Catégories
Politique

27 mai 1968 : le meeting de Charléty

Le 27 mai 1968 est une journée importante pour la gauche qui n’est ni celle du PCF, ni celle des regroupements révolutionnaires (anarchistes, marxistes-léninistes c’est-à-dire maoïstes, trotskystes).

Cette gauche ne veut pas la révolution mais un socialisme modernisateur, elle est portée par l’UNEF, le PSU, la CFDT (qui peu de temps auparavant était encore le syndicat chrétien).

C’est ce qui historiquement nommé la seconde gauche.

Elle parvient, le 27 mai, à rassembler 30 000 personnes au stade Charléty. Pierre Mendès France est présent, mais il ne prend pas la parole. Cette figure historique de la gauche réformiste, membre alors de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste, cautionne donc le meeting, mais en ne prenant pas la parole se présente comme recours possible, garant d’un ancrage au centre-gauche.

Voici l’appel de l’UNEF fait le 25 mai pour mobiliser le 27, puis des vidéos du meeting de Charléty.

Déclaration de l’U.N.E.F.

A la suite des événements qui se sont déroulés depuis trois semaines, et particuliçrement ces derniers jours dans toutes les villes universitaires de France et notamment à Paris, compte tenu de la situation présente, des déformations apportées par l’information officielle ou contrôlée par le gouvernement nous tenons à préciser les points suivants :

I. – LES FORCES DE L’ORDRE ET LE GOUVERNEMENT PORTENT L’ENTIERE RESPONSABILITE DES INCIDENTS QUI VIENNENT DE SE PRODUIRE ET L’U.N.E.F. SE DECLARE SOLIDAIRE DE TOUTES LES VICTIMES DES FORCES DE REPRESSION

Les incidents proviennent de la volonté du pouvoir tendant à créer une situation objectivement explosive et provocatrice pour les étudiants et les travailleurs luttant à leurs côtés :l’U.N.E.F. se déclare entièrement solidaire des victimes de la répression policière, quel que soit le moment où elle s’est exercée.

II – L’U.N.E.F. PROPOSE DE FAIRE DE LA JOURNEE DU LUNDI 27 MAI UNE GRANDE JOURNEE NATIONALE DE MANIFESTATIONS L’attitude de la police rend celle-ci entièrement responsable de tous les affrontements.

Particulièrement aujourd’hui et demain, la présence de forces importantes dans le quartier latin, leurs mouvements incessants, la façon dont ils dispersent les groupes sont autant de provocations : si des incidents se produisent, que le gouvernement sache qu’il est à l’origine de ceux-ci.

L’U.N.E.F. n’appelle pas à manifester aujourd’hui et demain. En revanche, elle propose à tous les militants de Paris et de province, de faire du lundi 27 mai une journée nationale de manifestations, celles-ci se tenant à partir de 17 heures.

III. – LES LUTTES UNIVERSITAIRES N’ONT DE SENS QUE S’INTEGRANT DANS LES LUTTES D’ENSEMBLE; LE GOUVERNEMENT QUI REFUSE DE VOIR LE SENS DE CE COMBAT COMMUN NE PEUT ETRE UN INTERLOCUTEUR

Depuis longtemps l’U.N.E.F. souligne que les luttes universitaires n’ont de sens que lorsqu’elles s’intègrent dans le cadre d’une contestation et d’une lutte contre le régime capitaliste : la démocratisation de l’enseignement ne peut être réelle qu’en liaison avec un renversement des rapports de production et la transformation des structures économiques par et pour les travailleurs.

Il est bien évident que sur tous ces points le gouvernement et le général de Gaulle n’acceptent pas de prendre en considération la nature de notre combat et qu’ils ne se placent que dans une optique de préservation du système actuel. Aussi considérons-nous que le régime n’est pas un interlocuteur.

IV. – L’UNIVERSITE, DE TOUTE FAçON, PREND EN MAIN SES PROPRES AFFAIRES Le 17 mai 1968, l’U.N.E.F. proposait à l’ensemble des étudiants et des enseignants quatre points précis d’intervention sur la situation.

Les décisions prises librement par l’ensemble des étudiants vont très largement dans le sens des propositions faites par l’U.N.E.F. Il faut maintenant conclure et réaliser, là où cela est possible, en particulier dans les Facultés d’ores et déjà en gestion paritaire (Enseignants Etudiants), l’inauguration de fait du droit de veto sur les décisions prises. Seul le contrôle des décisions permet en effet d’assurer la contestation permanente de l’Université.

Là où les Universités sont autonomes il faut combattre toute déviation vers une espèce de gestion privée des facultés. L’autonomie, cela veut dire aussi l’ouverture très large de l’Université aux travailleurs. L’U.N.E.F. appelle donc l’ensemble de ses militants, et l’ensemble des étudiants à appliquer dçs maintenant leurs propres décisions. Elle appelle aussi à repousser l’ensemble des examens en septembre.

V. – POUR UNE LIAISON PLUS SOLIDE ENCORE DES LUTTES UNIVERSITAIRES, DES LUTTES OUVRIÈRES ET PAYSANNES L’U.N.E.F. se réjouit de la jonction effective des ouvriers en grève avec les étudiants : elle s’est faite à Paris le 24 mai, en province dans beaucoup de villes universitaires, dans les usines et les facultés. Dans tous ces cas des dizaines de milliers d’ouvriers en grève se sont joints aux étudiants.

L’U.N.E.F. adresse son salut chaleureux à tous les travailleurs engagés dans la bataille avec leurs syndicats.

Parce qu’elle estime qu’il est important de garder un front uni étudiants-travailleurs, elle demande aux syndicats ouvriers – de garder le même front sans faille face à la répression gouvernementale, or, l’interdiction de séjour de Daniel Cohn-Bendit est justement un élément décisif de cette répression – de se rappeler qu’elle reste sur une position simple : jamais, et en aucune façon elle n’entend donner de leçons aux organisations de la classe ouvrière, mais en revanche elle n’en acceptera aucune pour les luttes étudiantes..

Le débat permanent existe à la base entre étudiants et ouvriers, l’U.N.E.F., dans la mesure où les points précédents seront bien compris, propose que les mêmes débats s’instaurent à tous les échelons avec les organisations syndicales des travailleurs C’est dans la mesure où l’action menée à Paris a rencontré de larges échos en province, que l’extension au secteur ouvrier a été possible.

A l’heure actuelle, et dans le même souci de développement du mouvement, l’U.N.E.F. appelle tous les étudiants de toutes les villes universitaires à intensifier leur action :

– pour la poursuite de notre combat universitaire,

– pour l’unité des étudiants et des travailleurs,

– pour leur victoire commune.

Bureau National de I’U.N.E.F. 25 mai 1968.

Catégories
Politique

Le sens de l’engagement des premiers affrontements de mai 1968

L’intervention policière du 3 mai à la Sorbonne fut un profond traumatisme, avec un embryon de résistance. Mais le lundi 6 mai fut marqué par une véritable résistance, dans le sens de la confrontation avec la police.

Le régime était sûr de lui à la base, mais il n’avait pas compris qu’il faisait face pour la première fois à un bloc compact et décidé, faisant du quartier latin son bastion.

A la base c’est une protestation contre l’intervention à la Sorbonne et la répression, mais la police veut encore écraser le tout : elle s’aperçoit très vite qu’elle fait face à un bloc historique bien structuré, motivé, décidé. D’où encore plus de répression.

France-Soir note ainsi le 7 mai que « Le quartier Latin est en état de siège » car « plusieurs milliers de gendarmes mobiles et de policiers casqués et armés de mousquetons ont bouclés la place de la Sorbonne et les rues adjacentes. »

Des milliers d’étudiants se rassemblent en effet dans le quartier latin. France-Soir souligne leur unité :

« Les étudiants se révèlent toujours plus nombreux à manifester. Les forces considérables de police qui transforment le quartier Latin en une véritable place forte ont l’union sacrée chez les étudiants dont un grand nombre ne savaient pas bien, ces jours-ci, pourquoi ils manifestaient.

Maintenant, au coude à coude, rue des Ecoles, au boul’ Mich, ici et là dans Paris, ils ont en face d’eux la police, comme un défi. »

La police repousse les étudiants jusqu’au carrefour de la rue des Ecoles, mais France-Soir constate une résistance dix minutes après :

« 9 h 20. Quelques centaines d’étudiants barrent le boulevard Saint-Michel à l’angle de la rue des Ecoles. Ils crient : « Libérez les étudiants ! Roche, démission ! Des profs, pas des flics ! Presse, complice ! » »

Et :

« Leurs slogans : « A bas la répression ! » et « C.R.S., S.S. ! » énervent visiblement les policiers. Tout à coup les gendarmes mobiles avancent.

Ils serrent les manifestants, les coups de crosses sont nombreux. De l’autre côté du boulevard, des petits groupes de manifestants continuent à hurler leur mécontentement. »

Tout commence alors :

« Trois cents personnes descendent le boulevard Saint-Michel vers le carrefour Saint-Germain. Les policiers, de leur côté, remontent le boulevard. Un pavé est lancé.

Les étudiants s’enfuient devant les premières grenades lacrymogènes de la matinée. Un jeune homme, qui a reçu une grenade sur un oeil, semble sérieusement atteint.

Deux autres étudiants sont blessés – notamment une jeune fille qui a été intoxiquée par les gaz lacrymogènes. L’atmosphère est irrespirable. On compte maintenant plusieurs milliers d’étudiants dans le quartier.

 Une cinquantaine de cars de police stationnent autour de la faculté et, vers 10 h 15, les voitures des C.R.S. viennent se joindre en renfort aux gardiens de la paix et aux gardes mobiles. »

L’UNEF décide de repousser la manifestation, mais les événements se précipitent dans l’après-midi. Combat décrit les affrontements :

« A 15 heures, à l’angle de la rue Saint-Jacques et de la rue du Sommerard éclatèrent vraiment les premières échauffourées de la journée. Très vite ce fut l’émeute, pire encore que vendredi soir.

Les pavés volèrent au premier assaut, et les matraques s’abattirent. En quelques minutes, après un reflux rapide, le boulevard Saint-Germain se hérissa de barricades constituées essentiellement de voitures, les panneaux étaient arrachés et les pavés descellés.

Le front se stabilisa, les agents formés « à la tortue », boucliers en l’air sous le jet des pavés en bordure de la place Maubert. Celle-ci était transformée en no man’s land, une barricade défendait l’entrée de la rue Monge. Les combattants restèrent face à face près d’une heure et demie, échangeant des pierres et grenades lacrymogènes.

Les rues avaient un air de champ de bataille, la Croix-Rouge ramassait de part et d’autre des blessés. Aux environs de 17 heures, le service d’ordre de l’U.N.E.F. sous l’injonction du président Sauvageot tentait d’arracher les étudiants à une violence inutile.

Lentement le repli se fit vers la Halle aux vins, tandis qu’en arrière-garde quelques irréductibles déchaînés poursuivaient leur guérilla désespérée, retranchés derrière des barricades.

Un peu avant 18 heures, ce groupe se trouvait renforcé par un retour de plusieurs centaines de leurs camarades qui reprirent possession de la place Maubert. La contre-attaque des gardes mobiles et des agents de police fut violente et efficace et repoussa définitivement les étudiants hors de la place. »

L’Humanité raconte la suite :

« Boulevard Saint-Germain, au carrefour Mabillon, plusieurs centaines de policiers, gendarmes mobiles, en tenue de combat forment un barrage. Il est 19 h 30. De violents heurts se produisent rue du Four, à coups de pavés et de grenades lacrymogènes. Les forces de police attaquent, mais doivent reculer. Une voiture et une barricade flambent carrefour Mabillon.

Les manifestants crient : « A bas la répression », « Fouchet assassin », « Libérez nos camarades ». Le cortège se scinde en deux.

Tandis que deux à trois mille manifestants se heurtent aux forces de police qui doivent à nouveau reculer vers le carrefour de l’Odéon, la manifestation principale se déroule dans le calme. Il n’y a en effet aucune force policière rue de Rennes et place Saint-Germain.

 Les charges des gardes mobiles se font de plus en plus violentes et atteignent le degré de brutalité des heurts de l’après-midi. Les manifestants arrêtés sont sauvagement frappés. Aux fenêtres du boulevard Saint-Germain, des dizaines de personnes crient, révoltées : « Assez, assez ! ».

Les policiers frappent au hasard, même loin de la manifestation dans plusieurs rues adjacentes. Il y a de nombreux blessés. Des groupes de manifestants dressent plusieurs barricades avec des voitures qu’ils retournent entre Mabillon et la place Saint-Germain et la rue Bonaparte. La terrasse vitrée d’un café s’effondre.

Les gendarmes mobiles, puis des C.R.S. chargent à 20 h 40 et occupent la place Saint-Germain. Des manifestants refluent vers la rue des Saints-Pères et la rue de Rennes. L’air est irrespirable de gaz lacrymogènes. Des postes de secours de la Croix-Rouge s’improvisent dans des entrées d’immeuble. Il y a de plus en plus de blessés. Les sirènes des ambulances retentissent sans arrêt.

Tandis que des heurts très violents se produisent vers 21 heures, dans toutes les rues du quartier Saint-Germain-des-Prés, rue du Vieux-Colombier, rue Madame et à Saint-Sulpice, une nouvelle barricade est érigée sur le boulevard à la hauteur de la rue des Saints-Pères.

Deux autobus sont placés en travers à une dizaine de mètres, et c’est en s’abritant derrière ces deux barrages que manifestants et policiers se bombardent de grenades lacrymogènes, de pavés et de boulons. »

Catégories
Politique

Le sens des brutalités policières du 3 mai 1968

Si l’on peut passer aussi rapidement de l’intervention policière à la Sorbonne du 3 mai 1968 à un appel à généraliser la lutte et l’unifier comme le fait le mouvement du 22 mars le 24 mai 1968, c’est qu’en fait le 3 mai la police s’est littéralement lâchée.

Elle a voulu à tout prix écraser toute velléité de contestation et, certaine de l’hégémonie du régime, elle a cherché la casse. Si on ne saisit pas cela, on ne peut pas comprendre pourquoi Charles de Gaulle appelle, le même 24 mai, à un référendum, s’imaginant que la situation, somme toute, est sous contrôle.

C’est tout le régime qui s’est contracté et qui s’imagine que cela va passer. C’est le sens des brutalités policières généralisées dès le 3 mai 1968.

Un chercheur du C.N.R.S. raconte ce qu’il a vu ce jour-là :

« Vers 15 h 30, l’entrée du 17 rue de la Sorbonne était bloquée, et les forces de police de plus en plus nombreuses aux portes de la faculté ; on pouvait cependant entrer librement par la porte de la rue des Ecoles.

Dans la cour, les étudiants avaient décidé de transformer le meeting en une réunion de discussion sur les problèmes universitaires. A ce moment, certains étudiants quittèrent la Sorbonne.

Ceux qui restaient (à l’exception de quelques membres du service d’ordre), se regroupèrent sur les marches menant à la chapelle. Le débat, poursuivi sans haut-parleur, porta d’abord sur l’explicitation, par les étudiants de Nanterre, des buts de leur action ; bientôt une controverse s’engagea avec les représentants d’autres tendances ; je tiens à souligner que ce débat était absolument pacifique, et que tous ceux qui le voulaient avaient droit à la parole.

« Vers 16 h 45, on demanda aux membres du service d’ordre présents dans la cour de regagner leur poste ; autour de moi, on ignorait s’il s’agissait d’une attaque d’Occident, ou des renforts de la police.

La réunion sur les marches de la chapelle prit fin à ce moment ; certains étudiants tentèrent de sortir, mais l’issue de la rue de la Sorbonne semblait bloquée. Quelques minutes plus tard, nous vîmes apparaître sur toute la largeur de la galerie du fond de la cour, une rangée de gardes mobiles coiffés de casques ronds, et, je crois, armés de matraques. Les consignes données alors furent: « Sortez tous dans le calme et en silence ».

Les étudiants présents dans la cour regroupèrent autour de la sortie, mais sans pouvoir avancer. Très vite, toute la cour de la Sorbonne fut remplie de gardes mobiles qui empêchaient les étudiants d’emprunter une autre issue ; il s’agissait véritablement d’une souricière.

« Quand j’eus enfin passé l’étroit couloir qui mène à la rue de la Sorbonne je me trouvai entourée d’une double rangée de gardes mobiles protégés de boucliers carrés en métal, et armées de matraques.

« Cette haie menait les étudiants j’au car de police qui se trouvait un peu plus haut dans la rue (d’autres cars de police se trouvaient également tout le long de la rue de la Sorbonne). La lenteur de l’évacuation de la cour était liée au fait que les étudiants qui sortaient ne pouvaient se disperser librement, mais que tous étaient dirigés d’office vers ces cars de police.

« Moi-même, je fus relâchée après avoir pu montrer que je travaillais dans la rue de la Sorbonne et n’étais pas étudiante.

« Un peu plus tard, vers 17 h 30, des grenades lacrymogènes éclatèrent (je crois sur la place de la Sorbonne). L’accès de la rue de la Sorbonne était bloqué par les forces de police situées dans le bas de celle-ci. »

Voici le récit d’un étudiant coffré suite à sa participation au rassemblement contestataire à la Sorbonne :

« 15 heures : Cour de la Sorbonne. Je participe avec ma femme à la manifestation organisée. L’atmosphère est au calme. Quelques discours : Cohn-Bendit, Sauvageot, Chisseray. Le service d’ordre de l’U.N.E.F. garde calmement l’entrée de la Conciergerie ou l’entrée de la rue des Ecoles. Un orateur annonce que Paris vient d’être choisi comme siège des négociations pour le Vietnam : gros applaudissements.

Tous les occupants sont rassemblés au pied de la chapelle, assis ou debout sur les marches. Et soudain, une annonce : « Ils arrivent. » La plupart pensent qu’il s’agit de groupes Occident qui veulent pénétrer à l’intérieur de la Sorbonne.

Une voiture et un panneau sont placés le long de la porte de la galerie de la rue des Ecoles. Les participants se resserrent sur les escaliers de la chapelle. Certains ont un morceau de bois qui vient d’une Vieille table délabrée qui traînait dans un coin de la cour (et non pas de mobiliers détériorés, comme l’a dit M. Peyrefitte).

Mais surprise, par une aile latérale, pénètre une masse impressionnante de gardiens, casqués, lunettes, boucliers, tels des chevaliers teutoniques avec un côté Obélix.

L’atmosphère alors se tend, tout le monde se resserre près des marches. Le service d’ordre de l’UNEF recommande le calme et tend les mains pour canaliser les manifestants en nous demandant d’évacuer la cour de la Sorbonne.

Ce qui se fit. Mais quelle surprise ! En sortant de la cour, nous ne vîmes point les commandos Occident ou autres groupes, mais bien les gendarmes casqués qui nous font monter dans les camions blindés.

Nous montons dans le premier camion. Le policier devant nous soulève son siège avant et en sort, avec une satisfaction évidente, des barres de cuivre (je crois) qu’il passe à ses collègues qui sont à l’extérieur. Le chauffeur du car exprime que « dans un moment ça va chauffer » car des cordons de C.R.S. arrivent. Nous sommes coincés au milieu des agents et de la foule. Au bout d’un moment, le camion démarre suivi de beaucoup d’autres.

On nous emmène d’abord au commissariat de Saint-Sulpice, puis à Notre-Dame-des-Champs. Et alors, c’est la longue attente des identifications individuelles ; puis on nous entasse à la cave où bientôt nous nous retrouvons au nombre de deux cents personnes environ.

Il est 18 heures. En attendant la « libération », des groupes de discussion se forment, ce sont déjà les comités d’action. »

Voici un autre témoignage :

« Je passais boul’Mich, vers 18 heures, arrivé à proximité d’un cordon de C.R.S., un gradé m’a sommé de faire demi-tour, ce que je fis sans protester, puis je pris un coup de matraque derrière la tête, puis ils ont chargé sur les quelques personnes, dont moi, qui étaient boul’Mich, après quoi je fus emmené au poste jusqu’à une heure du matin pour un contrôle d’identité, après m’avoir copieusement injurié et menacé, je pus enfin regagner mon hôtel.

Le lendemain je fus voir un médecin puis à l’Hôtel-Dieu pour des radios. Depuis ce jour, j’ai des migraines et des saignements de nez.

J’ai essayé de déposer une plainte au commissariat d’où je fus éjecté très incorrectement. »

Un autre témoignage :

« Le vendredi 3 mai, des brigades de C.R.S. ont chargé sur tous les gens qui se trouvaient dans les rues, sans faire aucune distinction entre les manifestants et les non-manifestants. Ils ont notamment matraqué un jeune motocycliste.

« Ces faits ne sont sans doute pas parmi les plus marquants, mais je tiens tout de même à vous en faire part, car je ne peux oublier les cris des blessés de cette nuit tragique.  »

Un autre encore :

« L’un des gardes s’en prit à une jeune fille blonde, vêtue d’un tailleur bleu marine, qui s’était réfugiée sous un porche, près du cinéma « le Latin ». Il la matraqua sauvagement (dix à vingt coups violents sur la tête et le cou).

La jeune fille, chancelante, tituba jusqu’au banc qui se trouve devant le cinéma et s’écroula sans connaissance.

L’ambulance que l’on avait appelée immédiatement n’est arrivée qu’une heure plus tard. La jeune fille n’avait pas repris connaissance. Si la jeune fille vit encore et si elle souhaite porter plainte, nous sommes prêts à lui apporter notre témoignage. »

Un témoignage encore :

« Je remontais le boulevard Saint-Michel, avec dans les bras un enfant d’un an, il était environ 18 h – 18 h 30, je me suis trouvée prise dans la manifestation, je n’ai reçu aucun coup de la part d’étudiants, mais presque au niveau de la place de la Sorbonne, il y a eu une charge de C.R.S. qui matraquaient les passants sans discrimination, exemples : une vieille femme, une jeune maman ont reçu des coups. J’ai reçu un coup de matraque, le bébé caché sous ma veste a reçu aussi un choc qui a laissé un « bleu ».

Devant le café du Départ, j’ai vu à 20 h 30, le même jour, un motocycliste arrêté et matraqué par un policier qui disait « circulez-circulez ». Un monsieur âgé s’interpose « ne le battez pas, il n’a rien fait, il arrive, il ne manifeste pas. » Le monsieur est frappé par un premier C.R.S., se protège la figure, un second C.R.S. intervient et frappe : « Ça vous apprendra à toucher à mon camarade. » La femme du monsieur crie, pleure : « Ne le battez pas comme cela, laissez-le » ; elle est battue également, presque évanouie. »

Un autre témoignage encore, d’une personne de nationalité suisse :

« Je me trouvais place Edmond-Rostand, isolé sur le trottoir à l’angle du boulevard Saint-Michel lorsqu’un agent de la force publique, casqué et matraque en main, m’a frappé sur la tête à coups de matraque malgré mes vives protestations alléguant que j’étais un touriste, puis m’a intimé l’ordre de déguerpir.

J’obtempérai en descendant vers l’Odéon, mais un commando d’une dizaine de C.R.S. remontait sur le même trottoir.

Le premier policier leur cria en me désignant :  Tapez-lui dessus ! Tapez-lui dessus !

Je tentai de m’effacer pour les laisser passer, mais six ou sept d’entre eux m’assaillirent et me frappèrent sauvagement à la tête à coups de matraque et à coups de pied au bas du corps. Je réussis à m’enfuir, le nez ensanglanté. 

Je vis notamment un jeune couple et un noir qui passaient simplement rue Cujas, qui furent conduits dans un car stationné devant la place de la Sorbonne, par la rue de la Sorbonne, les bras tordus derrière le dos et à coups de matraque, le noir recevant deux fois plus de coups que les autres. »

Un dernier, soulignant le racisme :

« Le vendredi 3 mai, voulant me rendre au cinéma, je descendais la rue Cujas vers 19 h 30 et je regardais les manifestations, très calmement ; un autre individu regardait aussi, très calme également ; à un moment, la force de l’ordre nous enjoignit de remonter la rue Cujas. Nous le fimes très lentement et un agent des forces de l’ordre, avisant un curieux, assez grand, légèrement basané et coloré, le bouscula puis lui appliqua un violent coup de matraque avec ces mots : « Tiens, voilà pour toi, l’Arabe ».

Deux jeunes hommes blancs, un noir et une jeune fille se sont enfuis vers la rue Cujas. Au coin de la rue Cujas et de la rue Victor-Cousin, il y avait des forces de police. Elles les ont interpellés, les ont pris par le col et jetés dans le car. Le jeune homme noir a été tout de suite jetés dans le car. Le jeune homme noir a été tout de suite frappé, tiré par terre jusqu’au car où il est jeté aussi. Ensuite, on a entendu le bruit de matraques en frappant. Après ils sont partis. »

Catégories
Politique

Mouvement du 22 mars : « Votre lutte est la nôtre! »

Voici le tract du Mouvement du 22 mars

 

Catégories
Politique

La journée du 3 mai, le début de « mai »1968 »

Comprendre comment mai 1968 s’est lancé n’est pas forcément évident, aussi voici un aperçu relativement simple présentant ce qui s’est passé le 3 mai, où a commencé la « boule de neige » de mai 1968.

Le doyen de la faculté de Nanterre était quelqu’un de très cultivé : Pierre Grappin avait été résistant durant la seconde guerre mondiale, et un germanophone si averti qu’il réalisa le principal dictionnaire franco-allemand, appelé d’ailleurs « le Grappin ».

Cependant, il avait décidé que l’agitation ayant lieu à Nanterre nécessitait une sorte de pause. Voici sa justification de la fermeture de Nanterre :

« En conséquence, après accord du ministre de l’Education nationale et du recteur de l’Académie de Paris, j’ai décidé de prendre les mesures suivantes : à partir du vendredi 3 mai 9 heures, et jusqu’à nouvel ordre, les cours et travaux pratiques sont suspendus à la faculté des Lettres de Nanterre. »

France-Soir parle alors le lendemain d’une « décision sans précédent », Pierre Grappin disant au journal :

« Il s’agit là de mesures exceptionnelles dont je mesure toute la gravité mais que les excès de quelques-uns ont rendues nécessaires. »

C’est une décision purement administrative, censée calmer le jeu. Cependant, parallèlement, la pression s’exerce sur les rebelles ; la veille de la fermeture, Le Monde constatait ainsi :

« Le parquet du tribunal de Paris a décidé ce mardi d’ouvrir une information judiciaire pour « menaces verbales de mort sous condition et coups et blessures volontaires », à la suite de la plainte déposée par un militant de Nanterre de la Fédération nationale des étudiants de France, M. de Kervenoël, contre un des leaders du mouvement d’extrême gauche de Nanterre, M. Daniel Cohn-Bendit. »

Daniel Cohn-Bendit et cinq autres étudiants étaient également convoqués à une réunion du conseil de discipline de l’Université de Paris.

A cela s’ajoute l’attaque des fascistes du groupe « Occident », raconté de la manière suivante par Marcel Durry,  doyen de la faculté des lettres de Paris :

« Un incendie a été allumé ce jeudi matin à la Sorbonne dans les locaux de la Fédération des groupes d’études de Lettres, l’organisation des étudiants de la faculté des Lettres de Paris.

Le feu a ravagé une salle de réunions et détruit les meubles et le matériel de bureau et les vitres de la salle.

D’autre part, le téléphone a été arraché. Les dégâts sont estimé a à 10.000 francs au minimum.

L’incendie a été, semble-t-il, allumé par des éléments d’extrême droite. Le cercle barré d’une croix qui constitue l’insigne du mouvement « Occident », a en effet été peint sur la cheminée de la pièce. »

Voici la réaction du syndicat étudiant, l’UNEF :

« Les fascistes du mouvement « Occident » ont attaqué la F.G.E.L., l’ont mise à sac et incendiée. Dans le journal Minute paru ce jour même, ils annoncent leur intention d‘attaquer les militants de Nanterre.

La semaine dernière déjà, ils avaient attaqué l’assemblée générale de l’U.N.E.F. et, deux jours après, ses locaux. Les concentrations importantes de troupes fascistes encadrées d’anciens paras ou légionnaires, concentrations qui se font depuis plusieurs jours avec la montée de troupes fascistes de province font peser une lourde menace sur la démocratie et la vie même des militants progressistes.

L’U.N.E.F. appelle toutes les organisations et les syndicats, particulièrement les syndicats d’enseignants, à se joindre à elle pour organiser la réponse aux attaques fascistes. Tenant compte de ces événements, de la liaison manifeste qui existe entre la Fédération des étudiants de Paris et le groupe « Occident », l’assemblée générale de l’U.N.E.F., prévue pour ce jeudi soir, est reportée à une date ultérieure. »

Les activistes de Nanterre font alors un meeting à la Sorbonne le 3 mai 1968 et le recteur de Paris Jean Roche panique devant ces 200 activistes, surtout qu’en raison des menaces d’attaques du groupe « Occident », le service d’ordre est conséquent.

Il appelle la police, qui intervient, provoquant une réaction virulente des étudiants.

Le journal Combat raconte, le lendemain et le surlendemain, les événements :

« Plusieurs centaines de gardes mobiles et de gardes municipaux, casqués, armés de matraques, de boucliers et de gants de protection, ont pénétré à l’intérieur de la Sorbonne par l’entrée principale, tandis que plusieurs centaines d’étudiants massés rue des Ecoles, criaient : « CRS SS », « Gestapo », « Libertés syndicales ».

« Les forces de l’ordre ont gagné la cour intérieure de la Sorbonne où elles se sont déployées en étau. Par une pression lente et continue elles ont refoulé vers la sortie de la rue de la Sorbonne les quelque 400 militants l’U.N.E.F. et des organisations révolutionnaires qui continuaient à y tenir un meeting. »

La police embarqua 574 personnes, mais les étudiants s’étaient alignés sur la position de défense des activistes. L’affrontement était posé, le choc inévitable, de par l’arrière-plan historique : les étudiants se posaient en première ligne contre le régime, s’y opposant de manière frontale.

Catégories
Politique

Jeunesse Communiste Révolutionnaire : « Travailleurs, étudiants »

Alors que progresse le mouvement de 1968, la Jeunesse Communiste Révolutionnaire entend proposer des démarches concrètes autour de ses mots d’ordre.

Catégories
Politique

Le troisième numéro d’Action

Le troisième numéro d’Action, au format pdf (cliquer sur l’image pour l’obtenir) ; rappelons qu’il a été lancé comme organe du syndicat étudiant l’UNEF, des CAL (comités d’action lycées) et du mouvement du 22 mars.

Catégories
Politique

PCMLF : « En avant pour un pouvoir populaire révolutionnaire »

Participant de plein-pied à mai 1968, le Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France voyait dans la situation la possibilité de démasquer le Parti Communiste Français devenu à ses yeux révisionniste et de s’affirmer comme nouveau pôle communiste. Voici son communiqué du 20 mai 1968

EN AVANT POUR UN POUVOIR POPULAIRE RÉVOLUTIONNAIRE

Déjouons les manoeuvres des politiciens au service de la bourgeoisie,

Arrachons leur le pouvoir à la base dans les entreprises, dans les universités.

ORGANISONS NOUS A LA BASE ET DANS L’ACTION

 » Pour faire la révolution, il faut qu’il y ait un parti révolutionnaire.

Sans un parti révolutionnaire, sans un parti fondé sur la théorie révolutionnaire marxiste-léniniste et le style révolutionnaire marxiste-léniniste, il est impossible de conduire la classe ouvrière et les grandes masses populaires à la victoire dans leur lutte contre l’impérialisme et ses valets. » Mao Tsé toung

Au troisième jour du grand mouvement révolutionnaire contre le pouvoir des monopoles, la grève paralyse toutes les industries, toutes les administrations et services publics, toute l’université.

Malgré le refus des états-major syndicaux de lancer le mot d’ordre de grève générale illimitée, les travailleurs unis à la base et dans l’action, débordent largement tous ceux qui s’emploient à freiner le développement de la lutte.

Malgré les consignes bureaucratiques et autoritaires de Georges Seguy, secrétaire général de la C.G.T., les Ouvriers pratiquent des formes nouvelles de lutte des classes plus dures et plus efficaces que celles déjà expérimentées en 1936 et en 1947 : par exemple, ils enferment dans leurs bureaux les directeurs et présidents-directeurs généraux.

Au surplus, ils se refusent à limiter leurs objectifs de combat à des revendications seulement sociales, comme le voudraient Seguy et Descamps, et politisent spontanément le mouvement en posant comme exigence prioritaire le renversement du POUVOIR DES MONOPOLES.

De tels faits attestent d’une très grande combativité des masses laborieuses.

Les adhérents et militants de base de la C.G.T. comme du P. »C ».F. agissent souvent de façon positive contrairement aux directives qu’ils reçoivent de leurs plus hauts dirigeants et qu’ils désapprouvent en de nombreux cas.

Face à cette situation dont ils n’ont pas eu l’initiative et qui les a débordés, les dirigeants révisionnistes et réformistes des « grandes centrales », C.G.T. entête, essayent de tenir avec habilité et souplesse leur rôle historique de défenseurs de la société capitaliste, infiltrés dans les rangs de la classe ouvrière.

C’est pourquoi ils multiplient leurs efforts pour empêcher tout contact entre les ouvriers en grève et les étudiants qui ont allumé les premiers, et au prix de leur sang, l’étincelle de la révolte contre le régime qu’incarne le directeur de banque Pompidou.

Ils tentent également d’isoler les grévistes les uns des autres.

Dans ces entreprises, ils reçoivent l’appui actif et intéressé de tous les organes de la bourgeoisie affolée : grande presse, radio et télévision, qui reprennent hâtivement les calomnies et arguties du bureau politique du parti de Waldeck Rochet ou du bureau confédéral de Georges Séguy, et qui utilisent abondamment l’actif soutien apporté à De Gaulle tant par les ultra-révisionnistes de Roumanie que par la clique dirigeante de l’Union Soviétique.

LES TROIS ASPECTS PRINCIPAUX DE LA SITUATION

La situation ainsi créée se caractérise donc :

l°- par la volonté révolutionnaire des travailleurs manuels et intellectuels auxquels vont se joindre les masses paysannes. L’ensemble de ces couches sociales représente l’immense majorité des forces productives de la nation, aspirant au socialisme.

2°- par la résistance du pouvoir des monopoles, que manifestent les nombreuses réunions tenues par Pompidou et ses ministres avec De Gaulle revenu précipitamment de Roumanie en présence des plus hauts responsables des organes répressifs de l’état bourgeois; armée, police, gendarmerie et par l’alliance ouverte dans la rue des groupes activistes gaullistes et fascistes.

3°- par les manoeuvres des dirigeants révisionnistes et réformistes des syndicats, du faux parti communiste, et de la social-démocratie, tous ces politiciens sclérosés et corrompus annonçant à grand tapage qu’ils sont prêts à « assumer leurs responsabilités » et à « s’emparer du pouvoir » tout en s’efforçant de rassurer la bourgeoisie qu’ils entendent sauver et servir une fois de plus.

UNITE A LA BASE ET DANS L’ACTION !

Dans ces conditions, le comité central du Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France, traduisant la volonté profonde des travailleurs de notre pays, lance un appel solennel pour que se réalise, à la base et dans l’action, la plus solide unité de combat révolutionnaire entre ouvriers, paysans et étudiants.

Seule une telle unité, solidement implantée dans les usines, sur les chantiers, dans les administrations et services publics, dans les campagnes, dans les facultés, lycées et collèges, peut parvenir au renversement du pouvoir des monopoles, empêcher que la bourgeoisie ne recoure, pour préserver ses intérêts et privilèges de classe, au service des politiciens sociaux -démocrates et révisionnistes, stopper net enfin toute tentative de putch de caractère fasciste.

COMMENT REALISER L’UNITE DU COMBAT REVOLUTIONNAIRE ?

Cette unité est possible à la condition que les masses agissent conformément à la volonté des ouvriers les plus exploités, des paysans les plus pauvres, des étudiants les plus avancés.

Pour permettre à cette volonté de s’exprimer et de se consolider, les masses en mouvement doivent constituer d’urgence et partout, des comités de base, conseils ouvriers, paysans ou étudiants, plaçant sous leur contrôle permanent tout dirigeant qu’elles désignent et qui reste susceptible d’être immédiatement remplacé s’il trahit.

Au surplus, ces comités de base doivent établir immédiatement des liaisons entre eux pour coordonner leur combat.

Si le pouvoir des monopoles est contraint à se démettre, la bourgeoisie essayera de le remplacer par des formes parlementaires qui ont déjà fait la preuve de leur nocivité.

Mitterand, Mendès-France, Waldeck Rochet, et Georges Séguy lui offrent déjà leurs services dans ce but.

Le pouvoir devra rester aux masses populaires dont la vigilance devra s’exercer avec intensité pour empêcher que ne soit usurpée leur victoire révolutionnaire.

Il convient tout spécialement de déjouer les manoeuvres de la social-démocratie qui sont appuyées en sous-main par l’impérialisme américain et de ce fait bénéficient des faveurs des centristes Lecanuet, Giscard d’Estaing et autres réactionnaires de tous poils.

VIVE LE POUVOIR OUVRIER DANS LES USINES !

VIVE LE POUVOIR DES PAYSANS PAUVRES A LA CAMPAGNE !

VIVE LE POUVOIR DES ETUDIANTS REVOLUTIONNAIRES A L’UNIVERSITE !

VIVE LE POUVOIR POPULAIRE ET REVOLUTIONNAIRE !

Paris, le 20 Mai 1968 – 14 heures

Catégories
Politique

Henri Weber et mai 1968

A la mi-avril 2018, Henri Weber signait une tribune dans Libération, intitulée « Il n’y aura pas un nouveau Mai 68 ». Il y analysait la différence entre aujourd’hui et il y a cinquante ans ; il la signait en tant que « Ancien sénateur et député européen socialiste », mais en réalité son identité politique est bien plus complexe, ce qui donne à son opinion une valeur très importante.

Henri Weber est en effet un des cadres de l’Union des Etudiants Communistes qui donne naissance à la  la Jeunesse communiste révolutionnaire en 1965. Il joue un rôle important durant mai 1968 de par sa fonction au sein de la JCR.

Dans la foulée, il devient l’un des plus hauts responsables de la Ligue communiste (puis Front communiste révolutionnaire, puis Ligue communiste révolutionnaire), étant notamment directeur de l’hebdomadaire Rouge et de la revue Critique communiste jusqu’en 1976, ce qui lui confère un poids idéologique très important.

A cela s’ajoute qu’il appartenait également à la direction de la « Commission très spéciale », c’est-à-dire l’organisation clandestine, à visées militaristes ou militaires, de la Ligue. Le changement de nom de cette dernière a comme origine l’attaque d’un meeting d’extrême-droite en 1973 à Paris, organisé conjointement avec le Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France.

Le film « Mourir à trente ans », de 1982, retrace ce moment « chaud » de la Ligue, avant le tournant institutionnel.

Henri Weber reflète justement ce tournant. Il arrête la politique en 1981, pour rejoindre le Parti socialiste, dont il devient une figure d’importance. Voici donc comment il voit les choses, cinquante ans après, à partir de l’identité d’un ex-révolutionnaire ayant rejoint les socialistes.

On est en droit de considérer qu’il réduit tout de telle manière à justifier sa propre position se limitant à une dénonciation du libéralisme économique.

Il n’y aura pas un nouveau Mai 68

Ce qui explique la puissance et l’ampleur du soulèvement de la jeunesse il y a cinquante ans, c’est la combinaison de trois facteurs.

Le premier est «sociétal», comme on dit aujourd’hui, ou culturel : la France s’était beaucoup modernisée sur les plans technologique et économique depuis 1945.

Elle s’était industrialisée et urbanisée à pas de géant. Mais sur les plans des mœurs et des rapports d’autorité elle était restée engluée dans le XIXe siècle. L’autoritarisme et le traditionalisme répressifs, hérités de la société catholique et rurale, pesaient de tout leur poids sur la jeunesse.

La révolte de celle-ci fut d’abord culturelle : capillaire, vestimentaire, musicale, sexuelle, esthétique.

Le second facteur fut politique: dans les années 60 du siècle dernier, «le fond de l’air était rouge», comme le titrait le cinéaste Chris Marker. Les peuples coloniaux avaient pris les armes pour conquérir leur indépendance et volaient de victoires en victoires, au prix de longues et sanglantes guerres de libération nationale.

C’était «l’heure des brasiers». Les «baby boomers» sont venus massivement à la politique par indignation et révolte contre les exactions des impérialismes, occidentaux et soviétique, que leur montrait quotidiennement le journal télévisé.

Le troisième facteur fut universitaire : entre 1962 et 1968, le nombre des étudiants a triplé, sans que les méthodes pédagogiques et les programmes ne soient adaptés à ce nouveau public. La réponse des autorités fut au contraire principalement malthusienne : le plan Fouchet préconisait (déjà !) la sélection à l’entrée des facultés.

A cela s’ajoute en France un autoritarisme patronal spécifique renforcé par la victoire du général de Gaulle en 1958-62. Les syndicats ouvriers en étaient réduits à manifester devant le siège du CNPF (le Medef d’alors) pour obtenir l’ouverture de négociations !

Ce n’est pas par hasard que «l’étincelle» étudiante a si aisément «mis le feu à la plaine» ouvrière. Celle-ci était sèche et archi-sèche.

Cette combinaison a nourri un lourd contentieux entre la jeunesse et la société des adultes. Celui-ci a engendré des situations d’autant plus explosives que la génération des baby-boomers était habitée par un formidable optimisme historique : l’homme avait marché sur la Lune, la croissance économique dépassait 5%, le plein-emploi semblait assuré, la société de consommation, d’abondance, de loisir déployait ses promesses…

Le contexte sociétal, politique, social, idéologique est bien différent aujourd’hui, même si les raisons de mécontentement ne manquent pas.

Le contentieux entre la jeunesse et la société adulte existe, mais il est  incomparablement moins fort. La France de 2018 est beaucoup plus libérale, au sens politique et culturel du terme, que celle des années 60. Le contexte géopolitique et idéologique a profondément changé.

Désormais «le fond de l’air est brun» : les populismes xénophobes et les «démocratures» ont le vent en poupe, les démocraties sont fragilisées et menacées. L’institution universitaire demeure en crise, mais sa réalité s’est considérablement diversifiée.

A côté des «facs parkings» existent beaucoup d’établissements de bonne qualité, voire d’excellence, y compris dans les filières techniques courtes. Ce contentieux est aussi plus fragmenté : beaucoup plus fort chez les jeunes issus de l’immigration et relégués dans les banlieues déshéritées, que chez ceux des centres-villes.

Des conflits sectoriels, durs et prolongés, sont probables, et mêmes inévitables, en cette ère de changements accélérés et de réformes nécessaires et, pour certaines, impopulaires.

Des «convergences» partielles des luttes peuvent se produire, mais sûrement pas une explosion généralisée comparable, même de loin, à celle de 1968. Il faudrait pour cela qu’une alternative politique et sociétale crédible existe et soit portée par des forces capables de la mettre en œuvre.

Ce qui, on en conviendra, est loin d’être le cas. Les syndicats réformistes et la gauche social-démocrate doivent mettre à profit les mobilisations en cours pour faire valoir leurs propres solutions progressistes, alternatives à celles du gouvernement d’Edouard Philippe.

Catégories
Politique

Jeunesse Communiste Révolutionnaire : « Le régime en question »

Au 16 mai 1968, la Jeunesse Communiste Révolutionnaire considère que le régime est aux abois.

Catégories
Politique

Le second numéro d’Action

Le second numéro d’Action, au format pdf (cliquer sur l’image pour l’obtenir) ; rappelons qu’il a été lancé comme organe du syndicat étudiant l’UNEF, des CAL (comités d’action lycées) et du mouvement du 22 mars.

 

Catégories
Politique

Jeunesse Communiste Révolutionnaire : « Nanterre : de la contestation de l’université capitaliste à la contestation de la société capitaliste »

La Jeunesse Communiste Révolutionnaire était au moment de mai 1968 une organisation déjà solidement implantée ; même si elle n’est née qu’en 1966, elle profitait d’être construite par le Parti communiste internationaliste né en 1944 et relevant du courant trotskiste dit « frankiste ».

Catégories
Politique

Le premier numéro d’Action

50 000 exemplaires du premier numéro d’Action sont vendus à la criée le 7 mai 1968, lors des manifestations. Le voici au format pdf (cliquer sur l’image pour l’obtenir) ; il a été lancé comme organe du syndicat étudiant l’UNEF, des CAL (comités d’action lycées) et du mouvement du 22 mars.

 

Catégories
Politique

PCMLF : « Travailleurs et étudiants unissez-vous »

Issu en partie du Parti Communiste Français et reconnu officiellement par la Chine, le Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France était l’une des deux principales organisations se revendiquant de Mao Zedong alors qu’arrive mai 1968. Voici son tract du 6 mai 1968.

TRAVAILLEURS ET ÉTUDIANTS

UNISSEZ – VOUS CONTRE LE POUVOIR DES MONOPOLES ET CONTRE LE FASCISME!

VIVE LA JUSTE LUTTE DES ÉTUDIANTS !

« Le monde est autant le vôtre que le nôtre, mais au fond c’est à vous qu’il appartient. Vous les jeunes, vous êtes dynamiques, en plein épanouissement comme le soleil à 8 ou 9 heures du matin. C’est en vous que réside l’espoir. »
MAO TSE-TOUNG

Le système capitaliste mondial est entré dans une période de crise économique, politique et idéologique dont il ne se relèvera pas.

La guerre victorieuse du peuple vietnamien ébranle jusque dans ses fondements l’impérialisme américain et stimule les luttes des peuples du monde entier.

Un monde nouveau se lève à l’Orient. La République Populaire de Chine, sous la direction de Mao Tsé-toung, Lénine de notre époque, indique le chemin à suivre pour tous les révolutionnaires.

Les régimes monopolistes des U.S.A. et d’Europe occidentale sentent leur fin prochaine. Pour eux, la seule issue, c’est le recours aux méthodes terroristes de gouvernement, à la violence permanente contre la classe ouvrière et le peuple, c’est-à-dire au fascisme.

La recrudescence de l’activité des groupuscules fascistes du type « occident  » est un signe de cette décadence.

Le journal fasciste « Minute » a ouvertement appelé au meurtre des étudiants, en les désignant sous les termes d' »enragés rouges ».

Il a été suivi en cela, par toute la presse et les moyens de propagande au service des monopoles.

La direction du P.  » C.  » F. est venue au secours du chœur des réactionnaires, en reprenant les mêmes arguments, en appelant à la répression contre les étudiants en lutte, en essayant de dresser la classe ouvrière contre eux.

Leurs manœuvres ont lamentablement échoué devant le soutien actif d’un nombre toujours plus grand de travailleurs aux luttes et manifestations des étudiants.
La faillite de la direction révisionniste du P.  » C.  » F. parmi les intellectuels révolutionnaires annonce sa faillite totale dans la classe ouvrière.

La classe ouvrière, de plus en plus exploitée et opprimée, voit grandir sa colère et envisage de plus en plus l’action directe contre le capitalisme.
L’accueil chaleureux que les travailleurs ont réservé aux marxistes-léninistes le 1er mai, de la République à la Bastille, le prouve assez.

Nos justes mots d’ordre:

o  » Unité à la base et dans l’action « ,

o  » A bas les monopoles « ,

o  » Vive la victorieuse guerre du peuple vietnamien « ,

o les chants révolutionnaires de l' » Internationale – et de la « Jeune Garde » ont été repris tout au long du
parcours par des milliers de voix sans que les permanents révisionnistes aux ordres de Waldeck-Rochet puissent nous empêcher de défiler avec tous les autres travailleurs, et obtenir leur soutien.
Les intellectuels et les étudiants, en particulier les étudiants d’origine pauvre ouvrière et paysanne, ressentent particulièrement la crise qui déferle sur notre société décadente.

ILS ONT RAISON DE SE REVOLTER !

Le plan Fouchet, réforme ultra-réactionnaire de l’enseignement, au service exclusif des monopoles, les touche dans leurs intérêts les plus profonds puisqu’il vise à rejeter la majorité et en premier lieu ceux issus des classes laborieuses de l’Université, à les mettre à la disposition des intérêts capitalistes les plus vils.

TRAVAILLEURS ET ETUDIANTS, UNISSEZ-VOUS DANS LE MEME COMBAT CONTRE LE POUVOIR DES MONOPOLES ET LA MONTEE DU FASCISME !

Les intérêts des étudiants progressistes rejoignent ceux des travailleurs. Il ne peut y avoir d’Université démocratique dans le cadre de la fausse démocratie de la bourgeoisie.

Seul le socialisme permettra la réalisation d’un système nouveau d’enseignement qui réponde aux aspirations légitimes des intellectuels progressistes.

Toutes les solutions réformistes propagées par la fausse gauche  » (Mitterrand et Cie) et par la direction du P.  » C.  » F. ne sont que poudre aux yeux visant à mieux préparer la soumission des intellectuels au système monopoliste d’Etat, en les berçant d’illusions pour qu’ils abandonnent la lutte.

La lutte des étudiants après les grands combats ouvriers de ces dernières années annonce les grands bouleversements qui vont avoir lieu dans les pays capitalistes.
Elle annonce les luttes révolutionnaires de la classe ouvrière et du peuple, luttes qui balaieront le système capitaliste.

C’est pourquoi les étudiants révolutionnaires doivent résolument rejoindre le combat de la classe ouvrière et se placer sous sa direction politique.
Les étudiants en lutte contre les monopoles ne pourront triompher qu’à cette condition C’est pourquoi les militants du Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France participent au coude à coude aux manifestations des étudiants et se battent résolument à leurs côtés contre le pouvoir des monopoles.

C’est pourquoi le P.C.M.LF. lutte résolument pour lier le combat des jeunes intellectuels a celui des travailleurs, pour expliquer aux travailleurs le sens profond de la lutte des étudiants, afin de briser l’isolement dans lequel la bourgeoisie et la direction révisionniste du P.  » C.  » F. tente de les enfermer. Il compte également pour cela sur l’aide de tous les anti-monopolistes sincères.

6 mai 1968 – Le Comité central du Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France.

– Travailleurs, étudiants, luttons tous ensemble, mobilisons-nous en permanence
contre le pouvoir des monopoles, contre la montée du fascisme !

– Peyrefitte et Fouchet à la porte !

– Grimaud (préfet de police), Roche (recteur) démission !

– Libérez les emprisonnés ! Levez les sanctions !

– Travailleurs, étudiants révolutionnaires, rejoignez le P.C.M.L.F., le seul Parti communiste véritable.

Catégories
Politique

UJCML : Vive les étudiants de Nanterre et de Paris

Voici le tract du 4 mai 1968 de l’Union de la Jeunesse Communiste Marxiste-Léniniste, une des deux organisations maoïstes de 1968, qui est née dans le mouvement étudiant et qui s’est notamment caractérisé par une politique d’établissement dans les usines, ainsi que par une intense activité de soutien au Vietnam avec les Comités Vietnam de Base. Les images sont tirées du film de 1967 La Chinoise, de Jean-Luc Godard, lié à l’UJCML et à son prolongement, la Gauche Prolétarienne.

Depuis plus d’un mois, un nombre grandissant d’étudiants et de jeunes se révoltent et luttent contre la bourgeoisie. Les étudiants de Nanterre ont dans cette révolte joué un rôle d’avant-garde.

Toutes les forces répressives de la bourgeoisie se sont mobilisées pour écraser ce mouvement; elles ont utilisé la presse, les bandes fascistes, l’intimidation par l’administration universitaire, les arrestations et enfin l’agression de forces policières massives.

Tous les réactionnaires (y compris la clique dirigeante révisionniste), pris de panique, ont constitué un front uni et fomenté un vaste complot contre les étudiants : calomnier les étudiants progressistes, déverser un flot de mensonges, tout mettre en oeuvre pour les isoler de la population et permettre ainsi leur écrasement par les bandes fascistes et les troupes d’agression policière.

Mais cette offensive de la réaction, loin d’intimider les étudiants, a renforcé leur résolution.

Le mouvement des étudiants progressistes s’est impétueusement développé.

Malgré les contre-courants la masse des étudiants progressistes a brisé les manoeuvres d’encerclement et s’est orientée vers le peuple, vers les larges masses de la classe ouvrière, des travailleurs et de la population.

LE MOUVEMENT DE SOUTIEN AUX LUTTES DU PEUPLE CONNAIT UN GRAND ESSOR.

Le 3 mai, pendant près de 6 heures, de 17 heures à 23 heures environ, la masse des étudiants du Quartier Latin s’est bravement dressée contre les C. R. S. et la répression.

Comptant sur leurs propres forces et bénéficiant de l’appui de la population, ils se sont spontanément organisés et ont sévèrement châtié les provocations policières.

Déjà le mouvement de résistance aux brutalités policières se développe parmi les masses populaires.

Le 3 mai, une partie de la population s’est elle-même portée aux côtés des étudiants pour les aider à résister à la violence.

Les C. R. S. se sont comportés à l’égard de la population comme des troupes d’occupation en territoire ennemi, s’en prenant brutalement aux masses sans aucune distinction.

Ils ont suscité ainsi une grande colère dans la population.

Des masses populaires de plus en plus larges sont frappées depuis des mois et des années par la répression et la violence contre-révolutionnaire. Ces derniers temps les C. R. S. et autres troupes d’agression contre la population se sont livrés à des attaques brutales à l’égard des paysans de Redon, puis à l’égard des ouvriers et des masses populaires du Mans, de Caen, de Redon qui ont vaillamment combattu et châtié les agresseurs.

Ainsi des masses de plus en plus grandes d’ouvriers, de paysans, et d’étudiants prennent conscience de la nécessité de mettre un terme aux agressions policières, de faire cesser la répression.

Dans leur lutte contre la répression, les étudiants doivent résolument s’unir avec les larges masses populaires, et en particulier de la classe ouvrière, qui combattent depuis longtemps le même ennemi.

Ils doivent se mettre au service des travailleurs, force principale de la révolution.

Ouvriers, paysans, étudiants doivent s’entraider et se soutenir mutuellement pour défendre la liberté populaire et mettre en échec la violence policière.

Si les larges masses populaires des ouvriers, des paysans, des étudiants, persévèrent dans la lutte, conquièrent leur unité et forment un vaste front contre la répression policière, elles briseront inéluctablement les plans d’agression de la bourgeoisie.

Catégories
Politique

Le «premier» premier mai en 1968 et la nature du premier mai

C’est quelque chose de fondamentalement méconnu, tellement cela paraît invraisemblable, mais dans les années 1950-1960, les défilés du premier mai étaient interdits par l’État, en raison des guerres d’Indochine et d’Algérie.

Cela signifie qu’à l’époque, la Gauche avait entièrement capitulé au sujet de l’un de ses plus grands symboles. Cela a grandement contribué à la perte de toute un état d’esprit, de toute une tradition, de toute une certaine vision politique de confrontation au lendemain de 1945.

A l’époque, il y avait une grande polarisation et assumer la CGT, c’était assumer la lutte des classes… La CGT elle-même avait fort logiquement des revendications dépassant largement le cadre restreint des mesures sociales.

Malheureusement, l’interdiction acceptée par la Gauche a endormi les travailleurs.

Ainsi, le premier mai 1968, il y a cinquante ans, lors du premier défilé depuis de nombreuses années, ce fut le choc de la confrontation entre la CGT d’un côté, les gauchistes de l’autre, avec notamment les « marxistes-léninistes » (c’est-à-dire les maoïstes) pour qui le « P « C »F », comme ils le désignaient, avait trahi.

Les vieux reprochaient aux jeunes de ne pas avoir le sens des réalités, de mépriser la bataille des acquis ; les jeunes accusaient les vieux d’avoir trahi l’idéal révolutionnaire, d’avoir abandonné le projet d’une société ayant renversé le capitalisme.

Au-delà de la confrontation d’idées, c’est la question de la démarche elle-même qui se posait. En quoi consiste le premier mai ? En une démonstration de force des forces sociales défendant des intérêts économiques ? Ou bien en un rappel des grands idéaux de la Gauche, ceux d’un monde sans exploitation ni oppression ?

L’affiche de 1951, avec des revendications précises et politiques

Le 1er mai en France est, en effet, malheureusement prétexte à des rassemblements syndicaux, alors qu’en réalité, une telle journée devrait être l’expression de la Gauche politique.

Cela reflète le vrai problème de fond de la question sociale en France : en raison de la charte d’Amiens fait par la CGT en 1906 et séparant radicalement la politique de l’activité syndicale, il y a deux mondes qui coexistent, au lieu que la primauté revient à la politique normalement.

Cela a renforcé le syndicalisme réformiste et gestionnaire, totalement coupé sur le plan des idées et des valeurs de ce qu’est la Gauche. C’est la fameuse figure du syndicaliste râleur, collaborant avec le patronat pour avoir ses heures sans travail, collaborant aux projets de l’entreprise, ayant des normes particulièrement sexistes, porté largement sur l’alcool, etc.

Un personnage insupportable, prétendant même représenter la Gauche, alors que son existence dépend des millions et des millions d’euros donnés aux syndicats afin de maintenir leur existence et de pacifier les rapports sociaux.

L’affiche de 1972, où règne le flou et avec la CGT placé au centre, sans drapeau rouge

Les forces conservatrices ont ici très bien joué, ayant très bien comprises l’apolitisme syndicaliste française. Si à partir d’avril 1919 le 1er mai devient une journée chômée, il n’est férié et payé à l’initiative du syndicaliste CGT René Belin.

Sauf que cela se passe en 1941 et que René Belin est alors ministre du travail du régime de Vichy, qui instaura alors la « Fête du Travail et de la Concorde sociale ».

Prétendre que cela n’a pas eu d’influence serait absurde. C’est dans cette identité liée au « travail » et non pas à la Gauche qu’il y a eu l’espace pour le Front National de commencer un rassemblement du premier mai à partir de 1988. Même Nicolas Sarkozy a eu une initiative similaire en 2012, pour célébrer le « vrai travail ».

Il n’y a qu’en France qu’une aberration est possible. Le premier mai devrait avoir un sens politique, pas un sens économique ou social. C’est là, bien entendu, toute la question d’une définition de la lutte des classes.

Catégories
Politique

La naissance du mouvement du 22 mars

Le 22 mars 1968 est une date très importante historiquement, car elle marque la naissance d’un mouvement qui a joué un grand rôle dans le déclenchement de mai 1968 : le mouvement du 22 mars.

En voici le manifeste, consistant en un texte voté par 142 étudiants de Nanterre (2 autres votant contre, 3 autres s’abstenant) occupant dans la soirée et pour la nuit le bâtiment administratif de leur université.

Il part d’une lutte contre la répression, des arrestations ayant suivi le saccage le 20 mars 1968 du siège parisien d’American Express, en solidarité avec le Vietnam. Six personnes avaient été arrêtées, dont Xavier Langlade du service d’ordre de l’organisation trotskiste dénommée Jeunesse Communiste Révolutionnaire, ainsi que Nicoles Boulte, qui jouera par la suite un rôle chez les maoïstes de la Gauche Prolétarienne.

À la suite d’une manifestation organisée par le comité Vietnam naitonal, pour la victoire du peuple vietnamien contre l’impérialisme américain, DES MILITANTS DE CETTE ORGANISATION ONT ÉTÉ ARRÊTÉS DANS LA RUE OU À LEURS DOMICILE PAR LA POLICE.

Le prétexte invoqué était les attentats qui eurent lieu contre certains édifices américains à Paris.
Le problème de la répression policière contre toute forme d’action politique se repose à nouveau.

Après :

Les flics en civil à Nanterre et à Nantes
Les listes noires
La trentaine d’ouvriers et d’étudiants emprisonnés à Caen, et dont certains sont encore en prison
Les perquisitions et arrestations continuelles contre les étudiants de Nantes qui mirent à sac le rectorat…

… Le gouvernement a franchit un nouveau pas. Ce n’est pas aux manifestations que l’on prend les militants, mais chez eux.
Pour nous ces phénomènes ne sont pas un hasard.
Ils correspondent à une offensive du capitalisme en mal de modernisation et de rationalisation. Pour réaliser ce but, la classe dominante doit exercer une répression a tous les niveaux.
La remise en cause du droit d’association pour les travailleurs
L’intégration de la sécurité sociale
Automation et cybernétisation de notre société
Une introduction des techniques psychosociologiques dans les entreprises pour aplanir les conflits de classe (on prépare certains d’entre nous à ce métier)

Le capitalisme ne peut plus finasser.

NOUS DEVONS ROMPRE AVEC DES TECHNIQUES DE CONTESTATION QUI NE PEUVENT PLUS RIEN

Le socialiste Wilson impose à l’Angleterre ce que De Gaulle nous impose.
L’heure n’est plus aux défilés pacifiques comme celui organisé par le SNESUP jeudi prochain sur des objectifs qui en remettent rien en cause dans notre société.

Pour nous l’important est de pouvoir discuter de ces problèmes à l’université et d’y développer notre action.

NOUS VOUS APPELONS À TRANSFORMER LA JOURNÉE DU VENDREDI 29 EN UN VASTE DÉBAT SUR
Le capitalisme en 68 et les luttes ouvrières
Université et Université critique
La lutte anti impérialiste
Les pays de l’est et les luttes ouvrières et étudiantes dans ces pays.

POUR CELA NOUS OCCUPERONS TOUTE LA JOURNÉE LE BÂTIMENT « C » POUR DISCUTER DE CES PROBLÈMES PAR PETITS GROUPES DANS DIFFÉRENTES SALLES.
À chaque étape de la répression nous riposterons d’une manière de plus en plus radicale et nous préparerons dès maintenant une manifestation devant la préfecture des Hauts de Seine.

Catégories
Politique

Slogans de mai 1968

À bas les groupuscules récupérateurs
À bas la société de consommation.
À bas la société spectaculaire-marchande.
À bas le crapaud de Nazareth
À bas le réalisme socialiste. Vive le surréalisme.
À bas les journalistes et ceux qui veulent les ménager
À bas l’État.
À bas le sommaire
Vive l’éphémère
Jeunesse Marxiste Pessimiste
Vive l’Association Internationale des Travailleurs
À bas le vieux monde
À bas l’objectivité parlementaire des groupuscules. L’intelligence est du côté de la bourgeoisie. La créativité est du côté des masses. Ne votez plus.
Abolition de l’aliénation.
Abolition de la société des classes.
L’aboutissement de toute pensée, c’est le pavé dans ta gueule, C.R.S.
L’action ne doit pas être une réaction mais une création
L’action permet de surmonter les divisions et de trouver des solutions.
L’âge d’or était l’âge où l’or ne régnait pas.  Le veau d’or est toujours de boue.
L’agresseur n’est pas celui qui se révolte mais celui qui affirme
L’agresseur n’est pas celui qui se révolte mais celui qui réprime
Aimez-vous les uns sur les autres
L’alcool tue.  Prenez du L.S.D.
« Amnistie : acte par lequel les souverains pardonnent le plus souvent les injustices qu’ils ont commises. » (Ambrose Bierce)
L’anarchie c’est Je
L’aptitude de l’étudiant à faire un militant de tout acabit en dit long sur son impuissance.  -Les filles enragées.
Les armes de la critique passent par la critique des armes
Arrêtez le monde, je veux descendre
L’art est mort. Godard n’y pourra rien.
L’art est mort, libérons notre vie quotidienne.
L’art est mort, ne consommez pas son cadavre.
Attention : les arrivistes et les ambitieux peuvent se travestir en « socialards ».
Attention les cons nous cernent. Ne nous attardons pas au spectacle de la contestation, mais passons à la contestation du spectacle.
« Au grand scandale des uns, sous l’oeil à peine moins sévère des autres, soulevant son poids d’ailes, ta liberté. » [André Breton]
Autogestion de la vie quotidienne
Autrefois, nous n’avions que le pavot. Aujourd’hui, le pavé.
Avant donc que d’écrire, apprenez à penser.
À vendre, veste en cuir spéciale manifestation, garantie anti-CRS, grande taille, prix 100 F
Ayez des idées
Baisez-vous les uns les autres sinon ils vous baiseront
Bannissons les applaudissements, le spectacle est partout.
La barricade ferme la rue mais ouvre la voie
Le bâton éduque l’indifférence
Belle, peut-être pas, mais ô combien charmant.  La vie contre la survie.
Bien creusé vieille taupe
Le bleu restera gris tant qu’il n’aura pas été réinventé
Le bonheur est une idée neuve.
Un bon maître nous en aurons dès que chacun sera le sien
La bourgeoisie n’a pas d’autre plaisir que de les dégrader tous
Cache-toi, objet
Camarades, 5 heures de sommeil sur 24 sont indispensables : nous comptons sur vous pour la révolution.
Camarades, l’amour se fait aussi à Sc. Po., pas seulement aux champs
Camarades, lynchons Séguy !
Camarades, si tout le peuple faisait comme nous…
Camarades, vous enculez les mouches
Céder un peu c’est capituler beaucoup
Celui qui peut attribuer un chiffre à une (é)motion est un con
Ce n’est pas seulement la raison des millénaires qui éclate en nous, mais leur folie, il est dangereux d’être héritier
C’est en arrêtant nos machines dans l’unité que nous démontrons leur faiblesse.
« C’est parce que la propriété existe qu’il y a des guerres, des émeutes et des injustices. » (Saint Augustin)
C’est pas fini !
Ceux qui ferment les portes à clé sont des froussards donc des ennemis
Ceux qui font les révolutions à moitié ne font que se creuser un tombeau.
Ceux qui parlent de révolution et de lutte des classes sans se référer à la réalité quotidienne parlent avec un cadavre dans la bouche
Changez la vie, donc transformez son mode d’emploi
Chassez le flic de votre tête.
Le Christ seul révolutionnaire
Colle-toi contre la vitre. Croupis parmi les insectes
« Le combat est père de toute chose. » (Héraclite)
Comment penser librement à l’ombre d’une chapelle ?
Concours du prof le plus bête. Osez donc signer les sujets d’examen.
Le conservatisme est synonyme de pourriture et de laideur
Consommez plus, vous vivrez moins
Construire une révolution, c’est aussi briser toutes les chaînes intérieures
Contestation. Mais con d’abord
Cours camarade, le vieux monde est derrière toi
Cours camarade, le P.C.F. est derrière toi
Cours, connard, ton patron t’attend
Créez.
Crier la mort c’est crier la vie
C.R.S. qui visitez en civil, faites très attention à la marche en sortant
La culture c’est l’inversion de la vie
« Dans la révolution, il y a deux sortes de gens : ceux qui la font et ceux qui en profitent. » (Napoléon)
Dans le décor spectaculaire, le regard ne rencontre que les choses et leur prix.
Dans les chemins que nul n’avait foulés, risque tes pas !  Dans les pensées que nul n’avait pensées, risque ta tête !
Debout les damnés de l’Université.
Déboutonnez votre cerveau aussi souvent que votre braguette
Déchristianisons immédiatement la Sorbonne
Déculottez vos phrases pour être à la hauteur des Sans-culottes
Déjà 10 jours de bonheur
Défense de ne pas afficher
Désirer la réalité, c’est bien ! Réaliser ses désirs, c’est mieux
Dessous les pavés c’est la plage…
Dieu, je vous soupçonne d’être un intellectuel de gauche
Le discours est contre-révolutionnaire.
Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend
L’économie est blessée, qu’elle crève !
Écrivez partout !
L’éducateur doit être lui-même éduqué
Élections pièges à cons
L’émancipation de l’homme sera totale ou ne sera pas
Embrasse ton amour sans lâcher ton fusil
L’ennemi du mouvement, c’est le scepticisme.  Tout ce qui a été réalisé vient du dynamisme qui découle de la spontanéité.
L’ennui est contre-révolutionnaire.
Enragez-vous
En tout cas pas de remords !
Espérance : ne désespérez pas, faites infuser davantage.
Est prolétaire celui qui n’a aucun pouvoir sur l’emploi de sa vie quotidienne et qui le sait
Et cependant, tout le monde veut respirer et personne ne peut respirer et beaucoup disent « nous respirerons plus tard ».  Et la plupart ne meurent pas car ils sont déjà morts.
Êtes-vous des consommateurs ou bien des participants ?
Être libre en 1968, c’est participer.
Être réactionnaire c’est justifier et accepter la réforme sans y faire fleurir la subversion
Être riche c’est se contenter de sa pauvreté ?
Et si on brûlait la Sorbonne ?
L’état c’est chacun de nous
Les étudiants sont cons.
Exagérer c’est commencer d’inventer
Exagérer, voilà l’arme
Examens = servilité, promotion sociale, société hiérarchisée.
Explorons le hasard
Fais attention à tes oreilles, elles ont des murs
Faites l’amour et recommencez
Faites la somme de vos rancoeurs et ayez honte
Le feu réalise !
Fin de l’Université.
Un flic dort en chacun de nous, il faut le tuer
La forêt précède l’homme, le désert le suit.
Les frontières on s’en fout.
Les gens qui travaillent s’ennuient quand ils ne travaillent pas.  Les gens qui ne travaillent pas ne s’ennuient jamais
Godard : le plus con des Suisses pro-chinois !
L’homme n’est ni le bon sauvage de Rousseau, ni le pervers de l’église et de La Rochefoucauld.  Il est violent quand on l’opprime, il est doux quand il est libre.
Un homme n’est pas stupide ou intelligent : il est libre ou il n’est pas
D’un homme, on peut faire un flic, une brique, un para, et l’on ne pourrait en faire un homme ?
L’humanité ne sera heureuse que quand le dernier capitaliste sera pendu avec les tripes du dernier gauchiste
L’humanité ne sera vraiment heureuse que lorsque le dernier des capitalistes aura été pendu avec les tripes du dernier des bureaucrates
Hurle.
Ici, bientôt, de charmantes ruines.
Ici, on spontane
Il est douloureux de subir les chefs, il est encore plus bête de les choisir.
Il est interdit d’interdire
Il est interdit d’interrompre
« Il faut porter en soi un chaos pour mettre au monde une étoile dansante. » (Nietzsche)
Il faut systématiquement explorer le hasard
Il n’est pas de pensées révolutionnaires. Il n’est que des actes révolutionnaires
Il n’y a de mortel, de temporel, de limitée et d’exclusif que dans l’organisation et dans les structures
Il n’y aura plus désormais que deux catégories d’hommes : les veaux et les révolutionnaires.  En cas de mariage, ça fera des réveaulutionnaires.
Ils pourront couper toutes les fleurs, ils n’empêcheront pas la venue du printemps
Il y a, en France, 38 000 communes… nous en sommes à la seconde
« Imagination n’est pas don mais par excellence objet de conquête. » (Breton)
L’imagination prend le maquis
L’imagination prend le pouvoir
L’insolence est la nouvelle arme révolutionnaire
Interdit d’interdire.  La liberté commence par une interdiction : celle de nuire à la liberté d’autrui.
Inventez de nouvelles perversions sexuelles (je peux pus !)
J’aime pas écrire sur les murs.
J’ai quelque chose à dire mais je ne sais pas quoi
Je décrète l’état de bonheur permanent
Je joue
« Je me propose d’agiter et d’inquiéter les gens.  Je ne vends pas le pain mais la levure. » (Unamuno)
J’emmerde la société et elle me le rend bien
Je ne sais qu’écrire mais j’aimerais en dire de belles et je ne sais pas
Je ne suis au service de personne, le peuple se servira tout seul
Je ne suis au service de personne (pas même du peuple et encore moins de ses dirigeants) : le peuple se servira tout seul.
Je participe.
Tu participes.
Il participe.
Nous participons.
Vous participez.
Ils profitent.
Je plane/hashich
Je prends mes désirs pour la réalité car je crois en la réalité de mes désirs
Je rêve d’être un imbécile heureux
Je suis marxiste, tendance Groucho
Je suis venu, j’ai vu, j’ai cru
Je t’aime !!! Dites-le avec des pavés
Jeunes femmes rouges toujours plus belles
Les jeunes font l’amour, les vieux font des gestes obscènes.
Jouissez ici et maintenant
Jouissez sans entraves
Jouissez sans entraves, vivez sans temps morts, baisez sans carotte
Laissons la peur du rouge aux bêtes à cornes… et la peur du noir aux staliniens
Les larmes des Philistins sont le nectar des dieux
La liberté, c’est la conscience de la nécessité
La liberté, c’est le crime qui contient tous les crimes, c’est notre arme absolue
La liberté, c’est le droit au silence
La liberté commence par une interdiction.  Celle de nuire à la liberté d’autrui
La liberté d’autrui étend la mienne à l’infini.
La liberté est le crime qui contient tous les crimes.  C’est notre arme absolue.
La liberté n’est pas un bien que nous possédions. Elle est un bien que l’on nous a empêché d’acquérir à l’aide des lois, des règlements, des préjugés, ignorance…
Libérez nos camarades.
Luttons contre la fixation affective qui paralyse nos potentialités. -Comité des femmes en voie de libération.
Lynchons Séguy ! La marchandise, on la brûlera !
Le mandarin est en vous
Mangez vos professeurs
Manquer d’imagination, c’est ne pas imaginer le manque
La marchandise, on la brûlera
Le masochisme aujourd’hui prend la forme du réformisme
Make love, not war.
La marchandise est l’opium du peuple.
Même si Dieu existait, il faudrait le supprimer.
Merde au bonheur (vivez)
Mes désirs sont la réalité
Métro, boulot, dodo
Mettez un flic sous votre moteur
Millionnaires de tous les pays, unissez-vous, le vent tourne.
Mort aux tièdes
La mort est nécessairement une contre révolution
Les motions tuent l’émotion
Mutation lave plus blanc que révolution ou réformes
Mur baignant infiniment dans sa propre gloire
Les murs ont des oreilles. Vos oreilles ont des murs
N’admettez plus d’être / immatriculés / fichés / opprimés / réquisitionnés / prêchés / recensés / traqués /
La nature n’a fait ni serviteurs ni maîtres, je ne veux donner ni recevoir de lois
Ne changeons pas d’employeurs, changeons l’emploi de la vie
Ne consommons pas Marx
Ne dites plus : Monsieur le Professeur, dites : crève salope !
Ne dites plus : urbanisme, dites : police préventive
Ne me libère pas, je m’en charge
Ne nous attardons pas au spectacle de la contestation, mais passons à la contestation du spectacle.
Ne nous laissons pas bouffer par les politicards et leur démagogie boueuse.  Ne comptons que sur nous-mêmes.  Le socialisme sans la liberté, c’est la caserne.
Ne prenez plus l’ascenseur, prenez le pouvoir
Ne travaillez jamais !
Ne vous emmerdez pas, merdifiez
Ne vous emmerdez plus, emmerdez les autres
Le n’importe quoi érigé en système
Le nihilisme doit commencer par soi-même
Ni maître, ni Dieu. Dieu, c’est moi
Ni robot, ni esclave
Non à la révolution en cravate.
Notre espoir ne peut venir que des sans-espoir
Nous avons une gauche préhistorique
Nous n’avons fait que la 1ère insurrection de notre révolution
« Or, les vraies vacances, c’était le jour où nous pouvions regarder une parade gratuitement, où nous pouvions allumer un feu géant au milieu de la rue sans que les flics nous en empêchent. » Harpo Marx
Nous ne voulons pas d’un monde où la certitude de ne pas mourir de faim s’échange contre le risque de mourir d’ennui.
Nous refusons d’être H.L.M.isés, diplômés, recencés, endoctrinés, sarcellisés, sermonés, matraqués, télémanipulés, gazés, fichés.
Nous sommes des rats (peut-être) et nous mordons. Les enragés
Nous sommes rassurés : 2 + 2 ne font plus 4
Nous sommes tous des « indésirables ».
Nous sommes tous des juifs allemands
Nous voulons : les structures au service de l’homme et non pas l’homme au service des structures. Avoir le plaisir de vivre et non plus le mal de vivre
Nous voulons une musique sauvage et éphémère.  Nous proposons une régénération fondamentale : grève de concerts, des meetings sonores : séances d’investigation collectives, suppression du droit d’auteur, les structures sonores appartiennent à chacun.
Nous voulons vivre.
La nouveauté est révolutionnaire, la vérité aussi
Nul n’arrive à comprendre s’il ne respecte, conservant lui-même sa propre nature, la libre nature d’autrui
L’obéissance commence par la conscience et la conscience par la désobéissance
Occupation des usines.
O gentils messieurs de la politique, vous abritez derrière vos regards vitreux un monde en voie de destruction. Criez, criez, on ne saura jamais que vous avez été castrés.
On achète ton bonheur, vole-le !
On n’a… pas le temps d’écrire !!!
On n’efface pas la vérité (ni d’ailleurs le mensonge)
On ne revendique rien, on prend
On ne revendiquera rien, on ne demandera rien, on prendra, on occupera
L’orthografe est une mandarine
Osons
« Osons ! Ce mot renferme toute la politique de cette heure. » (Saint-Just)
Oubliez tout ce que vous avez appris.  Commencez par rêver
Ou vous vous emparez des usines, des bureaux, des banques, de tous les moyens de distribution, ou vous disparaîtrez sans laisser de traces ! La révolution a besoin d’argent et vous, aussi; les banques sont là pour nous en fournir ! Une organisation, oui ! Une autorité ou un parti, NON ! (Bonnot and Clyde)
Ouvrez les fenêtres de votre coeur
Ouvrons les portes des asiles, des prisons et autres facultés
La paresse est maintenant un crime, oui, mais en même temps un droit
Parlez à vos voisins (et à vos voisines, bordel !)
Participez au balayage. Il n’y a pas de bonnes ici
Pas de liberté aux ennemis de la liberté.
Pas de replâtrage, la structure est pourrie.
« La passion de la destruction est une joie créatrice. » (Bakounine)
Le patron a besoin de toi, tu n’as pas besoin de lui.
Au pays de Descartes les conneries se foutent en cartes
La pègre, c’est nous
Une pensée qui stagne est une pensée qui pourrit
Penser ensemble, non. Pousser ensemble, oui
La perspective de jouir demain ne me consolera jamais de l’ennui d’aujourd’hui
Plébicite : qu’on dise oui qu’on dise non, il fait de nous des cons.
Pluie. Pluie et vent et carnage ne nous dispersent pas mais nous soudent (Comité d’agitation culturelle)
La plus belle sculpture, c’est le pavé de grès. Le lourd pavé critique c’est le pavé que l’on jette sur la gueule des flics.
Plus jamais Claudel
Plus je fais l’amour, plus j’ai envie de faire la révolution. Plus je fais la révolution, plus j’ai envie de faire l’amour
La poésie est dans la rue
La politique se passe dans la rue.
Pour mettre en question la société où l’on « vit », il faut d’abord être capable de se mettre en question soi-même.
Pourvu qu’ils nous laissent le temps…
Le pouvoir avait les universités, les étudiants les ont prises.  Le pouvoir avait les usines, les travailleurs les ont prises.  Le pouvoir avait l’O.R.T.F., les journalistes lui ont pris.  Le pouvoir a le pouvoir, prenez-le lui !
Le pouvoir est au bout du fusil (est-ce que le fusil est au bout du pouvoir ?)
Le pouvoir sur ta vie tu le tiens de toi-même
Prenez vos désirs pour la réalité
Prenons la révolution au sérieux, mais ne nous prenons pas au sérieux
Professeurs, vous êtes aussi vieux que votre culture, votre modernisme n’est que la modernisation de la police, la culture est en miette (les enragés)
Professeurs, vous nous faites vieillir
Quand l’assemblée nationale devient un théâtre bourgeois, tous les théâtres bourgeois doivent devenir des assemblées nationales
Quand le dernier des sociologues aura été étranglé avec les tripes du dernier bureaucrate, aurons-nous encore des « problèmes » ?
Quand le doigt montre la lune, l’imbécile regarde le doigt (proverbe chinois)
Quand les gens s’aperçoivent qu’ils s’ennuient, ils cessent de s’ennuyer.
Que c’est triste d’aimer le fric.
Qu’est-ce qu’un maître, un dieu ?  L’un et l’autre sont une image du père et remplissent une fonction oppressive par définition
Qui parle de l’amour détruit l’amour.
Le reflet de la vie n’est que la transparence du vécu
Réforme mon cul.
Regarde-toi : nous t’attendons !
Regarde ton travail, le néant et la torture y participent
Regardez en face !!!
Les réserves imposées au plaisir excitent le plaisir de vivre sans réserve.
Le respect se perd, n’allez pas le rechercher
Le rêve est réalité
La révolution cesse dès l’instant qu’il faut se sacrifier pour elle.
La révolution, c’est une INITIATIVE.
La Révolution doit cesser d’être pour exister
La révolution doit se faire dans les hommes avant de se faire dans les choses
La révolution est incroyable parce que vraie
Révolution, je t’aime.
Un révolutionnaire est un danseur de cordes
Nouvelle faculté de médecine
La révolution n’est pas seulement celle des comités mais avant tout la vôtre.
La révolution prolétarienne est l’acte intellectuel par excellence
Une révolution qui demande que l’on se sacrifie pour elle est une révolution à la papa
Un rien peut être un tout, il faut savoir le voir et parfois s’en contenter
Le rouge pour naître à Barcelone, le noir pour mourir (non, Ducon, pour vivre à Paris)
Le sacré, voilà l’ennemi
Savez-vous qu’il existait encore des chrétiens ?
Scrutin putain
Seule la vérité est révolutionnaire.
Un seul week-end non révolutionnaire est infiniment plus sanglant qu’un mois de révolution permanente
Institut des langues orientales
SEXE : c’est bien, a dit Mao, mais pas trop souvent.
Si besoin était de recourir à la force, ne restez pas au milieu
Si tu rencontres un flic, casse-lui la gueule
Si tu veux être heureux, pends ton propriétaire.
Si vous continuez à faire chier le monde, le monde va répliquer énergiquement
Si vous pensez pour les autres, les autres penseront pour vous
La société est une fleur carnivore
La société nouvelle doit être fondée sur l’absence de tout égoïsme, de tout égolatrie.  Notre chemin deviendra une longue marche de la fraternité.
Sous les pavés la plage
Soyez réalistes, demandez l’impossible
Soyez salés, pas sucrés !
Soyons cruels
Staliniens vos fils sont avec nous
Les syndicats sont des bordels
Toi, mon camarade, toi que j’ignorais derrière les turbulences, toi jugulé, apeuré, asphyxié, viens, parle à nous.
Tout acte de soumission à la force qui m’est extérieure me pourrit tout debout, mort avant que d’être enterré par les légitimes fossoyeurs de l’ordre.
Tout ce qui est discutable est à discuter
Tout enseignant est enseigné. Tout enseigné est enseignant.
Tout est Dada
« Toute vue des choses qui n’est pas étrange est fausse. » (Valéry)
Tout le pouvoir aux conseils ouvriers (un enragé).
Tout le pouvoir aux conseils enragés (un ouvrier).
Tout pouvoir abuse.  Le pouvoir absolu abuse absolument.
Tout réformisme se caractérise par l’utopiste de sa stratégie et l’opportunisme de sa tactique
Travailleur : tu as 25 ans mais ton syndicat est de l’autre siècle.
Le vent se lève. Il faut tenter de vivre
Vibration permanente et culturelle.
La vie est ailleurs
La vieille taupe de l’histoire semble bel et bien ronger la Sorbonne.  Télégramme de Marx, 13 mai 1968.
Vigilance ! Les récupérateurs sont parmi nous ! « Anéantissez donc à jamais tout ce qui peut détruire un jour votre ouvrage. » (Sade)
Violez votre Alma Mater.
Vite !
Vive le pouvoir des conseils ouvriers étendu à tous les aspects de la vie
Vive les enragés qui bâtissent des aventures.
Vive les mômes et les voyous
Vivre au présent.
Voir Nanterre et vivre. Allez mourir à Naples avec le Club Méditerranée.
Vous aussi, vous pouvez voler
Vous êtes creux.
Vous êtes en face d’une force. Prenez garde de déclencher la guerre civile par votre résistance.
Vous finirez tous par crever du confort
Zelda, je t’aime !  À bas le travail !

Catégories
Politique

Affiches de mai 1968