Entièrement gratuit, Lichess.org est incontournable pour qui apprécie de jouer aux échecs. Il est d’une accessibilité complète, puisqu’une inscription n’est pas nécessaire. Celle-ci permet cependant de conserver l’historique de ses parties, parties qui sont d’ailleurs évaluées au moyen du puissant logiciel stockfish permettant une évaluation de ce qu’on a fait, afin de progresser.
Les parties peuvent être classées ou non, on peut décider contre quel niveau on veut jouer et de très nombreux exercices d’entraînement sont disponibles, on a les statistiques sur ses parties. C’est une excellente occasion de se mettre ou de se remettre à un jeu intellectuellement très intéressant et qui malheureusement dispose dans notre pays d’une mauvaise image.
Les échecs ne sont pas vus comme un jeu élaboré et populaire, comme dans l’Est de l’Europe, mais comme un exercice intellectuel stérile pour intellectuels. C’est fondamentalement dommage.
Lichess.org, de par sa gratuité et son accessibilité complète (depuis tous les smartphones) avec des gens de tous les continents – on passe aisément d’une partie contre une personne en Iran à elle contre une vivant au Brésil ou en Ukraine – est un vrai témoignage qu’un produit de consommation de masse peut permettre la rencontre de gens de tous les pays, des échanges internationaux, bref un esprit qui va à l’encontre de tout nationalisme.
Lichess, développé par un Français par ailleurs, Thibault Duplessis, est d’ailleurs open source de bout en bout.
Il y a cependant deux défauts majeurs, très secondaires il est vrai. Le premier est qu’en plus de périodes classiques de jeu (5, 10, 15+15 mn, ou davantage), il y a cette fascination anti-jeu pour les parties ultra-rapides ou bien les formes baroques.
Parmi celles-ci, qu’on n’est nullement obligé de choisir, il y a la victoire obtenue en faisant trois fois échec, celle obtenue en amenant le roi sur une des quatre cases centrales, celle en amenant le roi sur la dernière ligne, celle où les blancs disposent de 32 pions au lieu des pièces normales, celle où les pièces capturées vont au camp adverse pouvant les replacer à n’importe quel moment, celle où les pièces sont placées au départ selon le hasard, la version atomique où une capture provoque une « explosion » détruisant les pièces alentour, etc.
Ces variantes sont insipides et reflètent une course à la victoire qui pollue l’effort de réflexion. Des gens contournent les vrais échecs avec des variantes et ce type d’approche produit une plaie bien connue des jeux d’échecs en ligne : la triche.
Depuis le départ des jeux en ligne et déjà sur l’interface très rudimentaire proposé par Yahoo en ligne, il y a des gens ouvrant un programme pour jouer ce que joue l’adversaire en ligne, eux refaisant ce que fait l’ordinateur calculant les meilleurs coups.
Leur victoire, pleine de vanité et absurde, est alors assurée. Lichess surveille ce genre de choses, en écoutant attentivement les réclamations faites. Mais on ne peut pas toujours le prouver, ni même le voir ou le deviner et cela nuit forcément à l’esprit sympathique du fait de vouloir jouer simplement une partie.
C’est que la population jouant aux échecs est elle-même corrompue par l’esprit de compétition, de victoire à tout prix, de vanité, etc. Comment en serait-il autrement ? On peut toutefois éviter ces désagréments en se mettant ami avec des partenaires sympathiques avec qui on aura joué.
En se rappelant que, de toutes façons, aux échecs, c’est la partie qui compte, sa beauté, la victoire ou la défaite étant indifférente. On doit savoir s’émerveiller d’un beau coup adverse, décisif, autant que de son propre coup victorieux.