La ministre des sports Roxana Maracineanu avait un aplomb incroyable pour faire quelques annonces sur Eurosport hier soir. Le plus tranquillement du monde, elle expliquait ne rien savoir de précis, pour ne surtout doucher aucune illusion, tout en laissant bien évidemment entendre que rien ne sera possible avant longtemps pour les compétitions sportives.
C’est avec un certain cynisme et une grande malhonnêteté vis-à-vis du monde sportif amateurs et professionnel, ainsi que leurs spectateurs, que Roxana Maracineanu est intervenue à la télévision. C’était d’ailleurs en privé, sur une chaîne accessible seulement aux abonnés de Canal +, donc de manière tout ce qu’il y a de plus anti-démocratique.
Or, le sport n’est que du sport évidement, il n’est pas la « priorité » bien sûr, mais il reste néanmoins une part importante de la vie du pays, et particulièrement de la vie des masses populaires les plus avancées sur le plan social. Il y a des milliers de structures amateurs, semi-pro ou même de petites structures professionnelles, qui sont d’une grande complexité, avec des mises en œuvre ayant des répercussions immenses.
Rien que pour les sportifs eux-mêmes, l’engagement sportif est très grand, touchant au plus profond de son intimité. Une telle suspensions des compétitions sportives est très perturbante psychologiquement, socialement, culturellement. Il faut donc des réponses claires.
Roxana Maracineanu, une arriviste au style néo-bourgeois condescendant, ne les fournit cependant pas. D’un côté, elle botte en touche en disant que le sport « ne sera pas prioritaire » dans la société et qu’il ne le sera pas pour le gouvernement. Sauf que ces affirmations ne relèvent d’aucun cadre clair et bien défini, comme aux Pays-Bas où les compétitions sportives ont toutes officiellement été reportées jusqu’à au moins après septembre. En France, tout reste très vague, rien n’est assumé.
Les choses sont pourtant simples et claires. Tant qu’aucun vaccin ou médicament n’existe, ou alors que le virus ait muté de lui-même pour s’affaiblir, ou bien n’importe quelle autre situation imaginable changeant la donne, tant qu’il n’y a pas cela, il faudra continuer la distanciation sociale. Celle-ci s’organisera, s’organise, tant bien que mal, au travail ou pour l’école, mais cela ne sera pas possible pour les compétitions sportives.
Les cyclistes ne feront pas le Tour de France avec des masques et comme l’a bien expliqué le coureur Romain Bardet, il y aurait quelque-chose d’étrange à prendre le risque de faire circuler tranquillement le virus sur les routes de France au mois de septembre si la situation n’a pas évolué drastiquement.
Le football professionnel, de par sa puissance financière, s’imagine encore capable de forcer les choses pour finir le championnat. Seulement, tout cela reste encore bien hypothétique, même s’il a copié le modèle allemand. En Allemagne, où le football professionnel a quasiment obtenu sa reprise, la fédération allemande table ainsi sur pas moins de 20 000 tests, avec tout un protocole très lourd. Le football professionnel français veut faire de même, avec 50 000 tests.
Naturellement, tout cela est considérée comme une provocation par rapport au besoin de tests pour des choses plus importantes, par rapport au public dans les stades qui se voit considéré comme facultatif, ainsi que par rapport à la sécurité sanitaire.
En fait, toute personne raisonnable sait bien qu’il n’est pas possible de reprendre les compétitions sportives cet été. C’est simplement logique. Mais le ministère des sports laisse pourtant planer de vains espoirs. Il laisse Denis Masséglia, président du Comité National Olympique et Sportif Français, faire circuler des propos hallucinés disant qu’il discute avec le gouvernement et que des choses seraient possibles, éventuellement, peut être, si jamais, etc.
Il abandonne simplement les dirigeants des clubs amateurs complètement désemparés, obligés de s’accrocher à des hypothèses improbables, etc. Tout cela va engendrer une frustration énorme dans la société : cette partie sociale n’est pas visible de prime abord, mais elle est immense ! Et c’est d’autant plus grave que le gouvernement peut inversement chercher à compenser en bafouant les règles sanitaires, en espérant que tout va bien, simplement pour éviter de l’agitation sociale…
Ici, dans tous les cas, l’absence d’État réellement social, c’est-à-dire étant la société elle-même, fait payer un prix terrible au peuple.