La technologie 5G génère beaucoup d’interrogations, voire d’inquiétudes en France. Voici un positionnement intéressant de la part du Parti socialiste à ce sujet, exprimé sur un mode très rationnel typique de la Gauche française :
« La 5G : progrès ou fuite en avant ?
Depuis plusieurs années, des alertes sont lancées concernant la 5G. Certaines sont suspectes, relayées par les complotistes en tous genres. Mais ces derniers mois, les rapports scientifiques s’accumulent et les problèmes soulevés se multiplient.
Nombreux sont ceux qui réclament un moratoire sur le déploiement de la 5G en France, le temps d’étudier sérieusement toutes les conséquences de l’installation et de l’utilisation massive de cette technologie de communication. Des candidats et maires socialistes ont notamment pris position pendant la campagne municipale ou plus récemment dans une tribune.
Le Premier secrétaire du PS Olivier Faure s’est exprimé à plusieurs reprises ces derniers mois en faveur d’un principe de précaution.
Car contrairement à ce que prétend Emmanuel Macron à travers des propos dédaigneux et tristement caricaturaux, réfléchir et débattre avant de déployer la 5G, ce n’est pas prôner la régression des civilisations humaines vers un nouvel âge de pierre, c’est au contraire exiger de comprendre si une évolution technologique est un véritable progrès humain.
C’est dans cet esprit que le secrétariat national du Parti socialiste lance un travail d’auditions d’experts et de concertations avec nos élus dans les territoires, pour :
- démêler le vrai du faux sur les questions d’impact du déploiement de la 5G sur la santé, notamment dans les fréquences hautes (26GHz) pour lesquelles l’ANSES demande d’approfondir la recherche sur les effets sanitaires potentiels ;
- examiner les aspects de consommation d’énergie et d’impact environnemental d’une utilisation nationale massive de la 5G ;
- évaluer les expertises concernant les problèmes d’interférences avec des équipements importants, comme les installations météorologiques ;
- comprendre les risques liés à la cyber-sécurité, en particulier pour les objets connectés, et assurer la protection des libertés individuelles et de la vie privée mais aussi les enjeux internationaux de sécurité liés aux technologies de la 5G ;
- alors que certains territoires ne sont pas encore couverts par la 3G et la 4G, il est paradoxal de se focaliser sur la 5G. Il semble donc nécessaire d’engager une réflexion sur la fracture numérique territoriale, de s’assurer aussi des moyens mis en œuvre pour réduire la fracture sociale, et d’enfin envisager ces technologies de réseaux mobiles comme des outils d’aménagement du territoire ;
- enfin, il convient d’engager un débat public avec la mise en place de consultations citoyennes sur les enjeux de la 5G dans les métropoles concernées.
L’évolution technologique n’est pas un but en soi. Voilà maintenant 30 ans que la révolution numérique a commencé, avec les prémices de l’Internet et de la téléphonie mobile. L’évolution exponentielle de ces technologies a bouleversé nos sociétés, nos vies, pour le meilleur et pour le pire.
Dès qu’une évolution technologique apparaît, elle est déployée, parce qu’il y a toujours des intérêts économiques et financiers qui rencontrent opportunément une aspiration légitime des êtres humains à un progrès technologique qui améliore ou facilite leur vie quotidienne. C’est seulement dans un deuxième temps qu’on mesure les conséquences négatives d’un déploiement précipité.
Voilà 20 ans qu’on court après la fracture numérique sociale et territoriale. On commence à peine à repenser le droit du travail dans le monde des plateformes numériques et du télétravail. On s’interroge sur la manière de traiter les addictions aux écrans chez les plus jeunes. On cherche depuis des années la ligne d’équilibre entre l’utilité du traitement massif des données et la protection de la vie privée. Les GAFAM font des profits considérables et atteignent des valorisations en bourse leur permettant de peser sur l’économie mondiale et d’investir massivement sans s’acquitter d’un impôt sur les sociétés à un niveau acceptable dans les pays où ces entreprises génèrent leurs profits. À titre d’exemple, la société AMAZON a investi près de 36 milliards de dollars en R&D en 2019, ce qui représente pour une seule entreprise l’équivalent du budget total du programme européen de financement de la recherche et de l’innovation Horizon 2020 de 2018 à 2020. Nous avons toujours et encore des problèmes de gouvernance de l’Internet et de neutralité du net notamment en dehors de l’Europe, pour garantir l’égalité de traitement de tous les flux de données sur Internet. Ce principe exclut par exemple toute discrimination positive ou négative à l’égard de la source, de la destination ou du contenu de l’information transmise sur le réseau.
Doit-on continuer cette fuite en avant, ou peut-on prendre le temps à l’occasion de ce débat sur la 5G, de respirer, poser les bonnes questions, trouver les solutions adéquates, avant de continuer à avancer ?
Oui, l’évolution technologique est intimement liée à la construction des civilisations humaines.
Mais la responsabilité politique est de s’assurer que le déploiement d’une technologie va dans le sens du progrès humain accessible à tous, dans le respect de l’écosystème dans lequel nos civilisations peuvent prospérer.
– Mercredi 16 septembre 2020
Fabrice de Comarmond »