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Johnny Hallyday : les éditoriaux élogieux du Figaro et de l’Humanité

Voici l’éditorial du Figaro sur Johnny Hallyday, puis celui de l’Humanité.

humanite.fr

L’éditorial de Patrick Apel-Muller.

Johnny Hallyday. À cœur perdu

Johnny n’aura pas eu la mort violente et inattendue de James Dean, celle dont il disait rêver. Les mots de Jack London auraient pu l’accompagner : « J’aime mieux être un météore superbe plutôt qu’une planète endormie. La fonction de l’homme est de vivre, non d’exister. Je ne gâcherai pas mes jours à tenter de prolonger ma vie. Je veux brûler tout mon temps. »

L’angoisse de mourir et la peur de perdre ont accompagné ses flamboiements et sculpté un destin que les Français ont aimé, parce que dans ce pays on aime aussi les chutes et les douleurs, les rédemptions et le panache, le dur désir de durer et le sens du rebond. L’amour toujours, l’élan animal, la faiblesse avouée, les peines revendiquées…

Sa musique a changé, mais pas nos frissons. Il a posé ses braises au long du chemin de toutes les générations et elles scintillent encore, témoins d’une perte ressentie presque unanimement.

Bien sûr, il eut ses conformismes – notamment politiques –, ses écarts fiscaux, les commandes que commandaient ses dettes. Mais même quand la France répétait « ah que » derrière les Guignols de l’info, la moquerie signait le statut de monument national, de chronologie musicale de nos vies.

Avec lui, nous aurons dansé le rock et le twist, goûté les slows et la romance, réconcilié le blues et la chanson française. Nous nous serons sentis biker, yé-yé, hippie, bidasse, flambeur magnifique ou amoureux lumineux, puis solitaire et trahi.

Ses contradictions dessinent une carte en forme d’Hexagone. Il chanta Chirac, aima Sarkozy, puis en perdit le goût, mais il versa des cachets pour soutenir le mouvement des sidérurgistes lorrains en 1979 et fit de ses passages à la Fête de l’Humanité des monuments. Parce que là était le peuple, les gens qu’il aimait et dont il se sentait.

Tout cela restera. Sa jeunesse insolente et les rides des épreuves, la voix qui arrache ou qui caresse, la mort trompée et gagnante au bout du compte.

Sa fin, il l’a aussi donnée au public, chantant au-delà des maux, marquant jusqu’à son dernier souffle qu’il était avec nous. Les agacements n’y changeront rien. Il a joliment « brûlé tout son temps ».