Les gilets jaunes avaient promis de célébrer leur première année d’existence de manière volontaire et efficace. Cela a bien entendu été une déroute de plus, avec même une qualité supérieure dans la défaite.
La France frémit, cela commence à bouillir et pourtant il n’y a pas eu de mobilisation favorable aux gilets jaunes. La lutte de classe reprend ses droits et la parenthèse « jaune » se referme.
Quelques centaines à Toulouse, 500 à Saint-Étienne, autour d’un millier à Marseille, Nantes et Lyon, 1500 à Montpellier, 1800 à Bordeaux, quasiment 5000 à Paris, 28 000 en tout. C’est extrêmement peu, mais les gilets jaunes n’ont jamais été vraiment nombreux de toutes façons, malgré tout le bruit qui a été fait autour d’eux. Ils n’ont pas non plus eu une quelconque influence dans la société française.
Jamais les ouvriers ne se sont tournés vers eux. Ils n’ont pas donné naissance à un style de lutte, ils n’ont pas donné naissance à des grèves, ils n’ont pas donné naissance à des dirigeants politiques. Ils en sont restés au niveau d’une passion française, le psychodrame.
Eux-mêmes sont le premier à le reconnaître : rien n’a changé au bout d’un an. Ils ne se remettent pas en cause pour autant, ce qui va renforcer de manière significative le populisme et l’antisémitisme. Il faudra bien expliquer par un « complot » l’échec complet, puisque les luttes de classes sont refusées.
Quant à l’ultra-gauche, elle a réussi à organiser de la casse, mais cela fut encore quelque chose de totalement ritualisé. Il y a bien eu des tentatives de sortir de cela à Paris, en occupant la salle de concert désaffecté La Flèche d’or pour en faire une « maison » contestataire ou en manifestant par surprise à 200 au niveau de la galerie commercial des Halles. Cela n’a pas fonctionné, car la police française a une stratégie bien précise : pas d’intervention sauf dans le cas où c’est « constructif ».
C’est cela que n’ont toujours pas compris les casseurs de Nantes ou de place d’Italie à Paris, réussissant divers feux de poubelle, quelques barricades sur le tas, des bris de vitrines, des graffitis divers, etc. L’État a laissé couler, sachant que là où il n’y a pas de proposition politique, tout est vain.
Nous revoilà d’ailleurs dans la même situation grosso modo qu’avant la fusion des socialistes français en 1905. On a des syndicalistes braillards, des anarchistes casseurs, une gauche électoraliste et un peuple qui reste totalement à l’écart de tout cela.
La grande question est de savoir maintenant ce qui va se passer en décembre, dans quelle mesure le cœur populaire du pays va se mettre en branle ou pas. Il est en tout cas déjà clair que la proposition stratégique des gilets jaunes a été réfuté par le peuple. C’est déjà donc indirectement un pas en avant vers une forme politique, de gauche, s’ancrant dans les valeurs du socialisme.