La critique romantique et esthétique de la scène gothique fut à la fois talentueuse et inspirante. Son affirmation de la sensibilité et du goût en fait quelque chose de tout à fait important.
Nous sommes à la fin des années 1970 et la vague punk a commencé. Mais déjà il y a l’idée de formuler quelque chose de plus dense, de plus sombre. Le côté punk nihiliste et brutal, parallèle à la violence skinhead, rapide et autodestructeur, semble trop insatisfaisant.
Ce qui s’affirme alors, c’est l’idée que la tristesse est une rébellion. C’est l’émergence du gothique, qui connaît deux phases. La première, celle montrée dans la playlist, est une opposition entre un son cinglant et abrasif – ce qu’on appellera le batcave – et de l’autre un son plus direct, plus accessible, plus rock – ce qu’on appellera le rock gothique.
> La playlist sera disponible quelques semaine dans la colonne de droite (version web) ou en bas de page (version mobile) et sera ensuite visible sur la page des playlists.
Une sorte de synthèse des deux se produit lorsque des groupes cinglants trempent leur musique dans la glace, pour donner ce qu’on appelle la cold wave.
Par la suite apparaîtra l’utilisation massive de la musique électronique, faisant qu’une réelle soirée gothique aujourd’hui dispose toujours de deux pistes de danse : une pour la direction rock, l’autre pour ce qui sera appelé l’electro-gothique.
Mais regardons l’une des grandes sources d’inspiration, qui a révolutionné les esprits de nombreux artistes qui deviendront goth et qui ont alors 12, 13, 14 ans. Il s’agit d’une vidéo totalement anodine pour nous aujourd’hui, mais qui a bouleversé l’Angleterre alors. Nous sommes en 1972 et David Bowie passe à l’émission Top of the pops.
On a ici une musique totale, une esthétique totale, une expression sensible assumée. L’Angleterre fut horrifiée pour une partie, fascinée pour une autre.
La vidéo de la reprise de la chanson de David Bowie Ziggy Stardust par Bauhaus reflète parfaitement comment cela été compris et transformé, de manière bien plus abrasive bien entendu.
Il faut comprendre ici que le gothique au sens le plus large est lié au punk. Il se vit, il se danse, il implique une esthétique dans la vie quotidienne. Il a une grande prétention de culture et d’exigence.
Pour cette raison d’ailleurs, et contrairement à ce que des préjugés peuvent laisser penser, le gothique a toujours possédé une très forte base populaire. En effet, quoi de plus normal que de vouloir s’arracher à un environnement beauf, sans attrait pour la beauté ?
Que ce soit par le côté punk abrasif rupturiste ou bien le rock gothique axé sur l’amour romantique, il y a toujours eu un fond de vaste critique du monde tel qu’il est. Voici deux chansons des Sisters of mercy (qui ont toujours réfuté le terme de gothique), avec une vidéo présentant indirectement une critique de la misère en Inde, et une chanson tirée d’une compilation intitulée « Ils ne passeront pas » en soutien à la CNT (avec notamment le groupe rock-soul The Redskins).
Porter un regard approfondi sur la musique gothique – batcave s’avère donc forcément utile ; de par les multiples directions prises – allant de l’incisif à la préciosité – on y trouve nécessairement des éléments parlant.