La crise n’a pas freiné du tout la poursuite de la course aux armements, bien au contraire.
Les dépenses en armement avaient atteint 1,85 % du PIB mondial en 2019, en 2020 cela a consisté en 2,08 % du PIB mondial. Naturellement, le PIB mondial s’est contracté avec l’ouverture de la crise, alors il faut regarder les chiffres eux-mêmes. On voit alors qu’on a 1 830 milliards de dollars de dépenses militaires, soit… 3,9 % de plus que l’année précédente. La folie continue.
C’est il est vrai une croissance moindre qu’entre 2018 et 2019, avec 4,4 %, mais cela n’est qu’un très léger ralentissement de la croissance des dépenses militaires. Mais cela ne change rien au fond et même, l’explosion des tensions aboutit au même phénomène qu’avant les première et deuxième guerres mondiales. Chaque protagoniste cherche à ne pas présenter toutes ses cartes.
Concrètement, on doit en fait considérer qu’il y a une accélération de ces dépenses, en sachant qu’il est très difficile d’en cerner les contours. Si du côté américain, les 738 milliards de dollars de dépenses sont relativement clairs, bien qu’une partie soit clairement opaque, c’est encore plus vrai pour la Chine. Celle-ci dépenses officiellement 193,3 milliards de dollars en 2020 pour les affaires militaires, mais c’est en réalité davantage. Une bonne partie est maquillée.
Cela est vrai d’ailleurs pour tout le monde. Il ne s’agit pas seulement du fait que le complexe militaro-industriel concerne parfois des productions en apparence purement civiles, comme c’est flagrant en Chine. Il s’agit surtout du fait que la guerre du 21e siècle implique un haut degré de professionnalisation et un très haut niveau de technologie.
Ce qui fait que les entreprises travaillant sur l’intelligence artificielle ou les systèmes autonomes ne peuvent aujourd’hui pas travailler avec l’armée, tout en étant intégrées à long terme dans les stratégies militaires. La guerre au Nagorny-Karabagh, avec son emploi stratégique de drones, est un exemple de comment, à un moment donné, l’armée choisit de systématiser une nouvelle option.
Il y a également un autre aspect qui compte, celui de la disponibilité matérielle de ce dont a besoin le complexe militaro-industriel. En apparence, les dépenses militaires françaises (55 milliards de dollars), britanniques (61,5 milliards de dollars), allemandes (51,3 milliards de dollars) et russes (60,6 milliards de dollars) sont sensiblement les mêmes. En pratique, les dépenses russes sont dans leur nature proportionnellement supérieurs, de par l’écosystème monopoliste et les matières premières disponibles, ainsi que des salaires moins élevés.
Cela ne change rien au fait qu’on est sensiblement au même niveau ici et qu’on a d’un côté l’ogre américain, de l’autre la Chine cherchant à lui prendre sa place de superpuissance hégémonique, mais encore très loin derrière. Puis, on a une série de pays puissants, prêts à en découdre, mais obligés d’établir des alliances dans tous les cas. D’ailleurs, les pays européens de l’OTAN sont en moyenne passées de 1,25 % du PIB en 2014 pour les dépenses militaires à 1,64 % du PIB en 2020. L’objectif est de généraliser les 2%.
On a donc une généralisation du militarisme, un approfondissement, une systématisation. C’est la marche à la guerre.