La grève d’hier a été un succès certain à la SNCF. Les grévistes ont été de 77 % chez les conducteurs, 69 % chez les contrôleurs, 39 % chez les aiguilleurs, 40 % chez les agents d’escales et du matériel.
C’est une expression de capacité de lutte significative. Et le fait que les cheminots aient déposé dix-huit préavis de deux jours (avec une grève de deux jours sur cinq), témoigne d’une combativité certaine, ce qui rassure ceux et celles n’osant pas lutter mais éprouvant de la sympathie.
Il y a ainsi un frémissement social certain, un esprit de recomposition élémentaire mais réel.
Au point qu’il y a nettement un bloc réactionnaire qui apparaît et voit en la lutte des cheminots le symbole de la lutte des classes, la boîte de Pandore de la confrontation sociale. Le premier ministre Edouard Philippe s’est donc posé en défenseur de « ceux qui veulent aller travailler veulent continuer à bénéficier de leur liberté constitutionnelle d’aller et venir ».
Il est vrai ici que, malheureusement, le gouvernement est aidé par l’esprit étroitement corporatiste de la Fédération CGT des cheminots, qui ne sort pas de l’esprit de collaboration avec les institutions, dans l’esprit de la CGT depuis les années 1950.
Voici par exemple les positions de la Fédération sur la lutte actuelle ; on y retrouve une mentalité nullement de gauche mais ayant tout à voir avec un esprit néo-gaulliste de cogestion, avec la revendication d’une meilleure efficacité au service de l’économie et du pays, etc.
Ce n’est certainement pas avec cela que les gens vont sympathiser avec la lutte et accepter que leur vie quotidienne ou leur capacité à aller travailler soient perturbés au plus haut point…
L’incapacité à formuler les choses autrement que de manière étroite, corporatiste – au final, syndical – est révélateur de l’absence de réflexion réelle sur ce qu’est la lutte de classes au sens réel du terme… Ou plus exactement de comment la CGT, comme déjà en 1968, n’entend que vouloir participer à la gestion, sans vouloir en rien changer la vie.
DETTE ET FINANCEMENT
La dette du système ferroviaire doit être reprise par l’Etat sans contrepartie. Elle est de sa responsabilité. Des financements pérennes doivent être apportés pour assurer le développement du service public ferroviaire (marchandises et voyageurs).
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• Création d’un pôle financier public pour donner la priorité à l’emploi, à la création de richesses dans les territoires et à la préservation de l’environnement, et non plus à la recherche de la rentabilité des capitaux. • Création d’une Caisse d’Amortissement de la Dette Ferroviaire de l’Etat (CADEFE) afin de libérer le système ferroviaire de ce poids (1,7 Md€ d’intérêts par an).
• Nationalisation des autoroutes et utilisation des profits pour alimenter la CADEFE.
• Mise en œuvre de l’Eco Taxe poids lourds. Ces nouvelles ressources financières permettraient également d’apurer la dette.
• L’utilisation de la Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Energétiques (TICPE) pour le financement des infrastructures de tous les transports (routes, voies navigables, ferroviaire – 6Mds consacrés pour le réseau ferré national-).
• La création d’un Versement Transport Régional (VTR) additionnel qui permettrait de doter les régions d’une ressource provenant du secteur économique, principal bénéficiaire du système des transports régionaux.
• Arrêt des Partenariats Public-Privé (PPP) qui ne servent que l’intérêt de groupes du BTP (Vinci, Bouygues, Eiffage).
RELANCE DU TRANSPORT DE MARCHANDISE S PAR FER
Le Fret ferroviaire SNCF ne doit pas être filialisé. Une véritable politique de relance et de report modal doit être décidée, appuyée par des moyens, notamment pour répondre aux enjeux environnementaux et ne pas laisser dépérir l’activité à petit feu.
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• Préservation et modernisation des emprises ferroviaires. La SNCF doit s’appuyer sur son groupe, pour se mettre au service de cette ambition.
• Développement des ports qui doit s’appuyer sur davantage d’acheminements ferroviaires.
• Pour la distribution urbaine, il faut s’intéresser aux acheminements en amont et définir les infrastructures nécessaires (hôtels logistiques, plateformes intermodales ou Cross-Dock…).
• Internalisation des coûts externes propres à chaque mode (supportés par la collectivité) par une tarification du fret à son juste coût. La CGT se prononce pour une Tarification Sociale Obligatoire (TSO).
• Conditionnement des aides publiques aux entreprises industrielles et de service à l’utilisation d’un mode de transport vertueux.
STATUT DE L’ENTREPRISE
La SNCF doit rester sous statut d’EPIC, propriété de la Nation et non objet de tractation et de spéculation financière.
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• Regroupement de SNCF Réseau, SNCF Mobilités et l’EPIC SNCF (dit « de tête ») au sein d’un seul EPIC SNCF en veillant à la séparation comptable entre l’opérateur et le gestionnaire de l’infrastructure, seule obligation imposée par les textes européens.
ORGANISATION DE LA PRODUCTION Une réorganisation complète de la production doit mettre fin au cloisonnement par activités, réactiver une véritable coopération opérationnelle entre les cheminots et assurer le retour à la qualité de service qu’exigent les usagers.
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• Une entreprise unique et des établissements multi-activités (voyageurs grandes lignes/proximité et Fret le cas échéant) décloisonnés au sens des activités, mais reposant sur la reconnaissance des métiers, garants de la qualité et de la sécurité. Ils doivent être renforcés dans l’animation, les qualifications, les formations…
• La mutualisation des moyens, des personnels et des informations, source d’efficacité.
RÉ INTERNALISATION DES CHARGES DE TRAVAIL
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• Les activités externalisées doivent être réintégrées (charge de travail et les personnels qui en ont la charge) dans le triple objectif de mettre fin au surcoût de la soustraitance, d’améliorer le statut social des salariés et de regagner la maîtrise complète de la production pour en assurer la qualité et la sécurité.
OUVERTURE A LA CONCURRENCE
La concurrence est un mauvais système qui se base uniquement sur le dumping social, qui n’est pas adapté aux contraintes techniques de l’exploitation ferroviaire et qui ne permettra pas de développer le service public ferroviaire. La situation de Fret SNCF, libéralisée depuis 10 ans, est significative d’une dégradation de la qualité de service du transport de voyageurs annoncée si la concurrence se mettait en place.
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• L’Etat doit transposer les dispositions du 4e paquet ferroviaire dans le droit national en décidant de l’attribution directe de l’exploitation des services ferroviaires à la SNCF sur l’ensemble du réseau ferré national. Cette décision est conforme à l’article 5 – paragraphe 4 bis du règlement Obligations de Service Public (OSP) qui prévoit des exceptions à la mise en concurrence en regard des caractéristiques structurelles géographiques, de la complexité du réseau, ainsi que de la qualité de service et d’un meilleur rapport coût-efficacité.
DROITS SOCIAUX DES CHEMINOTS/GARANTIES SOCIALES
Le statut doit être confirmé comme la règle, y compris pour les futurs embauchés. Il doit être amélioré ainsi que les droits des contractuels. Les droits des cheminots font partie intégrante de l’équilibre entre droits et devoirs liés au service public. Ils doivent être préservés. Une véritable augmentation générale des salaires et pensions doit être annoncée.
C e q u e l a C G T p r o p o s e :
• Maintien et amélioration du statut dans le cadre d’une SNCF intégrée et publique. Admission au statut de tous les personnels de la SNCF qui remplissent les conditions.
• Liées à la Convention Collective Nationale de la branche ferroviaire, les garanties sociales doivent être revues à la hausse, pour que le patronat ne puisse pas renforcer le dumping social entre l’entreprise publique et les entreprises ferroviaires privées. Les voies ferrées d’intérêt local et la restauration ferroviaire doivent y être intégrées.