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Même Noël est devenu moche

Dans l’imaginaire, Noël c’est encore l’image d’Épinal de la personne arpentant les boutiques et scrutant les vitrines à la recherche du cadeau idéal pour chacun de ses proches. Ce serait une ambiance, chaleureuse et réconfortante ; ce que d’aucun nomment la « magie » de Noël.

En pratique, cela est de moins en moins vrai. Le capitalisme n’en finit plus de tout lessiver et même Noël est devenu moche. Le problème n’est pas tant que Noël n’est plus une fête populaire et familiale, mais d’abord et surtout une orgie de consommation. Cela fait déjà longtemps que c’est comme ça, au moins 30 ou 40 ans.

Viggo Johansen, Glade jul (1891)

Le problème, c’est que même cette orgie de consommation n’a pratiquement plus de valeur, plus aucune « magie ». Le comble en effet, c’est que Noël consiste maintenant bien plus en une ruée vers les points relais pour retirer des objets commandés à la chaîne sur internet.

On ne choisit rien, on colle à des listes, comme pour les enfants gâtés. Une tireuse à bière pour lui, un sèche cheveux connecté pour elle. Une PlayStation 5 pour un autre qui s’identifie comme un gamer, un K-way horriblement cher pour une autre qui se rêve bobo.

Alors on part au plus pressé sur internet, en s’imaginant parfois faire une bonne affaire grâce aux prix agressifs de certaines plateformes sur certains produits d’appel. Plus de boutiques à faire donc, simplement du temps, beaucoup de temps sur internet, puis la queue dans des points relais bondés et débordant de colis jetés en vrac, sens dessus dessous.

Les cadeaux ne voyagent plus dans la hôte en osier du Père Noël (historiquement mis en avant par Coca Cola d’ailleurs), mais dans la hotte en tissu délavée et trouée du livreur pressé qui balance ça à la chaîne, de boutique point relais en boutique point relais.

Les commerçants se rendent alors compte alors qu’ils ne sont plus des commerçants, mais des supplétifs mal rémunérés des plateformes en ligne. Quelques centimes par colis ! Certains râlent un peu pour passer leurs nerfs et la presse locale ou nationale, papier ou internet, télé ou radio, est très contente de relayer ça. « Les points relais d’Avignon débordés », « Nancy : à l’approche de Noël, les relais colis saturent », « On ne sait plus où donner de la tête », etc.

Le Télégrame raconte très bien cette scène devenu typique :

« Des colis par terre, des colis sur le guichet, par dizaines. Il en arrive quasiment une centaine par jour au bar La Barrière à Saint-Martin-des-Champs (29) et une grande pièce leur est aménagée. En fin de matinée, ce mercredi, un flux incessant de clients va et vient. En cinq minutes, trois d’entre eux réclament un colis. Et malgré un large sourire affiché, les trois employés se marchent dessus et ne s’arrêtent jamais. »

Les prévisions de La Poste pour la période du Noël 2023, c’est 106 millions de Colissimo, en hausse de 6 % par rapport à 2022. Pour Chronopost (filiale de La Poste), c’est 50 millions (+12%) dont la moitié en point relais.

Du coté de Mondial relay, spécialiste de la livraison en point relais avec 12 000 commerçants affiliés en France, ainsi que 4000 armoires « Lockers », 1 500 intérimaires ont été recrutés pour la période. La plateforme flambant neuve de Harnes près de Lens (Pas-de-Calais), fleuron affiché du groupe, évoque jusqu’à 400 000 colis traités par jour contre 250 000 en temps normal.

Il y aussi DHL, UPS, Relais colis, Fedex, GLS. Et puis il y a Amazon qui gère directement une grande partie de ses acheminements. Ce sont des dizaines de millions de colis qui s’amoncèlent, dans une course effrénée et aliénée à la consommation.

Voilà à quoi ressemble le capitalisme absolument généralisé et systématisé à notre époque. Il n’y a plus aucune saveur, il n’y a même plus vraiment de Noël ; il est grand temps de renverser la vapeur, d’instaurer de nouvelles valeurs.

Là c’est vraiment flagrant : le capitalisme a gagné, et donc… il a perdu. Il n’a plus de contenu du tout, il tourne sur lui-même.

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Les réseaux sociaux, entrave au changement

Il y a un paradoxe ou disons plutôt une contradiction : l’usage généralisé du smartphone s’inscrit dans un long mouvement de fond historique qui est la libération d’un temps socialement disponible. Le smartphone a considérablement réduit les aléas de la vie et fluidifié le quotidien.

On peut acheter immédiatement son ticket de transport, consulter rapidement les horaires et les pannes sur un réseau de transport urbain, se repérer grâce au guidage par satellite, payer directement les choses, savoir si l’on peut retrouver une personne qui est loin d’où l’on se trouve, planifier et harmoniser ses courses alimentaires, etc. Cela permet de libérer énormément de temps disponible. Il y a encore 30 ans il fallait anticiper, prévoir, voir être carrément pris au dépourvu sans moyens d’emprise pour beaucoup de choses de la vie quotidienne.

Ce temps socialement disponible relève d’un espace-temps désencastré des impératifs d’une vie quotidienne salariée et domestique caractérisée par un faible développement des moyens de communication. Communiquer exige un temps qui a été considérablement réduit tout comme cela l’a été pour travailler et se déplacer.

C’est donc l’expression d’une tendance de fond, un progrès historique du à l’élévation des forces productives qui est en continuité d’autres, tels que l’eau courante, la machine à laver le linge, les plaques de cuisson électriques, etc. Le smartphone apparaît ici comme le prolongement du processus de civilisation au sens où il favorise la stabilisation et l’efficience de la vie quotidienne.

Mais évidemment comme chacun le sait, l’élévation technologique d’une société ne tombe pas du ciel. Elle se matérialise dans le cadre de rapports sociaux déterminés, actuellement dominés et orientés par le capitalisme et sa logique marchande. Tout cet espace-temps socialement disponible pour favoriser le développement des personnalités se retrouve pris dans une logique de consommation et de marchandisation.

Au centre de cette appropriation capitaliste du temps socialement disponible, il y a évidemment les réseaux sociaux qui sont devenus un moment central et incontournable des sociétés capitalistes. Une centralité apparue au cours des années 2010 et qui vue de 2023, soit un peu plus d’un an après deux années de confinement pour cause de pandémie de Covid-19, sonne comme une évidence.

Car au lieu d’user de cet espace-temps libéré pour approfondir ses connaissances universelles, pour développer son sens artistique, sa sensibilité, etc., le capitalisme en a fait un tremplin pour le déploiement tout à la fois de nouveaux espaces marchands et d’existences entrepreneuriales.

La contradiction est donc la suivante : il n’y a jamais eu autant de temps libre à disposition de la société par une élévation technologique ayant pénétré jusqu’à la vie immédiate des gens mais, dans le même temps, il n’y a jamais eu autant d’emprise des impératifs marchands dans le quotidien.

C’est que les smartphones, en fait surtout ses contenus algorithmiques, ne flottent pas en l’air mais s’inscrivent dans un ensemble social-historique qui est la société de consommation mature. Une société marquée par une fatigue psychique et une morosité collective qui ne tient que parce qu’elle génère des individus-égocentrés shootés à la dopamine, cette molécule du « bonheur » immédiat, générée par les réseaux sociaux.

L’absence de perspective collective est compensée par la satisfaction de « petits bonheurs » égocentrés réalisées heure par heure dans une journée généralement sans exaltation aucune. La perte de sens ou le triomphe du nihilisme « no futur » dans la société bourgeoise en décadence a comme pendant l’existence des réseaux sociaux comme sas de décompression psychique. Un sas qui peut également s’avérer être un espace de promotion d’un life style pour n’importe qui en quête d’un sens existentiel.

On peut être celui qui part faire « le tour du monde » tout comme le travailleur manuel qui valorise son expérience ou bien encore la femme moderne qui pense trouver un sens à sa vie en restant mère au foyer : tout est possible à partir du moment où l’on peut justifier son existence dans un espace valorisant et générateur d’un bonheur artificiel.

On peut donc affirmer sans peine que la généralisation de l’usage des réseaux sociaux est le prolongement de tout un ensemble culturel allant de la massification des drogues à l’idéologie du développement personnel.

Dans la société bourgeoise en décadence triomphent les Paradis artificiels de Charles Baudelaire avec une généralisation de subjectivités tout à la fois épuisées et hypnotisées par le temple de la valorisation marchande.

C’est dans ce contexte qu’on ne peut comprendre pourquoi toute perspective de changement d’envergure au XXIe siècle ne peut passer par la seule case de la « prise de conscience ». La « prise de conscience » exigeait un temps libre disponible pour réfléchir – au sens de refléter – sa propre vie individuelle dans un cadre plus large que son seul environnement immédiat mais dans la société toute entière.

L’élévation des forces productives dans son cadre capitaliste à la fin du XXe siècle a fini d’occuper un tel espace-temps pour le placer au seul service du capitalisme. À ce titre, le positionnement pratique par rapport aux réseaux sociaux marque l’ADN de tout mouvement ou organisation visant un changement des choses en profondeur.

Depuis la pandémie de Covid-19, un tournant a eu lieu et il est est dorénavant incontournable de passer par l’étape de la rupture. D’ailleurs la bourgeoisie cherche tant bien que mal à réguler le monstre qu’elle a elle-même enfanté sans en comprendre les tenants et les aboutissants.

En Chine mais aussi au parlement catalan en Espagne, des discussions ont eu lieu début novembre 2023 à propos d’un encadrement de l’usage du smartphone chez les adolescents. De la même manière un maire de Seine-et-Marne cherche à interdire l’usage du smartphone chez les enfants dans l’espace public de sa commune….

Dans une autre perspective a été fondé en 2021 « le Luddite Club », un regroupement de jeunes aux États-Unis qui souhaitent ce désintoxiquer du smartphone en revenant au téléphone basique sans connexion internet.

Le problème c’est que tout cela reste piloté par en haut dans le cadre d’institutions qui ne peuvent s’attaquer frontalement au problème, ou bien orienté en des termes petits-bourgeois unilatéraux qui ne dépassent finalement pas l’idée du développement personnel.

Lorsqu’on souhaite la révolution, la critique du smartphone doit s’orienter surtout sur les réseaux sociaux comme tremplin vers une remise en cause générale de la marchandisation capitaliste. On ne peut pas se séparer des réseaux sociaux sans viser un changement général de la société qui enfante une telle mutilation des personnalités.

Ce dont il s’agit, c’est de participer à la formation de subjectivités en rupture avec tout ce qui entrave la recomposition cognitive pour un changement collectif. L’objectif c’est de contribuer à former des brèches dans les interstices du quotidien pour redéployer une subjectivité émancipée de la marchandise.

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Non au sac à dos à vélo!

Partir se balader ou faire du sport à vélo demande quelques équipements. Par facilité, par manque d’autres solutions, il est parfois opté pour le sac à dos afin de tout emporter. C’est dommage, car cela n’est pas agréable, surtout à cause de la transpiration. Il existe vraiment beaucoup d’autres solutions !

1/ La boite à outil

On y met une chambre à air, un jeu de démonte-pneu, une petite pompe, un jeu de clef Allen.

On peut en acheter dans le commerce, pas cher, étanche et résistant. On peut aussi la fabriquer avec un vieux bidon que l’on découpe. Mais c’est moins étanche !

Inconvénient : il faut mobiliser un des deux porte bidon, ce qui est dommage si on a besoin de beaucoup boire.

Sur les vélos type gravel ou randonnée, il existe souvent la possibilité de fixer un 3e porte bidon sous le tube oblique du vélo. Contrairement aux apparences, ça ne risque pas de frotter au sol, même lors d’une sortie sportive en chemin !

Le Z Box de la marque française Zéfal coûte environ 5 euros.

2/ La sacoche à outil

Il existe de nombreux modèles, souvent pas chers, qui se fixent sous la selle. C’est pratique et on y met l’essentiel.

Attention, il faut de la bonne qualité, car c’est sujet à secousses et frottement ; le risque est d’abîmer vite une sacoche de mauvaise qualité ou qui se fixe mal.

Pour environ 15 euros, la marque allemande de chambre à air Schwalbe propose une sacoche déjà équipée !

3/ Le maillot cycliste

Outre qu’il soit doté d’une matière idéale pour évacuer la transpiration et qu’il permet d’être très à son aise en roulant, le maillot cycliste a un autre avantage très grand : il dispose de grandes poches à l’arrière !

Il faut éviter les modèles deux poches. Celles-ci sont trop larges et les affaires ont tendance à se balader. L’idéal sont les modèles avec trois poches. Certains ont même une quatrième petite poche avec fermeture éclair pour les clefs.

Toutefois, si l’on glisse bien ses clefs au fond d’une des poches, elles ne risquent pas de partir !

On met typiquement dans ses poches une compote en tube, un barre de céréale, une banane et pourquoi pas une chambre à air !

La marque espagnole Siroko propose des modèles esthétiques à un très bon rapport qualité/prix. Par exemple ce modèle manche longue de bonne qualité est vendu environ 50 euros.

4/ La veste de pluie

De nombreuses marques proposent des vestes de pluie spécifiques pour le cyclisme. Elles sont légères et compactes, ce qui permet de les ranger en boule dans une poche arrière.

Astuce : avec un maillot cycliste bien ajusté, on peut tout à fait glisser dans son dos, sous son maillot, une veste non pliée dont on veut se débarrasser tout en roulant. Celle-ci ne risque pas de tomber et on oublie sa présence en quelques minutes.

Le problème des vestes de pluie par contre est qu’elles sont très peu ventilées. Si elles protègent de la pluie, elles donnent souvent très chaud. Évitez de vous encombrer avec si c’est pour quelques gouttes probables ! Mieux vaut la pluie ! Par contre, si les averses sont menaçantes, c’est un accessoire indispensable.

On en trouve à tous les prix, plus ou moins résistantes, plus ou moins imperméables, plus ou moins ventilées.

Si on veut et peut y mettre le prix, on peut se tourner vers du haut de gamme comme la marque italien Ale qui propose un modèle Guscio Clever de très bonne qualité, que l’on ne trouve pas à moins de 80 euros.

5/ Les manchettes et le chasuble (gilet)

Pour se prémunir contre la fraîcheur éventuelle lors d’une sortie, pas besoin de s’encombrer d’un gros sweat shirt dans son sac à dos ! On peut emmener une paire de manchette ainsi qu’un chasuble (gilet) ajusté. La combinaison des deux accessoires est très efficace, et surtout cela ne prend pas de place et se glisse facilement dans une poche de maillot cycliste ou une sacoche.

La marque italienne Castelli propose en général des produit à un bon rapport qualité/prix, comme ce gilet (environ 35 euros) et ces manchettes (environ 25 euros).

6/ La mini sacoche de tube de cadre

Très pratique, il existe différentes tailles et formes. Les petits modèles sont idéales pour mettre un téléphone (sauf s’il est trop gros comme beaucoup de smartphone de nos jours) et des clefs ainsi qu’une barre de céréale.

Encore une fois, la marque française Zéfal propose de la qualité à des prix très abordables. Voici quelques modèles de différentes tailles, tous à environ 20 euros.

Le Z FRAME PACK (1,5 litres) :

Le Z Aero (0,4 litre) :

Le Z ADVENTURE (1 litre) :

7/ La pochette étanche

Si l’on met son téléphone dans la poche arrière d’un maillot cycliste, gare à l’humidité avec la transpiration ou la pluie ! Il vaut mieux une pochette étanche. On peut également y mettre ses papiers, sa carte de crédit, ses clefs !

La marque anglaise Muc-Off en propose toute une gamme d’excellente qualité, parfaitement étanche, pour environ 20 euros.

8/ La petite et grande bagagerie

Pour les expéditions plus importantes, ou bien si l’on veut pouvoir s’arrêter et donc disposer par exemple de son appareil photo, d’un sweat, d’un cadenas, etc., il existe toute une gamme de bagagerie. Même sans porte bagage !

Il faudrait un article à part entière, tellement il existe de possibilités et de produits. On retiendra ici la marque anglaise Restrap qui propose une gamme très intéressante et inspirante. Tout est fait main au Royaume-Uni et la plupart des produits (probablement tous) sont certifiés vegan.

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Les fast-foods ont entièrement conquis la France

Le succès de McDonald’s a accompagné la généralisation de l’industrie de la viande. McDonald’s est une entreprise qui a des milliards de dettes, et qui peut se le permettre, car elle achète des locaux. Ceux-ci sont loués pour une somme élevée à des franchisés vendant des burgers. McDonald’s est ainsi une entreprise immobilière qui a accompagné la disponibilité de la viande.

Le capitalisme des fast-foods des années 1989-2021 est relativement différent, car il procède lui d’un petit capitalisme profitant de l’expansion massive de l’industrie de la viande. En vingt ans, le nombre de fast-food est passé de 13 000 à 52 500 en France.

Ce qui souligne bien l’expansion du capitalisme dans ce domaine, c’est que ce ne sont pas simplement les très grandes villes qui sont visées. On n’est pas dans une consommation conviviale superflue, allant avec un style de vie urbain. On est dans la vie quotidienne, dans le 24 heures sur 24 du capitalisme.

Prenons Dole dans le Jura. On y trouve 27 fast-foods. La plupart des Français ne savent pas où est Dole. Pareil pour Blagnac, avec 28 fast-foods, Givors avec 26. Et si on touche à des villes plus connues, mais de dimension très restreinte, on a 53 fast-foods à Tarbes, 63 à Valenciennes, 45 à Bourg-en-Bresse, 43 à Melun, 56 à Narbonne.

Et que dire pour les 175 fast-foods à Saint-Étienne, les 236 à Lille, les 178 à Grenoble, les 136 à Perpignan, les 122 à Nancy, les 138 à Rouen ?

Rouen, c’est… 110 000 habitants. On y trouve 147 médecins généralistes libéraux. Il y a à Rouen autant de médecins que de fast-foods. Rien qu’avec cela, vous avez un constat de débâcle civilisationnel.

Conformément au style de cette débâcle, les fast-foods se divisent en trois tiers.

Le premier consiste en les vendeurs de burgers ; grosso modo, plus il y a des fast-foods, plus la part des burgers est grande en proportion, mais ce n’est pas une règle absolue. On est ici dans la malbouffe rassurante, conventionnelle, d’orientation familiale.

Un autre tiers tient les vendeurs des kebabs. On est ici dans le pseudo exotisme et parfois le vrai communautaire, avec en vue un empiffrage à visée amicale.

Le dernier, ce sont les vendeurs de tacos, avec à l’arrière-plan le « French tacos », qui n’est pas du tout un tacos mexicain d’ailleurs. On parle ici d’une bombe calorique (trois fois un burger!), une sorte de monstre de Frankenstein de la malbouffe mêlant le wrap, le kebab, le panini, le burrito, avec des variantes allant jusqu’à 800 grammes, pleines de matières grasses, acides gras saturés, sucre, sel…

Pas étonnant que la chaîne O’Tacos ne diffuse aucune information nutritionnelle ; on parle ici d’un monstre capitaliste, avec pratiquement 300 restaurants, dont toutes les viandes sont halal, contrairement au KFC par exemple. C’est un point important, car les fast-foods visent toujours un public bien délimité, à part McDonald’s qui vise tout le monde (« venez comme vous êtes »).

Les fast-foods jouent une fonction sociale, ils sont en un certain sens parallèle aux réseaux sociaux. Les lieux de socialisation ont toujours existé bien sûr, tel le fameux café français, avec son comptoir en zinc. Mais les fast-foods sont un lieu de passage, de refuge, où les gens ont les mêmes attitudes individualistes et de repli sur soi qu’avec les réseaux sociaux.

C’est le même esprit turbocapitaliste de pseudo-convivialité, ici bien entendu sur le dos en particulier des animaux car les prix des fast-foods reposent ni plus ni moins que sur la tyrannie industrielle pratiquée sur les animaux d’élevage.

Il est évident qu’aucun changement n’aura lieu en France tant que l’idéologie des fast-foods ne sera pas brisée, et ce tant pour les burgers, les French tacos que les kebabs. En un sens, on peut dire que le panorama politique tient aux partisans des burgers (les pro-Américains), des French tacos (les nationalistes), des kebabs (les « post-modernes »). Qu’ils aillent tous au diable !

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Trois signalisations peu connues du Code de la route

Les « Zones de rencontre » sont de plus en plus présentes dans les villes, petites ou grandes. Elles sont censées permettre des zones de circulation « apaisées », selon la terminologie politique à la mode, sans pour autant devoir créer des zones strictement piétonnes.

Le décret d’application date de 2008, mais ces zones ont été très peu utilisées durant les années 2010. Elles ne se répandent que depuis les années 2020, mais très peu de gens en connaissent le sens, ainsi que le panneau assigné.

Il est pourtant facile à comprendre. De forme carrée, avec un fond bleu, il représente un piéton, puis un cycliste plus petit, puis une automobile plus petite, ainsi qu’une indication de limitation à 20 km/h. En général ce panneau est assez discret, de taille petite, placé en hauteur, ce qui fait qu’il est totalement ignoré par la plupart des usagers de la route.

Il indique pourtant quelque-chose d’essentiel, à savoir que dans la zone désignée, les cyclistes et les automobilistes doivent rouler à allure modérée et céder la priorité absolue aux piétons, qui sont littéralement autorisés à déambuler sur la voie. En principe, les cyclistes ont le droit de circuler dans tous les sens, du moment qu’ils cèdent la priorité aux piétons et ne roulent pas à plus de 20 km/h.

En principe également, les automobilistes doivent la priorité absolue aux cyclistes dans ces zones. En pratique, il est plus intelligent de s’en tenir à la règle habituelle de la priorité à droite, étant donné que tout le monde est censé rouler globalement à la même allure, de manière prudente.

Seul le tramway fait exception : lorsqu’il circule dans ces zones, il est prioritaire sur tout le monde, y compris les piétons.

Beaucoup de municipalités utilisent ce panneau avec une grande légèreté, c’est-à-dire sans mettre les moyens pour faire respecter en pratique les zones concernées, ni adapter les aménagements. Pire, il arrive bien souvent que ces zones ne soient pas strictement délimitées : les panneaux d’entrée ou de sorties peuvent manquer sur des voies adjacentes…

Refuser la priorité à un piéton dans une zone de rencontre expose un automobiliste à une contravention de 4e catégorie donnant lieu à une amende forfaitaire de 135€ et au retrait de 6 points sur le permis de conduire.

Une autre signalisation de plus en plus courante dans les villes, mais assez méconnue, est le « Panonceaux d’autorisation conditionnelle de franchissement
pour cycles (M12) ».

Il s’agit d’un triangle encadré en rouge, représentant en jaune un vélo et au moins une flèche directionnelle. On trouve ce panneau attenant à un bloc de feu de signalisation.

Sa signification générale est très simple à comprendre : lorsqu’il y a un feu rouge, les cyclistes ont l’autorisation de passer.

Toutefois, il faut connaitre ce panneau et sa signification plus en détail, pour en respecter l’esprit et ne pas se mettre en danger, ni mettre en danger autrui.

Premièrement, ce n’est pas un « laisser-passer » : les cyclistes ont le droit de s’affranchir du feu rouge du moment qu’ils cèdent le passage en respectant la priorité accordée aux autres usagers. Par exemple les automobiles qui arrivent de la gauche avec un feu vert, ou encore les piétons à un passage piéton.

Deuxièmement, il faut regarder les flèches présentes sur le panneau, qui désignent ce qu’il est possible de faire.

Avec une flèche à droite, le cycliste à le droit de s’engager sur la voie de droite, mais pas de traverser l’intersection.

S’il y a une flèche vers l’avant, alors seulement le cycliste est autorisé à franchir l’intersection sans respecter le feu rouge.

Voici les différentes variantes.

Depuis août 2020, un nouveau panneau existe afin de réserver une voie au covoiturage automobile. Il s’agit d’un petit losange blanc sur fond bleu.

C’est très simple à comprendre : lorsqu’il y a ce panneau, il est interdit d’emprunter la voie désigner si l’on est seul à bord de sa voiture.

Il est possible qu’il soit indiqué qu’il faille être au moins trois personnes à bord pour emprunter la voie.

L’interdiction peut être permanente ou intermittente. Dans ce cas, il y a soit un panneau activable et désactivable selon les moments, soit une tranche horaire et hebdomadaire clairement indiquée avec le panneau.

Ne pas respecter cette règle expose les conducteurs à une amende de 135 euros. 

Voici un extrait du Journal officiel présentant différentes variantes et forme de cette signalisation.

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L’échec commercial de la viande « vegan »

C’est un symbole qui ne trompe pas en raison de son envergure. Au milieu de l’année 2023, les ventes de Beyond Meat ont chuté de 30% et l’entreprise assume que le reste de l’année ne se déroulera pas positivement du point de vue capitaliste. Les prévisions sur le long terme elles-mêmes sont remises en cause, le point de vue général étant désormais que la « fausse viande » végétalienne s’avère un échec commercial. L’action de Beyond Meat à la bourse américaine a perdu 64.79% depuis un an, soit 94% de moins que lorsque l’action était au plus haut.

La « fausse viande » vegan a été critiquée dès le départ par les vegans comprenant l’enjeu culturel qui se posait. Et on peut voir que ce qui s’est passé est tout à fait logique. Il y a eu un effet de mode, une petite minorité s’est précipitée en se présentant comme « branchée ». Cela a produit une petite vague et des capitalistes se sont dit : « allons-y ». Comme ce sont des capitalistes, ils ont eu des rêves délirants d’accumulation et l’argent a coulé à flot.

Cela produit naturellement une idéologie. L’association L214 a ainsi reçu 2,5 millions d’euros d’une association américaine philanthrope, dont l’intérêt capitaliste derrière est en fait la « viande cellulaire », une variante de la « viande végétale ».

Cependant, l’industrie de la viande n’a pas été ébranlé, bien au contraire. Des grandes entreprises capitalistes du secteur de la viande ont d’ailleurs elles-même investi dans la « viande vegan », comme celles de l’agro-industrie française, qui représente le pire de l’exploitation des animaux.

On parle ici de Herta, le Gaulois, Fleury Michon ou encore Bordeau Chesnel… Mais des capitalistes d’autres secteurs ont pu s’y mettre aussi (ainsi… LVMH pour l’entreprise suisse Planted).

Mais le fantasme d’une croissance à 15% par an a été rattrapé par la réalité et les poids lourds de la « viande végétale » comme Beyond Meat, Impossible Foods, Lightlife, Field Road… subissent le choc de la crise capitaliste commencée en 2020. Les promesses d’une consommation exponentielle ne peuvent tout simplement pas être tenues.

Car la mode passe, le véganisme (avec ses principes) est liquidé par le libéralisme (par définition sans principes), les gens retournent à l’original plutôt qu’à la copie. La croissance de la consommation de viande de bœuf aux États-Unis le montre, tout autant que le fait que les restaurants branchés à New York sont tout sauf vegan.

C’est une question de culture. Si on mange quelque chose qui a le goût de la viande, comment ne pas valoriser celle-ci ? Ce n’est pas pour rien qu’une fausse viande au goût d’humain est inconcevable. Le rapport avec le cannibalisme serait évident. Pareillement, on ne pourrait pas avoir de fausse viande avec un goût de chien. Il n’y a ainsi aucune raison pour qu’un consommateur mangeant du faux canard… ne passe pas au vrai.

Un autre aspect est la dimension alimentaire, celle de la nutrition. La « viande végétale » relève de l’ultra-transformation.

Voici par exemple la composition des chipolatas Happyvore (ex-les Nouveaux Fermiers) : 

eau, huile de tournesol, protéines de pois, protéines de fèves, stabilisant : méthylcellulose, herbes aromatiques (dont herbes de Provence 0,6%), épices, fibres végétales, extraits d’épices (extraits d’oignons), vinaigre, amidon de pomme de terre, arômes naturels, maltodextrine, colorant : extrait de betterave rouge, antioxydant : extrait de romarin, enveloppe végétale : alginate de calcium comme gélifiant.

Ce n’est pas de la nourriture de qualité, mais un produit ultra-transformé qui ne vaut pas mieux que ce que l’on peut trouver à McDonald’s ou Burger King. Quel est le problème dans ce cas ? Et bien tout simplement que cela n’a rien de naturel.

L’organisme a prévu pendant des millions d’années d’évolution une façon particulière d’assimiler les nutriments, qui sont combinés dans des formes complexes et particulières dans les aliments naturels (bien que déjà transformés par l’agriculture depuis des milliers d’années, mais sous une forme naturelle).

Les aliments ultra-transformés changent la donne, et chamboulent tout. Quand on ajoute de la maltodextrine par exemple dans des chipolatas Happyvore, on ajoute tout simplement des bombes de sucre.

Il s’agit d’une transformation chimique (hydrolyse) à partir de maïs, de riz, d’amidon de pomme de terre ou de blé pour obtenir une poudre blanche et insipide. Cela sert comme agent de texture pas cher pour les industriels.

Une tel matière fait littéralement exploser l’indice glycémique des aliments qu’elle compose. Autrement dit, le taux de sucre explose dans l’organisme, comme avec les sodas ou les burgers industriels.

Les dents sont attaquées, le surpoids arrive (car l’organisme se débarrasse rapidement du surplus de sucre en le transformant en graisse) et bien sûr, maladie de notre époque, cela favorise directement le diabète.

Ce n’est pas mieux pour le méthylcellulose, qui sert dans ce cas de stabilisant. C’est un additif alimentaire (code E461), mais ce n’est pas du tout de la nourriture ! Cela relève du bricolage industriel pour obtenir une texture : le produit est une modification chimique de la cellulose, le principal constituant du bois !

Rien de dangereux en soi d’après les autorités sanitaires, mais rien d’intelligent pour autant. Cela n’est pas digéré par l’organisme et fini directement à la selle, causant éventuellement au passage des ballonnements, des diarrhées, des obstructions intestinales ou autres désagréments intestinaux.

Et rien à voir avec les fibres alimentaires naturelles, qui elles sont utiles, et en tous cas correctement intégrées par l’organisme habitué à une nourriture saine et naturelle.

Ce genre d’horreurs industrielles sont très loin de la gastronomie. Ce n’est pas avec cela que la France deviendra vegan !

L’alimentation du futur sera saine et pleine de saveurs végétales, car une agriculture bien maîtrisée et tournée vers la nature a bien mieux à offrir que ces marchandises typiques du capitalisme moderne.

Les pois, les lentilles, les fèves, sont bien plus intéressants culturellement, sur le plan de la gastronomie et moralement que les fausses viandes « végétales », qui appartiennent déjà au passé, dans leur forme, dans leur goût, dans leur conception même.

Le Socialisme, ce n’est pas peindre en rouge les centrales nucléaires, les parkings, les zoos, le béton. Le Socialisme, ce n’est pas non plus le retour en arrière à un passé idéalisé. Le Socialisme, c’est une civilisation nouvelle qui se fonde sur les meilleures bases possibles à tous les niveaux pour l’humanité, en prenant le meilleur du passé et en dépassant le reste.

C’est ce que montre parfaitement l’échec de la « viande végétale ». On est soit une partie du problème, soit une partie de la solution !

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Michel Clouscard et la vie quotidienne

Existe-t-il une société de consommation ou pas? Le capitalisme façonne-t-il la vie quotidienne des gens ou pas? Ce thème étant à nos yeux essentiel, il y a lieu de se pencher sur l’avis de Michel Clouscard. Ce penseur (1928-2009) a vu son activité passer inaperçue durant sa vie, à peu de choses près, mais depuis une dizaine d’années à peu près, il y a un courant de pensée qui en fait la promotion.

Michel Clouscard aurait le premier tout compris : le capitalisme est libéral-libertaire et exige un mode de vie « libéré » dont la seule liberté est de fuir dans la consommation. Mai 1968 aurait été le détonateur de ce capitalisme nouveau, qu’il appelle le « capitalisme de la séduction ».

Les philosophes issus de ce capitalisme nouveau auraient été les pires, parce qu’ils se prétendaient de gauche alors qu’ils faisaient la promotion d’un style de vie hédoniste. On parle ici des philosophes Lyotard, Foucault, Deleuze, Derrida.

Voici les grandes lignes, en apparence, de la pensée de Michel Clouscard, dont on se dit que c’est très intéressant pour effectivement dénoncer la généralisation du style de vie allant avec la société de consommation. Le souci est qu’il ne dit pas ça.

En effet, Michel Clouscard ne dénonce pas ce que nous appelons sur agauche.org le turbocapitalisme. Il ne dénonce pas du tout le renouveau du capitalisme, la naissance de nouveaux marchés au moyen de la négation des rapports naturels.

Michel Clouscard dénonce le maintien artificiel du capitalisme au moyen de micro-consommations « amusantes » qui trompent les gens fascinés (mais qui ne consomment pas).

Cela n’a rien à voir !

Tout le monde consomme-t-il ou non?

Si on regarde ce que dit la gauche de la gauche en 2023 au sujet des masses, on croirait que les travailleurs français sont pauvres jusqu’à pratiquement ne plus savoir comment payer leur loyer ou leur alimentation.

C’est évidemment complètement faux. Le niveau de vie est très élevé. La France est l’une des plus grandes puissances mondiales, même si elle est en chute libre. Tous les Français consomment. Certains consomment plus que d’autres, mais tous le font et tous relèvent de la société de consommation, même si à des degrés différents.

Tout propos misérabiliste est donc trompeur. Et Michel Clouscard y participe. Il est présenté comme un critique de la société de consommation. En réalité, il ne le fait pas car il ne reconnaît pas la société de consommation. Il critique un capitalisme qui cherche à établir une société de consommation de manière forcée, sans y arriver, ce qui est bien différent.

Michel Clouscard reconnaît tout à fait que le niveau de vie s’est élevé. Pour autant, il ne pense pas que le capitalisme se soit réellement élevé au niveau d’une vaste consommation de masse. Donc il ne dénonce pas la société de consommation telle qu’elle existe (selon nous) aujourd’hui. Il dénonce le fait que le capitalisme aimerait parvenir à une telle société de consommation (mais pour lui elle n’y arrive pas).

Pas de capitalisme par en bas?

L’idée de Michel Clouscard, c’est qu’il y a des couches sociales petites-bourgeoises qui profitent d’une manne capitaliste afin de mener une consommation « libidinale, ludique, marginale ». Cela produirait une agitation faisant vivre l’idéologie libérale-libertaire.

Mais cette agitation est « idéologique » plus qu’autre chose. D’ailleurs, pour Michel Clouscard, les monopoles domineraient tout et donc il ne peut pas y avoir de renouveau du capitalisme, de relance par en bas.

Autrement dit, Michel Clouscard ne dénonce pas la société de consommation, le capitalisme par en bas – car il ne le reconnaît pas.

Ce qu’il attaque, c’est l’existence de marges intellectuelles universitaires et d’aventuriers consommateurs « d’un nouveau style ». Michel Clouscard dénonce pour cette raison… le rock et la disco!

Déjà que c’est absurde car rien n’a été pratiquement plus populaire à l’échelle de masse que le rock et la disco dans les pays occidentaux, c’est surtout totalement réactionnaire. Mais Michel Clouscard est un philosophe du PCF d’après 1968, et le PCF a été contre Mai 1968. Le PCF, avec la CGT, a tout fait pour casser la contestation de Mai 1968.

Michel Clouscard est totalement aligné sur le PCF et sa théorie du « capitalisme de la séduction » se fonde d’ailleurs sur la théorie du capitalisme monopoliste d’État du PCF.

Le capitalisme monopoliste d’État

Michel Clouscard est un penseur du PCF et à son époque, il est totalement dans l’ombre de deux penseurs concurrents : Louis Althusser et Nikos Poulantzas. Ces deux derniers accordent une grande place à la question de l’État. Pour cette raison, ils penchent sérieusement du côté des « gauchistes », puisque eux veulent détruire l’État.

Michel Clouscard, lui, est totalement anti-gauchiste et il l’est, car il est d’accord avec le PCF : l’État est une forme neutre. Prétendre le contraire, selon lui, c’est faire du « marxisme dogmatique ». Pour Michel Clouscard, il y aurait une « société civile ».

On l’a compris : il reprend directement Antonio Gramsci, avec la même interprétation électoraliste que le Parti communiste italien à l’époque. Dans cet esprit, l’État peut pencher d’un côté, il peut pencher de l’autre.

Lorsqu’il écrit son ouvrage « La Bête sauvage, Métamorphose de la société capitaliste et stratégie » (1983), Michel Clouscard le fait après le programme commun et en assumant totalement la thèse du PCF du « capitalisme monopoliste d’État ».

Cette conception veut que l’État est devenu neutre, car avec la seconde guerre mondiale, l’impérialisme a disparu. Le capitalisme n’existe plus que par les aides de l’État. Il suffit donc de conquérir les commandes de l’État, au moyen d’une union populaire pour « autogérer » l’État, et alors on pourra prendre des mesures pour se débarrasser du capitalisme.

Cette théorie du « capitalisme monopoliste d’Etat » a été conceptualisée par le Français Paul Boccara en s’inspirant du Hongrois Eugen Varga.

Par conséquent, pour Michel Clouscard, tous ceux qui veulent dénoncer l’État par la révolution… sont en fait au service des monopoles qui veulent empêcher le PCF de prendre le contrôle de l’État par les élections et de le donner au peuple !

« Avec le Capitalisme Monopoliste d’État, l’État est totalement investi par l’économique, par les monopoles qui se sont étatisés et sont gérés par l’appareil d’État. Alors cet appareil d’État se moque de l’État croquemitaine du dogmatisme, du gauchisme, des nouveaux philosophes, des contestataires ou des terroristes.

Bien au contraire : sa mission économique est de créer les conditions superstructurales nécessaires à l’expansion économique du Capitalisme Monopoliste d’État.

Il faut mettre en place les modèles culturels de la nouvelle consommation, du nouveau marché du désir. Il faut libéraliser, révolutionner les mœurs. Pour servir au mieux les intérêts des multinationales que l’appareil d’État a fonction de gérer.

Parce que répressif au niveau de la production – productivisme, taylorisation, fordisme, cadences infernales – l’État doit organiser la libéralisation des mœurs qui permettra la meilleure circulation de la nouvelle marchandise.

L’État a besoin d’une société civile qui dénonce… l’État. Aussi, le dogmatisme, le gauchisme, les nouveaux philosophes sont les fourriers de la société civile voulue par l’appareil d’État soumis aux multinationales. »

Comme on le voit, Michel Clouscard ne dénonce pas le capitalisme en mode turbo, il ne dénonce pas le capitalisme qui se renouvelle. Pour lui, il n’y a qu’un seul capitalisme, un très gros capitalisme, qui « pense » et qui façonne la société civile.

C’est la conception réformiste et fantasmatique d’un capitalisme qui « pense », qui fait des « choix », par en haut.

Michel Clouscard n’est pas un critique du capitalisme se relançant par en bas !

Que dénonce Michel Clouscard ?

Michel Clouscard ne critique pas le capitalisme par en bas, qui pour lui ne peut pas exister. Il dénonce le gros capitalisme qui, dans ses soucis de modernité, bouscule le pays, le violente.

Si l’on veut, il ne critique pas les bobos, les start up, les influenceurs, les kebabs, mais la généralisation de la fibre et des voies pour vélos.

C’est caricaturé et pourtant cela correspond au fond de sa pensée. Voici un exemple avec sa défense du paysage français « idyllique » que le capitalisme viendrait défigurer :

« Le capitalisme monopoliste d’État a totalement détruit l’harmonie spatio-temporelle inventée par l’histoire de France (celle de ses modes de production).

Si les écologistes étaient sérieux, ils ne diraient pas vouloir protéger la nature, mais le travail de l’homme objectivé, devenu nature, décor naturel : campagne humanisée, forêt jardinée, déserts ou marécages cultivés, montagnes recouvertes d’arbres, fleuves domestiqués, etc.

« Oui au cantonnier, non à l’écologisme mondain. »

Pour substituer au rythme rural le productivisme généralisé, le capitalisme monopoliste d’État a désintégré la cellule familiale.

C’est le lieu de l’emploi et non plus le lieu d’origine qui fixe la famille, maintenant. Une extraordinaire diaspora des régions recouvre l’hexagone. »

C’est littéralement l’idéologie de Pétain, du retour à la terre. Comme si la France d’avant les monopoles, c’était le paradis ! Mais Michel Clouscard ne fait que ça, insulter ce qui est nouveau. Il n’hésite pas à considérer comme odieux que des gens, dans les années 1980, connaissent le reggae, mais pas le twist.

Ce qu’il dénonce, c’est la modernité, forcément unilatéralement mauvaise. Le capitalisme ne fabrique plus que des « gadgets » pour lui, et encore même pas pour tout le monde.

Et les rares cas où il le fait, c’est vide de sens pour lui : mettre une pièce dans un flipper, dans un juke-box, pour acheter un poster… Même le blue jean ou avoir les cheveux longs pour un garçon n’échappe pas à la critique, réactionnaire, de Michel Clouscard.

Citons sa dénonciation de la danse, incroyablement réactionnaire et délirante dans son propos même : on sent le vieux, dépassé et prompt à l’outrance.

« L’autre animation : sonore. L’autre machination : boîte à rythme, cabine leslie, pédale wah-wah, synthétiseur, fender, guitare électrique, etc.

L’autre initiation à la mondanité : psychédélique. Après la mécanique de groupe, voici la mécanique « musicale ». Branchons la sono. Le disc-jockey ouvre les vannes.

La statue accède au rythme. L’automate au déhanchement. Le désir à sa forme : les sens s’électrisent. Le mannequin s’anime de pulsions : gestes saccadés, répétés, figés. Bruitages de ces élans machinaux. Projection et transferts.

Vie de machine, corps du désir, corps rythmé. Le désir s’est éveillé. La statue est vivante : le machinal est son instinct (le vitalisme n’est que le reflet actif du mécanisme. Il n’est qu’un signifiant de l’animation machinale). L’être est gestuel. Et celui-ci est le rythme. »

Ces lignes de son ouvrage « Le capitalisme de la séduction » auraient été crétines en 1970, mais elles datent de 1981… que dire ? Un peu après ces lignes, on a même la définition du rock comme « Boum-boum : c’est toujours pareil ». En 1981 ! Après les Doors, le Grateful dead, Pink Floyd, Yes…

Le capitalisme zombie

Ce que dénonce en fait Michel Clouscard, c’est la modernité dans le cadre capitaliste. Et pour lui, elle ne peut qu’être entièrement fausse.

Car pour lui tout ne peux qu’être faux. Michel Clouscard considère que le capitalisme a déjà « disparu », conformément à la thèse du capitalisme monopoliste d’État. C’est un capitalisme zombie qui n’existe que parce que l’État le maintient en perfusion. Il est donc « faux ». Et tout ce qu’il fait est faux.

C’est ce côté réactionnaire qui a amené Alain Soral a se rapprocher de Michel Clouscard, et a écrire la préface de son ouvrage Néo-fascisme et idéologie du désir : Genèse du libéralisme libertaire. Michel Clouscard a ensuite dénoncé Alain Soral, et pourtant ce dernier représente indéniablement la substance de sa critique de la modernité « monopolistique – libertaire ». Il a simplement ajouté l’antisémitisme et la dénonciation d’un « complot » de l’élite mondiale, afin de faire tenir un édifice sinon sans fondations aucune.

Alain Soral résume d’ailleurs le mieux la thèse de Michel Clouscard, en soulignant que le capitalisme ne propose pas une vraie consommation nouvelle, mais un simulacre de consommation :

« Je reprends la thèse du trop méconnu Michel Clouscard dont j’avais préfacé « Néo-fascisme et idéologie du désir »; la voici : après guerre, les capitalistes marchands, pour étendre le marché fatalement saturé de l’utilitaire, ont eu l’intelligence de lancer, en surfant sur le vent de liberté venu d’Amérique, le « marché du désir ».

Un marché de l’inutile dont le mécanisme fonctionne comme suit : un, réduire la liberté au désir, deux, réduire le désir à l’acte d’achat. »

La consommation simulacre

Pour parler en termes marxistes, on peut dire qu’agauche.org affirme qu’il y a des marchandises partout, partout. C’est une surproduction de marchandises.

La production de masse, c’est bien ! Mais consommer n’importe comment, n’importe quoi, c’est mal !

Life deluxe for all, c’est bien ! Mais les délires ultra-individualistes de type de l’idéologie LGBT, c’est mal !

Le capitalisme a élargi les forces productives, maintenant on récupère le tout et on change de direction. Et il ne faut pas laisser faire le capitalisme qui veut élargir les marchés en dénaturant l’humanité.

Il y a le bon nouveau et le mauvais nouveau !

Pour Michel Clouscard, dans la lignée du capitalisme monopoliste d’État, il n’y a pas trop de marchandises, il y a trop de capital, il y a surproduction de capital, l’expression exacte correspondant à ce concept est la « suraccumulation de capital« .

Le capital « invente » donc des moyens pour investir, pour forcer à une consommation… Quitte à brûler cette consommation et ce capital. Pour Michael Clouscard, les nouvelles marchandises sont des simulacres : une chaîne hi-fi, une guitare électrique, un appareil photo ?

Tout cela ne sert à rien, c’est « ludique, libidinal, marginal », on a l’accordéon, ça suffit bien !

Autrement dit, pour Michel Clouscard, le capitalisme se résume à Kim Kardashian et à la téléréalité. Il accorde une valeur suprême à des consommations « stériles » totalement insignifiantes en comparaison avec l’avalanche de marchandises que produit toujours davantage le capitalisme.

En ce sens, il ne sert à rien pour critiquer la société de consommation. Il ne voit pas qu’en plus des monopoles, il y a à la base un petit capitalisme hyper actif se renouvelant. C’est la conséquence de son acceptation de la thèse du « capitalisme monopoliste d’État », qui prétend qu’il n’y aurait plus que des monopoles qui domineraient tout. Il « oublie » concrètement qui produit les contenus pour Amazon, Etsy, Netflix, Apple…

Non, la consommation dans la société de consommation n’est pas du simulacre. Elle est liée à une production réelle de marchandises. Et on s’y noie plus qu’autre chose !

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Les français sont passés en mode sans échec

Comment la France va t-elle s’en sortir ? La question est dans toutes les têtes et forme un tel vertige qu’en débattre est exclu. Les esprits s’enivrent, les âmes vacillent et la discussion politique est toujours plus réduite, plus taboue tant les implications sont vastes.

On peut bien discuter des difficultés de la vie, de telles ou telles choses liées à l’actualité mais poser les choses du point de vue politique est interdite. Encore moins si l’on a une prétention idéologique. Si l’on regarde correctement les choses, on ne peut que constater à ce point de vue une coupure majeure entre les années d’avant 2010 et celles d’après 2020.

Il y a encore quelques années, parler de « capitalisme » était autorisé même si cela était une sorte de pensée commune sans surface critique et scientifique, il n’en restait pas moins vrai qu’une discussion impliquant un effort et une attention même minime était envisageable. Cela pour le capitalisme, mais également pour des tas d’autres choses comme la musique, l’actualité, l’écologie, les relations de la vie elle-même…

En 2023, cela est toujours moins permis. Non pas qu’il y ait une barrière formelle, des lois répressives comme le diffuse les petits boutiquiers du mensonge, mais bien que la pression psychique sur les gens est telle que toute discussion au-delà du quotidien immédiat est proscrite. On peut bien parler de grandes sujets, comme le réchauffement climatique, la guerre, l’exploitation salariée, etc., mais cela restera au stade élémentaire.

C’est là une donnée issue de la pandémie de Covid-19, avec des confinement qui ont permis de se poser, de revoir les choses ou pour le dire d’uploader sa vie, ou plutôt la vie dans une nouvelle configuration. Mais en réalité, l’upload a buggé. Le téléchargement des nouvelles données avait bien commencé mais il s’est crashé à 10 ou 20 % du processus…

Le bug a forcé les gens à continuer à vivre dans un autre mode. Penser que les gens sont dans le déni de l’après Covid-19 est donc erroné. Le déni est derrière eux, les gens sont passés en mode sans échec. Toute programmation psychique qui demande un effort dans lequel l’activité cérébrale est tendue vers un aspect collectif prolongé est indisponible.

Les gens vivent sur un mode élémentaire et la seule chose dont ils leur est permis d’avoir conscience, c’est que ce mode est précisément voué à l’échec. Dans le mode sans échec du capitalisme, c’est l’élémentaire et l’immédiat qui prime sur tout.

S’il y avait seulement déni, on ne pourrait comprendre par exemple les émeutes de la fin juin 2023. L’émeute anarchique avec pour arrière-plan l’ « anti-flic » relève d’un tel mode sans échec : le réel n’est pas nié mais filtré par un logiciel sans les pilotes permettant la navigation (l’interprétation) complexe.

Cela est visible dans le rapport aux règles de vie civique, le respect de la nature et des animaux, les relations amoureuses, le rapport au travail, etc. Dans le mode sans échec, ce qui manque c’est justement le pilote qui permet la conscience du rapport social.

Le rapport au travail justement est l’expression typique du phénomène. Il n’y a plus investissement au travail avec l’idée qu’on est là dans un rapport collectif mais une présence sur le mode simple. Il n’est pas question de regretter en soi ce phénomène issu de la réalité du capitalisme, mais d’un autre côté tout révolutionnaire part de cette réalité qui lui lègue des gens leur étant indisponible, voir même indisposé.

Évidemment, la bourgeoisie s’en émeut mais n’y peut rien car elle-même est passée sur ce mode. Il n’y a qu’à voir comment l’endettement du pays l’effraye et dont elle sait qu’il va falloir faire travailler les gens plus, beaucoup plus, avec moins d’acquis sociaux mais il lui faudrait pratiquement un régime policier, voir fasciste pour cela. Une telle programmation complexe lui est hors de portée.

La France va t-elle s’en sortir ? Sûrement pas et tant pis se disent les français puisque de toute manière le mode sans échec ne dure qu’un temps. La France va donc au crash et il sera l’espace de débogage.

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L’affaire Nahel ou la France américaine

La France est devenue comme les États-Unis, un pays où la lutte des classes est niée. Il n’y aurait plus que des individus, disposant de droits plus ou moins importants, que la société accorderait (c’est le « droit positif », par opposition au droit naturel revendiqué par la Gauche historique). Interpréter quelque chose au sein de la société revient ainsi à nier l’Histoire, les classes, pour ne se tourner que vers l’individu.

Toutes les réactions concernant l’affaire Nahel ont reflété cette américanisation de la société française. L’arrière-plan social n’est plus pris en compte, pas plus que le contexte. Tout caractère social est « oublié » et c’est vrai tant pour la question du crime organisé que de la police. De la même manière que dans les livres d’Histoire, ce sont des individus qui feraient l’Histoire – Napoléon, Hitler, de Gaulle, Poutine… – dans la vie de tous les jours, tout ne serait affaire que d’individus.

Les Français, pour dire simple, raisonnent comme des Américains. Lessivés par le capitalisme, les gens en France ne voient les choses qu’individuellement – pourquoi en serait-il autrement ?

Emmanuel Macron, le premier président français au style américain assumé

Oubliant qu’il s’agissait d’un jeune de 17 ans en grosse cylindrée ayant fui la police pendant pratiquement une demi-heure, les tenants de la « bavure policière » sont scandalisés de l’atteinte à la vie d’une personne. Peu importe qu’il s’agisse d’un délinquant multirécidiviste, car les droits de l’individu sont sacrés ! La « gauche » américaine n’aurait pas dit les choses différemment. La « gauche » française est devenue l’équivalent du Parti démocrate américain.

Les tenants de « l’ordre public » ont de leur côté réagi exactement comme l’aurait fait le Parti républicain américain. Là aussi, on raisonne en termes d’individus et de droits. Sauf qu’on considère que les droits acquis sont ce qu’il y a de plus important : il faut les préserver. Il faudrait donc avant tout fermer la porte à tout changement institutionnel, car c’est risquer de remettre en cause les droits individuels. Partant de là, les institutions doivent être rigides, la police doit appliquer les règles frontalement, afin de bloquer la moindre remise en cause individuelle des règles.

Tout cela n’a rien à voir avec l’opposition Gauche/Droite. C’est en réalité une opposition entre le capitalisme « à l’ancienne » et le capitalisme « moderniste ». Ce sont les deux aspects de la même pièce capitaliste. Le capitalisme reste lui-même tout en se modernisant. Pour cela, on a les « conservateurs » qui privilégient ce que le capitalisme a déjà mis en place, et les « progressistes » qui font la promotion de l’élargissement du libéralisme.

Le rappeur Jul avec Nahel dans la vidéo de la chanson Ragnar

Il serait d’ailleurs plus facile de formuler directement les choses en disant que tous, conservateurs comme progressistes, sont des libéraux. Tous raisonnent en termes d’individus et de droits individuels. Le panorama politique français est entièrement devenu libéral.

Pas forcément économiquement, car on trouve encore des gens pour promouvoir une intervention étatique dans l’économie. D’ailleurs, l’État français joue un rôle très actif dans l’économie du pays. Mais sur le plan idéologique, des idées, le libéralisme prédomine totalement. C’est l’idéologie de l’Union européenne, dont l’idéologie LGBT est un aspect majeur.

C’est la négation de la lutte des classes et dans cette négation, il faut toujours trouver le moyen de nier les classes au profit d’une identité. Un tel est gay avant d’être ouvrier, et comme cela ne suffit pas on va faire sauter la définition même de gay afin d’encore plus diviser, et on va également ajouter la question de la couleur de peau, etc., à l’infini.

Le but du capitalisme est de faire en sorte qu’on se définisse par la consommation seulement, alors il faut d’autant plus d’identités, d’autant plus de prêt-à-porter pour des gens aliénés, notamment par les réseaux sociaux.

Notre but est inversement la recomposition du prolétariat à partir de la production, par l’affirmation du collectivisme, du caractère historiquement inévitable du Socialisme !

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On peut s’habiller comme on veut désormais, mais…

C’est un aspect très intéressant du capitalisme et qu’on peut tous remarquer. Avec le développement de forces productives dans les années 2000-2010, notamment l’intégration complète de la Chine dans le marché mondial, l’habillement a connu un changement de très grande ampleur.

Auparavant, les habits ne profitaient que peu de variété et on s’habillait avec relativement peu de marge de manœuvre. Les deux exceptions marquantes étaient les très riches consommant des produits de grande marque et les marginaux appartenant à des tribus aux looks bricolés bien délimités (punk, gothique, scène tag-rap, métalleux, etc.)

Désormais, plus rien ne veut rien dire, car n’importe qui peut acheter n’importe quoi et ne se prive pas de le porter. Aucune tribu ne peut profiter d’une réelle délimitation et, de toutes façons, personne n’en a plus rien à faire. On peut s’habiller comme on veut, mais il faut que cela corresponde, il faut que ce soit bien porté.

Le streetwear, avec ses marques produisant de manière créative et profitant du Portugal, du Mexique, du Vietnam, du Bangladesh, de la Chine, a révolutionné les codes de l’habillement. La première chose qu’on apprend dans une boutique dont les produits coûtent chers, c’est que l’habit ne fait pas le moine et que la personne qui a l’air très mal habillé selon tel ou tel critère peut en réalité être un vrai branché avec des habits coûtant une fortune.

Civilist (Berlin)

Quand on voit cela, on se dit : il y a un problème, c’est comme si d’un côté le socialisme avait gagné, et de l’autre qu’il avait été mangé par le capitalisme. Car c’est une des raisons de croire en le capitalisme, pour les gens. On peut s’habiller de mille manières, c’est donc bien que le capitalisme apporte quelque chose !

C’est en fait le socialisme qui aurait dû instaurer cela. En raison du retard de celui-ci à triompher, on doit donc supporter une mondialisation maintenue dans le cadre du capitalisme, porté par des petits-bourgeois dynamiques et entrepreneurs. Et cela ne fait justement pas non plus les affaires du capitalisme.

En effet, le capitalisme a besoin de maintenir une hiérarchie dans la production. Or, des styles à l’infini, c’est bien pour la consommation. C’est cependant bien dérangeant au niveau productif lorsqu’on a des gens qui croient vraiment qu’ils sont différents et qui n’en font qu’à leur tête, voire qu’à leur style.

Cela fait désordre, tout de même. Et c’est pour cela qu’une ville comme Paris voit la bourgeoisie, y compris bobo, faire un retour aux sources niveau habillement. Le streetwear s’efface pour laisser la place à une apparence qui ne dénoterait pas dans le Auteuil – Neuilly – Passy des années 1980.

Le contraste avec la possibilité, pour les prolétaires, de disposer de choses de qualité à bas prix, se transforme ici directement en contradiction.

Collaboration (ici pour enfant) à bas prix d’Adidas avec la marque finlandaise chic et de qualité Marimekko

Ce qui est en jeu ici, c’est de comprendre que le capitalisme a pour l’instant battu le socialisme, mais que les choses se retournent en leur contraire. Les gens prennent au pied de la lettre le style. Le prolétaire ne se laisse plus mettre de côté sur le plan vestimentaire. Et surtout, il n’y a plus une dimension réactionnaire comme par le passé à ce niveau.

Il a existé en effet, surtout parti d’Italie avec les « paninaro » des années 1980, mais aussi le mouvement « ultra » au football, tout une tentative de jeunes prolétaires de suivre la mode, avec une mentalité d’élite, de carriérisme vestimentaire, de consumérisme. C’était très réfléchi, très esthétisant.

Désormais, le rapport au style est de masse et s’il existe encore des courants marginaux dans la quête d’un look « décisif », tout cela est bien fini. On remarquera ici d’ailleurs que ces courants marginaux se trouvent surtout chez les petits-bourgeois « à gauche de la gauche », qui vivent dans les fétiches et l’entre-soi. Leur ghetto a des codes vestimentaires très marqués.

Les prolétaires n’en ont rien à faire. Pour eux, un style a un rapport avec la personne. Si c’est bien porté, alors c’est bien. Si c’est mal porté, alors c’est critiquable.

Iriedaily (Berlin)

Il est évident que le problème fondamental, c’est que les gens vivant dans le capitalisme, cette question du style bascule dans la mise en scène. Pourtant, du point de vue socialiste, on doit également bien voir qu’il s’agit d’un approfondissement de leur personnalité. Tant que le capitalisme parvient à neutraliser cette question de la personnalité, la contradiction n’est pas explosive. C’est d’ailleurs là le rôle pernicieux et neutralisateur des idéologies ultra-individualistes, idéologie LGBT en tête.

Si le capitalisme commence par contre à brimer les développement de la personnalité, là les choses peuvent très mal tourner pour lui, car les gens considéreraient qu’un acquis leur est enlevé. C’est pour cela par exemple que la Russie n’a pas mené de mobilisation générale lors du début de « l’opération spéciale » contre l’Ukraine : il ne fallait surtout pas que la jeunesse de Moscou se sente brimée dans sa « personnalité »… et son individualisme.

En France, le thème de l’uniforme à l’école est récurrent et il est un vrai dilemme pour le capitalisme : il faut bien de l’ordre, mais sans toucher à l’individualisme… et le souci de l’ordre, c’est que les jeunes ont des acquis « personnels ». En un sens ils n’ont d’ailleurs que ça : les moments présents qui se succèdent, le style, une musique répétitive comme « son » servant d’arrière-plan. Si le capitalisme commence à toucher à ça…

Maillot extérieur de l’équipe colombienne féminine de football

L’habillement est également une preuve de la mondialisation tellement avancée qu’on ne peut plus reculer. Si d’un côté tout le monde se ressemble dans les mêmes centre-villes des grandes villes du monde, d’un autre il n’y a jamais eu autant de variété. Les goûts et les couleurs du monde entier se rencontrent, pas forcément pour le meilleur, mais le brassage et le métissage en ressortent triomphalement, d’une manière ou d’une autre.

Le socialisme l’emporte ainsi dans l’habillement capitaliste, malgré le capitalisme, car le capitalisme porte dialectiquement le socialisme, de manière contradictoire. Si on rate cet aspect, on veut retourner dans le passé, et ça les gens ne le veulent pas. Ils veulent plus de complexité, plus de possibilités de s’épanouir. Ce sont les masses et elles ont raison ! En même temps elles ont tort de ne pas comprendre qu’elles s’aliènent en acceptant que le cadre capitaliste se maintienne.

Et leur vie privée, réelle, concrète, épuisée par l’exploitation capitaliste, ne correspond pas à leur vie rêvée.

Stüssy

On comprend que le socialisme, c’est bien la bataille pour préserver les acquis que sont les forces productives… tout en renversant, en révolutionnant le cadre capitaliste. Ici, c’est la course à la consommation qu’il s’agit de supprimer, car avoir un style est suffisant et il ne s’agit pas d’accumuler des tonnes d’habits qu’on va jeter ou ne pas porter.

Ici, les achats – ventes de seconde main, surtout avec Vinted, expriment une tendance chez les gens à réorganiser leur consommation particulière. En soi, cela ne veut rien dire, car c’est aussi une expression de surconsommation et de volonté de petit commerce. On achète d’autant plus facilement qu’on pense qu’on peut le revendre.

Néanmoins, historiquement, c’est tout l’édifice capitaliste de l’habillement qui révèle sa fragilité. Les achats sur internet tuent d’ailleurs les magasins qui s’avèrent incapables par définition de présenter une immense variété. Si on y réfléchit bien, on voit bien que la société est bien mûre pour le socialisme…

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Le jeu de paume, « sport » avant les sports

Le jeu de paume est l’ancêtre direct du tennis, ce mot étant à l’époque la traduction anglaise pour jeu de paume. « Tennis » est une déformation du mot français « tenez » (« tenetz » en vieux français) prononcé avant un service au jeu de paume. 

De par sa forme, sa nature, son rôle social et culturel, le jeu de paume peut clairement être considéré comme une forme de sport, avant l’apparition des autres sports et du sport en général en Angleterre

Les humanistes ont largement contribué à le valoriser, notamment contre les jeux de hasard. Il fût mis en avant comme un amusement constructif, non décadent, partie intégrante d’une vie équilibrée et raffinée.  

En 1592, les Ordonnances du royal et honorable jeu de la paume édictaient des règles morales :

« Messieurs qui désirez vous ébattre et jouer à la paume, faut jouer, afin de récréer le corps et délecter les esprits, sans jurer ni blasphémer le nom de Dieu ». 

Comme dans le sport moderne, il existait des concours donnant droit à des prix, et même des championnats établissant un champion. Ceux-ci pouvaient être conditionnés au respect de la bonne conduite :

« Toutes personnes qui désirent jouer audit prix y seront honnêtement reçues, à la charge de ne jurer ni blasphémer le nom de Dieu, sous peine, pour chacune fois, de cinq sols d’amende. »

L’historien Jean-Jules Jusserand (que l’on retrouvera aux côtés de Pierre de Coubertin en 1892, et qui fut plus tard ambassadeur de France à Whashington de 1902 à 1925) cite un document de 1668 allant dans ce sens moral et hygiéniste, reflétant une approche très moderne, très avancée culturellement, annonçant l’émergence du sport au 19e siècle :

« L’exercice du jeu, dûment fait, échauffe le corps et les membres, purge les humeurs superflues et étrangères en les faisant évaporer, fortifie les facultés naturelles, éclaircit et réjouit l’esprit; en telle manière que l’homme qui sait choisir certain jeu d’exercice honnête et en user sagement, en vaut beaucoup mieux tant pour sa santé corporelle que pour la vivacité de son esprit. »

Le jeu de paume a largement décliné au 18e siècle sans que les historiens ne soient encore capables d’en comprendre les raisons. L’Académie royale tentait pourtant encore d’en valoriser la pratique, expliquant que le jeu de paume permet à la jeunesse « d’acquérir une santé robuste et une agilité si nécessaire dans le cours de la vie ». 

La célèbre salle ayant donné lieu au Serment du jeu de paume par les révolutionnaires en 1789 était une des très rares salles encore existante en France.

Le tennis aujourd’hui est une forme remaniée et surtout simplifiée du jeu de paume. Ce dernier était très complexe, notamment par le principe des chasses, c’est-à-dire la possibilité avec un second rebond de balle de passer ou non une des lignes (nombreuses) tracées au sol. Les personnes désireuses de connaître ces règles pourront consulter ce document de la Fédération Française de Tennis :

http://www.fft.fr/sites/default/files/pdf/regles_jeu_courte_paume_2014.pdf

Le tennis d’aujourd’hui a d’abord été appelé lawn-tennis, qui signifie tout simplement « paume sur gazon », bien que très vite le jeu ne s’est plus joué systématiquement sur du gazon. Il fut mis au point et diffusé à partir de 1874, le Major Walter Clopton Wingfield ayant tout simplement commercialisé un « kit » avec raquettes, balles et filets, qui connu un immense succès. 

Ce jeu s’appelait Sphairistike (inventé depuis le grec ancien) et était sous-titré Lawn-tennis. Son inventeur l’a défini comme :

« Cour transportable, nouvelle et perfectionnée, pour jouer l’ancien jeu de paume. « 

Les règles du tennis ont été unifiées en Angleterre en 1877,  notamment en ce qui concerne la taille des terrains, l’organisation des parties, etc.

Le comptage des points au tennis par 15, 30, 40 puis « avantage » provient directement du jeu de paume. Il s’agissait, après avoir remporté l’échange en fonction du système de chasse, d’avancer de 15 pieds, puis encore de 15 pieds soit 30 pieds, et ensuite seulement de 10 pieds, donc 40 pieds, pour ne pas s’approcher trop du filet.

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Vie quotidienne

Les sans-attaches et les ligotés du capitalisme

Dans la vie quotidienne du capitalisme, on peut distinguer deux types d’attitudes majeures. Il y a ceux qui vivent les choses de manière consommable, sans jamais vouloir s’engager durablement. Et il y a ceux qui suivent ce qu’on peut appeler un modèle de vie d’adulte, au sens petit-bourgeois et bourgeois du terme. Les deux camps cohabitent dans le capitalisme, mais vivent à part. Leurs mentalités peuvent se rejoindre, pas pour les mêmes raisons cependant.

Car ce qu’il faut bien saisir, c’est que ces deux attitudes majeures, ces deux styles de vie si on veut, ne dépendent pas des classes. Elles dépendent du rapport à la ville et aux campagnes. Cela ne veut pas dire qu’on soit dans un capitalisme qui se soit débarrassé des classes. Cependant, la fracture villes-campagnes sans cesse élargie par le capitalisme aboutit à une situation en développement.

Prenons par exemple la contestation « très à gauche » et celle « très à droite ». Dans les deux cas, on trouve ensemble les sans-attaches et les ligotés du capitalisme. Mais pas les mêmes ! Dans la version de « gauche », on trouvera des gens changeant d’emploi facilement ou étudiant, surtout jeunes, qui sont hyperactifs sur les réseaux sociaux, s’agitent d’autant plus qu’ils n’ont pas de responsabilités : pas de famille, pas de propriété. Ils profitent de la ville où ils s’activent d’autant plus qu’ils ont peut-être moyen de faire carrière par cette agitation. L’étudiant sans succès sait bien que plus il ira loin par exemple dans les délires LGBT, plus il va socialiser avec le turbocapitalisme et pouvoir trouver une place.

On trouve aux côtés de ces sans-attaches des ligotés du capitalisme, dans leur variante bourgeois de gauche. C’est le public de l’Observateur, le « nouvel obs » historique où les discours de « gauche » accompagnent des articles sur des montres à 2000 euros et des appartements pour CSP++. Ces gens veulent un capitalisme moderne, qui se renouvelle, qui soit social pour atténuer les chocs. Le Parti démocrate aux États-Unis est l’équivalent de tout cela.

« Très à droite », on a aussi des sans-attaches et des ligotés du capitalisme. Sauf que ces derniers ne sont pas des bourgeois : ils sont populaires. Ils ont acquis la propriété, et maintenant il ne faut plus que ça bouge. Le vote Le Pen, c’est historiquement cela. Les gilets jaunes sont également une expression de ces ouvriers et employés, artisans et commerçants ultra-conservateurs. Parvenus à un certain niveau d’accumulation de capital, ces gens aimeraient geler la situation. Tout ce qui est nouveau les dérange. Et le nouveau, voilà ce qui dérange aussi des sans-attaches… pour le coup bourgeois et grand-bourgeois. Car il y a des bourgeois restés au capitalisme à la papa.

Les agités de « l’ultra-droite » française relèvent totalement de cela et à ce titre ils ne sont même plus d’extrême-Droite. Ils assument de « réagir » au capitalisme accéléré, avec un style provocateur et brutal qui relève totalement des codes du capitalisme accéléré. Ils n’ont aucune cohérence sur le plan des idées et l’assument. Pour preuve, tous soutiennent le régime ukrainien pourtant totalement au service de l’Otan et de la superpuissance américaine. Cela ne les dérange pas, car ils voient que le régime ukrainien a une idéologie nationaliste et que les nazis y ont un immense espace en théorie et en pratique. Alors ils foncent : ils assument d’être simplement en réaction.

Il n’est pas difficile de voir ici que plus on est lié aux villes, plus on est influencé par le turbocapitalisme, alors que plus on est lié aux campagnes, plus on est marqué par la contestation « en réaction ». Ce qui ne veut pas dire qu’on soit concrètement en ville ou à la campagne. On peut en effet idéaliser la ville et la campagne. Tel urbain va avoir une image idyllique de la campagne, par l’intermédiaire de la chasse, tel habitant des campagnes va rêver d’une vie pleine de fantasmes en mode LGBT urbain. Et il y a bien entendu en France toute une série de degrés entre la campagne « absolue » et le centre de Paris.

Il est évident que tant que cette mauvaise dialectique des sans-attaches et des ligotés du capitalisme se maintient, il n’y a pas de place pour la Gauche historique. Et y en aura-t-il ? Car en France, pays occidental s’effondrant, tout a l’air coincé, tout en parvenant à se maintenir, et on peut penser qu’il y en aura pour un certain temps avant que tout cela ne soit remis en cause. Cela semble même être pareil pour tous les pays occidentaux. Dans tous, l’idéologie LGBT est assumée officiellement par les États, par l’Union européenne encore plus, et c’est pourtant toujours présenté comme une « cause » d’une portée « rebelle ». Que les gens acceptent une telle mystification, même passivement, en dit long.

De toutes manières, un pays qui finit par accepter l’idée qu’être homme ou femme, c’est dans la tête que ça se décide… a atteint un relativisme absolu. Plus rien ne peut vraiment tenir quand on a atteint un tel niveau de remise en cause de la dialectique de la réalité, avec ses oppositions bien-mal, passé-futur, positif-négatif, prolétariat-bourgeois. Tout se voit réduit à de l’individuel, à du choix de consommation. Encore faut-il pouvoir consommer… et c’est là la faiblesse du capitalisme. Si la superpuissance américaine n’arrive pas à torpiller la Russie puis la superpuissance chinoise… ce sera l’instabilité.

Là les sans-attaches et les ligotés du capitalisme cesseront d’être un obstacle à la recomposition du prolétariat dans la métropole occidentale.

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Le « player » et le « user »

Savez-vous pourquoi les gens se comportent de manière ignoble, mais pensent bien faire ? Tout simplement, parce qu’ils pensent qu’il y a pire. Il y a deux expressions en anglais qui aident à très bien comprendre la question.

En anglais, le mot « user » désigne un utilisateur. Mais il peut désigner celui qui utilise, au sens de quelqu’un qui manipule, qui profite. Le « user » utilise les gens dans son entourage afin d’en abuser.

Le mot « player » désigne un joueur. On peut cependant employer le terme pour désigner quelqu’un qui se divertit en profitant de son entourage, mais sans autre perspective que passer le temps. Il ne cherche pas à abuser : c’est juste qu’il refuse tout esprit de conséquence.

Les gens, dans le 24 heures sur 24 du capitalisme, sont tous des joueurs. Chacun agit en player, s’imaginant libre dans ses choix et menant sa vie comme « bon lui semble ». En réalité, le capitalisme les a totalement façonnés et ils sont comme des figures de baby-foot. On les manipule comme on veut et chaque joueur du baby-foot s’imagine : oh c’est moi qui ait décidé d’agir, et j’agis !

Et si jamais on lui reproche d’être un individualiste, de ne s’engager en rien, il répondra : mais je ne fais rien de mal, moi ! Car il a en tête la figure du « user ». Ne se considérant pas comme un « user », ne cherchant pas ouvertement, subjectivement à manipuler, le « player » considère que, par conséquent, ce qui suit son action ne le regarde pas, sauf s’il en a envie.

Les gens qui balancent leurs mégots par terre, qui abandonnent du plastique dans une forêt, qui achètent du foie gras, qui commandent des choses inutiles sur Amazon… diront tous la même chose. A leurs yeux, ils ne font rien de mal ! La preuve, ils ne veulent pas faire le mal. S’ils ne veulent pas faire le mal, ils ne sont pas responsables. Le « player » est innocent. C’est le « user » qui est coupable. CQFD.

Ce qu’on a là, ce n’est pas simplement de la mauvaise foi. C’est toute une vision du monde sur la base de la consommation de marchandises. La consommation est passive dans sa forme, et elle apparaît comme allant de soi. Comment quelque chose allant de soi et qu’on fait passivement pourrait être quelque chose de mal ?

Fort de cet état d’esprit, le « user » agit dans la vie, il se précipite, il profite des vanités de la vie quotidienne dans le capitalisme. Et, faible de cet état d’esprit, il s’effondre psychologiquement lorsque ce qui se passe ne correspond plus à son style de vie.

C’est particulièrement vrai pour la question de la romance. Seul le socialisme peut rétablir la romance, ou plus exactement l’établir historiquement au niveau mondial, au niveau des masses mondiales. Car le « player » est incapable d’aimer. Le « user » ne veut pas aimer : il veut tromper. Le « player », lui, ne se pose pas la question. Il vit en suivant des impulsions qui lui semblent les siennes. Sauf qu’elles sont en réalité celles qui lui sont fournies par la société de consommation.

C’est là où on retombe sur l’image des joueurs d’un baby-foot. Ils sont bornés. Ils ne peuvent pas gérer un changement qualitatif dans les événements.

Si on ne comprend pas cette nature de « player » des gens vivant dans le capitalisme, façonnés par le capitalisme, on ne peut pas les comprendre du tout. On ne peut pas comprendre comment ils sont dépassés, humainement dépassés. Une humanité façonnée par les réseaux sociaux n’est pas à même d’affronter sa vie intérieure.

Encore est-il qu’il serait unilatéral d’attribuer tous les malheurs du monde aux réseaux sociaux. Facebook, Instagram, TikTok, Twitter… poussent les gens dans une certaine direction. La réciproque est toutefois également vraie. Si ces réseaux ont eu du succès, c’est qu’ils répondaient aux attentes des gens. Si Tinder a eu du succès, ce n’est pas en forçant les gens à nier le romantisme. C’est tout simplement parce que les gens niaient le romantisme à la base. Tinder n’a fait que refléter une société où on choisit, où on « sélectionne ».

Dans un tel panorama, une personne qui agit comme « user » a toute sa place. Un « user », c’est simplement un « player » qui a franchi le pas. D’où la fascination permanente pour les figures criminelles, fictives ou réelles, les Pablo Escobar, les Tony Montana de Scarface, etc.

Car, au fond, le « player » sait qu’il n’est qu’une figure de baby-foot, et il envie le « user » de tenter de modifier les règles du jeu, de vivre « pleinement ». L’utopie capitaliste du « player », c’est le monde criminel du « user ».

Que faire avec des gens pareils ? Eh bien le socialisme n’a jamais prévu que deux options. Un « user » doit être éliminé de la société, un « player » doit être rééduqué. Il n’y a pas d’autres options. Il n’est pas possible de céder à des gens qui se considèrent dans leur « bon droit ».

Et comme le droit c’est celui de consommer autant qu’on le pourra dans un occident repu… la corruption est totale et il n’y a rien à faire, à part se fonder sur l’hypothèse d’un décrochage généralisé. Ce décrochage a d’ailleurs déjà commencé. La crise commencée avec le covid-19 ne s’arrête pas et ne s’arrêtera plus. C’est la fin d’un mode de vie.

Et dans cette fin, les gens vont devoir apprendre à découvrir et à rejeter les valeurs propres à la figure du « player », et à combattre celles du « user ». Ce qu’on appelle révolution est obligatoirement une formidable autocritique. C’est une autocritique libératrice, car on se libère d’un carcan. C’est la cessation de l’esprit borné, des sensations limitées, de l’emprisonnement dans les apparences exigées par le capitalisme.

Mais c’est une autocritique tout de même.

Quelle forme prendra cette autocritique ? Ce sera par la reconnaissance de la réciprocité, de l’interaction, de la dialectique. Tout est en interaction. La conception d’un individu isolé, coupé du monde, séparé de tout le reste par une muraille infranchissable, doit être brisée, en soi. Il faut tuer l’ego.

Le 24 heures sur 24 du capitalisme célèbre l’ego. Le 24 heures sur 24 sans le capitalisme s’en débarrassera. Et entre les deux, ce qui va jouer, c’est la capacité à avancer en ce sens. Il faut supprimer le capitalisme dans la réalité matérielle, ainsi que dans les esprits, et la combinaison de ces deux aspects est la substance même de ce qu’on appelle la révolution.

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S’engager sur des courses de vélo

Le titre de l’article est au pluriel car en effet, on ne s’engage pas sur « une » course de vélo, mais sur toute une série de courses. Une course de vélo n’a de sens que si elle s’inscrit dans une saison, en général de février/mars à septembre/octobre.

C’est comme au football, ou bien dans la plupart des sports en fait. Il y a un travail de longue haleine avec une vision à long terme, pour une série d’événements. La différence, c’est qu’au football, il y a une accumulation quantitative de résultats, des défaites, des victoires et des matchs nuls, qui donnent un certain nombre de points et déterminent un classement final.

Au vélo par contre, il s’agit d’accumuler qualitativement la participation à de nombreuses courses pour parfaire sa forme et décrocher à un moment une victoire.

Si une course de vélo est très exigeante en elle-même, ce qui compte et qui demande beaucoup d’effort est surtout l’arrière-plan qu’elle sous-tend. Il faut beaucoup de préparation pour se présenter sérieusement sur la ligne de départ, en ayant la capacité au moins de peser sur la course, si ce n’est de la gagner.

Cela commence à la fin de l’automne avec des petites sorties, qui se transforment ensuite en hiver en de longues sorties collectives d’endurance. A cela s’ajoutent, au fur et à mesure de la préparation hivernale, des entraînements spécifiques, souvent travaillés individuellement.

Il s’agit de développer sa vélocité (tourner vite les jambes), sa force (appuyer fort sur les pédales), son explosivité (pour les sprints), sa capacité à résister à l’acide lactique (pour les efforts soutenus de plusieurs minutes). Il faut surveiller attentivement son alimentation et son hydratation, pendant, avant et après le vélo.

Il y a également le travail en bosse, les relais en groupe à vive allure, l’accumulation de travail à haute intensité sur de très courtes périodes, l’exercice individuel prolongé (type « contre la montre »), le gainage, etc. Tout ce travail doit être relativement maintenu durant la saison, en semaine, ou parfois le week-end lorsqu’on ne fait pas de course.

Il existe différents schémas, voire des stratégies très différentes, pour arriver en forme sur les courses au printemps. Ce qui est incontournable toutefois est la nécessité d’un travail qui est à la fois prolongé et structuré, donc réfléchi.

Il ne s’agit pas simplement de faire des efforts, mais plutôt d’un véritable engagement. C’est d’ailleurs le nom que portent les inscriptions sur les courses amateurs de la Fédération française de cyclisme, quelque-soit le niveau. On dit qu’on s’engage sur telle ou telle course et on paie son droit d’engagement (à moins que ce soit le club qui paie, pour les coureurs ayant un bon niveau et faisant partie d’une équipe structurée avec un peu de moyen).

Cela n’a rien à voir avec le fait de « s’inscrire » sur un événement, de manière consommatrice (par exemple un événement « gravel », une « cyclo-sportive », etc.) La grande différence tient en le rapport à la victoire.

Quand on s’inscrit à un événement, il n’y a rien à gagner, si ce n’est une petite satisfaction personnelle, qui est en réalité très consommatrice (on a acheté un dossard et on est content d’avoir terminé l’événement).

Une course, une véritable course, c’est autre chose. On ne gagnera pas forcément, mais ce qui compte est d’envisager concrètement et pratiquement la victoire. On se prépare longtemps pour gagner et on se donne les moyens sur le moment pour gagner.

Il faut ainsi prendre en compte le règlement, avec des arbitres qui surveillent la course et sanctionnent, comme dans n’importe quel autre sport. Et puis il y a la tactique, car on doit courir autant avec sa tête qu’avec ses jambes, comme le dit l’expression.

Pour gagner une course de vélo, il faut être attentif aux moindre mouvement du peloton, repérer ses adversaires les plus en forme, « sentir les coups », c’est-à-dire observer avec ses yeux, mais surtout avec son corps, les moments où il faut vraiment produire un effort, et ceux où il faut au contraire « laisser filer » pour ne pas perdre inutilement de l’énergie.

Ainsi, il y a une autre dimension à l’effort lors d’une course. C’est un effort qui devient productif, autant qu’il est collectif. Car on ne gagne pas tout seul, mais grâce à ses adversaires que l’on a battu (et parfois grâce à ses équipiers avec qui on a produit un travail d’équipe).

Cela est d’autant plus intéressant qu’une course de vélo s’inscrit forcément dans un arrière-plan culturel et produit elle-même une culture. Il y aura des anecdotes chaque année sur telle course, des habitudes se forment au fur et à mesure des années, avec un palmarès, des records, des façons de gagner ou perde telle course, un public qui supporte et commente, etc.

Les courses cyclistes en elles-mêmes sont et produisent une culture, avec une mentalité propre, avec des figures locales, avec des habitudes qui évoluent (en 2023, pratiquement tous les coureurs ont des chaussures blanches, alors qu’elles étaient systématiquement noires il y a quelques années), avec d’autres habitudes qui sont extrêmement bien ancrées (on ne se présente pas sur une course avec des jambes qui ne sont pas rasées ou épilées ! )

Voilà pour quoi il faut s’engager sur des courses de vélo quand on aime le vélo ! Comme pour n’importe quel autre sport d’ailleurs, il faut s’engager et faire des compétitions, de manière sérieuse ! Au moins quand on est jeune. Et puis devenir arbitre, entraineur, encadrant, dirigeant, bénévole d’un jour, etc.

Il ne faut pas être de simples consommateurs de la vie, mais de véritables acteurs de la société, ayant une vie culturelle riche, productive et concrète ! Les courses de vélo sont une excellente école pour cela !

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La place du skateboard dans la ville

Le skateboard est né au cœur de l’urbanité. On peut se dire que le skateboard suit, finalement, la bétonisation de la ville. C’est vrai et cela constitue forcément un problème si l’on se place du point de vue écologique.

Mais en rester là serait formel car en réalité le skateboard ne suit pas tellement l’extension urbanistique de la ville à travers l’agglomération périurbaine, mais plutôt son renouvellement incessant.

Si l’on prend une zone périurbaine résidentielle, l’architecture y est finalement très pauvre et routinière. Il n’y a que peu de place pour des formes urbaines originales, ouvrant la voix à une exploration dense par le skateboard.

Rassemblement de skateurs au « LOVE park », une place de Philadelphie (États-Unis) détruite en 2016 pour stopper la pratique.

Mais voilà, une place urbaine, un escalier d’immeuble, une succession de trottoirs ou de bancs, etc., sont partagés avec d’autres usagers. Des usagers de toutes sortes, donnant lieu à des conflits et des nuisances tels le bruit et la dégradation du mobilier urbain.

Les mairies ont cru trouver une solution clef en main avec la multiplication des skateparks dans le but de pouvoir limiter la pratique dans la ville elle-même. A cela s’ajoute parfois des éléments anti-skate posés sur les mobiliers urbains, à l’instar des installations anti-SDF.

Le problème c’est qu’un skatepark reste un endroit limité par nature et bien qu’on puisse sans cesse renouveler son approche, il n’en reste pas moins vrai que les espaces sont les mêmes, avec les mêmes formes, les mêmes prises d’élan, etc., etc. Fondamentalement, un skatepark vise plutôt la performance et l’entraînement et c’est pourquoi en parallèle à l’inflation de ces structures, toujours plus élaborées ces dernières années, se sont montés en parallèle des clubs de skate dispensant un « enseignement ».

Mais la pratique du skateboard n’est pas un sport : plus qu’une discipline d’effort physique, il exige un déploiement de sa subjectivité à travers les formes sans cesse mouvantes de l’urbanité. Ce n’est pas pour rien qu’il y a une règle informelle, le ABD pour « Already Been Done » (déjà fait), qui veut qu’il ne faille pas réaliser un tricks (une figure) déjà réalisée sur un spot. Ou bien que s’est développé ces dernières années la mode de relever des grilles et/ou les plaques d’égout pour sauter un obstacle ou atteindre une surface, normalement inatteignable.

Une place urbaine va changer au fil des années et skater un park cloisonné et placé entre un gymnase et un terrain de football ne remplacera jamais le plaisir d’évoluer sur une place urbaine avec ses aléas, sa vie, ses contacts sociaux fluctuants… Une place s’est aussi un point central pour partir ensuite dans la ville, à la différence du skatepark qui en est le plus souvent éloigné.

Un skateur est donc une sorte d’artiste qui sculpte la ville et c’est pourquoi la scène est si connectée au monde des arts, pour le meilleur et pour le pire. Le skate, c’est l’art de combiner à la fois l’exploration et l’exploitation des possibilités de la ville.

La team « GX1000 » à San Francisco (États-Unis) est parvenue a marquer son empreinte par le fait qu’elle skate les nombreuses descentes très abruptes de la ville (down hill dans le jargon skate) d’une manière ultra-engagée, à la limite du suicide (Pablo Ramirez, un des membres du team, est décédé le 23 avril 2019 à la suite d’une percussion à grande vitesse avec un bus).

C’est à la fois le bon et le mauvais exemple : le bon car il traduit l’appropriation de la ville, le mauvais car il montre le côté anti-social du skate avec des comportements pleins de danger pour soi et pour autrui.

Les choses sont donc entendues : le skateboard est une démarche semi-artistique qui prend corps dans la ville mais se heurte à d’autres usages tout aussi légitimes.

Or voilà, étant donné que le skateboard est finalement quelque chose de récent dans sa forme moderne, il ya un tâtonnement pour résoudre ces questionnements.

Faut-il accepter de se transformer en un sport avec ses règles et son encadrement pour mieux négocier sa place au soleil ou maintenir la fidélité avec l’art urbain au risque de se heurter aux politiques de la ville et à sa police ?

Landhaus plaza à Innsbruck (Autriche). Une place urbaine qui a été refaçonnée en 2011 en acceptant le skateboard, après une interdiction en 1991-1992.

Dès qu’on pose cette question, il émerge deux options bien connues de la contre-culture : il y a ceux qui optent pour l’intégration aux institutions et voient donc la démarche vidée de son contenu, et les autres qui gardent la substance alternative mais se retrouvent marginalisés.

Ces deux options sont deux écueils qui pêchent par leur unilatéralisme. Car la clef, ce n’est pas « contre-culture » versus « institution » mais la mobilisation des pratiquants sur une base démocratique. De ce point de vue, si un débat et une mobilisation démocratique avait lieu, l’intégration du skateboard aux Jeux olympiques serait apparue pour ce qu’elle est : une simple tentative de relancer par en haut une institution qui n’attire plus les spectateurs.

Ce qui est intéressant, toujours, c’est la mobilisation des esprits à la base. Il existe depuis plusieurs années une démarche qui vise à se mobiliser pour peser auprès des mairies dans le but de sauver des places destinées à être détruites.

En 2016, à l’annonce de la destruction du « LOVE Park », une place très réputée à Philadelphie (États-Unis), les skateurs se sont rassemblés pour témoigner de leur attachement à un lieu, par ailleurs marqué par des conflits. La police municipale y menait régulièrement des raids anti-skateurs sur la base d’arrêtés d’interdiction, assimilant les skateurs aux dealers qui squattaient le même endroit.

Il y a également la très mythique « Stalin Square », son marbre et son point de vue à couper le souffle, à Prague (République Tchèque) qui a été sauvée de la destruction par ce type de mobilisation.

En France aussi, à Lyon, les skateurs se sont mobilisés pour sauver en 2016-2017 la place Louis Pradel (renommée en Hôtel de ville ou plus simplement « HDV ») qui était menacée de destruction alors qu’elle fait partie d’un des endroits les plus populaires pour le skateboard mondial.

Parmi l’architecture, il a été conservé les bancs en pierre qui bordent la place et dont la pierre offre un matériau tout particulier pour le skate, ainsi que les dalles de la place eux-mêmes en carreaux de pierre lisse.

Ici une vidéo tournée juste avant que la place soit rénovée, par la marque de skate Venture qui avait spécialement sorti un tee-shirt ainsi que des trucks avec la statue de Louise Labé et Maurice Scève, deux célèbres poètes français du 16e siècle, qui trône au milieu de la place et en est devenue l’emblème du fait de sa forme pyramidale :

L’enjeu c’est donc bien de générer une mobilisation à la base des skateurs dans le but de mieux faire cohabiter le skate avec les autres usages et usagers de la ville.

Il a d’ailleurs été suffisamment démontré que la présence de skateurs sur une place régulièrement minée par des incivilités contribue en fait à en réduire l’impact du fait de la présence prolongée faisant office de médiation.

Le skateur et co-fondateur de la marque Magenta skateboard Léo Valls, a impulsé une nouvelle approche dans le rapport aux mairies. A Bordeaux où il est installé, le skateboard s’est fait une place dans la ville en négociant tout à la fois l’installation de modules urbains adaptés à la pratique dans tel ou tel endroit et l’encadrement de la pratique sur les places par le biais d’horaires légales. Cet encadrement, respecté, devrait être généralisé à toutes les villes, avec une sorte de passeport interne délivré à chaque pratiquant pour évoluer en connaissance de cause.

On peut apprécier toute la démarche dans ce documentaire :

Mais voilà, si la mobilisation à la base est une clef pour entretenir un rapport avec la ville, il n’en reste pas moins vrai que les villes sont le plus souvent dirigées par une conception marchande de l’espace public, limitant aussi les autres usagers à des circuits de consommation et vis-à-vis desquels le skateboard peut apparaître comme un obstacle.

Le rapport du skateboard à la ville exige donc tout à la fois la prise en main de la scène skate pour assumer l’encadrement par rapport à la collectivité et une révolution des esprits pour liquider la perpétuelle tentation des villes à aseptiser ses rues dans l’objectif de satisfaire la société de consommation.

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Sans loyauté, il n’y a rien qui tient

Pourquoi les choses tiennent-elles ? D’une certaine manière, par la force de l’habitude et l’autorité, c’est vrai. Mais au fond, elles tiennent surtout par loyauté.

Il n’y a pas de sensibilité sans attachement. Partant de là, on s’attache forcément avec qui on est, à là où on est, aux endroits où on vit, où on fait quelque chose. C’est un processus qui se déroule de manière autonome, indépendamment de la volonté des gens. Cela se rattache à l’existence, sa possibilité sociale. On se sent dépendant et redevable de certaines choses pour exister, et on est alors loyal.

Le symbole le plus fameux de cette loyauté, dans sa substance même, c’est bien entendu le chien. Le chien est le « meilleur ami » de l’homme, car il est loyal. Il ne trahira pas, il est marqué par sa loyauté, alors que les êtres humains, justement, peuvent dérailler.

L’humanité ne tiendrait pas sans loyauté et c’est à ça qu’on voit que les humains n’ont pas été « créés » par Dieu, mais sont bien des animaux produits par la Nature. S’ils sortent de la loyauté, ils sont perdus.

Toutes les loyautés ne se valent pourtant pas. Certaines sont fictives, d’autres symboliques. Toute loyauté dépend de la culture, c’est-à-dire de la réalité historique de l’humanité comme animal social développé.

Par exemple, on ne peut pas comprendre la guerre en Ukraine sans comprendre que ce qui joue beaucoup, c’est qu’un camp veut célébrer la victoire sur les nazis et l’autre ne le veut pas. Les Russes reprochent aux Ukrainiens leur déloyauté par rapport à leur passé commun. Le régime ukrainien propose de son côté une nouvelle loyauté, artificielle, « occidentale ».

La guerre Russie-Ukraine est, psychologiquement si on veut, avant tout une guerre pour la loyauté. Bien entendu, à l’arrière-plan, il y a l’affrontement entre les blocs. Mais les gens ne vont pas à la guerre sans motivation, ne serait-ce que minime et de portée historique.

Si on rate cet aspect essentiel de la vie humaine, on ne comprend d’ailleurs pas le maintien des religions, des nationalismes, des superstitions, bref d’un nombre immense de petits actes au quotidien servant de témoignage de loyauté.

Le folklore humain est même ici sans limites. On est loyal, on célèbre la loyauté… et ce d’autant plus qu’elle est absente, trahie, dévoyée, etc.

On ne soulignera jamais assez comment cet aspect est fondamental dans l’étude des mentalités, des actions et réactions au niveau personnel, individuel. Et tout cela est de nature historique, dépendant du mode de production dominant. Ce sont les attachements qui permettent que, demain, les gens iront au travail, il y aura des hôpitaux, et pareil après-demain.

S’il n’y avait pas ces attachements, d’ailleurs réciproques, rien ne tiendrait. On ne pourrait avoir confiance en rien, ni personne. Le propre du 24h du 24 du capitalisme est justement de ne permettre les loyautés que par l’intermédiaire de contrats et de marchandises.

C’est à ce niveau que tente d’opérer le « romantisme » d’extrême-Droite, qui prétend réactiver d’anciennes loyautés, en fait fictives le plus souvent. C’est le fameux « avant, c’était différent ». Il a sa part de vérité, car le capitalisme s’est renforcé et il a procédé à la dissolution de plus en plus de liens sociaux et culturels. Cependant, la tendance était déjà là.

Car le capitalisme ne permet aucune loyauté… à part à soi-même, et encore, à sa fonction dans le capitalisme. Voilà pourquoi, à l’inverse, être de Gauche, c’est montrer l’importance de la loyauté. On est là, parce qu’on protège ce à quoi on tient, et que ce à quoi on tient a du sens.

On peut avoir raison autant qu’on le voudra – si on donne l’impression de trahir, tout est foutu. Qui n’a pas connu ce moment amoureux où on se sent embarqué malgré soi dans quelque chose de nouveau, d’inquiétant, mais où on dit : je reste là, je suis loyal ?

Car on a confiance en le mouvement de la vie : telle est la vraie loyauté, la première, celle que toute loyauté rejoint.

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Comment acheter un vélo ?

Quelques conseils de base.

Acheter un vélo n’est pas une chose facile, surtout à notre époque où le capitalisme exerce une pression immense sur les consommateurs. Soit pour vendre des choses inutiles, soit pour faire croire qu’il est possible d’avoir des choses bien en ne dépensant pas grand-chose.

Typiquement, le « vélo à assistance électrique » est une chose inutile. Si on ne veut pas pédaler, il ne faut pas s’acheter un vélo. Et si on s’estime pas assez en forme pour faire du vélo… et bien justement il serait temps de faire du vélo pour être en forme !

Inversement, les supermarchés et les chaînes de magasin de sport vendent des vélos très lourds, avec des composants de basse qualité qui sont difficilement remplaçables, mais ils prétendent qu’ils vendent des bons vélos pour pas cher. Il faut absolument éviter tous ces magasins.

Un vélo est un objet technologique de grande valeur qui doit être entretenu convenablement, ce qui n’est pas possible avec un vélo « discount » acheté dans une chaîne. Seul un bon vélo aura une bonne base et pourra être entretenu convenablement. Reste à savoir maintenant ce qu’est un « bon » vélo.

Souvent, le marché de l’occasion est une bonne solution, surtout pour des personnes jeunes disposant d’un faible budget. Cela nécessite par contre de la rigueur pour ne pas acheter n’importe quoi. Il est préférable d’avoir l’avis d’une personne connaissant (vraiment) le cyclisme avant d’acheter un vélo qui n’est pas neuf. L’occasion en magasin est une solution envisageable, bien que plus cher qu’en vente directe.

De manière générale, on peut distinguer deux grandes catégories d’usage déterminant l’achat d’un vélo. Soit pour les déplacements quotidiens et aller au travail, soit pour le loisir et le sport.

Dans le premier cas, le vélo d’occasion peut être une solution pour des trajets courts, sur des voies urbaines lentes et sécurisés. On cherchera alors typiquement un vélo de marque des années 1970 ou 1980, en acier. Avec un entretien régulier chez un professionnel, une fois par an, c’est très souvent une bonne idée, car ce sont des vélos robustes, qui sont très confortables sur des petits trajets et efficaces.

Toutefois, dès qu’on cherche à faire des trajets quotidiens longs, de plus de 20 à 30 minutes, voire très longs, de plus de 40 minutes, alors il faut se tourner vers le neuf. Ou alors vers de l’occasion mais en très bon état, et surtout, récent. Cela pour deux raisons essentielles, ainsi qu’une troisième relativement importante : d’une part le confort, d’autre part la sécurité, enfin le rendement.

Pour le loisir, c’est un peu l’inverse. Pour un usage occasionnel et peu intense sportivement, il sera difficile (et peu intéressant) de trouver un vélo de qualité en occasion. Autant se tourner vers du neuf et en profiter pour s’intéresser à l’univers du cyclisme en cherchant à développer sa propre pratique.

Par contre, pour un usage sportif, même débutant, même pour de simples longues ballades, on trouvera facilement en occasion des vélos en bon état et récents, qui permettent d’avoir un très bon matériel pour un coût moindre. Mais attention, cela demande de la vigilance et de la discipline pour bien étudier les annonces avant d’acheter.

Résumons ici les quatre grandes catégories définies ci-dessus, avec un ordre de prix (hors vêtements et casque).

Pour le quotidien avec des trajets assez courts, sur routes sécurisées (pistes cyclables, centre-ville ou bourg) et uniquement sur revêtement dur (bitume) :

50€ à 100€ d’occasion + 50€ minimum pour une première révision + 20€ à 100€ d’équipements (lumières, panier, garde boue, etc.)

On cherchera un vélo en acier, typiquement un Peugeot en bon état, avec un panier à l’avant ou un support à l’arrière pour des sacoches.

Ce vélo par exemple est vendu pour 70€ sur un site de petites annonces. Il faut ajouter des catadioptres, enlever les dynamos pour les remplacer par des lumières rechargeables, passer chez un mécanicien cycle pour vérifier les éléments de sécurité, puis le tour est joué !

Pour le quotidien avec des trajets de plus de 20 minutes, sur route et chemin cyclable :

1000€ à 3000€ neuf + 50€ à 500€ d’équipement.

On cherchera nécessairement un garde-boue ainsi que de quoi transporter ses affaires.

Ce Bergamont Sweep 6 EQ par exemple est vendu 1150€ neuf.

Pour le loisir occasionnel et peu intense :

– environ 1000€ neuf, et pas forcément d’équipement.

Par exemple, ce VSF Fahrradmanufaktur T-100 vendu 1200€ est un choix intéressant.

Pour un usage sportif débutant :

1000€ à 2000€ d’occasion, à partir de 2000€ neuf (ou 1500€ pour un gravel) + 100€ à 500€ d’équipements (lumières, pédales automatiques, kit de réparation, GPS, etc.)

Souvent, il se posera ici la question de privilégier un vélo typé gravel, ou randonnée, ou plutôt route. Un article sera disponible prochainement pour aider répondre à cette problématique. De manière générale, on évitera les VTT, à moins d’en faire un usage très spécifique de manière sportive, et donc avec du matériel de très haute qualité.

Voici par exemple un vélo route d’occasion vendu pour 1700€ sur un site de petites annonces. Ce Canyon Ultimate en carbone équipé d’un groupe Shimano Ultegra mécanique 11 vitesses et d’une bonne paire de roues brontrager est un excellent vélo sportif et peut tout à fait servir y compris sur des courses !

Ce gravel Jari 2.1 de chez Fuji est vendu neuf pour 1600€ est également un très bon vélo, qui sera durable dans le temps et se revendra très bien même dans plusieurs années.

Ensuite, quelque-soit le type de vélo, il faudra régulièrement le nettoyer et surveiller les éléments de sécurité. Une visite annuelle chez un professionnel du cycle s’impose, à moins de se former rigoureusement pour effectuer soit même les opérations d’entretien.

En voici les principales :

  • vérifier régulièrement son freinage et savoir le régler, remplacer les patins ou les plaquettes de freinage, effectuer une purge le cas échéant.
  • vérifier, nettoyer et huiler régulièrement sa chaine, la changer tous les 3000 km environ.
  • vérifier et ajuster régulièrement le réglage du dérailleur.
  • vérifier régulièrement la pression des pneus et les changer en cas d’usure.
  • vérifier régulièrement tension des rayons des roues, ainsi que l’ensemble des serrages et vis du vélo.

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Le vélo dans les grandes métropoles, cette horreur

Le vélo est merveilleux, il faut des pistes cyclables partout, virer ces immondes « vroum-vroum » des villes… ou peut-être pas tant que ça ?

Le vélo a le vent en poupe ces dernières années, et tout particulièrement suite aux premiers confinements via les fameuses « coronapistes » des grand villes, devenues permanentes pour certaines. Mais qu’en penser concrètement ? Avancée ou recul ? Et bien, les deux.

Si le vélo comme moyen de déplacement a des effets positifs indéniables, son utilisation et son attrait ne tombent pas du ciel. Tout ceci se voit et se comprend plus aisément dans les très grandes villes et leurs agglomérations.

Prenons par exemple Paris. La ville prévoit d’investir plusieurs centaines de millions d’euros au total sur une dizaine d’années afin de rendre la ville « 100% cyclable ». De très nombreuses pistes cyclables existent déjà, d’importantes voies ont été retirées aux trafic automobile, des aménagements spécifiques sont mis en place (contre-sens cyclables par exemple), etc. Et les travaux continuent afin d’agrandir, d’étendre et de généraliser l’existant.

Sur le papier, à première vue, on se dit : moins de voitures, plus de vélo, c’est une bonne chose. Pourtant la réalité est bien moins réjouissante.

Le vélo ici ne correspond pas à un besoin démocratique mais un besoin de marché. Les services de vélos et de trottinettes électriques en libre-service se multiplient de manière anarchique. Les ventes de trottinettes électriques au particulier explosent en parallèle. Et plus généralement, l’individualisme nombriliste et mortifère se sent pousser des ailes et a besoin de toujours plus de place pour s’exprimer.

Les voitures n’ont pas été retirées suite à une action démocratique, à un débat de fond sur la logistique, les transports en commun, la pollution atmosphérique et sonore, etc. De la même manière, les pistes cyclables n’ont pas été décidées de manière démocratique, à la base. Et leur supervision l’est encore moins.

Tous ces travaux répondent à des besoins du marché, rien d’autre. Et cette évolution a été accompagnée à bras ouverts par les éléments les plus libéraux des grandes métropoles, trop contents d’être à l’avant-garde de la modernisation.

D’un côté, il y a des aspects positifs : certains trajets deviennent potentiellement plus sûr pour les cyclistes, et cela entraîne la création et l’extension de plus vastes itinéraires en périphérie des grands centres urbains. De l’autre, l’ensemble a été offert aux plus libéraux comme un terrain de jeu, comme un moyen de s’accaparer davantage d’espace public.

D’un côté, il y a des itinéraires qui semblent avoir été pas trop mal pensés. De l’autre, la société française se décompose et les lumpen des grandes villes, les hipsters et autres bobos suffisants s’accaparent le tout.

C’est simple si l’on retirait leurs vélos à tous les cyclistes qui ont un comportement dangereux ou odieux, les pistes seraient quasiment vides.

Il y a donc un aspect positif, on peut se dire qu’il y a des avancées. Mais sur le papier uniquement. Car l’aspect principal reste le libéralisme, la logique du chacun pour soi. Le développement des pistes cyclables et du vélo comme mode de transport dans les grandes villes est donc d’abord un recul. Un recul dans les mentalités, un recul sur le plan de la culture.

Le capitalisme en décomposition a besoin d’écouler toujours plus de marchandises. Les avancées technologiques ont permis le développement et la production massive de vélos et de trottinettes à louer à la demande, via des applications. Les pistes cyclables des grands centres n’ont pas été développées pour les masses françaises, elles l’ont été pour ces entreprises ultra-libérales. Elles l’ont été pour faire plaisir aux anti-sociaux qui méprisent les transports en commun non pour leur état ou les mentalités qui y règnent, mais pour leur dimension collective.

Les déplacements à vélo pourraient être une excellent chose, le libéralisme a réussi à en faire une solution de plus en plus répugnante. Ceci doit changer.

A l’humanité de mater les lumpen, les post-modernes et tous les libéraux obnubilés par eux-mêmes et leur inexorable chute.

A l’humanité de renverser la table et de remettre l’intelligence et la beauté au cœur de la vie quotidienne.

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Le dépôt sauvage est un individualisme forcené

Il arrive souvent de tomber sur des déchets déposés illégalement en dehors des lieux de collecte : c’est du dépôt sauvage.

Il y a plusieurs types de dépôts sauvages.

Ceux dans les grandes villes où la mise en place des déchetteries est difficile voire impossible, comme dans la métropole parisienne qui de par sa densité empêche la construction de déchetterie en son sein. Il existe cependant dans les grandes villes, y compris à Paris, des services municipaux de ramassage d’encombrant sur rendez-vous, et gratuit, mais cela n’intéresse pas les esprits paresseux qui n’envisagent aucune démarche organisée.

Il y a ceux aux abords des déchetteries, où les individualistes voulant se rendre en déchetterie mais constatant que celle-ci est fermée, cèdent à l’immédiateté et se débarrassent de leurs déchets juste devant, obligeant les agents à nettoyer les abords. Au delà d’être une démarche purement égoïste, c’est tristement le reflet de la société aujourd’hui sans conscience planétaire ni collective ; où domine le libéralisme dans l’attitude.

Bien que tout ne puisse pas être recyclé ou « revalorisé », déposer des déchets ménagers, de bricolage, des meubles, électroniques, de produits dangereux etc. relève du cannibalisme social et d’une barbarie anti-planétaire. C’est céder aux mœurs du turbo-capitalisme, où si l’on veut faire quelque-chose il faudrait l’avoir de suite, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

C’est ce qui amène d’ailleurs au dernier type principal de dépôt sauvage : celui dans la Nature. Aux abords des petites routes en France, voire en forêt, il n’est pas rare de trouver dans les champs, dans les forêts, près des étangs, etc. des sac poubelles, du plastique, des déchets électronique, des pneus, de l’amiante ou tout autre type de déchet.

C’est précisément la manifestation presque ultime de l’individualisme forcené qui sévit dans la vie sous le capitalisme. Se laisser aller à ce type de pratique relève de la barbarie, du nihilisme et de l’égoïsme le plus total, sans aucune considération pour les autres habitants de la Planète, sans considération pour les animaux qui seront perturbés dans leurs vies, sans considération non plus pour les travailleurs qui devront se protéger et évacuer (si ils sont trouvés) tous ces déchets. La Nature n’est pas une décharge à ciel ouvert ; elle devrait être un sanctuaire pour la vie.

Bien entendu à l’heure actuelle, les déchetteries et le recyclage sont un business comme un autre dans lesquels les « déchets » ne sont pas toujours « revalorisés » ou recyclés correctement car ne permettant pas de tirer assez de profit.

Cela pose également la question de la gestion du déchet lui-même que la Gauche devra résoudre. Il suffit de se rendre en déchetterie pour constater que bon nombre de choses jetées sont encore fonctionnelles, utilisables, réparables, et mérite une seconde vie. Mais pourries par le 24h/24 du capitalisme, il faudrait consommer toujours plus, et jeter toujours plus. Cela est autant vrai pour des biens que des relations.

Le dépôt sauvage n’est donc qu’une expression avancée supplémentaire de l’individualisme forcené dans lequel la société capitaliste nous fait vivre. C’est de cela dont il est question lorsque des personnes jettent au sein de la Nature des produits dangereux (ou d’ailleurs n’importe quoi), nuisant aux animaux, vivants à côté des déchets et rendant le travail plus aliénant et plus difficile aux agents de déchetteries, communaux, pour nettoyer les dépôts sauvages.

Alors pour résoudre cela, il faudra que la Gauche embrasse la question des gestions des déchets, et que les personnes s’adonnant à des pratiques socialement pourries soient soumises à des travaux d’intérêts généraux dans les déchetteries, dans les incinérateurs, dans les lieux de recyclage, les services de ramassage des déchets.

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Les Nonnes Troppo: Le roi de la route

Une chanson classique contre les fous du volant.


Un bijou du tout début des années 1990, avec un esprit portraitiste particulièrement bien ficelé !