Taxer les « super-profits » ou socialiser les monopoles, il faut choisir.
Depuis la fin des élections présidentielles, différents cadres de gauche proposent de taxer les « super-profits ». Olivier Faure du PS a proposé de soumettre cela à un referendum d’initiative partagée, proposition soutenue quelques jours plus tard par Jean Luc Mélenchon lors de l’université d’été de la France insoumise.
Pour défendre cette proposition, l’ensemble de la gauche ayant adhéré à l’alliance NUPES, c’est-à-dire principalement le parti socialiste, La France insoumise, le parti communiste français, EELV s’appuient sur le fait que les entreprises du CAC 40 ont engrangé plus de 170 milliards d’euros de bénéfice en 2020/2021.
Avec le contexte inflationniste que connaît la quasi-totalité du monde, et particulièrement en Europe où il faut s’attendre à voir les factures d’électricité multipliées par dix lors de l’hiver qui arrive, cette proposition semble arriver à point nommé.
La gauche actuelle qui tente de se refaire une crédibilité réfléchit ainsi : la situation devient compliquée pour les gens, partageons mieux l’argent des riches pour les aider. Une telle perspective est tout à fait éloignée de l’héritage du mouvement ouvrier, étant plutôt liée à celui d’une partie des classes dominantes ayant à cœur les « réformes sociales ».
Évidemment, la situation est inacceptable. Que des entreprises comme Total Énergie qui emploie des dizaines de milliers de personnes à travers le monde arrivent à engranger des dizaines des milliards d’euros de bénéfice doit questionner toute personne de gauche, mais la discussion devrait surtout porter sur ce que nous voulons faire de Total, CMA-CGM, Carrefour, etc.
Faut-il simplement se battre pour des réformes qui poussent les entreprises à mieux partager les bénéfices qu’elles font et demander au mieux un droit de regard sur leurs activités, ou alors faut-il exiger de lutter pour dépasser le capitalisme et socialiser des multinationales qui se développent bien souvent sans, voir contre l’avis populaire ?
Plus directement est-il souhaitable que Total partage ses bénéfices tout en continuant son entreprise impérialiste, comme en Arabie Saoudite où elle vient de signer un accord avec Qatar Énergie pour développer l’exploitation de la plus grande réserve connue de GNL au monde?
Ou alors l’objectif est-il de socialiser Total pour que cette entreprise ne fasse plus aucun bénéfice privé et qu’il soit décidé démocratiquement de ce qu’il est envisageable de réaliser avec les moyens de productions qu’elle possède ?
Cette question est d’une grande importance car elle permet de prendre une position déterminante dans la période qui s’ouvre, et qui est marquée par la marche vers la troisième guerre mondiale.
Des blocs se construisent et se préparent à faire face les uns aux autres pour se partager le monde. En France, des grandes entreprises comme Total, Orano (anciennement Areva), Carrefour ou Bolloré sont en première ligne pour pousser les capitalistes français à jeter toutes les forces du pays dans cette bataille de repartage.
Preuve en est encore la visite d’Emmanuel Macron en Algérie pour négocier le gaz en compagnie du PDG d’Engie ou s‘approprier les métaux rares du pays grâce à un nouveau « partenariat », qui n’est rien d’autre qu’un néo-colonialisme du fait de l’absence de gros moyens de production en Algérie capables d’explorer puis d’exploiter des mines géantes.
Par conséquent, en acceptant la proposition actuelle de taxation des « super-profits » par les forces de la NUPES, c’est donner l’illusion d’un capitalisme à visage humain, du moins pour les français au détriment des autres peuples.
Car l’objectif ici c’est de compenser la chute du niveau de vie provoqué par la crise du capitalisme, en partageant « mieux » le gâteau de l’impérialisme français sans s’y opposer. Cela est d’autant plus vrai qu’il n’est jamais défini la différence entre les profits et les super-profits… Mais alors d’où viennent ces « super »-profits, si ce n’est d’une super exploitation d’autres peuples du monde ?
Ces forces politiques en apparence sociales qui ne veulent pas reconnaître « l’abondance » que connaissent les français depuis les années 1990 grâce à la « mondialisation » sont des menteurs qui proposent sans le dire de continuer l’entreprise de pillage par les multinationales françaises, et donc contribuer à alimenter la tendance à la guerre de repartage. On ne s’étonnera guère d’ailleurs de leur silence à propos du militarisme et de l’armée française…
La perspective de la Gauche historique, c’est celle de voir en la situation sociale difficile qui arrive une occasion historique pour permettre au prolétariat de France de se reconstruire une conscience de classe dans le but de mener la grande bataille contre la bourgeoisie, pour l’émancipation du capitalisme.