Un mot galvaudé désormais qui justifie tout.
L’administration américaine a franchi un nouveau cap mi-avril 2022, par la voix du président Joe Biden qui a lancé l’accusation de « génocide » de la part de la Russie en Ukraine. Selon lui, même si « les avocats au niveau international trancheront sur la qualification de génocide », pour lui cela en est.
Jusqu’à présent, seul le régime nationaliste ukrainien utilisait ce terme, qui est en fait constitutif de son idéologie fasciste anti-russe, et qui n’a rien de nouveau. Il était parlé de « génocide » bien avant l’invasion militaire.
Notons d’ailleurs que la Russie n’est pas en reste sur ce genre de propos. En décembre 2021, Vladimir Poutine expliquait au sujet de l’Ukraine à une réunion du Conseil des droits de l’homme :
« Je dois parler de la russophobie comme d’un premier pas vers un génocide. C’est ce qui se passe en ce moment dans le Donbass, nous le voyons bien, nous le savons. »
Tant les Russes que les Ukrainiens sont dans un récit, servant à mobiliser leur population dans le sens de la guerre, en forçant les traits à partir de réalités. Mais les Américains agissent ici de manière extérieure, avec un propos censé avoir autorité internationalement.
Autrement dit, si le président américain utilise le mot « génocide », en disant qu’il est « de plus en plus clair que Poutine essaie simplement d’effacer l’idée même de pouvoir être Ukrainien », cela devient une accusation très sérieuse, et donc très grave.
C’est tellement brûlant que le président français Emmanuel Macron, en campagne pour sa réélection, a dû prendre de la distance avec une accusation aussi grave et engageante. En pleine élection, il doit prendre des pincettes pour ne pas que cela lui explose à la figure, alors il préfère être « prudent » avec les mots, expliquant au passage, ce qui est tout à fait vrai, que les peuples ukrainiens et russes sont des peuples frères.
Parler de génocide, c’est affirmer qu’il y a une tentative d’extermination d’une population tout entière, y compris les civils désarmés dont les femmes et les enfants, au-delà de tout objectif militaire, économique, politique. C’est, autrement dit, un massacre volontaire et planifié.
Il existe une convention internationale sur le génocide, qui le définit très clairement en insistant notamment sur la notion d’intention, qui est forcément très difficile à établir.
L’ONU explique à ce sujet :
« Pour qu’il y ait génocide, il faut démontrer que les auteurs des actes en question ont eu l’intention de détruire physiquement un groupe national, ethnique, racial ou religieux. La destruction culturelle ne suffit pas, pas plus que la simple intention de disperser un groupe. C’est cette intention spéciale, ou dolus specialis, qui rend le crime de génocide si particulier.
En outre, la jurisprudence associe cette intention à l’existence d’un plan ou d’une politique voulue par un État ou une organisation, même si la définition du génocide en droit international n’inclut pas cet élément. »
Absolument rien ni personne ne permet d’affirmer en avril 2022 que la Russie procède à une telle ignominie en Ukraine actuellement, malgré les nombreuses tentatives faites par le régime ukrainien de présenter clefs en main pour les médias occidentaux des récits de crimes de guerre. La guerre russe en Ukraine est ignoble, par définition. Mais tout autant que la guerre en Syrie, au Yémen, la guerre américaine en Irak, etc.
Il est évident que l’accusation américaine, suivi par le Canada et son premier ministre Justin Trudeau qui a emboîté le pas à Joe Biden, n’est en réalité qu’un prétexte cynique pour faire monter les tensions. L’accusation de génocide est très utile à la propagande anti-Russie et l’opération psychologique pro-guerre de la part des États-Unis.
Mais surtout, l’accusation de génocide est très utile pour justifier a priori les interventions militaires, en cherchant le consentement international. L’ONU prévoit en effet, via son Bureau de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger, une sorte d’autorisation à l’intervention, et ce qui peut en tous cas très bien être un prétexte à l’envoi d’armes lourdes modernes.
L’accusation américaine a lieu justement au moment où l’armée russe est sur le point d’accomplir un objectif militaire majeur avec la prise totale de la ville de Mariupol, le grand port industriel ukrainien. Le ministère de la Défense russe a communiqué le 12 avril 2022 sur la réédition de 1026 marins de la 36e brigade de la marine ukrainienne, qui étaient retranchés dans une zone industrielle, totalement coupés depuis plusieurs semaines du restes de l’armée ukrainienne.
Les États-Unis ne veulent clairement pas de la fin du conflit en Ukraine, et encore moins de victoire russe, même partielle. Alors ils font tout pour pousser le peuple martyr d’Ukraine dans une bataille déséquilibrée et sanglante contre l’armée Russe. De nouvelles livraisons d’armes ont donc été annoncées, marquant de plus en plus ouvertement la participation de l’OTAN à cette guerre.
La campagne américaine au sujet d’un pseudo « génocide » relève de cela. Joe Biden a ainsi présenté mercredi 13 avril une nouvelle aide militaire de 800 millions de dollars, avec des équipements lourds, « de nouvelles capacités », parlant de systèmes d’artillerie, de transports blindés, d’hélicoptères.
Et la France est alignée sur cette escalade militaire. Elle fait partie du problème, pas de la solution, parce qu’elle est une grande puissance participant à la grande bataille du repartage du monde. La France, qui a déjà livré plus de cent millions d’euros d’équipements militaires selon la ministre des Armées, a parlé de « capacités militaires additionnelles » pour bientôt, avec notamment armements et munitions.
On sait qu’à l’arrière-plan, il y a l’affrontement prévu entre la superpuissance américaine, qui dispose de l’hégémonie mondiale, et son challenger chinois. La première vise désormais la seconde directement la seconde sur la question russe. La secrétaire américaine au Trésor a ni plus ni moins que menacé la Chine :
« L’attitude du monde envers la Chine et sa volonté d’embrasser une intégration économique plus poussée pourraient bien être affectées par la réaction de la Chine à notre appel à une action résolue contre la Russie ».
Le but de la superpuissance américaine, c’est d’affaiblir ses alliés européens, pour ne pas qu’ils lui fassent d’ombre, et de soumettre la Chine. Car l’actualité internationale est de plus en plus ouvertement celle d’une grande guerre pour le repartage du monde, avec la constitution de deux blocs distincts et hostiles.
Et tous les moyens sont bons de la part des belligérants pour pousser à des interventions militaires, les justifier ou les faire accepter par la population, les préparant toujours plus aux futurs inévitable conflits.