Alors que l’épidémie de coronavirus n’arrête pas de s’étendre en Guyane, le premier ministre Jean Castex s’est rendu ce dimanche 12 juillet dans la région. Resté seulement huit heures sur place, cela ne fut qu’une simple formalité en plus pour réaffirmer sa stratégie de combat anti-social, anti-populaire.
Jean Castex prouve son mépris pour les Guyanais en parlant de ce département comme d’une « île », réitérant la lourde erreur déjà effectuée par Emmanuel Macron en mars 2017. Cette « bourde » n’est en rien anecdotique : elle révèle combien la bourgeoisie française gère les régions d’outre-mer comme quelque chose à la marge, les délaissant en bonne partie.
La situation du covid-19 en est encore une triste illustration, avec près de 5 949 cas confirmés sur 268 700 habitants. La région ne compte que trois hôpitaux pour une trentaine de lits de réanimation et environ 600 médecins en activité. Un système de santé déjà mis à bout avec l’afflux de malades déjà atteints par le paludisme, la dengue ou la tuberculose.
Jean Castex a ainsi beau dire que « la Guyane est un territoire de la République comme un autre », il n’en est rien. Si tel était le cas, l’annonce de la fin de l’état d’urgence au 10 juillet n’engendrerait pas insouciance en métropole alors que la Guyane et Mayotte sont sous ce régime d’exception sanitaire jusqu’au 30 octobre.
Cela ne fait d’ailleurs aucunement illusion pour Yvane Goua, porte-parole du « collectif Mayouri Santé Guyane » qui déclarait ne rien attendre de la visite d’un premier ministre faisant l’aller-retour dans la journée, et précisait que :
« aujourd’hui, par habitant, je parle bien par habitant, en termes d’impact du virus, on est au-dessus de la Chine, on est au-dessus de l’Italie et pourtant on a pas les moyens en adéquation. On a 20 personnes qui arrivent par semaine, alors qu’il manque en fait aujourd’hui 300 à 400 professionnels soignants en Guyane »
Car trois ans après une importante vague de protestations, l’accord signé avec le gouvernement français n’a pas abouti à satisfaire les revendications.
Au mois de mars et avril 2017, le collectif Toukan (« 500 frères »), l’UTG (Union des Travailleurs Guyanais) et le collectif « Pou La Gwiyann dékolé » (Pour le développement de la Guyane) menaient une vague de grèves, dressant à des endroits des barricades pour réclamer, outre la lutte contre l’insécurité, l’immigration incontrôlée liée à l’orpaillage illégal, la création d’un CHU et la gestion publique du centre Centre médico-chirugical de Kourou situé à proximité de la base de lancement spatiale.
L’accord signé le 21 avril 2017 n’a toujours pas été mis en œuvre et c’est pourquoi, d’ailleurs, Emmanuel Macron s’était rendu dans la région en octobre, se disant attentif à a la situation. Et depuis ? Depuis rien. Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé auprès du ministère de la santé, restait encore bien évasif à propos de la demande du CHU en Guyane lors d’une session parlementaire en octobre 2019.
Dans ce contexte comment ne pas être offusqué, pour ne pas dire révolté, lorsqu’on entend Jean Castex déclarer :
« je viens avec la volonté de préparer la France à une éventuelle deuxième vague mais en préservant la vie économique, la vie sociale »
L’ordre du jour est clair pour ce gouvernement : c’est la poursuite coûte que coûte du capitalisme, à marche forcée, envers et contre toutes les attentes populaires. La Guyane demande pourtant une très grande aide pour faire face à la fois à la situation sanitaire actuelle posée par le covid-19, mais aussi pour son développement social en général.
Dans une région où plus de 20 % des gens sont privés d’emplois et environ 25 % sans couverture sociale, le re-confinement de certains quartiers les plus pauvres va être dramatique. Alors que l’occupation moyenne d’un logement en métropole est de 2,3 personnes, en Guyane elle est de 3,4 personnes. C’est près d’un tiers de la population qui subit le mal-logement lié au surpeuplement….
La visite éclair du premier ministre Jean Castex prouve bien toute l’arrogance d’une personnalité technocratique, placée par en haut et n’étant là que pour gérer, de la manière la plus ferme et placide, la continuité du capitalisme français. Soit les masses populaires prennent conscience de la situation et tentent de résister, soit c’est un terrible rouleau compresseur qui va s’écraser sur elles, qui s’écrase déjà sur elles…