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Culture & esthétique

Les origines guerrières du sport

Le sport est une forme développée des jeux populaires traditionnels et des affrontements aristocratiques codifiés à l’époque féodale. Il existe de nombreuses continuités entre les sports d’aujourd’hui et ces activités, rien n’étant jamais créé ex nihilo

Une grande partie des sports actuels étaient d’abord des arts martiaux. Ils étaient liés à l’activité militaire, mais ont développé petit-à-petit une existence autonome avec une finalité propre, devenant des activités de délassement physique et morale raffinées, strictement codifiées et censées ne plus être dangereuses. 

L’escrime, sport français par excellence, a d’abord été enseigné pour la guerre. Il est devenu ensuite un art martial à mesure que son utilité militaire disparaissait avec le développement de la poudre pour les armes. Il était alors enseigné par des maîtres d’arme et pratiqué en duels.

À la fin du 16e siècle, le Roi Charles IX autorisa les « Maistres Joueurs et Escrimeurs d’Épée de Paris » à former l’Académie des Maistres en faits d’armes de l’Académie du Roy, ce qui va permettre à l’escrime de se structurer en France. Il deviendra un sport au 19e siècle avec la fin des duels et l’utilisation de protections dont le masque à grille ou encore l’utilisation du fleuret en combat (alors qu’il était réservé à l’entraînement). 

Les duels étaient des affrontements à l’épée devant témoin, convoqués par une personne s’estimant offensée. Les motifs pouvaient-être parfois futiles, parfois plus importants, mais les combats étaient normalement très codifiés. Ils pouvaient avoir lieu jusqu’au « premier sang » (le premier qui saigne perd) ou même jusqu’à la mort. Cette pratique était très courante au 16e siècle et a perduré en France jusqu’au 19e siècle, avec encore des centaines de morts par an en duel à cette époque. 

La pratique des duels était déjà une forme plus moderne et plus raffinés des joutes ou pas d’armes de la fin du Moyen-Âge. Ces derniers étaient eux-mêmes des combats issus des tournois de chevaliers.

Les tournois de chevaliers au Moyen-Âge donnaient lieu à de véritables épreuves physiques, se déroulant parfois sur plusieurs jours devant de nombreux spectateurs et avec des acteurs appréciés et ovationnés de manière assez proche des sportifs d’aujourd’hui.  

La savate, ou boxe française, se développe au 19e siècle également sur la base des duels, mais dans une forme plus raffinée et plus codifiée. C’est en quelque sorte l’escrime des pieds et des poings et cela permet des duels sans armes (donc plus discrets et moins risqués). L’intérêt est aussi de se défendre à tout moment, alors que l’usage du port de l’épée a disparu.

La boxe française est également devenue au fur et à mesure un sport, tout en continuant d’être un moyen de défense utile. Elle s’est cependant beaucoup effacée en France du fait de l’arrivée massive d’arts martiaux en provenance d’autres pays, notamment asiatiques. 

La savate, ou boxe française, développe pourtant un caractère national dans sa forme et ses usages. Elle se distingue par exemple fortement de la boxe anglaise, plus rude, moins fine. 

En France, l’armée a joué un rôle important pour le développement et la diffusion des techniques de combat et de la gymnastique, ce qui servira ensuite le développement et la diffusion du sport. 

L’intérêt des techniques de combat et de la gymnastique pour la préparation physique des soldats était évident pour le régime de Louis-Napoléon Bonaparte qui en 1852 ouvra l’École Normale Militaire de Gymnastique de Joinville, dans le bois de Vincennes à Paris.

Y furent mises au point des techniques d’assaut particulières, notamment de canne ou de bâton dont certaines sont toujours enseignées aujourd’hui dans les clubs de savate, ou boxe française, ainsi que dans les écoles de police. 

Après la défaite de 1870 face à l’armée prussienne, l’école se restructura et devint l’École Normale de Gymnastique et d’Escrime. En 1925 elle devint École Supérieure d’Éducation Physique puis s’émancipa des autorités militaires à partir des années 1930.

Elle changea plusieurs fois de nom avant devenir en 1975 l’INSEP (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance), toujours en activité, mais coupée de ses origines militaires. 

Parallèlement, pour garder une affiliation militaire au sport, fût formé dès 1956 le Bataillon de Joinville, célèbre pour avoir accueilli jusqu’à la fin du 20e siècle des milliers de sportifs de haut niveau pendant leur service militaire. Y sont passé des figures du sport français telles que Michel Platini, Alain Prost, Laurent Fignon, Henri Leconte, etc. 

Le bataillon de Joinville a été dissous avec la suspension du service militaire en 2003. L’armée française continue néanmoins d’accueillir des sportifs de haut niveau sous le statut de Sportifs de Haut Niveau de la Défense (SHND) sous l’égide du Centre national des sports de la Défense (CNSD) (qui est maintenant appelé « bataillon de Joinville » en référence à l’ancien bataillon, bien qu’il n’en soit plus un au sens strict). 

Il est parlé de « l’armée des champions ». Ces engagés doivent participer à quelques stages militaires mais disposent de l’essentiel de leur temps pour leur sport et sont rémunérés pour cela.

Ces sportifs ont surtout un rôle de représentation pour l’Armée, ils n’ont plus vocation à être des militaires au sens strict. Ils sont environs 200 sous contrat chaque année.