Après l’automobile, l’industrie aéronautique figure parmi les secteurs les plus impactés par l’arrêt de l’économie suite au Covid-19. À la fin du mois d’avril, on comptait 16 000 avions immobilisés, bloquant ainsi toute la chaîne de renouvellement de la flotte mondiale. Le secteur ne devrait pas retrouver son niveau de croissance avant plusieurs années.
Le ministre de l’économie Bruno Le Maire a donc annoncé un plan d’aide de 15 milliards d’euros, compte tenu déjà des 7 milliards de prêts garantis à Air France. De ces 15 milliards, un milliard va être dirigé vers un fonds d’investissement avec la participation d’Airbus, Safran, Dassault et Thalès. Le reste aidant à la recherche/développement et à la modernisation (robotisation et numérisation).
De la même manière que les grandes entreprises de l’automobile s’imposent par le projet d’Alliance Européenne des Batteries (le « Airbus des batteries »), c’est le même processus qui s’instaure dans l’aéronautique. Avec la pression technologique à l’avion « décarboné », les grandes entreprises se placent à la tête de la modernisation. Et comme dans l’automobile, la question réside dans la souveraineté nationale comme l’a bien rappelé le ministre de l’économie Bruno Le Maire :
« La crise sanitaire a mis un coup d’arrêt à la croissance du secteur aéronautique. Nous devons à tout prix éviter un décrochage de notre industrie face à la Chine et aux États-Unis »
Ce renforcement des grandes entreprises ne va pas manquer d’imposer leur rythme aux sous-traitants, aux petites et moyennes entreprises. Celles qui ne pourront suivre, seront forcément hors course.
En parallèle à la mise en avant des grandes entreprises, il y a le renforcement de l’armée dans l’aéronautique, qui a d’ailleurs toujours été importante pour les commandes de ce secteur. Les commandes effectuées par la loi de programmation militaire 2019-2025 vont ainsi être accélérées.
Ces commandes concernent 3 avions A330, transformés ultérieurement en avions ravitailleurs, 8 hélicoptères et des drones pour la marine nationale, pour un coût de 600 millions d’euros. À cela s’ajoute une commande d’environ 100 millions pour la construction d’avion de surveillance et de reconnaissance, ainsi que de drones pour la marine nationale. Et ces commandes sont très pragmatiques, comme l’a rappelé la ministre des armées Florence Parly :
« Chacune de ces livraisons, chacun de ces nouveaux équipements a une fin et une destination : nos opérations militaires […] Chacune de ces commandes, ce sont des emplois français non délocalisables, ce sont des territoires qui vivent, ce sont des régions fières de leur savoir-faire. Et c’est, au fond, notre souveraineté qui est en jeu »
Si ces commandes étaient déjà prévues et sont simplement avancées, il n’en est pas de même de l’augmentation de la participation du ministère à Definvest, un fonds d’investissement public spécifique à l’armée fondé en novembre 2017 pour soutenir les PME stratégiques en difficultés.
Cogéré par ce ministère et la Banque Publique d’Investissement, Florence Parly a annoncé passé sur cinq ans d’actuellement 50 millions à 100 millions d’investissements. Dans le même temps, une cartographie de 1 500 entreprises va être effectuée par ce ministère pour protéger ces entreprises. Florence Parly a d’ailleurs rappelé l’augmentation ces trois dernières années de l’investissement du ministère des armées dans l’aéronautique.
Les industries de l’automobile et de l’aéronautique, voient se produire le même schéma de relance : la domination de plus en plus unilatérale des grandes entreprises. A cela s’ajoute donc dans l’aéronautique une prise de contrôle plus grande de l’armée elle-même sur le rythme productif.
On a un appareil productif qui se fait de plus en plus la caisse de résonance des intérêts des grosses entreprises capitalistes, avec en arrière-plan la mainmise de l’armée sur une partie d’un secteur clef. C’est là une nouvelle illustration de la tendance à la guerre.