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L’Assemblée nationale adopte une petite loi pour les animaux

L’Assemblée nationale a voté vendredi 29 janvier 2021 une proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale. C’est un petit pas, allant clairement dans le bon sens, mais qui ne suffira pas à changer le sort général des animaux dans le pays tellement la tâche est immense.

La proposition de loi « visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale », portée par les députés de la majorité Laëtitia Romeiro Dias, Dimitri Houbron, Loïc Dombreval et Aurore Bergé, a été adoptée suite à une procédure accélérée avec 79 voix pour (et 2 contre) à l’Assemblée nationale.

Il y a des bonnes choses dans ce texte, montrant une évolution des mentalités en France. C’est toutefois très limité par rapport aux exigences de la protection animale. On a d’abord trois mesures pour les animaux de compagnie :

  • l’instauration d’un « certificat de connaissance des besoins spécifiques de l’espèce » pour l’achat d’un animal de compagnie ou d’un équidé ;
  • l’interdiction de la vente d’animaux en ligne (par petite annonce) pour les particuliers ;
  • l’interdiction à partir de 2024 de la vente de chiens et de chats en animalerie.

C’est intéressant, mais certainement pas à la hauteur de la situation, qui exige qu’un véritable passeport soit élaboré pour chaque animal de compagnie, afin qu’il se voie reconnaître son existence personnelle. Cela permettrait d’établir de réelles obligations pour les familles prenant la responsabilité d’un animal.

Mais pour organiser cela, il faudrait en fait un véritable service public des animaux de compagnie, prenant en charge un réseau de centres de soins et de refuges publics, organisant lui-même l’adoption et l’achat d’animaux de compagnie et disposant d’agents dédiés pour surveiller et faire respecter l’intégrité des animaux dans les familles et dans la société.

Sans cela, les mesures de la proposition de loi visant à renforcer la répression de la maltraitance animale n’auront qu’un faible impact dans une société où règne le libéralisme. Elles consistent en :

  • le durcissement des sanctions pour maltraitance, avec jusqu’à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende en cas de mort de l’animal ;
  • la considération, comme circonstance aggravante de l’acte d’abandon, le fait de le perpétrer dans des conditions mettant en péril, directement ou indirectement, la vie de l’animal (l’abandonner dans une cage, au milieu de la forêt, dans un endroit non fréquenté, etc.) Cela est puni d’une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
  • la condamnation de la zoopornographie à trois ans d’emprisonnement et de 60 000 euros d’amende, y compris dans le cas de la simple diffusion des images. La peine peut être portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis en présence de mineurs, par le propriétaire de l’animal ou un membre de sa famille ou par un professionnel exerçant une activité en lien avec les animaux.

L’autre volet de la loi concerne les animaux sauvages détenus.

Il y a d’abord la fermeture des élevages de visons d’Amérique pour leur fourrure, qui est prévue pour dans deux ans. Si cela est appliqué, ce sera une grande victoire… En attendant, deux ans c’est très long, alors que la fermeture de ces lieux abject devrait être immédiate, ne serait-ce que face aux risques récents liés aux covid-19 que l’on connaît (encore est-il que cette question sanitaire, aussi importante soit-elle, n’est pas ce qui compte ici).

La proposition de loi prévoit également la fin des animaux sauvage pour le spectacle, à la télévision, en cirque ou en delphinarium. Ces deux dernières interdictions sont très marquantes, car elles sont une revendication ancienne et très importante de la protection animale, avec notamment le grand travail fourni sur cette question par One Voice depuis des années.

Si la satisfaction est là, il y a malgré tout une méfiance, car cela n’offre pour l’instant aucune garantie. Rappelons ici que la loi est loin d’être effective, car elle doit ensuite passer devant le Sénat, à majorité de Droite, qui pourrait tout à fait la détricoter. Ensuite, à l’issue d’une éventuelle navette parlementaire, il faudra que la loi soit promulguée… puis qu’il y ait les décrets d’application mettant en place formellement les mesures, puis que celles-ci soient appliquées dans les faits, etc.

Notons au passage qu’il a été remarqué des « détails », comme par exemple le fait que l’article 12 sur les « dispositions relatives aux animaux sauvages détenus en captivité à des fins de divertissement » parle d’établissements… « itinérants ». On se demande ainsi, comme le souligne One Voice, « combien vont rester aux mains des dresseurs qui vont se sédentariser ?! »

Cela a l’apparence d’un détail, mais il n’en est rien. Car l’exploitation des animaux en France relève d’une industrie et d’une culture très ancrée, solidement implantée dans les mentalités. Il ne suffira pas d’une petite loi pour changer les choses par enchantement, car en face les résistances sont fortes, et il y aura forcément des brèches dans lesquels ne manqueront pas de s’engouffrer ceux qui vivent et s’enrichissent aux dépens des animaux.

De toute façon, la proposition de loi, aussi bienveillante soit-elle, passe totalement à côté de la question essentielle des animaux destinés à l’alimentation et exploités en masse par l’agro-industrie… et de la question autant essentielle des animaux sauvages dont les lieux de vie devraient être sanctuarisés.

Car c’est là le cœur du problème, c’est là où tout se joue, dans un sens où dans l’autre.

En effet, si on commence à reconnaître l’existence des animaux, il devient impossible de les manger… Et comme la société n’est pas prête culturellement à changer ses habitudes alimentaires, ni à s’affronter à l’agro-industrie, alors elle va forcément freiner pour la reconnaissance des animaux, y compris ceux de compagnie.

Inversement, à partir du moment où il est question de refuser de manger les animaux, alors là tout se débloque. Et ce n’est plus seulement de l’intégrité des animaux de compagnie ou de l’interdiction des animaux sauvages dans les cirques dont il est question, mais de tout ce qui concerne les animaux, avec la chasse, la pêche, la corrida, le massacre des animaux sur les routes, les zoos, l’expérimentation animale !

La question animale est tout simplement la boîte de Pandore d’un capitalisme dénaturé qui engloutit la planète elle-même…

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