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L’ultragauche, CNews, la Guillotière ou le besoin d’un antifascisme politique

Le piège était gros comme la maison et l’ultragauche est tombée en plein dedans.

Le piège était gros comme une maison et l’ultragauche est tombée en plein dedans.

Le mercredi 24 novembre, Jordan Bardella était l’invité de l’émission « Face à la rue » diffusée sur Cnews et présentée par Jean-Marc Morandini. Cette émission est la quintessence de la stupidité intellectuelle. Elle est une expression d’un débat politique qui est asphyxié par le populisme.

Et forcément, inviter Jordan Bardella, président du Rassemblement National, à la Guillotière à Lyon c’était chercher la provocation en visant à mettre en scène pour le buzz médiatique toute les thèses démagogiques d’extrême droite. Et cela a fonctionné, d’autant plus que l’ultragauche est tombée dans le panneau en organisant un rassemblement d’opposition.

Quand Jordan Bardella vient pour diffuser son poison nationaliste-chauvin, c’est justement pour court-circuiter la lutte des classes, pour saboter toute prise de conscience et toute perspective d’organisation populaire contre le pourrissement anti-social.

Mais visiblement l’ultragauche et les « antifas » ne comprennent pas le rôle politique joué par le fascisme. Ils ne le comprennent pas, car ils ne l’étudient pas, et ne veulent pas raisonner en termes politiques.

C’est pourquoi dans ce contexte, les propos tenus par Eduardo Rihan-Cypel, membre du conseil national du PS, appuie là où ça fait mal :

« Je crois que ce sont des gens de l’ultragauche qui ne sont pas d’accord avec votre venue et notre venue et celle de Joardan Bardella. Il y a une partie de cela où je peux comprendre les choses où ils ont le sentiment qu’on prend les choses en spectacle (…). C’est une quartier dans lequel il y a des difficultés, il y a des problèmes de sécurité, de trafics, et moi j’entends des gens d’ultragauche qui nous disent de nous casser, mais j’aimerais aussi demain qu’ils puissent dire aux trafiquants, au dealers et aux délinquants à eux de se casser du quartier »

Ces propos ont évidemment fait polémique dans un partie de ladite « gauche de la gauche ». En effet, dire que le débat avec le Rassemblement National irait de soi, c’est quelque chose de bien critiquable tout comme d’ailleurs la participation à la mise en scène médiatique est une erreur car cela ne permet pas d’élever le niveau politique et idéologique.

Mais là où Eduardo Rihan-Cypel met le doigt là où ça fait mal, c’est sur la question du pourrissement social !

La Guillotière, c’est un quartier de 31 000 habitants qui s’est largement transformé ces dernières années, sous le poids notamment des résidences étudiantes. Mais pas seulement…

Le problème ce n’est pas que la Guillotière puise historiquement ses racines dans une identité métissée et populaire, un quartier surnommé tout à la fois « la petite Afrique » et le « chinatown lyonnais », mais bien que l’approfondissement de la crise du capitalisme produit une couche toujours plus grande de lumpenprolétaires.

Et le lumpenprolétariat, c’est un mode de vie anti-social, fondé sur le modèle de réussite du gangster, « sans foi, ni loi », avec tout son lot de conséquences en matière de climat délétère pour la vie quotidienne.

A la Guillotière, la situation est telle qu’une petite superette a avancé son heure de fermeture à 17h au lieu de 19h30 à cause des comportements anti-sociaux aux alentours, tout comme l’enseigne MacDonald’s ne sert plus ses immondes burgers en salle mais seulement en vente à emporter (la salle de restaurant étant fermée).

Les personnes liées à l’immigration asiatique ont tiré la sonnette d’alarme, allant même jusqu’à menacer de s’organiser pour assurer leur propre sécurité face aux violences. La cellule du PCF du 7e arrondissement de Lyon est ainsi amenée à parler de « réseaux mafieux qui prospèrent à la vue de tous ».

En manifestant derrière le slogan « Les vendeurs de rue ne sont pas des criminels ! », l’ultragauche montre qu’elle fait partie du problème, et non pas de la solution antifasciste. Il faut vraiment fantasmer sur le réel pour s’imaginer qu’il y a quoique ce soit de positif dans la vente de cigarettes ou tout autre produit de contrebande, sans même parler du climat oppressant pour les femmes.

Et que dire de ces trois individus ridicules, déguisés en daltons, ces personnages de la bande-dessinée « Lucky Luke », et tirant des feux d’artifices sur la police….

Et la misère sociale dira-t-on ? Certes, mais on ne combat pas la misère sociale en étant un anti-social ou en soutenant ce type social décadent, mais justement en proposant un modèle d’organisation populaire en mesure d’assurer une vie sociale réelle.

C’est par exemple ce qu’on fait certains groupes d’extrême gauche dans le quartier d’Exárcheia à Athènes en Grèce, où se mêlent des comités sociaux et groupes d’auto-défense contre ce qu’ils nomment justement le « cannibalisme social ». Voilà une proposition réelle, concrète qui ne court pas après la dénonciation de l’extrême droite mais sait se positionner en pratique pour proposer une solution anti-démagogique, car populaire.

Mais pour cela, il ne faut pas être un petit-bourgeois pourri par la pensée libérale-libertaire.

Bref, il faut avoir saisir la tâche énorme d’un antifascisme capable de briser la démagogie fasciste en le prenant de court sur le terrain pratique de l’organisation de la vie populaire. Un antifascisme politique et culturel, qui va s’avérer d’autant plus nécessaire que le fascisme porté par Marine le Pen, Eric Zemmour et ses relais médiatiques va intensifier la pression.