On touche aux limites d’une mise en scène infantile avec Greta Thunberg, où la cause climatique a été transformée en molles protestations adolescentes contre « la fin du monde ». Des limites qui tiennent à une écologie qui prétend qu’il faut moins produire, alors qu’en réalité il faut davantage produire.
Nous vivons dans un monde « fini » où la croissance infinie est impossible : tel est le leitmotiv larmoyant de couches sociales aisées profitant du système capitaliste et craignant que les grandes entreprises amènent le tout à s’effondrer.
C’est un discours régressif, prônant le retour en arrière. Il va du discours anti-science des religions au discours anti-productiviste des zadistes, anarchistes et fascistes se faisant concurrence pour se présenter comme les meilleurs représentants d’une petite production censée être à la fois saine, raisonnable et équilibrée, adaptée aux besoins du monde.
Greta Thunberg se rapproche de plus en plus de ce discours, car il faut bien qu’elle dise quelque chose. Elle était à New York au sommet de l’ONU durant lequel elle a parlé à Angela Merkel et regardé méchamment Donald Trump, tout en tenant un discours comme quoi elle devrait être à l’école de l’autre côté de l’océan au lieu d’avoir à exiger que les adultes se bougent.
Elle a protesté contre la croissance économique, qui serait la grande folie des adultes et qui priverait les jeunes d’un avenir plein de certitudes agréables.
C’est là à la fois vain et contradictoire. Vain, car ce n’est pas le théâtre qui change le monde. Greta Thunberg risque ici de payer humainement le pétrin dans lequel l’ont mis des adultes irresponsables, ses parents en premier. Si elle croit vraiment qu’elle joue un véritable rôle historique, la désillusion ne va en être que plus grande. C’est inhumain.
Contradictoire, car la situation actuelle, dans ses aspects positifs et négatifs, est issu de la production, de son élargissement, d’une croissance économique impliquant davantage de moyens, davantage de culture, davantage d’envergure. Critiquer le capitalisme alors qu’on en est le produit, cela n’a pas de sens.
Ce qu’il faut dire, en réalité, c’est qu’il faut aller de l’avant, et non pas ralentir l’économie ou aller dans le passé. Il faut davantage de centralisation, de monopoles, de grandes entreprises, avec encore plus de moyens. Et tout cela doit appartenir au peuple, qui doit également gérer l’ensemble, en dirigeant le tout dans une bonne direction.
Nous avons besoin de bien plus de production, par exemple de Canadair pour éteindre les feux de forêt en Amazonie, de drones avec des missiles pour anéantir les braconniers en Afrique, de robots pour aller coloniser l’espace et permettre la diffusion de la vie, de plus de mécanisation, de robotisation pour que le travail devienne plus aisé, plus productif, qu’on se débarrasse de tous ses éléments aliénants et oppressants.
Tout cela, c’est la Gauche qui l’a historiquement affirmé, c’est le drapeau rouge de l’utopie. Greta Thunberg s’imagine bien au-delà de tout cela. Venant d’un milieu aisé et étant autiste, elle n’a pas de mise en perspective concrète de la réalité, elle vit dans l’idéalisme.
Cela en fait quelqu’un de sympathique. Mais pourquoi sympathiser avec telle suédoise végane et pas une autre ? Cela fait trente ans que la Suède produit de telles adolescentes, conscientes et engagées, il est vrai dans un cadre alternatif, à l’opposé de Greta Thunberg. C’est pour cela qu’elle passe très bien dans les médias : avec elle on sait à quoi s’attendre. Le cadre est posé, on en sortira pas.
Elle ne fait donc pas le poids. À moins de croire en les « grands Hommes » et en les génies – ce qui est antidémocratique, antipopulaire, il n’y a aucune raison de dire que l’activité de Greta Thunberg est juste, elle qui n’a ni idées, ni solution, ni théorie, ni vision du monde.
Elle n’empêche pas les choses de tourner en rond, car derrière le battage médiatique, tout continue comme avant. C’est en ce sens que cela risque d’être dramatique pour cette adolescente : lorsqu’elle s’apercevra que tout ce qu’elle a fait est vanité, le choc n’en saura que plus dur.