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Eric Zemmour, défenseur de la chasse à courre

Qui se ressemble s’assemble.

Qui se ressemble s’assemble.

Le magazine Chassons.com publiait en novembre 2021 une interview vidéo d’Eric Zemmour qui lui permet de poser quelques marqueurs pour son projet. Dans un lieu bien choisi, la forêt de Marly, où Louis XIV aimait chasser, Zemmour commence par comparer les écologistes d’aujourd’hui aux gauchistes des années 1970. Il en vient ensuite tout naturellement à la chasse à courre et à sa dimension symbolique socialement, pour ses opposants comme pour ses défenseurs :


« On voit bien ce qu’il y a derrière, on voit bien le fantasme, on va à Marly c’est le fantasme de Louis XIV, de l’aristocratie, des beaux costumes, etc. »

Il se lance ensuite dans une récitation somme toute banale des éléments de langage des veneurs, distribués régulièrement par prospectus à tous le personnel politique du régime depuis que cette pratique est dans le collimateur d’un fort mouvement d’opposition populaire.

Dans tout ce fatras de lieux communs, peu lui importe ce qui est vrai ou faux, il s’agit pour lui de se présenter comme au service des gens qui pratiquent cette chasse. Par cette intervention, Zemmour assume donc la défense de la chasse mais pas seulement : il invoque tout spécialement la chasse à courre comme totem de ce que sa candidature représente socialement. C’est le seul qui aille aussi loin, là où un Macron cherche seulement à désamorcer une possible opposition « rurale » à son modernisme et où un Xavier Bertrand n’assume la chasse que comme un bloc de beaufitude patriarcale.

Pour Zemmour, c’est précisément la chasse à courre qui est intéressante. Car il faut le savoir, cette chasse particulière est ouvertement revendiquée comme un bastion par l’aristocratie (à travers le site de l’Association de l’Entraide de la Noblesse Française, en même temps que l’Église, l’Académie Française et un certain surnombre parmi les officiers de l’Armée). En ce sens, elle possède toutes les clefs idéologiques dont un fasciste a besoin pour mobiliser les esprits dans le sens du nationalisme et de la marche à la guerre.

L’aristocratie (ou ce qu’il en reste) est une force sociale à laquelle Zemmour s’adresse ici directement, pas pour sa force numérique dans le cadre d’une élection, mais parce qu’elle porte quelque chose qui culturellement sert son projet politique : le code de l’Honneur chevaleresque, l’héroïsme individuel, le sens de la Famille et de l’héritage, la charité envers les classes populaires, la Piété, l’abnégation en faveur de la Patrie…

A travers ce vecteur qu’est pour lui la chasse à courre, il peut très bien se permettre de combiner une vision fantasmée de Louis XIV avec une revendication des acquis de la Révolution Française :

« dans les cahiers de doléances, les gens disent on veut chasser comme les aristocrates. La première revendication de 1789, c’est le droit de chasse pour tous, c’est profondément révolutionnaire et républicain ».

Zemmour n’a pas à s’embarrasser des détails. Peu importe si la Révolution, en ouvrant le droit de chasse aux citoyens, a aboli la chasse à courre dans le même temps, et qu’elle est donc tout l’inverse d’un « acquis révolutionnaire ». Ce qui compte, c’est la mise en place de symboles, d’un imaginaire national favorable au projet de la haute bourgeoisie hyper agressive, à l’impérialisme conquérant.