Le mouvement Extinction Rebellion a mené des initiatives à Paris, en faveur du climat. Le souci est que ce mouvement est né par en-haut, profitant de centaines de milliers de dollars de dons par de riches mécènes, tout en proposant une lutte en version prêt à porter. Il est vrai que la branche française a une démarche tout à fait différente, strictement équivalente à Nuit debout. Cela change-t-il fondamentalement la substance de la démarche ?
« Un blocage de la place du #Chatelet, du quai de la Megisserie et du pont au Change, avec orchestre live, une disco, des ateliers artistiques, des formations, du yoga, des cuisines collectives, un voilier, des abris pour se protéger de la pluie et un vrai village de tentes ! »
Un tel discours d’Extinction Rebellion en dit long sur la nature de sa « rébellion ». C’est le plan squat du samedi soir du jeune de centre-ville élevé au pinacle de l’interventionnisme politique.
Que le programme d’action prévoit également le nettoyage d’un camp de migrants et on aura tout compris : l’écologie n’est qu’un moyen de recyclage pour les débris de l’esprit Nuit Debout et de ses avatars zadistes ou gilets jaunes.
Dans tous les cas, il y a la même mentalité, qui consiste à dire à la fois à l’État : « fous-nous totalement la paix » et en même temps « fais tout pour nous ». Dans tous les cas, la prédominance du style petit-bourgeois est outrancier et tout est fait par conséquent pour réduire le capitalisme à une oppression virtuelle, pour ne jamais parler ni des ouvriers, ni de la bourgeoisie, ni de l’exploitation.
La conséquence en est le refus de chercher à mobiliser le peuple. Le mouvement Extinction Rebellion assume la grande thèse populiste, qui veut qu’un changement social profond se déroule lorsque 3,5 % de la population s’y implique. Cette thèse anti-démocratique a d’autant plus de succès dans notre pays que les syndicalistes révolutionnaires, il y a un siècle disaient déjà cela.
Enfin, on admettra que les syndicalistes révolutionnaires avaient au moins le mérite de chercher la confrontation avec le capitalisme et ne réduisaient pas la lutte à une sorte de style mi-clown mi-revendicatif.
On pourra toujours prétendre que c’est un premier pas, un engagement. Mais un premier pas à quoi et pourquoi un engagement serait-il forcément positif ? Qui peut croire d’ailleurs que cette révolte scénarisée apportera quoi que ce soit, par exemple, au véganisme ou à la condition animale en général ?
Car s’il est un thème qui ne pardonne pas sur le plan du contenu, c’est bien l’écologie. Et là il n’y a pas de contenu, juste des gens pleurant sur leur avenir, sur le fait qu’ils vont vivre moins bien. C’est la même chose sur ce plan que les gilets jaunes, cela est très clair, c’est une révolte de l’amertume.
L’amertume a bien sûr sa dignité… si on en fait pas un fétiche. Mais là c’est plus qu’un fétiche, c’est du jeu, les gens s’amusent. Le décalage entre leur jeu et leur affirmation que le monde s’effondre est particulièrement frappant. Et glaçant.