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Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht, assassinés il y a cent ans

Il y a cent ans, le 15 janvier 1919, Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht étaient tués en raison de leur rôle de dirigeants dans la révolution spartakiste en Allemagne.

Il y a cent ans, le 15 janvier 1919, Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht étaient tués en raison de leur rôle de dirigeants dans la révolution spartakiste en Allemagne. Le fait que les socialistes soient à la tête de la répression d’un insurrection de socialistes devenus communistes allait avoir des conséquences historiques dramatiques en Allemagne.

Karl Liebknecht, Rosa Luxembourg

Rosa Luxembourg est une figure relativement connue en France, et souvent très appréciée par les gens de Gauche. Ils y voient une figure historique de premier ordre, avec il est vrai souvent beaucoup de romantisme. Ils négligent souvent le fait qu’elle a été une des principales figures du mouvement ouvrier allemand, en tant que l’une des dirigeantes de la social-démocratie.

Ce qu’on retient surtout d’elle, c’est son opposition à la guerre de 1914, puis son soutien à la révolution russe. On sait aussi qu’elle a formé un Parti Communiste « spartakiste » et que les événements ont été terribles pour elle, puisqu’elle a été assassinée par des regroupements paramilitaires d’extrême-droite, les corps-francs, sur ordre des socialistes à la tête de la république venant d’être fondée, Philipp Scheidemann, Friedrich Ebert, Gustav Noske.

Ce dernier est connu pour avoir déclaré, après avoir dirigé l’écrasement des spartakistes à Berlin :

« Il faut que quelqu’un fasse le chien sanguinaire : je n’ai pas peur des responsabilités. »

Rosa Luxembourg est donc un symbole d’engagement et de fidélité à ses idéaux, et c’est bien pour cela que les communistes ont voué une haine farouche à la direction du parti socialiste allemand, le SPD, qui d’ailleurs le lui rendait bien.

Le problème est que cette confrontation produisait le blocage de l’unité des socialistes et des communistes face à la menace fasciste. Les socialistes et les communistes connurent alors bien souvent les camps nazis, et ce n’est qu’à partir de 1935-1936 qu’un esprit d’unité réapparaît, du côté communiste d’abord. Cela ira jusqu’à la fusion des socialistes et des communistes en Allemagne de l’Est après 1945, les communistes se faisant rapidement interdire à l’ouest.

Il faut rappeler ici que la particularité des socialistes allemands (ou autrichiens) alors, était qu’ils assumaient de vouloir le socialisme tout autant que les communistes, qu’ils se revendiquaient encore du marxisme. De plus, les socialistes étaient encore soutenus par une large partie des ouvriers. C’était un débat à l’intérieur du mouvement ouvrier.

Et il y a beaucoup d’actualité, somme toute, dans cette problématique, ce conflit entre les pragmatiques ou « réalistes » d’un côté, les purs et les durs de l’autre, qui se veulent tout aussi réalistes d’ailleurs. Il est vrai que François Hollande n’a pas écrasé d’insurrection et que Benoît Hamon n’est pas Rosa Luxembourg, et que si on a beaucoup de gens pragmatiques à gauche (quand ils ne sont pas passés chez Emmanuel Macron), on a peu de révolutionnaires.

Toutefois, la question de l’unité de la Gauche dans son ensemble est la même que de par le passé. Comment concilier la Gauche disant qu’il faut influer sur les mesures gouvernementales et la Gauche disant que sans affrontement rien n’est possible ? On connaît la réponse de Jean Jaurès : dire oui à tout, quitte à faire semblant. François Mitterrand a fait de même. Le résultat a toujours été l’amertume et l’effondrement de la Gauche face aux valeurs hégémoniques de la Droite.

On peut dire qu’une telle conciliation n’est pas possible dans le cadre d’un capitalisme disposant d’un État très fort, car dans ce cas-là, la récupération par le système est inéluctable. La fusion des socialistes et communistes après 1945 en Allemagne, ainsi que dans d’autres pays, n’a pu avoir lieu que parce que l’État s’était effondré, il fallait repartir sur une base saine. Or, quand il y a le capitalisme et qu’il y a un État à son service, rien n’est sain, naturellement.

Mais quand le capitalisme connaît une crise au point qu’il est terriblement agressif, que l’État à son service devient Fascisme, alors là il y a une ouverture pour l’unité générale de la Gauche. Ce serait cependant terrible de dire qu’il faille une telle expérience pour en arriver là, surtout que l’Histoire a déjà enseigné cela. Mais malheureusement, la Gauche française est si peu structurée, si faible, que les leçons risquent d’être à réapprendre…

Rosa Luxembourg