La fête de la musique joue un rôle important dans la culture française. C’est une opportunité pour sortir aller boire un verre (souvent alcoolisé) tout en écoutant un groupe de musique, puis un autre, dans une sorte de petite balade. Naturellement, plus la ville est grande, plus les possibilités sont nombreuses sur ce plan.
La version 2024 a été toutefois porteuse d’un état d’esprit tout à fait particulier, reflétant en quelque sorte, à sa manière, la situation française. En effet, il y a déjà grosso modo une France qui n’est plutôt pas là : celle qui justement vote pour le Rassemblement National.
La fête de la musique a une base urbaine, avec une dimension festive qui tend à célébrer l’individualité, l’aventure individuelle, le « sens de la fête ». Ce n’est pas un lieu pour les masses, malgré la prétention qu’ont les institutions et les médias à ce sujet.
Et il y a une France qui est inversement très présente à la fête de la musique 2024 : la jeunesse, ainsi que des gens plus âgés, en famille, s’alignant sur la même ligne « festive ». Des gens dépolitisés, s’imaginant de « gauche » en raison de positions LGBT, libérales – anarchisantes, tolérantes – cosmopolites, et considérant dans leur imaginaire que l’extrême-Droite, par exemple ce serait l’interdiction de la fête de la musique.
La fête de la musique, c’est le jour de fête des turboconsommateurs modernes, en l’absence des « perdants ». Sauf que comme il y a les élections législatives qui se profilent à très court terme et que l’extrême-Droite est en position de force, l’ambiance de la fête de la musique 2024 a été celle de l’orchestre du Titanic.
La musique était mise à fond comme jamais, jusqu’à tard comme jamais, avec des cris exprimant un besoin de lâcher son stress. Et malgré toute cette tension, il n’y avait pas d’esprit d’agression ou de violence, de rébellion ou d’autodestruction. C’était on ne peut plus fragile et urbain, à l’image de ce qui représente l’ennemi pour les gens votant pour le Rassemblement National.
La fête de la musique 2024 a montré la vigueur mais aussi l’impuissance des urbains, leur capacité d’agir et en même temps leur incroyable impuissance. Tant de gens, tant d’initiatives, pour ne produire strictement rien.
D’ailleurs, même appeler à mobiliser contre l’extrême-Droite est au-dessus des forces des urbains. Tellement « fragiles », ils ne veulent pas prendre de responsabilité, sous prétexte de ne pas se sentir légitimes. Ils donnent donc un point de vue « individuel », sans vouloir forcer personne, même si quand même l’extrême-Droite serait à rejeter : tel est le visage des libéraux-libertaires qui n’assument rien, même pas leur propre défense.
Les Français sont nuls, ils sont soit populaire-passif, soit bourgeois (désormais bobo)-actif. Ils veulent l’ordre en général, mais pouvoir individuellement faire ce qu’ils veulent. Leur niveau idéologique est lamentable, leur discipline intellectuelle inexistante. La France s’effondre, parallèlement au capitalisme qui se décompose. C’est toute la fin d’une époque qui se déroule sous nos yeux.