Voyage au bout de l’enfer (The Deer Hunter) est un film réalisé par Michael Cimino sorti en 1978.
Il s’agit d’un film emblématique du “Nouvel Hollywood”, un mouvement cinématographique s’étalant de la fin des années 1960 au début des années 1980, caractérisé par une modernisation dans la production des films, mais aussi dans la mise en scène et l’approche des sujets traités, plus brut. On y trouve, entre autre, des influences de la Nouvelle Vague française et du néoréalisme italien.
Voyage au bout de l’enfer est un film sur la guerre, mais qui ne montre que très peu la guerre en tant que tel. Sur trois heures de film, on distingue trois actes bien distincts.
Le premier, qui dure un peu plus d’une heure, pose les personnages, le contexte, l’environnement social, d’une manière très réaliste.
Cimino nous plonge au sein d’une communauté d’immigrés russes vivant en Pennsylvanie, parmi lesquels trois ouvriers ont été engagé pour partir faire la guerre du Vietnam.
On assiste au mariage de l’un d’eux (Steven, interprété par John Savage), quelques jours avant le départ, lors une magnifique séquence de fête populaire qui frappe de par son réalisme et par la virtuosité de la mise en scène, notamment lors des scènes de danses. Cette scène a été filmé lors d’un véritable mariage, ainsi les figurants n’en sont pas vraiment, renforçant la vraisemblance et la charge émotionnel de la scène.
Il y a également eu un gros travail préalable des acteurs, d’immersion dans cette communauté de Pennsylvanie, afin de s’imprégner de l’ambiance et de renforcer les liens entre eux. Un des membres de la bande d’amis dans le film est d’ailleurs interprété par un acteur non professionnel, un ouvrier rencontré lors de la pré-production.
Tout cela se ressent durant ce premier acte, cela sonne vrai, tout une communauté et ses enjeux humains sont posés, préparé pour le drame à venir.
En un plan, le film passe au Vietnam, dans la jungle, où nous retrouvons Steven, Mike (Robert De Niro) et Nick (Christopher Walken). La transition, de par l’ellipse du départ, du voyage, et de l’arrivée sur place, est brutale, comme doit l’être le fait d’être arracher à sa vie pour être envoyer au front, dans un pays lointain, où tout est étranger.
Ce second acte est principalement marqué par la séquence de la roulette russe, ou les geôliers imposent aux soldats américains et à leurs alliés capturés le « jeu » de la roulette russe.
C’est une scène extrêmement intense et difficile mais qui à elle seule représente bien toute la folie, la violence et l’absurdité de la guerre et c’est ainsi qu’il faut la voir : comme une métaphore de la barbarie guerrière tel qu’elle est vécu par ces soldats américains.
Le troisième et dernier acte est celui du retour, où plus rien ne peux être comme avant, où les blessures sont tout autant physiques que psychologiques.
Une très belle scène de chasse – dans la mesure où une telle scène peut avoir une quelconque beauté, de par son caractère meurtrier – faisant écho à celle de la première partie, illustre un changement du rapport à la violence et à la vie en général. Rapport qui se montre dialectiquement ambivalent dans d’autres séquences, par l’aspect autodestructeur qui rattrapera certains vétérans.
Michael Cimino dresse en trois heures une grande fresque humaine, sur contexte de guerre, de ses dégâts, sur ceux qui partent et qui n’en reviennent jamais indemnes, mais pas uniquement, car à la fin c’est toute la communauté qui a été présenté dans le premier acte qui se retrouve meurtri par cette guerre, dépassant ainsi le cadre individuel.
Tout cela en fait un film très fort émotionnellement, à la portée universelle ; Michael Cimino est un réalisateur incontournable.