Catégories
Restructurations économiques

La grève du 7 mars 2023 sera un échec, car anti-historique

On n’avance pas à rebours de l’Histoire.

On n’avance pas à rebours de l’Histoire.

Le 7 mars 2023 est censé être le point culminant du mouvement contre la réforme gouvernementale des retraites. Depuis quinze jours, cette date est présentée comme celle de la mobilisation générale, de la grande bataille. Le 2 mars, les secrétaires généraux de cinq fédérations CGT (Ports et Docks, Cheminots, Industries chimiques, Verre et Céramique et Mines-Energie) se sont même réunis au siège de la centrale syndicale, à Montreuil, pour annoncer qu’il s’agit « de mettre à genoux l’économie française ».

« Ce qui va se passer à partir du 7 est hors du commun » a même osé Jean-Luc Mélenchon.

Est-ce possible ? Le 7 mars 2023 sera-t-il caractérisé par une déferlante de grèves et de mouvements de lutte ?

La réponse est non. Tout cela relève de la fiction syndicaliste-révolutionnaire, c’est une tromperie bien française. Les Français aiment se mentir à eux-mêmes !

Il faut une preuve ? En voici quatre !

La première preuve : l’état d’esprit

La grève ne doit pas avoir lieu que le 7 mars. Elle est censée se dérouler en continu par tranche de 24 heures. C’est-à-dire que le syndicalisme révolutionnaire se la joue à la « révolution permanente ».

On est là dans un maximalisme revendicatif. Or, si on regarde la société française, on ne voit rien chez les gens indiquant un niveau de tension corroborant un épisode majeur dans la société.

Pour un conflit, il faut des acteurs, et on ne voit pas du tout des travailleurs français prêts à l’affrontement jusqu’au boutiste.

La deuxième preuve : Dassault

La première preuve semblera trop idéologique pour certains. Alors regardons ce qui se passe avec un exemple concret. Il y a un important mouvement de grève en ce moment chez Dassault. Sont concernés toutes les usines de cette entreprise d’armement, avec également les sous-traitants de mobilisés.

C’est une lutte réelle, avec de l’agitation, des blocages dans les 3/4 des usines, un état d’esprit qui remue et est revendicatif. Niveau revendication, justement, il est exigé 6 % d’augmentation et 250 euros brut.

Anthony Dupuy, délégué syndical CGT Dassault Mérignac dit que c’est dans l’ordre des choses :

« Notre demande est tout à fait acceptable, car le carnet de commandes est plein pour les dix prochaines années. Nous demandons un meilleur partage des richesses ! »

On a donc des ouvriers qui sont… très contents de travailler pour le capitalisme, de produire des armes, de produire des armes qui se vendent, et qui veulent leur part du gâteau.

Jamais de tels travailleurs n’iront au conflit général avec le capitalisme. C’est mal parti donc pour un mouvement de conflictualité qui déborde le cadre institutionnel…

Il y aura du remue-ménage, mais il n’est dans l’intérêt de personne que les choses aillent trop loin. Le 7 mars 2023 vise à « sauver » le cadre institutionnel des retraites, voilà tout.

La troisième preuve : le niveau

Il ne faut pas se leurrer sur le niveau des travailleurs français et des Français en général. C’est l’effondrement culturel généralisé, la passivité dans la corruption capitaliste, un esprit régressif tendant au niais.

Et à gauche tout ce qui existe est simpliste, anti-culturel, anti-intellectuel. Soit dans une version beauf, soit dans une version LGBT moderniste, mais cela ne change rien à la substance de la chose.

Même chez les jeunes il n’y a rien à sauver. Les jeunes sont vifs, mais ils n’ont pas de culture et se laissent aller à suivre le cours des choses. Ils ne veulent surtout pas heurter ou entrer en conflit.

Comment peut-on être jeune et mettre l’amour au même niveau que la retraite à 60 ans ? Humainement, quel désastre.

La quatrième raison : la restructuration économique

Le capitalisme est ce qu’il est. En l’occurrence, le capitalisme français est imbriqué dans le capitalisme américain, et l’heure est à la guerre contre la Russie.

Tout cela demande un certain budget et il faut procéder, en fonction, à une restructuration économique. La question a bien sûr déjà été abordée ici.

Donc tout le délire d’une « bataille pour le repartage des richesses » sans rien contextualiser, à caricaturer le président Emmanuel Macron comme un vilain, à dénoncer les milliardaires qui ne partagent rien, c’est du cinéma.

Il n’y a pas de bataille pour le « repartage » des richesses sans affrontement avec la bourgeoisie. Mais comme personne ne la veut, personne ne mentionne cette classe et préfère parler des milliardaires et de l’affreux gouvernement, en espérant grapiller…

Grapiller quoi ? Des miettes. Ce que le capitalisme voudra bien donner pour assurer la paix sociale, le consensus afin d’aller à l’affrontement militaire contre la Russie.

Et sinon ? Sinon ce sera la violence contre les travailleurs, le fascisme pour porter la guerre aux visées impériales.

Alors, franchement, le 7 mars, il ne tient pas debout. C’est une vantardise anti-historique, une tromperie, qui s’associera aux multiples gueules de bois de plus de la société française et surtout des travailleurs.

Travailleurs qui vont alors s’empresser… d’encore plus pour voter pour l’extrême-Droite. L’absence de substance du 7 mars 2023 est le rêve éveillé de Marine Le Pen pour la prochaine présidentielle.