On peut prendre n’importe quel parti politique, on aura le même constat : il n’y a plus grand monde. Surtout, il n’y a pratiquement pas de cadres, la base est passive et il y a éventuellement des militants qui, s’ils sont là, pourraient en même temps tout à fait être ailleurs.
Paradoxalement, le seul qui arrive à maintenir la tête hors de l’eau, c’est Emmanuel Macron, alors que justement sa tête était censée être coupée politiquement.
C’est totalement aberrant, car la France a une longue tradition politique, ainsi que des habitudes de protestation, de contestation, de militantisme. C’est pourtant inévitable étant donné que dans le domaine des idées, la France a connu un nivellement par le bas tout à fait terrifiant.

La société de consommation a tout englouti. Que ce soit le libéralisme, les idéologies d’extrême-droite, les agitations, les conceptions révolutionnaires, tout, absolument tout a été aspiré par le capitalisme, modifié, lessivé, transformé en marchandise.
On se souvient que, dans les années 1960, les « situationnistes » prônaient le refus de toutes les idéologies et dénonçait les « militants ». Eh bien, le rêve de ces activistes d’ultra-gauche s’est réalisé.
Les choses se sont-elles améliorées pour autant ? Pas du tout. L’ultra-gauche, avec son refus des idées, de l’idéologie, n’a fait que paver la voie au capitalisme, qui justement refuse toute idéologie.
Le capitalisme veut du prêt-à-porter consumériste et il lui importe peu que ce soit pour un style bobo, beauf, musulman, syndicaliste étudiant ou skater. Ce qu’il veut, c’est qu’on consomme, qu’on assume une identité sur la base de cette consommation.
Avec la croissance du capitalisme depuis la chute du mur de Berlin, le capitalisme a réussi à se développer comme jamais et, sur ce plan, il est arrivé à ses fins. Pour les gens, être heureux, c’est trouver une identité de consommation.
Il n’y a donc politiquement plus personne nulle part, car les gens sont en fait partout, à faire de la politique, une seule politique : la leur, celle où leur ego est au centre. C’est la politique de la démesure individuelle, du repli égoïste, de l’égocentrisme n’ayant comme bornes que les limites de son compte en banque.
Ce constat, il faut bien le reconnaître, si on veut changer les choses. Et il s’agit après tout de comprendre pourquoi, maintenant que le capitalisme a gagné, il a perdu, ou du moins il est en train de perdre.
Depuis 2020, la mondialisation régresse, on fonce à la guerre de repartage du monde. Les gens consomment, mais sont paralysés ; la désorientation est générale, systématique. Les gens sont perdus, ils sont à la fois en attente d’une explosion et eux-mêmes explosés à l’intérieur d’eux-mêmes.
C’est une crise de civilisation à laquelle nous faisons face. Alors ne nous imaginons pas qu’il y aurait des moyens pour changer les choses à petite échelle, ce serait ridicule. Ne nous attardons pas sur du militantisme débile et régressif. Ne cherchons pas des solutions miracles et, évidemment, n’en attendons pas.
Ce sont les masses qui vont tout faire basculer, des masses qui vont agir sous une impulsion historique. Et là les choses changeront de dimension. C’est ça qu’il faut avoir à l’esprit, certainement pas tout le reste, lié à un monde qui s’effondre !