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Le complexe militaro-industriel français dans la course aux armements avec la Turquie en ligne de mire

La course aux armements s’accélère dans la zone euro-méditerranéenne.

La course aux armements s’accélère dans la zone euro-méditerranéenne.

Alors que la Turquie multiplie les coups de menton sur ses frontières, face à l’Arménie, face à la Syrie, à l’Irak et face à la Grèce et Chypre, la France a annoncé ce mois-ci le début de la livraison des premières frégates dites de défense et d’intervention (FDI) à la marine française, qui doit en être équipée de manière opérationnelle pour 2024, avant la marine grecque, qui sera livrée en 2025.

La Grèce a annoncé l’achat de quatre FDI (trois plus une en option), et le ministre grec des armées, Nikolaos Panagiotopoulos, était d’ailleurs présent à Lorient, en Bretagne, dans le département du Morbihan, qui abrite la principale base des sous-marins de la Marine de guerre française, et où se trouve aussi le site de production d’un des principaux monopoles du complexe militaro-industriel français, Naval Group, chargé de l’assemblage de ces frégates.

On parle là d’un véhicule considéré comme étant à la pointe de la technologie actuelle, avec une capacité de longue autonomie technique et numérique, bénéficiant d’une installation de haut niveau en mesure de contrer théoriquement toute attaque de type informatique, tout en embarquant un équipement complet et quasiment autonome de traitement de données complexes.

Le bateau en lui-même est conçu pour être à la fois rapide, discret et en mesure d’embarquer un lourd armement de frappe : drone, hélicoptère d’assaut, dont le modèle à venir Guépard Marine, en commande chez Airbus et surtout tout un arsenal (antiaérien, antinavire, antisous-marin et mer-sol) de missiles de frappe produit par MBMA , sans compter la capacité à projeter des groupes armés des forces spéciales.

Les FDI sont donc des armes polyvalentes, conçues autant pour appuyer le renseignement, l’attaque et la défense, avec un système de radar conçu par Thalès en mesure de constituer un bouclier anti-missile.

Le discours prononcé à l’occasion de ce lancement par le PDG de Naval Group, Pierre Éric Pommellet, lui-même polytechnicien passé par le MIT américain, s’est donc voulu extrêmement clair sur l’engagement central du complexe militaro-industriel au service de l’État français, en parlant frontalement d’économie de guerre :

« Nous sommes fiers d’être présents ici à Lorient aujourd’hui pour célébrer ce jalon important pour l’Amiral Ronarc’h, première de la série FDI, la nouvelle génération de frégates de premier rang de la Marine nationale. La mise à l’eau d’un navire de guerre est aussi l’occasion de rappeler que l’outil industriel français est au service de nos forces armées, engagé dans l’économie de guerre.

Dès 2025, le site Naval Group de Lorient réalisera ainsi jusqu’à deux bateaux par an. Aujourd’hui, nous célébrons également l’avenir du programme FDI avec la présence du ministre Nikolaos Panagiotopoulos, l’occasion de rappeler l’importance de la coopération militaire et industrielle en Europe, la FDI associant déjà de nombreux industriels grecs dans la réalisation du programme pour la Grèce ».

Il faut voir ici que Naval Group a annoncé la création de près de 2000 emplois pour satisfaire cette commande, et que donc la pression sur les masses en terme de propagande et de bourrage de crâne pro-militariste ne peut que s’accroître, d’abord de manière sectorielle sur la région, mais cette tendance ne peut que se renforcer de plus en plus de manière générale au plan national.

Le nom choisi pour ce premier navire est d’ailleurs aussi une sorte de symbole, l’Amiral Ronarc’h ayant été un officier très engagé dans le cadre de la Première Guerre mondiale, et s’étant formé face à la Chine dans le cadre de la guerre des Boxers (1899-1901).

Mort en avril 1940, après avoir été chef d’état-major de la Marine, il a aussi l’avantage de ne pas avoir eu à se postionner face à la capitulation décidée par le Maréchal Pétain en juin 1940.Pierre Éric Pommellet n’a bien sûr pas manqué d’appuyer l’alliance militaire qui se constitue de manière toujours plus nette avec la Grèce, avec bien entendu la Turquie en ligne de mire.

Il faut voir que la Grèce dispose ainsi d’une perspective redoutable de consolidation de son arsenal, avec une alliance militaire renforcée, désignée comme la QUAD (EUNOMIA), liant Chypre, la Grèce, l’Italie et la France, explicitement formée pour affirmer l’hégémonie de ces pays en Méditerranée orientale.

L’horizon 2024-2025 est d’autant plus significatif du côté turc, que la République de Turquie célébrera alors son centenaire, et que Recep Tayyip Erdogan annonce depuis des années vouloir faire de cette date une sorte de refondation de la puissance turque.

La course aux armements qui s’élance pour le repartage de la Méditerranée, mettant face à face la Turquie et la France, au-delà de la Grèce, a de très bonnes chances de faire exploser toute cette situation bien avant cela… On est à la limite de l’ouverture du conflit – ce qui implique en réalité que la limite a déjà été dépassée : les conflits dans le cadre de la bataille pour le repartage du monde se mettent toujours en place avant même de commencer formellement.

Le désastre n’est pas devant nous : il est parmi nous.