Le Comité français de l’Union internationale de conservation de la nature (UICN) a publié un rapport sur la biodiversité dans lequel on trouve une liste rouge des espèces menacées en France. Le bilan est catastrophique.
Lancée en 2008 par le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) et le Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’étude a mobilisé près de 500 chercheurs sur plus de 10 ans, avec 13 842 espèces animales et végétales surveillées et suivies.
Cette nouvelle liste rouge est importante car la dernière étude de la faune et de la flore en France date d’il y a 20 ans, cette dernière liste étant donc une précieuse actualisation des connaissances, avec un enrichissement des espèces suivies.
Et entre 2008 et aujourd’hui, ce sont 2 432 espèces qui apparaissent comme gravement menacées, avec déjà 187 formes de vie qui ont définitivement disparues du sol français. Les variantes de la vie ayant disparues concernent surtout celles relevant des poissons d’eau douce, des mammifères, ainsi que des espèces dites « éphémères » (comme certains papillons de nuit par exemple).
Quant aux espèces menacées, elles concernent surtout une partie des amphibiens, des oiseaux nicheurs, des poissons et crustacés d’eau douce. On ne parle ici d’ailleurs que la France métropolitaine, car si l’on regarde l’ensemble du territoire francophone, c’est déplorable puisque 1 048 espèces menacés au niveau mondial sont présentes dans les « territoires d’Outre-Mer » français.
En Martinique c’est pratiquement la moitié des reptiles qui sont menacés d’extinction, un tiers des coraux constructeurs de la Réunion (ou « coraux durs »), un tiers des mammifères marins de la Guyane, un tiers des plantes vasculaires indigènes (fleurs locales) de Guadeloupe etc., etc. Les proportions sont telles et la liste si vaste que cela donne le vertige, un vertige couplé d’une profonde tristesse, d’une grande colère.
Cette altération du monde vivant est considérée comme la sixième extinction de masse qu’a connu la Planète depuis que la vie y est apparue. Mais ce qui est préoccupant, c’est que cette dernière s’effectue à un taux de 100 à 1 000 fois plus élevé que les cinq précédentes extinctions. Cette rapidité à laquelle disparaissent des tas de formes de vie est due à l’emprise de l’être humain sur la Biosphère :
Les principales menaces pesant sur les espèces sont la destruction et la dégradation des milieux naturels, le
braconnage et la surexploitation, l’introduction d’espèces envahissantes, les pollutions et le changement climatique.
Si l’on a saisi que ces « principales menaces » ne sont pas séparées les unes, des autres, on comprend pourquoi la vie sauvage disparaît à une telle vitesse. C’est tout à la fois l’environnement direct et la capacité de la vie à se reproduire qui sont attaqués de plein fouet. Il est donc absurde de penser que c’est l’emprise de l’humain, en elle-même, qui cause tant de dégâts, c’est surtout son emprise anarchique fondée sur un développement indifférent aux conséquences sur la Nature.
C’est en ce sens qu’il faut affirmer que rien n’avance pour l’écologie, car rien n’avance pour protéger la vie naturelle, puisque rien n’émerge des bases populaires pour stopper la grande indifférence envers la Biosphère. Pire il y a même un recul : le rapport affirme que ce sont finalement les espèces ayant le plus de mesures de protection qui se sont fortement dégradées depuis 2008.
À ce titre, il est absurde que l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), intégré-transformé début 2020 dans l’Office français de la biodiversité (OFB), participe à cette étude, tant la chasse relève du problème plus que de la solution.
Ce recul est pourtant noyé, masqué par l’avalanche de communications « militante », de spots publicitaires, d’appels de « personnalités » en tout genre, de conférenciers détachés de toute perspective pratique, bref d’une mode qui donne l’impression que des choses changent, sans que rien ne change vraiment.
La cause écologiste n’avancera jamais sans une rupture morale visant à reconnaître pleinement la vie naturelle. Cela demande une remise en cause de sa vision du monde, avec à la clef une modification de son propre mode de vie. On ne peut vouloir le changement, sans chercher à se changer soi-même.
Il faut apprendre à apprécier la vie naturelle autour de soi, apprendre à étudier la nature en bas de chez soi, ou à côté de chez soi, pour mieux être en mesure de s’opposer aux intérêts destructeurs. Voilà ce dont a besoin toute cette vie qui disparaît sous nos yeux : d’un vaste mouvement de résistance populaire, assumant la sensibilité envers la nature et n’ayant pas peur de défendre coûte que coûte la vie sur Terre.