Renaud Muselier, président Les Républicains des régions de France, a annoncé le 19 octobre 2020 que les présidents des régions de France prenaient « l’initiative de préparer la publication d’un ouvrage rassemblant les caricatures religieuses et politiques les plus marquantes parues dans la presse régionale aux côtés de celles parues dans la presse nationale », et cela afin de « témoigner de nos engagements à défendre les valeurs de la République et le droit fondamental de chacun et chacune de nos concitoyens à vivre en paix et dans la liberté ».
Cette initiative montre à quel point la bourgeoisie vit coupée des réalités quotidiennes et des besoins de l’époque.
La crise actuelle n’est perçue qu’à l’aune d’une liberté d’expression qu’il serait bon de réaffirmer. Les Républicains bon-teint ne raisonnent qu’à partir du passé et semblent ajouter encore plus de confusion au chaos ambiant. Avant toute chose, que représente la caricature ?
La caricature est un moyen polémique pour dénoncer un fait, une personne, une idéologie, en déformant la réalité, en choisissant l’outrance. C’est un artifice visant à condamner fortement la position de l’autre. On est dans le registre de l’affrontement, de la dérision.
C’est un procédé littéraire typique de l’esprit français ; à savoir la dénonciation politique teintée de sarcasme, d’ironie, voire d’un peu de vulgarité, et qui ne s’encombre pas trop de raisonnement. Le modèle historique par excellence auquel pensent les défenseurs à tout crin de la caricature est évidemment Voltaire, la figure de la critique des superstitions et de l’obscurantisme.
Cependant réduire le combat des Lumières contre l’obscurantisme à la seule ironie voltairienne, c’est refuser de voir l’immense œuvre collective de l’Encyclopédie portée notamment par Diderot et d’Alembert. Le combat des Lumières a surtout été le fait d’un effort collectif, d’une réflexion approfondie, d’un apport philosophique et intellectuel en vue d’émanciper leurs contemporains. Mais la droite préfère valoriser Voltaire, l’intellectuel isolé, figure de « l’insolence française ».
Par populisme, de nombreuses figures politiques tentent donc de faire croire que la caricature serait l’alpha et l’oméga de l’esprit philosophique et de la critique. Une telle attitude est un mensonge face à l’Histoire, et nous dirige tout droit vers le chaos. La période est à la confusion, à l’émotion médiatique et à l’hystérie sur les réseaux sociaux.
Le combat de la Gauche c’est d’affirmer des valeurs, des repères idéologiques et culturels. La critique des religions est nécessaire, et elle doit se faire par la connaissance, par l’instruction, par la réflexion intellectuelle et historique sur ce que représente réellement la religion. C’est une question démocratique et elle doit être traitée comme telle, sans céder un pouce de terrain aux extrémistes ; elle ne peut se résumer à des attaques outrancières, et à des postures démagogiques.