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La Science-fiction c’est la Gauche, la Fantasy c’est la Droite

Les valeurs de la Science-fiction et de la Fantasy s’opposent radicalement, reflétant le conflit entre le passé et l’avenir.

Le drapeau de la Fédération des planètes unies dans Star Trek (Wikipédia)

Il était tout naturel que le choix d’auteurs de Science-fiction de soutenir l’armée française à se moderniser, à prévoir des scénarios, provoque un grand émoi chez les amateurs de Science-fiction. C’est que la Science-fiction est historiquement le pendant de la Fantasy. Ces deux formes de littérature et de cinéma se sont particulièrement développées aux États-Unis, pays littéralement passé des cow-boys aux gratte-ciels. Cela a marqué les esprits et il y a eu deux directions opposés qui ont été prises.

Les progressistes se sont tournés vers l’avenir. Ils ont considéré que l’humanité connaissait une évolution de grande ampleur, que la vie quotidienne allait être révolutionnée, les barrières entre les Hommes dépassées. Pour eux, les préjugés ne pouvaient que disparaître, l’humanité prenant enfin conscience de l’universalité, de la nécessité de se tourner vers la découverte de l’espace, la science, la culture, la paix. Les grandes références historiques sont Cent ans après ou l’An 2000 d’Edward Bellamy en 1888, ainsi qu’au 20e siècle la grande fresque romanesque Les robots / Fondation d’Isaac Asimov et la première génération de la série télévisée Star Trek.

Les réactionnaires se sont tournés vers le passé. Ils ont inventé des mondes parallèles, dans un passé mythique, peuplé de races en guerre et de héros. Cherchant à détourner les esprits, ils ont façonné des mondes pittoresques, avec des êtres grotesques (elfes, nains…), des castes, de la magie, un combat entre le Bien et le Mal. Les œuvres les plus connues sont Conan le barbare, Le seigneur des anneaux, Harry Potter, Star Wars, Dune.

Culturellement, les publics se tournant vers les uns ou les autres n’ont rien à voir. Cela se lit particulièrement dans le rapport à la technologie. Les tenants de la Science-fiction sont tout à fait ouverts aux évolutions technologiques, aux ordinateurs, aux robots, etc. Les tenants de ce qu’on doit appeler la Fantasy ont par contre une profonde haine de la technologie, comme en général du monde moderne. Le fond de leur approche est d’ailleurs la « révolte contre le monde moderne » propre à l’extrême-Droite.

Le cycle de Fondation, un classique incontournable pour les gens de Gauche

Alors que la Science-fiction dit qu’un monde décadent doit être dépassé par l’avenir, la Fantasy dit qu’un monde dégénéré doit laisser la place aux valeurs d’on ne sait trop quel monde parallèle fantasmagorique.

Alors que la Science-fiction dit que l’humanité s’en sort par une communion collective, la Fantasy valorise un monde divisé en castes où tout le monde doit être à sa place. C’est pour cela qu’à la liste mentionnée plus haut, il faut par exemple ajouter Astérix et Obélix, une œuvre totalement réactionnaire. Il faut évidemment ajouter Blake et Mortimer, Tintin et Milou, deux bandes dessinées jouant naturellement sur le côté magique, les extra-terrestres, etc. Dans tout ces œuvres il y a un ordre passé auquel on revient indéfiniment. Chacun à sa place, tout à sa place, c’est une lecture romantique-communautaire tout à fait réactionnaire.

Voilà pourquoi il ne faut pas se dire : tel auteur est de gauche, il fait ci, tel auteur est de droite, il fait ça, tel lecteur est de gauche, il lit ça, tel lecteur est de droite, il fait ça. Ce n’est pas ainsi que cela marche. C’est la culture de gauche en général qui produit les auteurs et les lecteurs, c’est l’idéologie de droite en général qui produit les auteurs et les lecteurs. Ce qui se joue, c’est ce qu’on appelle la lutte des classes. Elle passe par des multiples vecteurs historiques, à travers les auteurs, les lecteurs, les œuvres.

Tout est le reflet d’un processus, voilà pourquoi une œuvre qui se tourne vers le passé reflète la tentative de freiner le cours de l’Histoire, d’en empêcher le développement. Une œuvre tournée vers l’avenir est par contre le produit de la tendance à la transformation. Lorsqu’une série de science-fiction de série B comme Babylone 5 montre des personnages sacrifiant leur vie pour les autres, c’est le reflet de la victoire du collectivisme historiquement sur l’égoïsme et le passé.

C’est le sens du fameux propos de Spock dans Star Trek : « L’intérêt du plus grand nombre l’emporte sur l’intérêt d’un seul ». C’est notre avenir.

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Le sens de la polémique quant à « Star Wars, épisode VIII : Les Derniers Jedi »

Star Wars, épisode VIII : Les Derniers Jedi a été un très grand succès du box-office en France, dépassant les quatre millions de vues. Cependant, il a révélé un immense conflit d’interprétation.

La presse internationale a considéré que le film était une réussite dans la forme, même si l’on pouvait aussi regretter que le scénario est particulièrement redondant, puisant aux autres épisodes. Le public, par contre, a considéré qu’il connaissait un outrage. La pétition lancée aux États-Unis et demandant le retrait de l’épisode VII du « canon » de la saga a rassemblé 75 000 signatures.

Interpréter cette différence d’interprétation révèle beaucoup de choses et la première, c’est que désormais Star Wars relève de l’univers Disney, dans la forme et dans son contenu. Cet univers est profondément de culture protestante, avec la question du doute généralisé et angoissant, de l’engagement moral avec le choix entre le bien et le mal, avec des personnages révélant une certaine faiblesse par rapport à des événements plus forts qu’eux.

Bien entendu, il ne faut pas ici s’attendre à un questionnement intellectuel, mais à une déviation du protestantisme sur un mode commercial de masse, avec tout le côté caricatural qui va avec.

Or, Star Wars appartient historiquement à une lecture relevant du fantastique, sous la forme du Space Opera. On a donc une combinaison de culte de la supériorité « naturelle » et de la magie, dont les jedis, avec leur spécificité dans le sang, sont les grands représentants.

Le public a donc reproché à Disney d’avoir sabordé cette dimension fantastique au profit de sa propre lecture et le grand symbole de cela, c’est le sort réservé à Luke Skywalker.

Son côté faible et son refus de la tradition jedi, associés au caractère « fort » de personnages secondaires, a heurté de plein fouet le culte de la « supériorité ». Le rôle secondaire, voire inexistant de la « force » a totalement perturbé.

L’humour régulièrement présent a été considéré comme une insulte à la dimension épique. Le petit passage où Chewbacca veut manger un Porg rôti devant d’autres Porgs, pour finalement ne pas le faire en raison de son sentiment de culpabilité, a également choqué.

Toutes ces critiques sont à la fois naïves et fausses. D’abord, parce que Star Wars est un produit commercial de bout en bout et que le principe de la force relève du mysticisme le plus complet. Vouloir donc une continuité rationnelle pour Star Wars n’a donc aucun sens : tout dépend des choix subjectifs des studios, ainsi que de l’imagination délirante des scénaristes.

Ensuite, parce qu’il y a une dimension nostalgique foncièrement régressive qui s’exprime. Les épisodes IV-V-VI relèvent du Space Opera, mais les épisodes I-II-III sont remplis d’éléments simplistes, enfantins, aberrants, etc.

Cela fait bien longtemps qu’il n’y a plus cette dimension « mystique » sérieuse et finalement on retrouve dans l’attitude des fans de Star Wars le même comportement irrationnel que chez les fans de Dune ou du Seigneur des anneaux.

Il y a une telle fuite dans un monde imaginaire totalement coupé de la réalité que les réactions sont exacerbées, les vanités hypertrophiées, le sentiment de trahison complet dès qu’il y a la perte des habitudes, des repères traditionnels.

Tout cela montre bien le formidable niveau d’aliénation qui existe dans la « société de consommation »: on vend du rêve et une fois ce rêve se révélant faux, on éprouve une nostalgie régressive, sans remettre tout à plat, sans rien remettre en cause.