Il n’y a pas que les grandes puissances qui veulent la guerre parce qu’elles en ont besoin. C’est également vrai des pays cherchant une forme d’hégémonie : l’Inde, le Pakistan, la Turquie… et bien entendu l’Iran. Les États-Unis s’approprieraient bien l’Iran et l’Iran s’approprierait bien l’Irak. Dans un contexte de repartage du monde, c’est une poudrière.
Lorsque les États-Unis ont envahi l’Irak de Saddam Hussein, dans ce qui fut appelé la guerre du golfe en 1990-1991, la Gauche s’est lourdement trompée en dénonçant simplement les États-Unis, alors que le conflit avait deux aspects. Les gens comme l’Irakien Saddam Hussein ou le Serbe Slobodan Milošević, il y en a encore aujourd’hui et ils s’appellent Recep Tayyip Erdoğan en Turquie ou Hassan Rohani en Iran.
On est ici dans une tendance à la guerre – c’est Saddam Hussein qui envahit le Koweït initialement – qui s’oppose à la paix et à la démocratie. Des puissances grandes, moyennes, petites… oppriment leur peuple et cherchent l’hégémonie aux dépens d’autres pays, ou bien carrément la prise de contrôle complète. Les petites puissances sont en partie aux mains des moyennes, les moyennes aux mains des grandes.
Mais aucune de ces puissances n’a besoin de quelqu’un d’autre pour être antidémocratique et pour chercher la guerre comme échappatoire à la crise. L’Iran, une théocratie horrible, opprimant les peuples de ce pays de manière terroriste, pratique ainsi la fuite en avant et le militarisme généralisé, et n’a besoin de personne pour cela. Les manifestations de novembre dernier ont d’ailleurs été réprimées dans le sang avec des centaines de morts.
L’un des moyens de ce terrorisme d’État, ce sont les Pasdaran ou Gardiens de la révolution, une force à côté de l’État disposant d’un armement massif et qui contrôle 30% de l’économie iranienne. Qassem Soleimani en a été un de ses principaux commandants historiques, dirigeant ensuite sa section « non-conventionnelles » avec notamment des opérations « extérieures », dénommées Force Al-Qods (nom arabe de Jérusalem), en Syrie lors de la guerre civile.
Il a été dans ce cadre le stratège de la très forte pénétration iranienne au Liban, ainsi qu’en Irak, et c’est dans ce dernier pays, à Bagdad, qu’il est mort dans un bombardement américain.
Les États-Unis montrent ainsi qu’ils veulent reprendre la main sur l’Irak, passé pour beaucoup sous hégémonie iranienne, alors qu’une révolte contre le régime en décembre 2019 a déjà fait 460 morts et 25 000 blessés, notamment sous les coups des milices pro-iraniennes appelées Hachd al-Chaabi (Unités de mobilisation populaire).
Les bases américaines étaient régulièrement harcelées militairement, avec un contractant américain tué par la milice Kataëb Hezbollah récemment. Le 29 décembre, les États-Unis avaient alors visé une faction armée pro-iranienne en Irak, juste à la frontière avec la Syrie, faisant 25 morts.
En réponse, une manifestation était allée jusqu’à l’ambassade américaine à Bagdad, cherchant à y pénétrer et n’étant repoussé que par les forces américaines armées, le 31 décembre. Donald Trump avait alors publié un tweet, où il disait notamment :
« Ils paieront LE PRIX FORT ! Ceci n’est pas une mise en garde, c’est une menace. Bonne année ! »
Qassem Soleimani est alors victime du bombardement américain, le 3 janvier 2020.
Pour comprendre l’affront à l’État iranien, il suffit de voir que ce dernier a rétabli en mars 2019 la décoration de l’Ordre de Zulfikar, aboli lors de la « révolution iranienne » de 1979 et auparavant mise en place par le régime monarchique. C’est alors Qassem Soleimani qui l’a obtenu. La revue de politique extérieure Global Thinkers avait également placé Qassem Soleimani numéro un à son classement de 2019 des gens les plus influents dans le domaine de la défense et de la sécurité.
On est donc déjà dans une guerre, une guerre larvée, mais qui annonce la guerre ouverte. Et derrière l’Iran, il y a aussi la Russie et la Chine, l’aspect principal du conflit mondial, c’est l’affrontement sino-américain. Ce qui ne signifie pas que les pays européens, y compris la France, ne contribuent pas puissamment à cette tendance à la guerre.
On en est revenu à la veille de 1914 – et on a besoin d’une Gauche capable de l’emporter pour stopper la guerre.