La catastrophe tant redoutée est arrivée : les élections au Royaume-Uni ont été marquées par un triomphe pour la Droite, la Gauche se faisant dévaster. La voie est libre pour une vague nationaliste et la mise en place d’un bloc assumant de batailler pour le repartage du monde.
Lors des élections de 1987, la Droite de Margaret Thatcher avait obtenu 376 sièges à la Chambre des Communes, la Gauche de Neil Kinnock 229. Aux élections de décembre 2019, la Droite de Boris Johnson a obtenu 365 sièges, la Gauche de Jeremy Corbyn 202 sièges. Cela veut dire que la défaite de la Gauche nous ramène directement à la période la plus sombre du Royaume-Uni, lorsque la Droite avait tellement le dessus qu’elle allait de victoire en victoire. En 1987, Margaret Thatcher obtenait même sa troisième victoire, et la plus grande.
La situation est d’ailleurs au sens strict encore pire et il faut remonter à 1935 pour un résultat aussi mauvais. Mais l’esprit correspond à celui des années 1980, où le libéralisme prédominait dans tous les secteurs culturels du pays, à part dans une toute petite Gauche activiste se confrontant au racisme sur le terrain et très influente dans le milieu des musiciens, ainsi que du côté de l’IRA.
Il est vrai que la raison fondamentale de tout cela, c’est que le mouvement ouvrier britanique ne s’est jamais élevé au Socialisme, formant un « travaillisme » sans envergure. Le Parti travailliste (Labour Party) était ainsi une construction des syndicats (en Allemagne ce fut l’inverse : la social-démocratie marxiste construisit les syndicats). Toute la Gauche pouvait et peut adhérer au Labour, critiquer comme il l’entend, le Parti étant une sorte de vaste fédération.
Pour cette raison, la tendance bascule dans un sens ou dans un autre. Les réformistes l’emportent à la direction, perdent à un moment les élections, sont remplacés par des activistes plus engagés qui échouent dans leur entreprise, ce qui amène un rebasculement, etc. En l’occurrence, le Labour était dirigé par Jeremy Corbyn, depuis 2015, très à gauche, avec un véritable engouement, le parti passant de 190 000 à 515 000 membres en raison de sa popularité.
La démarche était très proche de celle de Jean-Luc Mélenchon ; le populisme anticapitaliste a d’ailleurs permis l’émergence d’une vague antisémite violente dans le Labour. Pris au piège entre le travaillisme et les philosophies post-modernes à la mode (et si puissantes en Angleterre), Jeremy Corbyn refusa même de prendre position pour ou contre le Brexit. Tout ce qu’il proposa fut une meilleure négociation et surtout un nouveau référendum, lui-même ne donnant jamais son point de vue.
C’était là un suicide politique, laissant se déchaîner la Droite soutenue par toute la haute bourgeoisie afin de former un bloc britannique autonome. Donald Trump a évidemment été le premier à saluer Boris Johnson, alors que Morgan Ortagus, porte-parole de la diplomatie américaine, a rappelé la volonté américaine de former un bloc de libre-échange entre les deux pays.
On l’a compris : le bloc britannique se met dans l’orbite américaine, assumant de s’impliquer dans l’affrontement sino-américain, les pays du continent européen étant encore à l’écart à ce niveau. Cela ne se fera pas sans difficultés, car le Parti national écossais a obtenu 48 des 59 sièges d’Écosse, prônant l’indépendance. Mais il se fera inévitablement mettre au pas, car le Royaume-Uni rentre dans une période sombre, celle de l’élan nationaliste dans le militarisme.
Il suffit pour l’admettre de voir les chiffres de participation aux élections : ils sont de 67,3 %. Un tiers du pays est resté entièrement à l’écart d’une élection décisive pour l’avenir du Royaume-Uni ! Le capitalisme a littéralement broyé la société britannique, atomisé les individus, anéantit les esprits dans le nationalisme et mobilise dans un sens militariste.
Comme dans les années 1930, seule une poignée de pays-îlots vont se retrouver à résister à la montée et l’installation du Fascisme !
Une réponse sur « Vers la guerre: triomphe de Boris Johson et du Brexit »
[…] principaux États, un phénomène qui date d’ailleurs de bien avant, comme on l’a vu avec le Brexit. C’est là tout simplement la tendance à la guerre, une répétition de ce qui a eu lieu pour […]