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Les Français apprennent dans les médias le changement de couleur du drapeau national

C’est littéralement surréaliste.

C’est littéralement surréaliste.

C’est à peine croyable et en fait cela en dit long sur la société française. Le drapeau national a changé de couleur, a-t-on appris par les médias, et encore ce changement a trois ans déjà! Il inverse le choix de 1976, un choix dont d’ailleurs personne n’était au courant de toutes façons.

Voici les trois drapeaux: avant 1976, à partir de 1976, puis à partir de 2018.

Le changement de 1976 avait été réalisé par la président de la République Valéry Giscard d’Estaing. Chef de file de la bourgeoisie moderniste, avec notamment Simone Weil, il voulait montrer que la France s’intégrait dans le projet européen. Le bleu du drapeau devint moins « agressif » en prenant le ton du drapeau européen (dont le bleu et les douze étoiles sont très clairement des allusions chrétiennes, dans le sens de la démocratie-chrétienne).

On notera au passage que Valéry Giscard d’Estaing avait… ralenti la Marseillaise, François Mitterrand rétablissant le rythme par la suite. Et là, donc, on apprend qu’a eu lieu un autre « fait du Prince », avec un nouveau changement consistant en un retour au drapeau d’avant 1976, c’est-à-dire un remplacement du bleu cobalt (de l’Union européenne) parle bleu marine (présent à l’origine).

Le Figaro résume cela ainsi:

« L’Élysée a modifié le bleu du drapeau tricolore accroché à son fronton pour revenir au bleu marine d’avant-1976, a confirmé lundi la présidence française, évoquant «l’imaginaire des Volontaires de l’An II, des Poilus de 1914 et des Compagnons de la Libération de la France libre».

Ce changement pour un bleu plus foncé, opéré en toute discrétion, s’est appliqué d’abord aux drapeaux posés derrière les allocutions d’Emmanuel Macron à partir de fin 2018, puis pour ceux accrochés au fronton de l’Élysée et des autres bâtiments de la présidence depuis 2020. »

Mais on apprend en même temps que la démarche est incitative : il ne s’agit pas de forcer au changement du bleu. Ce qui implique que deux nuances de bleu vont coexister… Le libéralisme, jusqu’aux couleurs du pays! Il faut dire que la constitution française – un pays pourtant pointilleux sur les détails de par sa culture historique – ne précise pas de quel bleu il s’agit, parlant seulement de bleu, blanc et rouge.

Qui plus est, il y a déjà des usages : lorsque c’est un drapeau qui flotte par exemple sur une mairie le bleu est sombre, dans des documents il est clair, etc. Bref, c’est à n’y rien comprendre et tant mieux, car cela montre que si les Français savent être des idiots chauvins totalement aveuglés, ils se désintéressent de tout fanatisme outrancier. Personne n’en a rien à faire du changement de couleur!

C’est quelque chose de vraiment marquant. Le président change les couleurs du pays, et les gens disent : ah bon, pourquoi pas, il n’a rien d’autre de mieux à faire, bof, oui, ok, etc. C’est très surprenant, dans un autre pays cela serait une question nationale, même là où on ne s’y attend pas. Il suffit de penser, par contraste, au fanatisme « soft » qu’on trouve en Suède, par exemple, pays où les gens se veulent ouvert au monde mais où le drapeau est présent partout (jusqu’aux couleurs de sacs Ikea) et où critiquer le pays est un crime de lèse-majesté.

C’est là qu’on voit qu’un type malsain comme Eric Zemmour peut déverser sa propagande et même réussir son entreprise nationaliste, mais qu’au fond cela ne tiendra pas, parce que les gens en France ont une autre envergure que du néo-pétainisme. Malheureusement, les gens étant fainéants, la catastrophe peut arriver avant que le nationalisme n’échoue…

Et en même temps, tout ce chaos au sujet du drapeau montre que l’État a totalement perdu les pédales, qu’on a affaire à une administration prenant des mesures on ne sait trop comment, on ne sait trop pourquoi, au point que le drapeau national a changé et que les gens ne le savent même pas. C’est littéralement n’importe quoi et en fait c’est à l’image d’un pays où on laisse faire les choses et une fois qu’elles sont installées, on les valide, en disant qu’on ne peut pas faire autrement et qu’après tout, pourquoi pas.

Là il y a un vrai travers français.

Cela montre aussi que la France est un pays à bout de souffle, sans esprit d’unité. Ce qui est logique, car la lutte des classes a démoli une unité nationale temporaire historiquement, aidé par l’inévitable mondialisation (malheureusement encore capitaliste). Il faut une nouvelle unité, populaire, dont le drapeau ne pourra qu’être rouge. Pour cela il faut un romantisme propre à la Gauche historique. C’est d’elle dont on a besoin, et pas de la gauche caviar ni de la gauche kebab.