Le geste écologique par excellence semble être de mettre des ruches là où l’on peut. C’est une vague qui a été le fruit des premières révélations sur la chute de la biodiversité focalisant sur les abeilles car cela aurait un impact important sur l’alimentation humaine. S’en sont suivies des initiatives sur les abeilles à toutes les sauces, mais sans jamais prendre en compte la notion d’écosystème.
À titre d’exemple, lors du JT évoquant les résultats de l’IPBES en mai 2019, l’œil du 20h a fait un reportages sur les abeilles. Le rapport de l’IPBES parle pourtant d’un million d’espèces menacées, et la question des abeilles est mise en avant depuis septembre 2016 étant inscrites sur la liste des espèces en voie d’extinction.
Bien sûr le sujet est aussi important que n’importe quel animal, mais il a tendance à être monté en épingle car certaines abeilles sont domestiquées et on pense pouvoir avoir un certain contrôle en essayant d’en domestiquer plus, partout.
C’est ce qui est entrain de se passer avec la multiplication des ruches, en milieu urbain notamment. Le nombre de ruches à plus de doublé dans la capitale française depuis 2016, passant de 600 à 1500. C’est la même logique dans la plupart des villes, et ce, partout dans le monde.
Or, on n’a pas vraiment essayé de comprendre les dynamiques des pollinisateurs avant de faire la promotion de l’installation de ruches.
La logique était « il y a moins d’abeilles, implantons des abeilles ». C’est un raisonnement très mécanique, les choses ne pouvaient fonctionner comme cela.
Une étude alertait déjà en janvier 2018 sur les conséquences néfastes. Une autre étude publiée en septembre 2019 confirme qu’il faut arrêter de toute urgence et même faire machine arrière. Certaines villes comme Besançon, Metz, Lyon (…) prennent déjà des arrêtés d’interdiction d’installation de ruches.
Déjà parce qu’il n’y a pas qu’une espèce d’abeille mais des milliers, et surtout parce que la plupart sont sauvages et deux fois plus menacées.
Les abeilles sauvages sont souvent des ouvrières spécialisées de la pollinisation, elles sont incroyablement efficaces, transportant délicatement le pollen d’une fleur mâle à femelle d’une même espèce, aidant à la reproduction des plantes, notamment les arbres fruitiers. Certaines d’entre-elles ne pollinisent que quelques espèces végétales et se complètent avec les centaines d’autres spécialisées dans d’autres essences de plantes.
Les abeilles domestiques, elles, sont le résultats de croisement pour les rendre productive pour le miel, elles ne sont donc pas vraiment « paramétrées » pour faire ce travail de pollinisation. Elles vont dans tout type de fleurs, n’y laissent plus rien de comestible et transportent des mélanges de nectars sous forme compacte, coagulée. Le contact avec ce genre d’agglomérat ne permet pas de fécondation sur les fleurs qu’elles visitent.
Placer des ruches à outrance est donc mauvais car les abeilles domestiques suppriment la subsistance des abeilles sauvages et pour ne pas ou peu contribuer à la pollinisation.
Il faudrait donc attacher plus d’importance à la survie des abeilles sauvages, en sachant notamment, qu’elles nichent pour 90 % dans le sol, les autres dans des tiges creuses ou du bois mort.
On en revient donc à la question de l’étalement urbain, des pesticides et des manies de « nettoyer » la nature, son jardin.
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Le fait de mettre des ruches, c’est une manière bobo de concilier un mode de vie destructeur tout en greffant des éléments pseudo-écologiques largement promu par une vision ésotérique de la nature.