Tout est en place pour le drame.
Le régime azerbaïdjanais multiplie les provocations anti-arméniennes depuis la fin du mois d’octobre 2022, lançant incidents de frontières sur incidents de frontières, célébrant de manière outrancière les deux ans de la victoire du régime sur l’Arménie et faisant circuler des cartes montrant le territoire arménien coupé par un corridor reliant l’Azerbaïdjan à son enclave, jadis arméno-turque à l’époque soviétique, du Nakhitchevan et surtout, avec un effacement complet du Karabagh arménien.
Sur ces cartes, la capitale du Karabagh arménien, appelé Stepanakert, en hommage au plus grand révolutionnaire arménien d’Azerbaïdjan, Stepan Chahoumian (1878-1918), est rebaptisé « Khankandi », à la fois pour annoncer la volonté ouverte d’effacer les Arméniens y vivant, mais même encore, toute trace évoquant de quelque manière que ce soit le passé arménien, et révolutionnaire, de l’Azerbaïdjan.
Le but est de liquider toute référence au passé soviétique, confrontant directement le régime raciste et chauvin du président Ilham Aliyev à ses propres mensonges quant à sa démarche en fait nationaliste.
Tout est en réalité prêt à une vaste offensive militaire sur le Karabagh dans le but d’y mener une épuration ethnique des Arméniens, y compris la réannexion d’une partie de leur patrimoine historique au profit de la minorité nationale portée à bout de bras par le régime des Outis, représentant quelques milliers de personnes.
Les choses en sont au point que le dirigeant religieux de cette communauté, Robert Bagratovitch Mobili, s’appelle en réalité Mobilyan; comme tous les derniers Arméniens qui se sont maintenus en Azerbaïdjan, il a été poussé à nier son arménité, en se prétendant descendant des antiques « Albanais du Caucase », dont les Outis seraient les héritiers aujourd’hui. Cette fiction permet de nier toute présence historique des Arméniens en Azerbaïdjan, et aucun régime occidental ne condamne cette ligne ni ce qu’elle annonce : la liquidation pure et simple du Karabagh arménien.
Plus même, le régime azerbaïdjanais a obtenu ces derniers jours l’aval complet de la France et des États-Unis d’Amérique pour liquider de fait le Karabagh arménien. Le président Macron ayant dit que sa ligne rouge était le territoire souverain de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie en 1991, signifiant donc que le Karabagh, à cette date Oblast dissident de la RSS d’Azerbaïdjan elle-même sécessionniste de l’URSS, fait partie du territoire azerbaïdjanais. Bien sûr le Karabagh était en 1991 un Oblast arménien dans le cadre de la RSS d’Azerbaïdjan, mais de cela il n’est jamais question lorsque la diplomatie française aborde cette question.
Les États-Unis ont même pris position par la voix du secrétaire d’Etat Antony Blinken en corrigeant Emmanuel Macron sur le fait que toute solution, y compris donc de découper le territoire arménien pour y ouvrir un corridor au profit de l’Azerbaïdjan.
L’idée des uns et des autres est de pousser le régime d’Aliyev à se confronter aux Russes, qui ont annoncé de leur côté leur volonté de se maintenir indéfinement au Karabagh arménien pour le protéger. Cette présence étant vu autant par Paris que par Washington comme la cause de la durée de ce conflit. Mais la vérité est surtout qu’il s’agit de prendre la main sur cette région, en y écrasant la présence russe afin de l’affaiblir.
Armé jusqu’aux dents par l’Occident, et d’ailleurs aussi par la Russie, et chauffer à blanc par la propagande furieuse de son propre régime, l’Azerbaïdjan d’Aliyev est donc prête désormais à frapper l’ultime coup sur le Karabagh arménien, avec le feu vert français et américain, comptant jeter dans la guerre le peuple azerbaïdjanais, quitte à liquider les Arméniens du Karabagh.
Qui sauvera désormais les Arméniens du Caucase ? Le funeste sort qui attend tragiquement les Arméniens du Karabagh doit être un signal sur le fait qu’il y a rien à attendre de l’OTAN, en l’espèce des États-Unis et de son allié, l’État bourgeois français. Toutes les organisations arméniennes et tous les partis politiques qui se sont compromis lamentablement avec l’État français et sa meurtrière politique belliciste concernant l’Arménie doivent mourir de honte désormais : elles auront aussi sur les mains et sur leur front leur part du sang et des larmes des Arméniens du Karabagh condamnés devant la fureur que l’impérialisme français contribue à lancer contre eux.
Seule une Gauche assumant son héritage historique, assumant le passé révolutionnaire et soviétique des années 1920-1940, assumant de se confronter à l’impérialisme français et ses trahisons est en mesure de défendre ce qui restera de l’Arménie et des Arméniens dans un Caucase transformé en poudrière par les vélléités impérialistes.