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Après le mythe de la grève générale, le populisme du référendum

La grève générale n’étant clairement pas en vue, il fallait trouver un autre mythe mobilisateur de la part du PCF et de La France insoumise pour sauver la CGT. C’est l’Humanité qui s’est chargée de la mission, avec un grand appel à un référendum. Il faut sauver le soldat CGT.

Si la CGT coule, alors tout un pan de la Gauche s’écroule. Pas celle liée au Parti socialiste, car elle s’appuie de son côté sur des valeurs, un programme. Mais celle liée au PCF, à La France insoumise, au NPA, c’est-à-dire « à la gauche de la gauche », qui vit de surenchère.

S’il n’y a plus la CGT, il n’y a plus le levier de la surenchère. Et c’est la fin de tout. Il ne reste alors que les idées, le programme, les valeurs, et cela ne pèse pas lourd, tellement le populisme a fait des ravages.

L’ultra-gauche peut bien de son côté commencer à dénoncer une CGT qu’elle a entièrement soutenu jusque-là. Elle ne fait que revenir à son culte de la marginalité après un traditionnel suivisme syndical à la première occasion. Hier, les chasubles CGT, les cortèges CGT, aujourd’hui les postures de regret du manque d’élan, de la « trahison » des dirigeants. Rien de plus classique. On connaît l’adage : « la crise est une crise de la direction révolutionnaire ». L’ultra-gauche connaît son Léon Trotski.

Mais le PCF et LFI ont de l’ambition. Sans la CGT, il n’y a plus les moyens de cette ambition. Il faut donc agir avant qu’il ne soit trop tard. Ce qui se lit ici, c’est l’étrange rapport, très pervers, entre la gauche de la gauche et le syndicalisme. Il y a des non-dits, des zones réservées, un équilibre précaire mais en même temps une grande connivence, etc. Il y a un accord masqué qui, véritablement, pourrit la primauté de la politique et ce depuis les débuts de la CGT.

Il y a par conséquent une dépendance à la CGT, que le PCF et LFI la reconnaissent comme essentielle. Il faut donc sauver la CGT, qui va dans le mur. Mais comment faire pour ne pas la compromettre, pour qu’elle sauve la face ? D’où l’idée de demander un référendum, avec une pétition en ce sens, signée des principales figures de la « gauche de la gauche ».

La CGT, anti-politique, ne le signera pas, surtout lancée dans la grève, du moins officiellement. Si elle le fait, elle remettrait en cause sa propre logique syndicaliste. Elle ne peut donc pas vraiment être vexée. Surtout que c’est l’Humanité qui lance la pétition. On a aussi parmi les signataires Patrick Le Hyaric, qui est directeur de l’Humanité, ainsi que Bernard Thibault, ancien secrétaire général de la CGT.

Les angles sont donc arrondis. Et pour sauver le soldat CGT, on a Ian Brossat du PCF, ainsi que Adrien Quatennens et Jean-Luc Mélenchon de La France Insoumise. On a Marie-Noëlle Lienemann et Emmanuel Maurel de la Gauche républicaine et socialiste et Gérard Filoche de la Gauche démocratique et sociale.

On a Julien Bayou, qui est secrétaire national d’EELV, et Alain Coulombel, porte-parole d’EELV. On a Clémentine Autain de La France insoumise et Guillaume Balas, coordinateur de Génération-s.

On a également des figures d’arrière-plan, comme Pouria Amirshahi, ancienne figure majeure du syndicalisme étudiant et actuel directeur de publication de Politis, Willy Pelletier qui est coordinateur général de la fondation Copernic, Alain Obadia qui est président de la fondation Gabriel-Péri.

La liste initiale comporte également des avocats, des intellectuels, des chercheurs, des artistes, des économistes, etc. avec quelques ambulancier, sans profession et chauffeur poids lourd pour donner un côté populaire.

Est-ce que cela suffira ? Certainement pas. C’est même plus un signe d’effondrement qu’autre chose. Car la véritable actualité n’est pas dans ces noms. Elle est dans le fait que les hauts cadres du Parti socialiste ont également signé la pétition, et notamment Olivier Faure, qui est secrétaire national du PS, et Jean-Christophe Cambadélis, ex-premier secrétaire.

Qu’Olivier Faure veuille faire bien, soit. Mais que viennent faire les autres signataires, et notamment Jean-Christophe Cambadélis ? Ce dernier a un regard extrêmement précis et aguerri. Il disait tout récemment, avec justesse, au sujet des municipales :

« La gauche, elle, va toucher le fond de la piscine alors que le PS gardera pour l’essentiel ses bastions. Le PCF aussi, grâce à une alliance jugée hier impossible avec le PS. Même si ce sera l’arbre qui cachera la forêt des reculs du premier tour, la rupture avec la France insoumise va coûter chère au PCF et à la France insoumise.

Les écologistes seront globalement très hauts et devant les socialistes là où la gauche n’est pas sortante. Dans les villes de Besançon, Bordeaux etc. où la gauche est unie avec eux, ils peuvent même virer en tête. Reste que l’écologie est un vote de 1er tour, pas ou pas encore de rassemblement.

Quant à la France insoumise, elle est réduite à une posture de témoignage protestataire, ayant du mal à exister dans ce scrutin qui est pour elle encore plus difficile que les européennes. »

Et il ajoutait, présentant sa solution :

« Mais, encore une fois, le problème de la gauche c’est la faiblesse et le manque d’attractivité du PS. Ce n’est pas un problème de personnes mais une question structurelle. La marque est obsolète, il faut la refonder (…). Ce renouveau, cette réinitialisation du PS nécessite de dépasser le PS. »

Jean-Christophe Cambadélis croit-il qu’une Gauche, qu’il qualifie de « réformiste », peut naître d’un appel populiste à sauver une CGT antipolitique qui a mené un mouvement de protestation dans le mur ?

Cet appel au référendum est un suicide pour la Gauche politique. Il est une énième tentative de contourner les problèmes, les questions de politique, d’économie, de morale, de société, de valeurs. Il n’est aucunement possible d’échapper à la seule solution possible : constituer une Gauche consciente, organisée, structurée, établie de manière stricte.

Cela n’est pas possible avec une Gauche populiste, libérale culturellement, refusant l’organisation au nom de « mouvements », ne cherchant jamais à établir des structures locales menant un travail sur le long terme.

Le signe qu’on a ici, c’est que le Parti socialiste lui-même agonise – pas qu’il va contribuer à une structuration à Gauche. Sinon il ne se retrouverait pas là.

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Des élus locaux de la Gauche républicaine et socialiste appellent à soutenir la liste de la France insoumise aux élections européennes

La Gauche républicaine et socialiste a lancé un appel d’élus locaux à voter pour la liste de la France insoumise conduite par Manon Aubry aux élections européennes.

La Gauche républicaine et socialiste (GRS) est le parti fondé en début d’année par Marie-Noël Lienmann et Emmanuel Maurel, après avoir quitté le Parti socialiste. Dès le début, il a été expliqué que cette structure serait une force d’appui à Jean-Luc Mélenchon, afin d’attirer des personnes de la Gauche vers le populisme de la France insoumise.

> Lire également : Fondation du nouveau parti « Gauche républicaine et socialiste »

Il est donc logique qu’elle soutienne et participe à la liste de La France insoumise pour les prochaines élections. Un appel a donc été lancé et il est fait comme s’il s’agissait d’une dynamique avec des élus de gauche rejoignant l’initiative. Il est proposé de signer l’appel en précisant son nom et son mandat.

Dans les faits, les dix premiers signataires mis en avant sont tous déjà liés à GRS, ou directement membre de l’organisation. C’est donc un soutien à sa propre alliance qui est fait, mais présenté comme quelque-chose venant de l’extérieur.

Le contenu de ce court appel consiste en un keynésianisme classique, avec l’idée qu’il faudrait de la dette pour soutenir les secteurs d’État, ce qui serait forcément bon pour la population. Il n’y a pas une critique du capitalisme ni une perspective de Socialisme mais un rejet des logiques « austéritaire » et du « capitalisme financier ». C’est le discours typique de la « gauche » souverainiste et antilibérale.

« Européennes 2019 : Appel des élus locaux à voter pour la liste de la France Insoumise conduite par Manon Aubry.

Les traités européens qui se sont empilés depuis plus de 30 ans fonctionnent exclusivement selon une logique libérale et austéritaire. Cette orientation impacte lourdement nos collectivités et leurs habitants.

Le carcan des 3% de déficit a entraîné des baisses drastiques de dotations de l’Etat pour les collectivités (moins 10 milliards entre 2012 et 2017 !), réduisant considérablement leurs budgets au détriment des habitants, des investissements d’avenir et de l’entretien des équipements et infrastructures de proximité.

La « concurrence libre et non faussée » a affaibli les services publics et rompu l’égalité républicaine dans de nombreux territoires. Partout la compétition accroît les inégalités, particulièrement dans les banlieues et les territoires ruraux.

Le dumping fiscal et social a favorisé les délocalisations qui privent nos concitoyens de leurs emplois et contribuent à désindustrialiser et dévitaliser notre pays.

L’injonction des institutions européennes à la constitution des grandes régions et des métropoles a éloigné les habitants de leurs élus et affaibli leurs capacités à agir dans les territoires ruraux et périurbains.

Alors que nous aurions pu attendre des politiques fortes pour la transition écologique et un nouveau mode de développement, l’Union européenne maintient une politique agricole productiviste et chimique. Elle reste inféodée au capitalisme financier qui mène l’humanité à la catastrophe écologique et sociale.

Il est désormais clair que nous ne répondrons pas aux attentes de nos concitoyens sans rompre avec

les traités de l’Union Européenne.

Face aux lobbies, aux multinationales et à la technostructure euro-libérale, nous avons besoin d’eurodéputés de combat au Parlement européen, pour défendre l’intérêt général, la souveraineté populaire, le progrès social et la transition écologique.

C’est pourquoi nous, élus locaux, appelons à voter aux élections européennes du 26 mai 2019 pour une Europe enfin au service des peuples !

Les 10 premiers signataires

  • Marc Vuillemot, Maire de la Seyne-sur-Mer (83), Vice-Président de la métropole de Toulon, président de l’Association des maires Ville & Banlieue
  • Monique Bonnet, Maire-adjointe de Clermont-Ferrand (63)
  • Pascal Noury, Maire de Morangis (91)
  • Hadhoum Belaredj-Tunc, conseillère départementale de Reims-2 (51)
  • Bastien Faudot, Conseiller départemental du Territoire de Belfort (90)
  • Marie-Noëlle Lienemann, Sénatrice de Paris, Ancienne Ministre
  • Jean-Luc laurent, Ancien Député, Vice-président chargé de la culture de l’Etablissement Public Territorial Grand-Orly-Seine-Bièvre, Conseiller municipal du Kremlin Bicêtre (94)
  • Dominique Subra, Adjointe au Maire de Foix (09)
  • Philippe Bonnin, Maire de Chartres-de-Bretagne et Conseiller départemental (35)
  • Thierry Cotelle, Conseiller régional, conseiller municipal de Toulouse (31) »
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Fondation du nouveau parti « Gauche républicaine et socialiste »

La gauche du Parti socialiste qui a quitté celui-ci sans avoir rejoint Benoît Hamon a décidé de finalement passer sous la coupe de la France insoumise. Elle en sera une composante lors des prochaines élections européennes.

Ce week-end s’est tenu à Valence un congrès constitutif d’une nouvelle organisation à gauche, ayant pris comme dénomination « Gauche républicaine et socialiste ». Au sens strict, ce n’est pas quelque chose de nouveau, car il s’agit de l’organisation de Marie-Noëlle Lienemann et Emmanuel Maurel, « Aprés », qui change de nom, abandonnant sa tentative d’exister de manière autonome. Marie-Noëlle Lienemann a exprimé ses regrets de la manière suivante :

« J’en veux à la gauche française, nous avions une trame idéologique potentielle pour résister à l’ultra-liberalisme; il faut créer de nouvelles formes politiques. Nous sommes dans une phase de décomposition. »

Il est apparu en effet soit qu’il n’y avait pas d’espace à gauche du Parti socialiste alors qu’il y avait déjà Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, soit qu’il n’y avait pas les cadres pour développer une organisation aux contours bien délimités, selon comment on voit les choses. Le manque de temps ou de confiance en ses propres idées (ou moyens) a donc abouti à un changement radical d’orientation.

Marie-Noëlle Lienemann et Emmanuel Maurel, qui étaient depuis plusieurs mois alliés au Mouvement Républicain et Citoyen (MRC), ont fondé une nouvelle structure et rejoints Jean-Luc Mélenchon. La présence de l’ancien MRC dans la nouvelle organisation est un gage auprès de Jean-Luc Mélenchon, car c’est une structure « souverainiste » de gauche, fondé par Jean-Pierre Chevènement qui a toujours tenu une orientation qu’on peut qualifier comme « patriote » ou nationaliste de gauche.

De manière surprenante, ce positionnement souverainiste a été ouvertement assumé et exprimé par Emmanuel Maurel :

« La question de la souveraineté est essentielle. Souveraineté des peuples, reprise en main pour défendre les biens communs contre les intérêts privés. Cela passe par des ruptures radicales ! »

Il est, quoiqu’on pense de l’importance, de la validité de la question, toujours inquiétant de voir annoncer une « rupture radicale » au sujet d’une question nationale. La forme ici employée ne peut que choquer la Gauche. C’est cependant le prix à payer pour le passage dans le camp de la France insoumise.

Il ne s’agit par ailleurs pas d’une remarque dispersée, mais bien d’une approche générale ; en voici quelques exemples qui ont dits pendant le week-end de fondation :

« La politique de dumping, de casse sociale et la désindustrialisation en France et la politique « austéritaire » Bruxelloise sont les deux faces du même euro. »

« Le traité franco-allemand, c’est Merkel qui dit à Macron : « Donne-moi ta montre, je te donnerai l’heure. » »

Dans un même ordre d’idée, les gilets jaunes sont considérés comme quelque chose non seulement de très bien, mais même de nouveau. On l’a deviné, c’est le prétexte employé pour passer sur la ligne « populiste » de La France Insoumise. Gael Brustier a pour sa part considéré que « les gilets jaunes donnent une opportunité incroyable pour la gauche telle qu’elle n’en avait jamais eu depuis trois décennies » et Marion Beauvalet a expliqué que ce qui est intéressant c’est que c’est « un mouvement au-delà des clivages gauche/droite [qui] oppose le peuple et l’élite ».

> Lire également : Emmanuel Maurel et le mouvement ouvrier

On remarquera l’incohérence qu’il y a à parler de gauche d’un côté, de dépassement du clivage droite/gauche de l’autre, mais on devine que jeu de va et vient entre affirmation de la gauche et populisme va être incessant pour la Gauche républicaine et socialiste. Ce n’est qu’un début et on voit mal comment il va être continué à parler de Front populaire alors que La France insoumise a coupé les ponts avec l’histoire de la Gauche.

Emmanuel Maurel a pour sa part affirmé au sujet des gilets jaunes que :

« Il y a trop d’ambiguïté d’une partie de la gauche sur les gilets jaunes. Nous les soutenons ! »

Ce soutien est donc à ajouter à celui, tout récent, de la CGT, alors que pareillement l’ultra-gauche est désormais dithyrambique au sujet des gilets jaunes. Il y a là une véritable orientation nouvelle, résolument populiste ; on a d’ailleurs droit la semaine dernière à Marie-Noëlle Lienemann expliquant que l’émission de Cyrille Hanouna avait été quelque chose de positif au résultat conforme aux idées de gauche.

La base de la Gauche républicaine et socialiste est-elle d’accord avec tout cela ? Dans tous les cas elle va devoir s’y habituer, ou bien revenir dans le giron de la Gauche historique, qui reste à recomposer. Elle compte surtout sur son nombre, 2 538 personnes sont annoncées comme ayant participé au vote pour le choix du nom, pour pouvoir à un moment faire pencher la balance.

Le problème est que déjà que la rupture avec le Parti socialiste s’est déroulée de manière non démocratique, quoiqu’on pense du parti socialiste, aller rejoindre La France insoumise c’est franchement se lancer dans l’aventure.

On devine au fond qu’il est espéré que la formation de Jean-Luc Mélenchon n’est qu’une étape vers quelque chose de nouveau. Mais outre que c’est là du machiavélisme, que c’est là jouer avec le feu, comment espérer que la négation de la Gauche puisse aboutir à son renforcement ?

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L’appel de L’APRÈS d’Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann

Après avoir quitté le Parti Socialiste, Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann lancent un nouveau parti dénommé APRÈS, qui signifie Alternative pour un Programme Républicain, Écologiste & Socialiste. Ils ont publié un appel afin d’inviter à les rejoindre.

Appel de l'APRES

Le nom APRÈS et l’appel qui y est afférent montre cependant les grandes limites de leur démarche. Normalement, le socialisme est un terme général qui englobe tout le projet politico-culturel de la Gauche. Ainsi, l’écologie ne doit être qu’un aspect inhérent au programme, tout comme peut l’être la question républicaine si l’on souhaite raisonner en ces termes.

En mettant sur le même plan les notions de « Républicain », « Écologiste » avec celle de «  Socialiste », l’APRÈS fait une grande erreur. Elle dénature totalement le projet Socialiste pour en faire une sorte de synonyme de « politique sociale envers les classes populaires ».

Il n’y a d’ailleurs dans cet appel pas de véritable projet, mais une vague proposition qui se contente de dire « changer la vie » pour montrer la filiation à François Mitterrand en imaginant que cela suffise.

On l’aura compris, il ne s’agit pas d’une nouvelle organisation visant à changer le monde mais d’un rassemblement politique avec des vues électorales, et d’abord les prochaines Européennes. Cela était évident déjà vu la façon dont Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann ont quitté leur propre organisation le Parti Socialiste, en plein vote interne afin de la torpiller puisque leurs positions n’allaient pas être adoptées.

> Lire également : Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann torpillent le Parti Socialiste

Mais franchement, quel sens cela a-t-il de jouer les vierges effarouchées par la désillusion de François Hollande, tout en disant que « depuis 25 ans, la social-démocratie européenne a peu à peu cédé devant le Libéralisme » ?

Pourquoi se réveiller maintenant à l’automne 2018, si ce n’est parce que c’est suffisamment tôt mais pas trop tôt non plus pour faire une alliance électorale à Gauche pour les Européennes ? Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann sont tous deux déjà députés européens et risqueraient de perdre leur mandat avec la déroute prévisible au PS, ceci expliquant certainement cela.

> Lire également : Emmanuel Maurel et le mouvement ouvrier

Le contenu proposé n’est qu’un keynésianisme intéressé par les questions industrielles, mais ne relevant pas du mouvement ouvrier. C’est une organisation de Gauche de plus, appelant à l’unité certes, mais n’apportant rien de nouveau ni de vraiment concret qui justifierait la démarche autrement que sur le plan électoral.

Voici leur appel :

ap-res.fr/appeldelapres/

Appel de l’Alternative pour un Programme Républicain, Écologiste & Socialiste

Nous nous sommes engagés parce que nous voulions une société plus juste, une société plus libre, une société plus démocratique, parce que nous voulions agir pour améliorer la vie de nos concitoyens, au plus près d’eux évidemment, mais aussi plus largement porter des réformes qui mettent en œuvre un idéal révolutionnaire – Liberté, Égalité, Fraternité – pour changer la vie. Longtemps, il nous est apparu que le PS était le parti capable de transformer le réel dans ce sens. Nous constatons comme beaucoup d’autres avec tristesse et regret qu’il a cessé de l’être.

Depuis 25 ans, la social-démocratie européenne a peu à peu cédé devant le Libéralisme cessant de résister devant les multinationales et les intérêts privés des groupes financiers. Pendant quelques années, le socialisme français a semblé moins atteint par la dérive néolibérale initiée par Tony Blair. Las, le mandat de François Hollande a démontré qu’au pouvoir les dirigeants du PS avaient eux aussi abdiqué. On connaît les conséquences : des réussites ténues, mais une politique injuste socialement, inefficace économiquement, des écarts avec nos valeurs républicaines, une incompréhension puis un rejet par nos concitoyens, par le peuple de gauche. Nombre de dirigeants « socialistes » étaient prêts en 2017 à vendre leur âme pour un soutien du nouveau Président.

On aurait pu imaginer que le PS apprendrait de la double déroute présidentielle et législative : il n’en est rien… aucun bilan du quinquennat, aucune vision politique, l’inertie règne rendant incapable de parler au reste de la gauche et au mouvement social ou d’être entendus par les Français. La « Renaissance » promise aux militants ressemble à une glaciation.

Alors que la majorité de la social-démocratie européenne se montre au mieux ambigüe, au pire complaisante, envers le néo-libéralisme, les dirigeants nationaux du PS ont annoncé qu’ils se plieraient à ses choix pour son programme électoral et son candidat à la présidence de la Commission européenne. Ils refusent l’idée même de proposer à la gauche française de s’unir aux élections européennes, alors que la raison et l’urgence le commandent. Les mêmes logiques produiront les mêmes effets : compromissions avec les droites européennes et des promesses qui n’engagent donc que ceux qui y croient… la crédibilité s’efface devant la duplicité.

Nous, femmes et hommes de gauche, nous nous organisons pour que cela change.

Pour nous, la République, l’écologie et le socialisme sont une seule et même chose : la défense du bien commun.

Redonner force à la règle commune contre l’individualisme, protéger notre unique planète contre le productivisme, investir dans les moyens publics d’émancipation contre le libéralisme, tel est le programme. Comme toujours à gauche, il sera débattu et enrichi par tous ceux qui nous rejoindront autour de nos valeurs et de nos buts.

Il n’y a plus de temps à perdre dans la compromission désolée et la morne survie de chacun dans son coin. La résignation est une défaite, l’espoir est une première victoire.

Il est à nouveau temps de parler d’avenir.
Maintenant, c’est A.P.R.É.S !

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Emmanuel Maurel et le mouvement ouvrier

Emmanuel Maurel a quitté le Parti Socialiste pour fonder un nouveau parti. Fustigeant les erreurs de son camp, il fait souvent référence au mouvement ouvrier et aux classes populaires pour s’en revendiquer. Qu’en est-il vraiment ?

Emmanuel Maurel

Le mois dernier dans un entretien vidéo au Figaro, Emmanuel Maurel expliquait :

« je suis sur une position traditionnelle du mouvement ouvrier sur l’immigration »

Ces mots sont très importants car presque plus personne à Gauche ne se revendique du mouvement ouvrier. De la même manière, lors de la campagne pour la direction du Parti Socialiste, il avait expliqué que sa ligne était d’unifier la gauche et de :

« reconquérir le cœur des ouvriers, le cœur de la France qui se lève tôt et que l’on n’entend pas »

On peut bien-sûr penser que ce ne sont que des mots, et que de toutes manières il est bien étrange de parler de la classe ouvrière quand on a été au Parti Socialiste si longtemps, tellement ce parti est devenu celui de la bourgeoisie moderniste et libérale des centre-villes des grandes métropoles.

Mais cela n’est pas suffisant. Rien que dans le nord de la France, et particulièrement dans le département du Nord, il existe une filiation très forte entre cette organisation et ce qui reste du mouvement ouvrier.

Emmanuel Maurel est une figure intellectuelle de gauche typique. C’est quelqu’un de très cultivé, aimant la politique et le débat d’idée, qui veut être proche du peuple et répondre à ses aspirations. Seulement, il n’est pas quelqu’un reconnaissant le marxisme et pensant que la classe ouvrière puisse elle-même s’organiser pour conquérir le pouvoir.

S’il a été au Parti Socialiste, c’est parce qu’il ne considère pas les choses en termes de classes sociales et d’idéologies qui leur sont afférentes, mais en termes de politique simplement. La question serait celle des bons ou des mauvais choix politiques.

C’est pourquoi il a été capable la semaine dernière de quitter son parti en plein débat et échéance électorale interne, alors que cette façon de faire est insupportable si l’on considère au contraire que les principes sont ce qui doit primer.

> Lire également : Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann torpillent le Parti Socialiste

Son « mentor », dont il a écrit une biographie, est Jean Poperen. Ancien membre du Parti Communiste, exclu en 1959 après avoir eu d’importantes responsabilités internationales, ce dernier est devenu un figure socialiste en France, particulièrement en ce qui concerne la question de l’unité de la Gauche.

Tant que le Parti Socialiste était la force la plus importante à Gauche, il était logique pour Emmanuel Maurel d’en faire partie. Il considère par contre que le Parti Socialiste a échoué sur le plan politique avec François Hollande, alors qu’il était majoritaire quasiment partout en 2012.

Il quitte donc le Parti Socialiste en voulant le refonder sur de nouvelles bases. La présidence d’Emmanuel Macron incarne pour lui l’aboutissement des erreurs récentes de son camp :

« nous lui avons fait la courte échelle […] C’est notre créature et aujourd’hui, on s’en mord les doigts. »

Quand Emmanuel Maurel explique qu’il s’était « engagé pour défendre les intérêts des gens modestes, mais aussi des stratégies de rassemblement des forces populaires », alors qu’aujourd’hui « le PS ne correspond plus à l’idée [qu’il se] fait du socialisme », ce n’est pas une critique idéologique. Simplement le regret d’une mauvaise orientation politique.

De ce point de vue, on ne peut pas considérer qu’il fasse partie du mouvement ouvrier. Sa critique n’est pas celle du mode de production, mais des « capitalistes qui se défient des règles ».

Il est par contre un homme politique de gauche ayant compris l’importance de la question ouvrière et ne cédant pas aux positions postmodernes et postindustrielles. C’est pour cela qu’il considère que « la question économique et sociale reste centrale » par rapport aux questions identitaires et républicaines.

C’est pour cela également qu’il défend une ligne intermédiaire par rapport à l’Union Européenne, n’appelant pas à en sortir mais par contre à « désobéir » aux directives qu’il rejette (sur l’austérité budgétaire, les travailleurs détachés, etc.)

C’est là encore un choix très étrange, très « politique », ne correspondant pas aux choix nets et tranchés, idéologiques, qui sont traditionnellement ceux du mouvement ouvrier.

Emmanuel Maurel ne fait pas parti du mouvement ouvrier car le « fil rouge » du parti qu’il souhaite créer sera « la république sociale, une maison de la Gauche républicaine », et que cette approche « républicaine » n’est pas celle de la classe ouvrière.

Son crédo n’est pas celui de la lutte de classe mais la bataille électorale. Il a déjà souvent à la bouche le mot « 2022 » et tout le monde aura compris qu’il se construit sur mesure un tremplin pour les élections présidentielles de 2022, misant tout autant sur l’éparpillement des forces de la Gauche que sur les dynamiques politiques existantes ici et là.

S’il peut être une figure sympathique et ayant une démarche positive sur un certain nombre de sujets, ses alliances avec le Mouvement Républicain et Citoyen à la ligne sociale-gaulliste, ou bien à la France Insoumise et le populisme social-chauvin de Jean-Luc Mélenchon, ne s’inscrivent pas dans la tradition et l’intérêt du mouvement ouvrier.

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Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann torpillent le Parti Socialiste

Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann, dirigeants de l’aile gauche du Parti Socialiste, annoncent leur départ et affirment avoir plusieurs centaines de membres, d’élus et de cadres prêts à les suivre. Il agissent de manière non-démocratique, en torpillant leur propre organisation de l’intérieur pour des raisons électorales.

Ce week-end, le Parti Socialiste tenait son conseil national consacré à la question des élections européennes. Alors qu’il présentait lui-même un texte, le député européen Emmanuel Maurel a annoncé sa démission la veille du vote. Le lendemain, la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann a fait de même.

Ils présenteront la semaine prochaine une nouvelle organisation avec la liste de ceux qui les suivent, et s’allieront à la France Insoumise.

En agissant ainsi, de manière non démocratique puisqu’il y a une participation à un vote qui est littéralement saccagé, l’objectif d’Emmanuel Maurel et de Marie-Noëlle Lienemann était bien entendu d’affaiblir jusqu’au bout le Parti Socialiste, qui comptait annoncer ce week-end son positionnement aux Européennes, alors que par ailleurs Ségolène Royal a été sondée pour prendre la tête de la liste.

Au-delà du fait qu’on apprécie ou non le Parti Socialiste, la ligne du Parti Socialiste, la démarche d’Emmanuel Maurel et de Marie-Noëlle Lienemann est discutable. On ne quitte pas une organisation alors qu’on participe à un vote : si l’on considère que ce n’est pas acceptable, on sort avant, mais on ne s’engage pas pour se dédire juste avant, pendant ou après.

L’autre problème touche le sens de la démarche elle-même. Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann ne cachent nullement qu’ils comptent fonder un nouveau parti qui utiliserait le terme de socialiste, afin de s’allier directement à La France Insoumise pour les Européennes, ainsi qu’avec le Mouvement républicain et citoyen.

Cela signifie que ce départ prend comme axe les élections et non pas les valeurs. Au lieu d’un débat sur le fond – que Benoît Hamon a essayé de mener avec Génération-s, même si c’est sans succès – on a une question électorale qui se profile.

C’est là revenir au défaut historique des socialistes français. Marie-Noëlle Lienemann dit qu’il faut en revenir au « socialisme de Jaurès » : c’est bien vu, Jean Jaurès n’a jamais raisonné qu’en termes électoraux, comme d’ailleurs tout le Parti Socialiste SFIO du début du XXe siècle. Le socialistes ont toujours appartenu à des petits appareils très minoritaires, uniquement actifs lors des élections. Faut-il vraiment en revenir là ou affirmer la nécessité du contenu ?

Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann contournent le problème au nom de l’actualité. Tous deux considèrent que le Parti Socialiste, pour prendre l’exemple assez sordide de Marie-Noëlle Lienemann pour se justifier, est un « canard sans tête », et que de toutes façons La France Insoumise est incontournable. Il n’y aurait donc pas le choix.

Et il y aurait même la possibilité d’un « Front populaire », l’expression étant régulièrement reprise par eux pour s’expliquer.

Rappelons pourtant que le Front populaire est né de la combativité ouvrière en 1934 pour contrer le fascisme. C’était une initiative d’urgence, mettant en perspective une menace terrible et sanglante, qui avait triomphé en Italie avec Mussolini en 1922 et en Allemagne avec Hitler en 1933. Et il y avait aussi l’idée de faire avancer la cause du socialisme, qu’assumaient alors tant le Parti Communiste que la SFIO. Or, il n’y a aujourd’hui ni menace directe de coup d’État fasciste en France, ni des organisations significatives voulant le socialisme. Ni le PCF, ni La France Insoumise, ni la gauche du Parti Socialiste qui vient de sortir ne veulent le socialisme.

Emmanuel Maurel a raison quand, dans une interview au Monde où il explique son départ, il résume le dénominateur commun de la gauche électorale actuelle de la manière suivante :

« Notre fil rouge, c’est la République sociale. Promouvoir la laïcité, défendre les services publics, l’égalité des territoires, un modèle social de qualité, faire vivre la souveraineté populaire… Privilégier le commun sur le particulier. On doit faire la synthèse avec les luttes nouvelles, à commencer par l’écologie. »

Mais peut-il exister trois forces à gauche proposant cette même vision édulcorée du keynésianisme de François Mitterrand ?

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Discours d’Olivier Faure au séminaire d’été du Parti socialiste

Hier se concluait trois jours de séminaire pour la Fédération nationale des élus socialistes et républicains (FNESR), c’est-à-dire 300 élus du Parti socialiste. En voici le discours de clôture, prononcé par le député de Seine-et-Marne Olivier Faure, premier secrétaire.

On notera qu’Emmanuel Maurel n’était alors plus présent à La Rochelle : il s’est éclipsé pour aller à Marseille, à l’université d’été de la France insoumise. Il fondera d’ailleurs le 7 septembre un « club » de gauche, en présence de Jean-Luc Mélenchon.

Cher François que nous sommes si heureux de retrouver après l’épreuve de la maladie,

Chers amis chers camarades,

Il y a un an nous étions dans cette salle quelques semaines après une défaite historique. Nous étions là par amitié, par habitude, sans doute aussi pour nous rassurer en démontrant par notre présence à La Rochelle qu’il est des rites immuables.

Nous étions tellement sonnés que nous en avions même oublié de nous diviser… un an plus tard, à la lecture des journaux, je nous retrouve, vivants !

En 2017 nous avons été fracturés. Notre existence même était devenue incertaine. Aujourd’hui nous avons redressé la tête et nous sommes toujours là. Grâce à vous, les élus, nous sommes une force d’alternative, vous montrez chaque jour dans vos territoires qu’un autre chemin est possible, que nous n’avons pas perdu notre force créative.

En 2017, la recomposition a surtout créé la confusion. Après avoir dû voter pour un autre afin de faire barrage au Front National, notre identité était devenue floue. Depuis notre congrès, nous avons engagé notre renaissance. Parce que nous avons été sévèrement battus nous devons changer, produire une nouvelle synthèse, construire un nouveau projet, et d’abord changer nos comportements, prendre conscience que nous réussirons ou que nous disparaîtrons ensemble.

En 2017, certains s’interrogeaient sur notre positionnement, étions-nous dans l’opposition, dans l’opposition constructive, dans le dialogue exigeant, que sais-je encore ? Aujourd’hui, il est devenu clair pour les français que nous sommes dans l’opposition, dans une opposition résolue et déterminée, parce que le pouvoir s’est dévoilé dans ses actes et que son visage n’est pas celui de la gauche, pas celui du socialisme, pas celui de l’humanisme.

Il n’a rien de commun avec nos valeurs, nos idées, nos combats. En 2017, le nouveau Président devait mener une « révolution » et faire entrer la France dans un « nouveau monde ». Ce projet répondait à une demande et il a levé une espérance dans le pays. Mais cette espérance a été trahie. Le fait politique majeur de cette année c’est la trahison par le Président élu, des termes du contrat démocratique noué lors de la présidentielle. Elu pour faire barrage au populisme, il devait être un rempart. Il est devenu une passerelle : antiparlementarisme, défiance vis-à-vis des corps intermédiaires, pouvoir personnel, recul sur le droit d’asile…

Le président a trahi le candidat en abandonnant toute dimension progressiste. Un an après, ce qui devait être un OPNI a été clairement identifié. Le « nouveau monde » se révèle être un mélange de conformisme technocratique et de libéralisme a-démocratique. Rien ne l’y a contraint, ni crise économique, ni circonstances exceptionnelles, c’est son choix. Cette trahison nous donne une responsabilité et une légitimité. Le drapeau du progrès, le drapeau de la République sociale ne nous a pas été repris sur le champ de bataille.

Le rôle historique nous revient de nouveau.

Le progressisme est orphelin, les français ont besoin du retour d’une gauche qui agit, les français ont besoin de notre renaissance. Quel est notre message en cette rentrée :

– Avec les affaires Benalla et Kohler, le dernier masque est tombé, celui de l’exemplarité. Emmanuel Macron n’est pas seulement le Président des riches, il est aussi le Président d’un clan, prêt y compris à faire mentir l’Etat. Les Français l’ont élu en espérant que sa frénésie de pouvoir serait mise au service du pays, pas pour que son autorité serve son clan et son camp. Cette trahison du contrat passé avec les Français nous oblige.

– Un an après notre terrible défaite nous sommes là, notre renaissance est engagée, nous avons repris notre rang au sein des grandes forces d’opposition, et nous allons marteler nos propres propositions comme autant d’alternatives. Oui la gauche et les socialistes sont bien de retour !

Si nous avons retrouvé ce rôle c’est grâce à l’action conjointe des élus et du parti.

Ensemble nous avons organisé la résistance face aux réformes libérales. Votre action dans les territoires a été essentielle pour défendre les solidarités et soutenir le monde associatif. Ensemble nous avons porté haut les valeurs de la France, pour exiger par exemple l’accueil des réfugiés de l’Aquarius.

Et je salue avec vous le courage des positions prises par Martine Aubry à Lille, Carole Delga en Occitanie, Anne Hidalgo à Paris, Johanna Rolland à Nantes et tant d’autres, l’énumération serait trop longue.

Ensemble nous avons rendu toute sa noblesse à l’action du Parlement qui s’est dressé face à l’exécutif, au moment même où le président voulait l’affaiblir, pour réclamer la vérité dans l’affaire Benalla. Et les socialistes ont joué un rôle majeur dans ce combat et je voudrais vous demander de saluer nos députés qui autour de Valérie Rabault ont porté une motion de censure de gauche, et nos sénateurs qui autour de Patrick Kanner et de Jean-Pierre Sueur ont contribué à faire du Sénat la voix de l’exigence démocratique. Merci à tous pour ces combats. Nous n’en avons pas fini !

Certains continuent d’appeler à une inflexion sociale. Mais même l’écho ne leur répond plus. Depuis le discours solennel de Versailles chacun sait qu’il n’y aura aucun rééquilibrage. Ni demain. Ni jamais.

Le discours présidentiel n’est complexe que parce qu’il emprunte ses mots à la gauche – « Société de l’émancipation », « état providence du 21ème siècle » – pour mener une politique de droite !

Pour Emmanuel Macron, l’égalité se résume à l’égalité d’accès au marché. Chaque individu doit pouvoir y contribuer par ses talents. Ensuite c’est le marché qui sélectionne et récompense les mérites de chacun. Les inégalités de revenus ne sont plus un sujet. Seules comptent les « inégalités de destin ». Chacun doit avoir sa chance par la formation, mais ensuite chacun doit accepter le marché pour seul juge.

Le Macronisme est une société à responsabilité où l’Etat limite son intervention aux premiers âges de la vie. Pour Emmanuel Macron, la lutte contre les inégalités ne passe plus par la redistribution des richesses produites. Chacun est « responsable » de son destin, donc de son chômage, de sa pauvreté, de son statut, dès lors que l’Etat a garanti des conditions de départ équitables.

C’est la justification de la réforme de l’assurance chômage qui mettra chaque chômeur devant sa « responsabilité ». Le rôle de l’Etat se limite à fluidifier le marché et à assurer un filet minimal de sécurité pour éviter tout risque d’explosion sociale.

Le modèle Français n’est pas le sien. Il voit dans les décennies passées une suite d’échecs. La solidarité, la redistribution, la lutte contre les inégalités, ne sont pas son affaire. Pour Emmanuel Macron, la vision c’est le marché jusqu’au bout.

Pour nous depuis Jaurès, c’est « la République jusqu’au bout ».

Deux visions du monde. Deux regards sur l’Humanité. Pour nous, le Capital c’est l’Humain. Alors oui chers amis, chers camarades, cette rentrée va être celle d’une force d’opposition, déterminée, offensive. Et les combats vont être nombreux.

Budgétaire évidemment. Le président nous dit : « Pour partager le gâteau, il faut qu’il y ait un gâteau ». Mais sa politique fiscale a coupé les moteurs de la croissance. La consommation des ménages a chuté dès lors que le choix a été fait de leur faire payer à eux, les 45 à 50 milliards de cadeaux fiscaux faits à quelques-uns ! Et comment chacun pourrait-il disposer de sa juste part quand les outils de la répartition sont abandonnés? Les services publics, la fiscalité et même les politiques sociales !

Tout l’argumentaire présidentiel reposait sur un maître mot : l’efficacité. Mais elle est où l’efficacité quand la croissance est trois fois inférieure à celle que nous connaissions à la fin du quinquennat précédent ? Que la création nette d’emplois dans le secteur privé s’est réduite de moitié ? Que l’investissement des entreprises a lui-même baissé de 50% ?

Elle est où l’efficacité quand les dividendes atteignent des niveaux inédits mais qu’on renonce à les taxer au même niveau que le travail ? et que c’est sur les politiques sociales que l’on s’apprête à rogner parce qu’elles coûteraient « un pognon de dingue » !

J’ai eu honte qu’un président Français puisse dire à Versailles : « Quelle gloire peut-on tirer de politiques sociales qui ont condamné à la pauvreté un enfant sur cinq? »

Le macronisme est un syllogisme : les politiques sociales n’ont pas supprimé la pauvreté et bien supprimons les politiques sociales ! Et c’est dans le creux de l’été qu’a été adressée une directive sur l’organisation territoriale des services publics.

Et que dit-elle? Que l’efficacité, c’est une prime d’intéressement pour les préfets qui réduiront les services publics ! L’efficacité c’est – vous ne rêvez pas – de proposer aux serviteurs de l’Etat une prime pour affaiblir l’Etat ! L’efficacité c’est au contraire d’utiliser les marges de manœuvre pour renforcer nos services publics, donner les moyens aux médecins, aux infirmières, aux aides soignantes d’exercer leur métier dans les hôpitaux et les EHPAD…

L’efficacité c’est de lutter contre le pire des gâchis, le gaspillage humain ! L’efficacité c’est d’accompagner les familles qui ne s’en sortent plus, l’efficacité c’est de mettre les moyens pour que l’enseignement supérieur ne soit plus une loterie mais un tremplin pour tous nos étudiants, l’efficacité c’est d’aider les locataires à se loger plutôt que de raboter les APL, l’efficacité c’est de maintenir les emplois aidés dans les associations qui assurent le lien social et qui remettent le pied à l’étrier aux publics les plus éloignés de l’emploi…

Nous proposerons à nouveau à l’automne, comme nous l’avions fait dès 2017 avec Valérie Rabault, un contre-budget qui reviendra sur les cadeaux superflus aux super-riches pour au contraire ouvrir une nouvelle étape dans la lutte contre les inégalités et notamment les inégalités entre territoires. C’est aussi à la retraite que le gouvernement s’apprête à toucher. Le pire est à craindre. Dans une série de déclarations contradictoires, les pensions de réversion ont été supprimées, puis rétablies pour les seules femmes n’ayant pas travaillé, et le président lui-même s’est engagé à ne pas toucher aux pensions existantes mais sans garantie pour l’avenir…

Nous défendrons un système solidaire, par répartition, nous refuserons le basculement vers toute logique assurantielle. Nous défendrons la prise en considération de la pénibilité, les espérances de vie réduites. Nous refuserons toute logique qui conduirait à individualiser le rapport de chacun à sa retraite avec la volonté de casser toute possibilité de revendication collective. Le combat social et le combat économique vont de pair. Face à la loi PACTE, nous proposerons de nouvelles règles de gouvernance des entreprises.

Dans les conseils d’administration le travail doit être reconnu à parité avec le capital. La stratégie des entreprises ne peut plus dépendre de la seule volonté d’actionnaires qui sont le plus souvent totalement étrangers à la vie des sociétés et qui cherchent simplement une rentabilité.

Nous voulons la codétermination pour que soit respectée une vision qui replace le travail, les travailleurs au cœur de la décision. Notre combat sera aussi environnemental. Tout nous alerte et la France devrait donner la priorité à l’économie circulaire, décarbonée, adresser des signes clairs au marché en mettant Ie paquet sur les énergies renouvelables, faire le choix du ferroviaire, respecter sa parole sur le réchauffement climatique, lier enjeux environnementaux et enjeux sanitaires.

C’est une vraie révolution des modes de production qu’il faut atteindre. Impliquant une transition vers l’agro écologie. Garantissant une alimentation de qualité, dans le respect de la planète et un niveau de vie digne à nos agriculteurs qui luttent contre la concurrence à bas coût. Au lieu de quoi : Le gouvernement se félicite d’une condamnation de Monsanto mais renonce à ses propres engagements sur le glyphosate et rejette notre proposition d’indemniser ses victimes?

Le gouvernement entend faire une planète «great again » mais autorise Total à importer 300 000 tonnes par an d’huile de palme. Le gouvernement nous parle de développement durable mais repousse à plus tard le rééquilibrage du mix énergétique. Le gouvernement tire des larmes de crocodile le « jour du dépassement » parce que la planète a déjà consommé ses ressources de l’année, mais met en œuvre par anticipation le traité de libre-échange CETA…

C’est ce même gouvernement qui vient de refuser notre proposition de placer au rang de principe constitutionnel la défense des biens communs face aux multinationales ! Le combat sera aussi institutionnel. Je préfère dire démocratique. Nos institutions doivent évoluer. Mais pas comme le pouvoir actuel nous le suggère en concentrant davantage de prérogatives dans les mains d’un seul et en affaiblissant le Parlement.

Avec Emmanuel Macron, la démocratie se cantonne à la désignation des gouvernants. Les syndicats, les associations, les ONG, les élus locaux et nationaux, les citoyens, tous ceux qui peuvent apparaître comme une force alternative, un contre-pouvoir, sont tenus en lisière. Ce n’est pas notre conception de la République. La République ce n’est pas l’Empire. La souveraineté populaire ce n’est pas le règne d’un seul.

Nous croyons à la confrontation, au dialogue, à la participation. Nous voulons faire de chaque Français, non pas un sujet, pas davantage un simple consommateur, mais un citoyen. L’objectif ce n’est pas l’Olympe pour quelques-uns mais l’agora où chacun prend part à la définition des choix collectifs. Obliger annuellement le gouvernement à solliciter la confiance du Parlement sur son programme, ouvrir un droit d’amendement citoyen, limiter les outils du parlementarisme rationalisé, définir les principes de rangs constitutionnels qui nous permettent de protéger les biens communs, il y a là de quoi faire avancer la démocratie !

Le combat portera également sur les politiques migratoires. Combien faudra-t-il encore d’Aquarius pour que cessent ces trocs ponctuels ? Le temps est venu pour que la France tienne un discours de vérité sur ces mouvements de population qui ne visent pas principalement l’Europe. Nous sommes très loin de toute submersion. Mais nous devons prendre notre part. C’est-à-dire remettre à plat les accords de Dublin qui font peser principalement sur quelques pays l’accueil des réfugiés. Ouvrir une liste de ports et éviter ces images désastreuses de pays qui se renvoient les navires. Décider ensemble d’une répartition équitable entre Etats membres.

Bien sûr, nous devons établir une distinction entre réfugiés relevant du droit d’asile et migrants économiques, mais cette distinction ne peut tenir qu’à la condition de renforcer l’aide au développement et de mener une lutte efficace contre le réchauffement climatique. C’est cette approche globale qui manque cruellement et qui fait le jeu de ceux qui utilisent le désordre actuel pour proposer un ordre qui contredit nos valeurs et nos principes.

Puisque le gouvernement semble incapable de s’emparer de ces enjeux dans la fidélité aux valeurs de la République c’est à nous d’agir, à nous la gauche, à vous, les élus de la République française. J’ai déjà eu l’occasion au début de mon intervention de saluer les actions emblématiques de grandes métropoles, je connais aussi les solidarités du quotidien qui se manifestent dans tant de villes et de communes. Puisqu’il revient aux collectivités, et d’abord aux villes, d’assumer des responsabilités que l’Etat ne prend pas, faisons-le tous ensemble, solidaires, avec les autres élus de gauche.

Je propose aujourd’hui qu’à l’initiative du Parti Socialiste et de la FNESER, nous proposions à tous les élus de gauche, et plus largement à tous les élus humanistes et progressistes, un engagement commun pour l’accueil et l’accompagnement des réfugiés. Il permettra de répartir l’effort d’accueil et d’organiser à l’initiative des territoires, la solidarité nationale, que l’Etat a abdiqué.

Notre agenda politique ne se limite pas à cette rentrée politique en France. Notre agenda il a été fixé par le congrès du Parti Socialiste : engager et accélérer la renaissance, lancer et conduire nos chantiers pour demain disposer d’un nouveau projet, transformer notre parti en lui donnant de nouveaux statuts et une nouvelle vie collective, ouvrir les portes et les fenêtres, redevenir le parti de l’espérance, le parti face à la montée des populismes et des nouvelles inégalités, le parti d’un nouveau projet humaniste et de progrès partagé.

Ce chemin de la renaissance a largement rassemblé les militants et les élus lors de notre congrès. De nouvelles équipes se sont constituées, de nouveaux visages sont apparus. De nouvelles actions sont engagées, notre plate-forme « la ruche socialiste » a été ouverte. Cette démarche de renaissance est ouverte à tous, je dialogue avec les responsables des autres sensibilités et mon rôle est de nous faire, de vous faire, tous travailler ensemble.

Ce n’est pas toujours le plus facile, je suis patient, parfois trop, on me le reproche, mais je sais où je vais. Avec la nouvelle direction nous avons un mandat pour trois ans, et notre programme d’action a été adopté par le Conseil national il y a 3 mois.

Nous avons à l’issue de ces trois ans, trois objectifs clairs : retrouver une crédibilité collective, reconstruire un projet d’alternative pour le pays, redevenir le principal parti de gauche à l’issue du cycle électoral des élections territoriales. Avec cette équipe, avec vous, je suis sur ce chemin, notre chemin. Mon agenda ne sera ni celui des médias ni celui des grognons, ce sera l’agenda fixé par les militants du Parti Socialiste.

J’aurai l’occasion de revenir sur l’ensemble de ces chantiers de la renaissance lors de l’inauguration de notre nouveau siège, à Ivry. Ce rendez-vous sera une fête, une étape de la renaissance, et un moment fort de travail et de réflexion collective avec une université des militants qui se tiendra tout au long des week-ends qui suivront notre installation.

Le cycle d’Epinay est terminé, l’époque Solférino, dont nous sommes fiers, avec ses grands moments est derrière nous. Dans ce nouveau lieu nous allons inventer ensemble un nouveau parti socialiste, nous allons engager une nouvelle histoire collective. L’agenda de la renaissance, ce sera aussi mener à bien notre travail sur le bilan de nos années de pouvoir. J’ai reçu mandat des militants pour mener ce travail et il sera publié en novembre conjointement au travail de la fondation Jean Jaurès.

Ce bilan est un bilan collectif, c’est le bilan de nos années de pouvoir, il plonge ses racines dans une histoire plus longue et s’inscrit dans le contexte de crise du socialisme et de la sociale-démocratie en Europe. Et après une élection où aucun candidat de gauche ne figurait au second tour de l’élection présidentielle.

Sans bilan sincère qui croira que nous avons compris les raisons de notre défaite ? Sans bilan sincère il n’est pas de renaissance possible. François Hollande a – légitimement – sa lecture des cinq années écoulées. C’est sa contribution à l’inventaire. Je n’en partage pas tous les termes. Je crois nécessaire la réhabilitation de notre bilan, de rappeler le contexte national, européen, international, d’en finir avec une certaine forme d’anachronisme, mais je crois aussi nécessaire la reconnaissance de nos erreurs et de nos manques.

Quoi que l’on puisse penser de la campagne du candidat désigné par nos primaires, le séisme a atteint une telle magnitude que rien ne serait pire que de considérer qu’il s’agissait d’un simple accident de parcours. Dans l’interprétation de notre défaite, il y a matière à un débat posé, sans caricatures et sans œillères.

Si nous savons le conduire sans postures, il nous vaudra l’estime de tous. Évitons nous les faux débats. François Hollande est à la fois celui qui nous a conduit à la victoire en 2012, et un acteur de notre présent ; Il joue un rôle important dans le dévoilement de l’imposture macroniste, il contribue au réveil du peuple de gauche, et cette contribution est précieuse.

Il a choisi de redevenir un militant du Parti socialiste. Le compter aujourd’hui dans nos rangs doit être pour nous tous une fierté. Mais le plus sage est de ne pas chercher à l’instrumentaliser pour exister. Je le sais trop averti et trop fin, pour ne rien exclure mais aussi pour ne rien préjuger. Et mon devoir comme chef de parti, notre devoir comme militants socialistes, c’est de nous poser la question de notre renaissance indépendamment de celle ou celui qui nous représentera le moment venu.

Dans cet agenda de la renaissance figurent aussi les élections européennes. Mi-septembre, sur la base du travail conduit par Christine Revault d’Alonnes, Emmanuel Maurel, Clotilde Walter et Boris Vallaud, le bureau national arrêtera le texte qui sera ensuite débattu dans nos fédérations et soumis au vote des militants et des sympathisants sur notre plate-forme. Le 13 octobre nous aurons notre projet. Le 7 et le 8 décembre le PSE adoptera notre plate-forme européenne.

Et au cours de cette période nous choisirons une tête de liste et une liste. Avant la fin du mois de septembre le bureau national en proposera les modalités d’élaboration au Conseil National qui se tiendra le 13 octobre. Les élections européennes auront lieu le 26 mai 2019 dans 9 mois. Les français se moquent aujourd’hui se savoir qui seront les têtes de listes des grandes formations politiques et la majorité d’entre elles n’en ont d’ailleurs pas.

Par contre ils veulent savoir comment l’Europe peut servir à la construction de l’avenir dans un monde menaçant, marqué par de profonds bouleversements, par la toute-puissance des nouveaux monopoles du numérique et par la brutalité des effets du changement climatique. Et c’est d’abord cela qui doit nous intéresser.

Cette étape sera difficile. Emmanuel Macron va chercher à résumer cette échéance à un débat entre « pro » et « anti » européens. Soit très exactement ce qu’attendent les nationalistes, les populistes, trop heureux de se poser comme seule alternative à la politique libérale de l’Union.

Si la construction européenne est une pensée unique alors la voie du chaos devient une option. Le choix que nous devons ouvrir à nos concitoyens, ce n’est pas pour ou contre l’Union européenne, mais la possibilité de construire l’Europe autrement. Souhaitons-nous une Europe qui dérégule nos sociétés ou qui en renforce les protections ? Qui protège nos droits, ou qui en réduise la portée ?

Nous, nous voulons une Europe qui défend ses valeurs et aussi ses intérêts dans le monde de Trump, de Poutine, d’Erdogan, où le rapport de force prévaut sur le multilatéralisme, où le réveil des empires, des nationalismes, des césarismes, ne peut se faire qu’au prix de l’endormissement des démocraties .

Etouffer ce débat, c’est nourrir la défiance envers l’Europe et dérouler un tapis rouge à Salvini, Le Pen et leurs amis. Face aux populistes, face à la droite libérale, l’Europe a besoin de l’affirmation d’une gauche socialiste et sociale-démocrate, écologiste et progressiste. Il ne sera pas possible de la réunir au sein d’une seule liste, le mode de scrutin et la situation politique le rendent illusoire, on peut le regretter, mais cette réalité s’impose.

Pour autant la gauche européenne, et donc la gauche française, doit montrer qu’elle peut se donner des combats communs si elle veut voir se lever une espérance de changement. Ce que nous avons fait en juillet sur la question démocratique, nous devons pouvoir le reproduire sur des sujets d’intérêt général. J’ai il y a quelques minutes évoqué l’initiative que nous devons prendre sur l’accueil des réfugiés.

Je veux donner deux autres exemples :

Sur le glyphosate, nous avons été les premiers à demander une commission d’enquête au Parlement européen et c’est aujourd’hui notre camarade Eric Andrieu dont je salue la persévérance et l’obstination, qui la préside aujourd’hui. Nous pourrions chercher à en tirer gloire pour nous-mêmes. Ce n’est pas notre état d’esprit. Sur un sujet comme celui-là qui engage la santé de nos concitoyens, je propose que nous unissions nos voix et nos forces pour obtenir du gouvernement qu’il suspende l’autorisation des produits à base de glyphosate afin de protéger les femmes enceinte, les nourrissons, les 68 millions de consommateurs français.

Je suggère un second combat commun, faire de l’égalité entre femmes et hommes en Europe un combat emblématique de toute la gauche. Je lance aujourd’hui un appel aux forces politiques et syndicales progressistes pour avancer dans cette bataille essentielle. Commençons par les avancées sociales de la directive « work life balance » auxquelles s’oppose Emmanuel Macron. Cette directive garantit pour l’ensemble des européens, des droits nouveaux sur le congé de paternité, le congé parental et le congé des aidants.

Continuons par un droit à l’IVG universel en Europe déjà voté par le Parlement européen mais bloqué par le Conseil, ce combat porté par le mouvement féministe et mis en avant récemment par Julien Dray. Voilà le visage de l’Europe à laquelle nous croyons. Celle qui harmonise de nouveaux droits, qui favorise l’Egalité entre les femmes et les hommes et permet de préserver la vie privée. Je proposerai dans les prochains jours une initiative ouverte à l’ensemble de ces forces de gauche afin de mener campagne et obtenir que le Gouvernement d’Edouard Philippe revienne sur sa position.

L’Europe sociale n’est pas un mythe mais un combat à mener. Je ne peux achever mon propos sans évoquer les élections municipales, et plus largement la préparation des élections locales de 2020 et 2021. Je l’ai souvent dit il y a un Parti socialiste malade, rue de Solférino et un autre qui continue d’aligner les succès dans les élections partielles.

Et pas seulement en Haute Garonne ! Ce parti c’est celui des territoires. Ceux où l’innovation continue d’être la règle. Et je salue le travail des 14 départements qui sous la direction de Jean-Luc Gleize président du département de la Gironde, expérimente le revenu de base.

Connaître le réel, le comprendre, chercher à l’améliorer, elle est là notre marque de fabrique. Et c’est pour cela que l’échéance probatoire de notre renaissance sera d’abord celle des municipales. Notre message doit être clair, il s’agit de lancer par les territoires un mouvement de renaissance de la gauche, il s’agit de faire de chaque territoire un laboratoire de l’alternative, il s’agit d’inventer de nouvelles solidarités, de nouveaux services publics, d’accélérer la transition écologique, de donner un nouvel élan à l’émancipation par la culture et l’éducation.

Oui il s’agit d’inventer l’avenir dans les territoires, de s’appuyer sur cette réserve inépuisable d’engagement citoyen et de créativité, de nourrir notre renaissance par notre action locale. Une renaissance dans l’action, une renaissance par la preuve. Qu’est-ce qui est le plus crédible, les déclarations d’intention ou de dire que Dijon est une ville zéro pesticides depuis un mandat ? Il ne s’agira pas seulement de faire gagner le Parti Socialiste, il s’agira de faire gagner la gauche, une gauche citoyenne, une coalition des progressistes.

Parce que nous sommes la première force locale à gauche, il nous revient d’engager ce mouvement et de faire des territoires aussi les creusets d’une renaissance citoyenne. Ce rendez-vous des élections municipales de 2020 est capital. C’est pourquoi il doit se préparer dès maintenant. Nous devrons prendre en compte chaque réalité locale, notamment pour les calendriers de désignations, et respecter l’autonomie de nos premiers secrétaires fédéraux et élus qui connaissent leur terrain.

Mais nous devons aussi construire une démarche collective, construire une cohérence politique, partager des lignes forces qui donnent corps à la construction d’une alternative dans nos villes. Je vous propose donc d’élaborer ensemble une charte commune à nos candidats et à ceux qui solliciteront notre soutien. Le parti jouera son rôle, Sarah Proust est notre secrétaire nationale à la reconquête des territoires épaulée par Pierre Jouvet et Sébastien Vincini qui animent le réseau des fédérations.

Mais c’est d’abord à vous, les élus, de vous impliquer pour construire cette charte. J’ai donc demandé à André Laignel, 1er vice-président de l’AMF, et à Sarah Proust de prendre tous les contacts, en lien étroit avec François Rebsamen, pour constituer le collectif d’élus qui pilotera l’élaboration de cette charte. Le parti dégagera des moyens et offrira un véritable service d’appuis aux candidat-e-s en partenariat avec les fédérations.

Et dans un an, à La Rochelle, nous aurons à nouveau une université de tous les militants. Et c’est ici que nous lancerons notre campagne des municipales ! Chers camarades, En politique rien n’est jamais définitif. Il n’y a pas de victoires définitives. C’est ce que les sociaux démocrates avaient fini par oublier. Nous étions persuadés que nos concitoyens n’accepteraient jamais de revenir sur les droits acquis. Que la marche vers le progrès humain était irréversible sur notre continent.

Nous avions pensé que le débat se limiterait à la nécessaire contagion de notre modèle audelà de nos frontières. Et nous n’avons pas vu venir d’autres fractures. Nous n’avons pas vu que nos lignes s’étiraient sur notre droite, sur notre gauche et que bientôt nous serions transpercés. Nous avons perdu le goût de la conquête. Nous nous sommes repliés sur nous-mêmes.

Nous avons préféré les batailles d’appareil aux guerres culturelles, les complots aux combats, les intrigues à l’Histoire. Et nous sommes entrés dans le temps de la défaite. Mais il n’y a pas de défaites définitives non plus. La politique c’est le rocher de Sisyphe. Chaque fois que nous saurons répondre à ces deux impératifs humains que sont le besoin d’être ensemble et d’écrire un avenir pour tous, notre rocher culminera. Chaque fois que nous nous écarterons des Français par de vaines querelles, notre rocher dévalera la pente. C’est ce que j’ai appris de nos victoires et compris de nos défaites.

Tirer les leçons, refuser la résignation, surprendre à nouveau, c’est maintenant notre feuille de route. Nous renouveler dans la fidélité à celles et ceux qui nous ont précédé, c’est maintenant notre devoir. Rien n’a jamais été donné à la gauche. Ce qui a été gagné a été conquis.

Nos ainés avaient le courage de ceux qui mènent le combat juste. Ils savaient qu’ils portaient quelque chose en eux qui ne peut être vaincu. C’est cette force-là, celle des valeurs que l’on défend sans complexe, des causes communes que l’on porte sans chercher à en tirer un bénéfice personnel, qui a donné le goût à des millions de femmes et d’hommes de consacrer leur vie à la gauche. Cette force-là elle est irrésistible !

Vive la gauche, vive la République et vive la France!

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Parti socialiste : lettre pour l’unité contre Emmanuel Maurel

A l’occasion de la candidature de Luc Carvounas, Stéphane Le Foll et Olivier Faure au poste de secrétaire du Parti socialiste, des élus et des membres de la direction de ce dernier ont signé une « lettre pour l’unité ».

L’initiative part de Rachid Temal, coordinateur du Parti socialiste et représente le courant dominant de ces dernières années, liées à François Hollande. Cet appel à l’unité est, en ce sens, en fait un appel à battre un autre candidat, Emmanuel Maurel, qui représente le courant Maintenant la gauche, qui vient justement de publier un document exprimant sa lligne politique : L’ambition de gagner.

Lettre pour l’unité

Cher Luc, cher Olivier, cher Stéphane, Nous nous adressons à vous en cette veille de congrès car, membres de la majorité sortante comme vous, nous voulons vous transmettre un message.

Nous recevons vos candidatures séparées comme un engagement parce que notre parti, après les défaites historiques qu’il a subies, a besoin de débats, de réflexion et d’abnégation.

Vos initiatives démontrent que des hommes et des femmes pensent encore que notre histoire commune doit continuer pour la Gauche et pour la France. Ceci ne sera possible qu’au terme d’un profond renouvellement.

Si vos candidatures ont provoqué un regain d’attention pour le PS, elles ne peuvent porter que sur le fond et ne doivent pas se transformer en conflit de personnes qui nous ont tant abimés. Nous ne pouvons plus nous le permettre. Le pays a besoin de la Gauche parce qu’il n’est pas sain, pour une démocratie, que l’opposition ne soit portée que par les extrêmes. Sans la gauche, la France n’est plus la France.

Dans un monde incertain, où Trump, Poutine et d’autres illustrent par leurs politiques à quel point la démocratie n’est jamais acquise, le besoin d’Europe et d’une France debout est fort pour humaniser la mondialisation en œuvrant à un développement solidaire et à la paix.

Au moment où le Président de la République veut s’identifier au centre pour ne pas assumer sa politique libérale et Jean-Luc Melenchon veut incarner le peuple contre les élites, seul le PS peut rassembler la gauche. Nos militants et électeurs qui nous font encore confiance attendent beaucoup de nous. C’est pourquoi nous voulons réaffirmer quelques principes, avant l’ouverture de ce débat.

Un certain Parti socialiste est mort dans les urnes en 2017. Une certaine façon de faire de la politique doit bel et bien être enterrée. L’exigence, la sincérité et surtout l’utilité du PS, sa capacité à être humble et en résonnance avec les grands enjeux de société, voilà ce que le pays attend de nous pour pouvoir à nouveau redevenir audible et crédible. Les motions que vous présenterez, leurs analyses et les propositions que vous ferez nous aideront à comprendre ce qui vous distingue sur le fond.

Mais nous voulons vous rappeler un engagement commun : si le prochain congrès doit engendrer un profond renouveau, il ne peut le faire en rompant avec la culture de gouvernement qui est notre bien commun. Il faut mener un inventaire sérieux et lucide des cinq dernières années, au plan national comme au niveau européen.

Il nous faut tourner la page, nous rénover mais aussi assumer ce que nous fûmes au pouvoir. Si ce travail demande distinction et objectivité, on ne peut pas se contenter de la culture d’opposition. Nous avons tranché collectivement cette question.

Nous sommes et restons l’opposition de la gauche responsable. Chaque terme a son importance et son sens. Nous devons aussi travailler à l’autonomie du PS.

Aujourd’hui, aucune alliance politique ne s’impose. Emmanuel Macron construit une orientation de centre-droit, à vocation libérale et installe une autorité verticale toujours refusée par les socialistes.

Nous lui opposons une conception équilibrée de l‘économie, un refus du tout libéral, un renforcement de la solidarité, une décentralisation approfondie et un respect des corps intermédiaires.

L’actuelle crise structurelle du Front National met de côté, provisoirement, l’argument du vote utile face au risque frontiste, même si ses idées sont toujours violemment présentes dans le débat politique et ont dépassé depuis longtemps le cadre strict du parti d’extrême droite.

Quant à Jean-Luc Melenchon, touché par les sirènes populistes, il veut substituer un clivage élite/peuple au clivage gauche/droite, estimant les partis de gauche dépassés. Ne lui donnons pas raison !

Décider d’un type d’alliance, à cet instant de notre débat, reviendrait à nous subordonner, donc à disparaître. La rénovation avant les alliances devrait être notre ligne de conduite.

Cette démarche n’exclut ni les partenariats ponctuels sur certains sujets, ni une relation rénovée avec les autres femmes et hommes de gauche. Nous voulons le rassemblement du peuple de gauche et nous pensons être les seuls à pouvoir pratiquer le et – et : et ceux qui ont voté Macron, et ceux qui ont voté Melenchon et ceux qui se sont abstenus.

Le PS est encore le seul parti à pouvoir proposer ce rassemblement des électeurs de toutes les gauches, y compris dans le cadre d’un débat ouvert et constant au sein de la Gauche. Nous devons procéder de nous-mêmes mais aussi parler à ceux que nous avons déçus et que d’autres ont trompés Nous voulons également réaffirmer notre orientation.

Nous devrons aborder les élections européennes en européens et les élections municipales en décentralisateurs.

Pour cela, il faudra nous engager avec volontarisme et modestie, ne pas s’emballer pour un succès, ni se désespérer pour un revers, parce que la route de la reconstruction ne sera pas linéaire.

Nous vous proposons deux rappels :

– Le congrès qui s’ouvre n’épuise pas les sujets. Il faudra préparer, sous une forme renouvelée, ouverte et participative, les Conventions thématiques qui jalonneront notre reconstruction. Il nous faudra rajeunir, féminiser, représenter les territoires et prendre en compte la réalité sociologique de notre pays.

Notre Parti devra être décentralisé et ouvert. Il devra co-construire avec la société. Il faut un programme de travail dense avec le militant placé au coeur.

– Le Parti Socialiste a besoin d’une majorité claire, ce qui n’exclut pas la minorité. Mais, pour qu’il y ait un travail efficace, il faut que chacun inscrive son action dans un cadre prônant l’efficacité. Le travail en commun ne peut pas être la confusion. Le congrès d’orientation ne peut pas se rejouer sur chaque sujet en débat.

Nous souhaitons que, lorsque ce débat aura été arbitré par les militants, vous vous retrouviez sur les bases alors définies pour constituer une vraie majorité, car il n’y a pas de Parti renouvelé sans majorité assumée.

Premiers signataires : premier-es fédéraux, responsables nationaux et fédéraux ADOMO Caroline, ALARCON Antony, ASSARAF Christian, ARNAUD Samuel, AUGIER Florence, AZZAZ Nadège, AZOULAI Laurent, BERGOUNIOUX Alain, BLATRIX Florence, BRIEN Nicolas, BRUNSCHWIG Xavier, BODIN Nicolas, BOURGI Hussein, BOUAMRANE Karim, BORD Corinne, BRAUD Maurice, BROUSSY Luc, BRUEL Mickael, CANET Michel, CARREIRAS Joël, CLAVEQUIN Maude, CIOT Jean-David, CHANTRELLE Laurent, CHENUT Jean-Luc, CHEVALIER Fabien, COILLARD Stéphane, CONWAY-MOURET Hélène, COUMET Jérôme, DANEL Pierre, DESTOT Michel, DELBOS Olivier, DIOP Dieyneba, DOUCET Philippe, ELKOUBY Eric, FABIANO Patrice, FAGES Marie-Laure, FILLEUL Martine, FINIELS Philippe, FOUILLERE Christophe, GAGNAIRE Franck, Brice GAILLARD, GELLY-PERBELLINI Michel, GERARDIN Annie, GINER Bernard, GUUDUBOIS Elisabeth, GLOANEC-MAURIN Karine, GROSNON Thierry, GUERRIEN Marc, GUILLAUME Sylvie, HADIZADEH Ayda, HARQUET Philippe, HOFFMANN-RISPAL Danièle, IBARRA Stéphane, JEAN BAPTISTE EDOUARD Léon, JOUBREL Yannig, KHADEMI Antoine, LIME Catherine, LE CONSTANT Philippe, LE GARREC Alain, LE MEAUX Vincent, LE MOËL Annaig, LEPRÊTRE Marie, LEPRETRE Patrick, LIOUVILLE Jean-Pierre, MATHELIER Guillaume, MAALOUF Rita, MARECHAL Denis, MAUPAS Valérie, MESSAFTA Lies, MEYSEN Felix, MOINE Philippe, NARASSIGUIN Corinne, NICOLLET Eric, NIEPCERON Loïc, NEUGNOT Michel, ORAIN Frédéric, OUMER Nawel, PAPOT Jean-François, PESCHEUX Victor, PICARD Maxime, POLSKI Olivia, RECALDE Marie, REVAUL D’ALLONES-BONNEFOY Christine, RISPAL Gérard, ROULY Nicolas, ROUILLON Christophe, ROY Isabelle, ROZE Christophe, SAYER Ghislain, SAW Fatoumata, SEVE Patrick, SFEZ Nicolas, SADOUN Marc, SOUMARE Ali, VALENTI Paola, TEMAL Rachid, THOMAS Jean-Jacques, TRIJOULET Thierry, TRIGANCE Yannick, TYSSEYRE Jean-Michel, VIEU Patrick, VENON Boris, VERON Vincent, VINCENT Bernard, WOLF Romain

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Emmanuel Maurel : L’ambition de gagner

Emmanuel Maurel, candidat au poste de secrétaire du Parti socialiste, a publié un document exprimant sa ligne politique.

L’ambition de gagner.

Vous pouvez signer ici ou par mail emmanuelmaurel2018@gmail.com

UNE RESPONSABILITÉ HISTORIQUE.

Notre parti, le Parti socialiste, connaît une situation inédite. La double déroute du printemps 2017 n’a en effet pas d’équivalent dans notre histoire politique. En 2012 nous avions tous les leviers pour transformer la société. Cinq ans plus tard, nous n’en avons pratiquement plus aucun. Jamais, sous la Vème République, un parti n’est passé si vite de l’omniprésence politique à la marginalité électorale.

Ce vote-sanction ne saurait s’expliquer par la seule « usure du pouvoir ». Pour nombre de nos compatriotes de gauche, ce quinquennat a représenté une perte des repères spectaculaire. Pacte de responsabilité, loi travail, déchéance de nationalité : les Français ne se sont pas reconnus dans ce que nous avons fait, et, finalement, ne nous reconnaissent plus.

Dans ce paysage politique profondément bouleversé, il serait déraisonnable de penser que nous reviendrons mécaniquement aux responsabilités. Il faudra plus que les fautes des uns ou les échecs des autres pour revenir au pouvoir. La reconquête requiert un travail collectif méthodique, humble, sérieux, et l’ambition assumée de changer la société : pour ceux qui souffrent le plus, la reconquête ne peut pas attendre.

Nous en sommes capables ! Parce que nous continuons à croire à l’actualité du message socialiste.

Parce que, sur le terrain, des milliers de militants et d’élus continuent d’agir sans rien renier de nos principes communs. À celles et ceux qui ont eu le courage de rester, nous proposons de relever la tête, de viser l’horizon et de redonner l’espoir.

1. CE QUE NE DOIT PAS ÊTRE LE CONGRÈS D’AUBERVILLIERS.

Nous n’avons pas le droit ou le luxe de reproduire les figures habituelles. Évitons :

Un Congrès de « gouvernance », dans « l’entre soi », dont l’enjeu serait le choix du prochain syndic de copropriété, uniquement chargé de faire la police du bruit dans les étages du Parti. Au contraire : du bruit, il faudra en faire pour être à nouveau entendus. Et pour faire du bruit, il nous faudra être rassemblé autour d’une voix forte et claire.

Un Congrès « règlement de comptes » refaisant, dans l’indifférence des Français, le match du quinquennat. Bien sûr, nous devons tirer le bilan de l’expérience de 2012-2017.

Mais à quoi bon se renvoyer la balle sur la responsabilité des uns et la faute des autres ? Cela nous ferait oublier qu’un parti vivant doit regarder en avant et pas systématiquement dans le rétroviseur.

Un Congrès « hors-sol », une juxtaposition de slogans creux et de digressions thématiques intéressantes mais sans rapport avec les vraies questions qui nous sont posées au lendemain d’une telle débâcle.

Quelles réponses apporter aux enjeux économiques, sociaux, géopolitiques, régaliens, culturels qui interrogent, voire déstabilisent notre société démocratique ? Les Français ne nous jugeront dignes d’être à nouveau écoutés qu’à la condition de travailler sérieusement ces problèmes.

2. CE QUE DOIT ÊTRE LE CONGRES D’AUBERVILLIERS.

Le Congrès d’Aubervilliers doit constituer une première étape déterminante dans la reconstruction de notre unité et de nos perspectives collectives.

1. Réaffirmer la nécessité d’une voie socialiste distincte du social-libéralisme.

A l’heure où les inégalités se creusent à une échelle jamais observée dans l’Histoire, la social-démocratie se trouve comme paralysée. Alors que sa mission historique était de porter un meilleur compromis entre le capital et le travail au niveau des États-nations, elle semble y avoir renoncé depuis l’avènement de la globalisation.

Pire, elle donne le sentiment de s’accommoder, voire, parfois, d’accompagner un nouvel ordre planétaire inégalitaire, individualiste, marchand.

Ce “modèle” de développement est pourtant condamné. Il détruit les solidarités et les écosystèmes. Il va même jusqu’à corrompre l’intégrité de la personne et de la conscience, sous l’emprise de la marchandisation et du consumérisme. Il est à proprement parler insoutenable.

C’est le paradoxe du moment  que nous vivons : au moment où la gauche peine, nous n’avons jamais eu autant besoin d’un socialisme républicain, antilibéral, écologiste.

2. Assumer clairement les conséquences stratégiques qui s’imposent : opposition à la politique d’Emmanuel Macron, unité des forces de transformation de la société

Le Parti socialiste doit être sans ambiguïté dans le contexte national issu des élections. Nous sommes un parti  d’opposition et certainement pas la force supplétive d’une majorité clairement marquée à droite.

Les six premiers mois du quinquennat (ordonnances Travail, suppression de l’ISF, flat tax sur les revenus financiers, baisse des APL, contrôle des chômeurs…) ont démontré de manière éclatante qu’on ne peut pas être socialiste « et en même temps » dans la complaisance à l’égard de Macron. Le cap a été donné, il ne changera pas. Idéologiquement, politiquement, économiquement, Emmanuel Macron est le Président des riches.

Pendant ce temps, la société civile continue d’évoluer et d’élaborer des revendications nouvelles. Ce faisant elle a produit de nouvelles formes de contestation et d’intervention dans le champ politique : la lutte pour la cause des femmes, les nouveaux comportements de consommation, la dénonciation des paradis fiscaux, la solidarité avec les migrants, la mise en accusation des pollueurs, la révolte devant l’avidité sans limites du capitalisme financier…

Ces nouvelles aspirations ont d’ailleurs été reconnues et prises en compte par la gauche. Dans les collectivités locales, les élus socialistes expérimentent et innovent.

Beaucoup ont choisi les circuits courts face à la grande distribution et la malbouffe, de se battre pour faire reculer la pollution, la précarité ou la désindustrialisation, certains expérimentent le revenu de base… À leur échelle, ils contribuent déjà à la transformation écologique et sociale de la France.

Le Parti socialiste devra reconnaître et étendre ces expériences, tout en leur offrant un débouché politique à l’échelle de notre nation et du continent. C’est pourquoi sa ligne stratégique doit être celle d’un dialogue avec toutes les forces de gauche qui veulent transformer la société en profondeur.

3. Pour renouer avec le corps central de la société

Nous considérons que la renaissance du Parti socialiste implique de renouer avec le corps central de la société, c’est-à-dire les millions d’ouvriers et d’employés qui se sont progressivement détournés de nous à partir des années 2000.

Cela suppose de donner une priorité réelle dans nos programmes à des questions trop souvent esquivées ces dernières années, telles que le pouvoir d’achat des salariés ou la présence des services publics sur les territoires.

Partager les richesses

Le néolibéralisme déstructure et déshumanise, il empêche de bien travailler et sa rengaine de « l’insuffisante compétitivité » ajoute la démoralisation au stress, alors même que la productivité du travail est en France parmi les plus élevées du monde.

Les salariés attendent de nouvelles perspectives sur leur pouvoir d’achat, sur la sécurité sociale, la protection de l’emploi et la démocratie dans l’entreprise. Ils attendent aussi que nous ripostions fermement à la précarisation et l’atomisation sociale dont usent et abusent les entreprises « innovantes » et « disruptives » du monde merveilleux de l’ubérisation.

Aujourd’hui, les socialistes doivent continuer de se mobiliser contre les ordonnances Macron et la loi travail.

Mais c’est aussi leur rôle de mener campagne pour l’augmentation du SMIC (au moment où le mode de calcul de celui-ci est remis en cause), de proposer une « loi islandaise » d’interdiction du moindre écart de salaire entre les hommes et les femmes.

Pour l’écosocialisme

Au risque de l’accaparement des richesses par une minuscule oligarchie, s’ajoute celui d’un désastre écologique et climatique, alors que l’on sait aujourd’hui que les engagements internationaux actuels demeurent insuffisants pour le conjurer, voire juste le limiter.

Qui ne voit, à gauche du moins, que les deux phénomènes, l’ultra-domination économique et financière des « 1% » et la catastrophe climatique, sont inextricablement liés ?

L’extrême polarisation des richesses, les conditions insensées de l’exploitation du travail et des ressources naturelles, la dilatation des rapports de production et des profits dans la sphère financière : tout se tient.

Écosocialistes, nous lions le combat social et le combat écologique en renouant avec nos fondamentaux, et en renonçant à la course effrénée au profit et au productivisme, des périls mortels pour le genre humain.

Pour une relance des services publics

Enfin il n’y aura pas d’égalité sociale – et encore moins d’égalité entre les territoires – sans une relance des services publics. Nous avons laissé transformer La Poste, la SNCF, EDF, GDF, France Telecom, en entreprises sinon complètement privées, du moins complètement livrées à la concurrence.

Faut-il répéter que c’est là un pur non-sens ? Les services publics doivent fournir des services de qualité accessibles partout et à tous, ce que ne permet pas le marché. Ils nécessitent des investissements à 30 voire 50 ans.

Comment pourraient-ils fonctionner correctement dans un cadre concurrentiel dont le long terme se mesure en mois ? Interrompre la marche folle à la marchandisation des services publics : voilà un axe politique majeur – et un sujet sur lequel mettre en scène la réfutation en actes des contraintes européennes.

4. Pour une Europe au service des peuples

En n’ayant pas su associer engagement européen et souveraineté démocratique, la gauche a été punie et il en a résulté une désaffection grandissante des peuples.

Cette crise de confiance suppose de briser la logique austéritaire et inégalitaire de l’Europe et d’en revenir à son ambition initiale : celle d’un espace de solidarité, de prospérité et de protection pour tous.

Mais pour ce faire, nous ne pouvons plus nous payer de mots et d’incantations (« et maintenant l’Europe sociale »). Le risque d’une confrontation doit être assumé clairement, à l’avance, particulièrement pour ce qui relève de la gestion de l’euro, des politiques budgétaires, industrielles et de l’harmonisation sociale.

La France doit cesser de sous-estimer sa capacité d’influence ; elle doit rompre avec l’illusion qu’on n’est « crédible » qu’en se montrant l’élève le plus docile et zélé de la classe européenne.

Notre responsabilité européenne nécessite aussi de s’opposer au règne du libre-échange intégral, sous-tendu ces dernières années par la multiplication de projets d’accords bilatéraux (CETA, Mercosur, Corée du Sud, Vietnam, Australie, Mexique…) dont les conséquences risquent d’être dévastatrices pour nos industries et notre agriculture.

Les autres grands ensembles géopolitiques (USA, Chine…) veillent à leurs intérêts économiques, pourquoi l’Europe serait-elle la seule refuser de le faire ?

Enfin, comme on l’a observé à l’occasion des Panama Papers, Luxleaks et Paradise Papers, l’Europe s’est montrée faible face au pouvoir de l’argent. Certains États-membres, comme les Pays-Bas, le Luxembourg, se comportent en véritables paradis fiscaux.

L’Union européenne est encore trop timide pour lutter contre la fraude. Ce n’est plus supportable. Dans ce domaine aussi, la France doit prendre l’initiative, en assumant le risque de la confrontation.

Les Français veulent se protéger et se projeter : se protéger des menaces de désindustrialisation, de précarisation, de communautarisme et de dérèglement climatique, et se projeter dans l’avenir, comme ils l’ont toujours fait jusqu’ici, en relevant les défis du monde.

Entre d’un côté les partisans, au pouvoir, d’une libéralisation de tout et de tous et, de l’autre, les bonimenteurs du repli sur soi, notre Parti peut incarner cette double mission de protection et de projection. Il le peut, il le doit ; reste à le vouloir. C’est l’enjeu de ce Congrès.

5. Un parti conquérant

La lucidité impose de le reconnaître : parmi les causes de l’échec du quinquennat, il y a le rapport trop peu critique aux institutions de la Vème.

L’acceptation du présidentialisme qui implique que tout soit soumis à l’exécutif, la trop grande influence de la technostructure d’État et de certains milieux d’affaire, ont nui considérablement à notre exercice du pouvoir. Dans le même temps, renonçant à son autonomie, le Parti a été volontairement inaudible.

Or le rôle du Parti socialiste, c’est d’être l’acteur vigilant de la transformation quand nous gouvernons.

Dans l’opposition, il s’engage dans des mobilisations exemplaires (et en premier lieu celle de ses élus locaux qui s’insurgent légitimement contre les premières mesures du nouveau pouvoir) et prépare la reconquête avec méthode.

Nous voulons que les militants soient les acteurs de la reconquête. Pour cela, nous proposons la tenue trimestrielle de grandes conventions, et le recours régulier au référendum militant pour trancher certaines questions essentielles. Il faudra également produire un effort réel pour apporter une forte formation aux militants.

Ensemble, réfléchissons à une nouvelle organisation qui valorise toutes les formes d’implication et d’engagement : local, bien sûr, mais aussi thématique, dans un secteur professionnel ou en entreprise.

Enfin, il faudra mettre en chantier l’élaboration d’un manifeste pour le socialisme des temps nouveaux dont l’objectif sera de confronter les fondamentaux de notre doctrine aux défis contemporains (numérique, biotechnologies, etc.) qui bouleversent l’humanité.

***

L’UNION ET L’ESPOIR !

Le Congrès d’Aubervilliers doit constituer une première étape déterminante dans la reconstruction de notre unité et de nos perspectives collectives.

En 74, un jeune premier, libéral et prétendument surdoué, parvenait à l’Élysée en incarnant l’aspiration au changement, tout en poursuivant une politique plus favorable aux rentiers qu’au monde du travail. La gauche rassemblée le battit dès la fin de son premier mandat.

En 93, le Parti socialiste perdait les trois quarts de ses députés. Par les commentateurs, il était condamné à des décennies d’opposition, voire à une disparition prochaine. Quatre ans plus tard, il dirigeait à nouveau la politique de la Nation, accomplissant la réduction du temps de travail et mettant en place la CMU.

À chaque fois, les conditions du succès furent les mêmes : l’union et l’espoir.

Certes, comme l’expérience militante nous l’a appris, l’union est un combat. Certes, l’espoir ne se décrète pas : il renaît lorsque nous dégageons l’horizon des Français et des Européens, lorsque nous refusons les fatalités qui aliènent, et lorsque nous proposons des mesures qui permettent à chacun d’entrevoir qu’une autre vie, au quotidien, est possible.

L’espoir naît du droit aux bonheurs. Dans quatre ans, si elle redevient elle-même, la gauche gagnera.

À nous d’éclairer le chemin et plus nous serons nombreux, plus vite renaîtra parmi nos concitoyens l’espoir d’un monde différent.

Oui, un nouvel avenir est possible pour le Parti Socialiste et pour la Gauche !