Le battage médiatique a été très intense avant la manifestation et la grande majorité des structures de gauche ont appelé à se mobiliser. Pourtant, tout comme pour la manifestation en faveur des Kurdes de Syrie faisant face à la Turquie, la mobilisation a été faible, avec 13 000 personnes. Et surtout, elle a été totalement parisienne, dans un mélange de bobos de gauche et de petits-bourgeois musulmans cherchant à s’incruster socialement dans le panorama bourgeois. Cela n’a rien à voir avec la Gauche.
Bras dessus bras dessous, très contents d’eux, toujours prompts à poser : telle était l’attitude des gens issus de la Gauche présents à la manifestation contre « l’islamophobie », ce concept flou visant à présenter en général la religion musulmane comme une victime. C’est ici la rencontre de l’Islam politique et d’une Gauche ne raisonnant plus en termes de capitalisme ou de classe, mais en terme d’individus avec des droits. L’extrême-Droite rêvait d’un islamo-gauchisme, les courants post-modernes de la Gauche ont exaucé ses vœux.
La seule exception à l’esprit à la fois allègre et niais ayant prédominé fut Benoît Hamon, dont on comprend le manque d’emballement, au point de venir à la manifestation l’Équipe à la main (ouvert à la page 29, l’article traitant de la défaite de l’aviron bayonnais contre Pau – rappelons que l’origine de l’appel à manifester est l’attentat d’une personne âgée raciste contre une mosquée à Bayonne). Que fait-il dans cette galère?
À cette posture générale bobo de gauche battant le pavé parisien s’est ajoutée une petite-bourgeoisie musulmane clairement revendicative sur un mode identitaire. L’ancien directeur exécutif du Collectif contre l’islamophobie en France Marwan Muhammad n’a pas eu de mal à faire scander « Allahu Akbar » à la foule à la fin de la manifestation. On n’a d’ailleurs pas échappé à des comparaisons délirantes avec la persécution des Juifs par l’Allemagne nazie.
Cela a bien entendu fait scandale, car nous sommes en France et il y a une connaissance de l’histoire qui n’est pas nulle. La conscience morale est réelle, contrairement aux affirmations délirantes comme quoi les musulmans de France seraient harcelés, pourchassés, etc.
Esther Benbassa, sénatrice EELV et une grande figure de l’ultra-libéralisme dans les mœurs, s’est faite littéralement détruire pour avoir cautionné cette utilisation d’une étoile jaune en version « musulman ». Elle prétend n’avoir rien vu et que de toutes façons ce n’est pas grave, voire une allusion positive contre l’antisémitisme, etc. C’est là un relativisme inévitable de la part de gens sans valeurs.
On n’a pas échappé non plus à une action au nom des FEMEN, celles-ci niant par contre toute manifestation. Cela a bien entendu provoqué tout un remue-ménage dans le cortège, pour une revendication en faveur de la laïcité qui, d’ailleurs, a perdu son sens.
La manifestation du 10 novembre 2019 a en effet rappelé une chose que trop de monde a oublié dans une France endormie. La laïcité n’a été qu’un compromis entre la moitié de la France farouchement opposé aux religions et l’autre moitié favorable au catholicisme. Or, un compromis n’est pas fait pour durer, il est prétexte à la lutte pour un nouveau rapport de force. La marche du 10 novembre 2019 a ainsi à la fois été tout à fait religieuse, tout en se prétendant entièrement laïque.
Faut-il avoir perdu l’esprit pour participer à une telle chose quand on se dit de gauche ?
Une réponse sur « La manifestation parisienne du 10 novembre 2019 contre «l’islamophobie» »
[…] marqueurs et il y en a qui assassine la Gauche depuis l’intérieur. Il s’agit bien entendu du rassemblement du 10 novembre 2019 contre « l’islamophobie ». En réfutant la lutte des classes, les « post-modernes » et les populistes s’étaient alors […]