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La crise sanitaire est finie pour les Français en mode beauf

La France est dans le déni et fonce droit dans le mur.

La France est dans le déni et fonce droit dans le mur.

La société française n’a jamais pris au sérieux la crise sanitaire. Elle n’a fait que subir, en s’adaptant au fur et à mesure face à l’urgence et en acceptant des milliers de morts, en sacrifiant des personnes âgées, les diabétiques, les obèses. Il a fallu énormément de temps pour fermer les frontières, pour imposer le masque dans les lieux clos, pour prendre telles et telles mesures, pour ne plus accepter telles et telles attitudes. La société, de manière passive, s’est globalement pliée aux règles, sans trop rien dire, mais sans trop réfléchir non plus, sans outrepasser quoi que cela soit.

Et puis voilà qu’il est considéré maintenant que tout cela a trop duré, qu’il est temps d’en finir. Les gens se sont rués sur les terrasses ou les rayons barbecue des magasins dès que cela a été possible. Peu importe que la situation soit, globalement et suivant les régions, environ 4 fois pire que l’an passé à la même date (malgré 30 millions de primo-vaccinés…) : la crise sanitaire est de plus en plus ouvertement niée.

Symbole de cette immaturité générale, le gouvernement a fini par expliquer qu’il y aurait une tolérance au couvre-feu pour l’après match de football France-Allemagne mardi 15 juin 2021. Cela en dit très long sur le relâchement généralisé, jusqu’aux plus hautes sphères de l’État qui en arrivent à un tel degré de décomposition au point de tolérer quelque chose d’aussi futile. En quoi les gens ont besoin d’une tolérance au couvre-feu pour suivre un simple match de phases de groupe de l’Euro ? De surcroît au milieu de la semaine de travail.

Rien que le fait d’y avoir pensé, d’en parler, est déjà incroyablement décalé. On peut toujours estimer que le couvre-feu à 23 heure n’a pas d’utilité : mais là n’est pas la question, car à partir du moment où il y a une règle sanitaire, c’est qu’elle est faite pour être appliquée. Et pas pour disparaître de manière aussi absurde qu’à l’échéance d’un match de football.

Il faut dire qu’il y a ici surtout un choix populiste qui est fait, avec une visée électorale en arrière plan. Le sommet de l’État se moque éperdument de la réalité sanitaire du pays, mais il y a par contre une stabilité sociale et culturelle à garantir, pour qu’il n’y ait pas de vague de contestation, ni aucune remise en cause du désordre capitaliste. Le football est ici très utile pour fabriquer un semblant de « cohésion » et de joyeuseté collective. On est clairement dans le mythe mobilisateur de type nationaliste avec le « bleu blanc rouge » censé s’imposer à tout… et même aux règles sanitaires au milieu d’une des pires crises sanitaire de l’histoire moderne.

Le gouvernement s’imagine qu’il gagnera ainsi de la sympathie, et c’est d’ailleurs probablement très vrai tant la société est immature et prête à gober tout et n’importe quoi, du moment qu’est maintenu le rêve éveillé d’une société de consommation 24h sur 24 et à 150 km/h.

C’est en tous cas à ce rythme que la société fonce dans le mur, et le réveil va être terrible. Déjà, rien qu’à propos de la crise sanitaire, qui est loin d’être terminée. Il faudra bien à un moment en faire le bilan. Il faudra voir combien de vies ont été sauvées et combien n’ont pas été épargné à cause de l’absence de mesure ou de leur application trop tardive ou pas assez stricte. Et rien que là, le choc sera terrible.

Mais il n’y a pour l’instant toujours pas de prise de conscience de l’ampleur de la crise, de sa globalité (elle est autant sanitaire qu’écologique, sociale, culturelle ou économique). Il n’y a que le déni, encore le déni et toujours le déni. Cachez cette crise que je ne saurais voir, tel est le grand mot d’ordre qui s’annonce pour l’été 2021 en France.