Catégories
Politique

Christophe Lannelongue et Didier Lallement, deux exemples d’un État en perdition

Ils sont diplômés et ont de grandes responsabilités, ils relèvent du meilleur de ce que la société produit intellectuellement et sur le plan des capacités d’organisation. On n’arrive pas là où ils sont sans de grandes capacités. Et pourtant, la nature de classe de Christophe Lannelongue et Didier Lallement les a amenés à se comporter aux yeux du peuple comme les derniers des sans-cœurs, et en même temps les derniers des idiots. Un paradoxe exemplaire de toute une époque.

L’un est directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) Grand Est, l’autre préfet de Paris. Pour en arriver là, il faut une abnégation dans son travail et d’énormes capacités : on parle là de ce qui relève, au sens strict, de l’appareil d’État. Et pourtant cela se retourne en son contraire car leur État est le support d’une société avec des classes, où les bourgeois sont décadents.

Leur intelligence a donc été pétrifié et abouti à des grands moments d’égarement. Vendredi dernier, le préfet de Paris avait ainsi tenu ces propos aberrants :

« Ceux qui sont aujourd’hui hospitalisés, ceux qu’on trouve dans les réanimations, ce sont ceux qui, au début du confinement, ne l’ont pas respecté, c’est très simple, il y a une corrélation très simple. »

Il n’y a nulle corrélation évidemment, car les choses sont beaucoup plus compliquées que cela, mais apparemment c’est trop compliqué pour un préfet de Paris pour qui il y a l’État d’un côté, le peuple idiot de l’autre. C’est là un esprit gendarmesque typique des préfets, lié à une fonction anti-démocratique de A à Z. Le pauvre il n’y peut rien : c’est une machine au service d’une machine.

Mais comment trouver une excuse sociale alors à Christophe Lannelongue, directeur de l’ARS Grand Est ? Nous sommes en pleine crise sanitaire, on sait comment le Grand Est est touché : terriblement. Et lui débarque et dit qu’il n’y a « pas de raison ». Pas de raison à quoi ? « Pas de raison » d’interrompre les suppressions de postes et de lits au CHRU de Nancy.

Forcément, cela trouble, mieux : cela écœure. Et ce directeur est un drôle d’hurluberlu, d’abord pour croire qu’il peut dire cela comme cela, de manière simplement administrative, ensuite pour ne pas deviner que tout va être remis à plat et que donc sa conception du « il n’y a pas de raison » repose sur un moment politique totalement dépassé.

Et comme justement c’est un hurluberlu de l’appareil d’État, c’est le peuple qui a tort, pas lui. Ce n’est pas sa faute, on l’a piégé, c’est un complot politique monté par… un syndicat, lui n’est qu’une personne aux services des autres, il est là pour « gérer ».

Borné par sa nature sociale, il ne voit pas comment il est passé du côté des sans-cœurs, des bureaucrates de l’appareil d’État qui sont incapables de saisir la dignité d’une situation. Ils sont hors sol, c’est-à-dire hors du peuple. Voici ses propos ubuesques accordés à France 3 grand est :

« Mes propos ont été sortis de leur contexte. C’était une question bizarre lors d’une conférence de presse mensuelle où nous avons fait le point sur la gestion de la crise.

Un journaliste m’a demandé ce qu’il en était du Copermo à Nancy et si nous maintenions les suppressions d’emploi au CHRU de Nancy. J’ai répondu que le Copermo continuait même si on avait quelques semaines de retard sur la transmission du dossier en raison de la situation sanitaire actuelle.
Après coup, je me suis rendu compte que j’avais été piégé. Le journaliste a agi en concertation avec des élus de la CGT et des élus de la région. Dans la foulée, mes déclarations ont été transformées et ce qui est paru dans l’Est Républicain est faux !

Pire que ça, des communiqués, des lettres au ministre… ont immédiatement été publiés. Tout cela démontre que l’opération a été montée. En fait, c’est une opération politique de la CGT du CHRU de Nancy (…).

Il y a des gens qui exploitent le malheur de cette région. Moi, je gère la crise. C’est toute la différence. »

Christophe Lannelongue ne gère rien du tout : il parle, et il parle de gérer. Et tel le pharaon de l’ancienne Égypte, ses paroles sont censées se réaliser une fois dites : que ceci soit écrit, et accompli ! Tel est, comme le préfet de Paris, la mentalité propre à un appareil d’État se présentant comme un monstre bureaucratique au-dessus du peuple, se cantonnant dans la stabilisation d’une société pour que le capitalisme tourne.