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Refus de l’hégémonie

Agressivité du 75e sommet de l’Otan et exercices militaires sino-biélorusses

Au début de l’année 2024, l’Otan menait l’exercice « Steadfast Defender 2024 » (« défenseur inébranlable ») avec notamment 90 000 soldats mobilisés ainsi que 133 chars, 50 navires de guerre, etc. Cela en fait la plus importante opération de ce type depuis 1988.

En réponse, la Chine vient de tenir avec la Biélorussie l’exercice « Assaut du faucon », plus grande manœuvre militaire entre les deux pays depuis 2010. On parle d’un exercice réalisé à 5 kilomètres de la frontière avec la Pologne et quelques kilomètres de celles avec l’Ukraine, au moment même où s’ouvrait le sommet de l’Otan à Washington.

Cela fait suite à l’acceptation de l’adhésion de la Biélorussie à l’Organisation de coopération de Shanghai, alliance de coopération économique et militaire piloté par la Chine de concert avec la Russie.

À l’instar des années précédents 1914, on assiste à la mise en place de manière toujours plus délimitée de deux grands blocs, eux-mêmes dirigés par la superpuissance américaine et la superpuissance chinoise, formant le terreau inéluctable d’une troisième guerre mondiale. Il n’est clairement plus simplement question d’escalade, mais bel et bien de la préparation concrète de la guerre générale.

Le 75e sommet de l’Otan qui s’est déroulé du 6 au 11 juillet à Washington s’inscrit entièrement dans cette perspective avec la mise sur pied de nouveaux éléments de commandement et de coordination des efforts militaires interalliés en Europe.

Le point 7 de la déclaration générale affirme sur la chose suivante :

Nous procédons au plus grand renforcement de notre défense collective depuis une génération. Nous concrétisons ainsi les décisions prises aux sommets de Madrid et de Vilnius pour moderniser l’OTAN dans la perspective d’une nouvelle ère de défense collective. La possibilité d’une atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de pays de l’Alliance n’est pas à exclure.

Nous avons renforcé notre posture de dissuasion et de défense afin de priver tout adversaire potentiel de toute occasion d’agression. Nous continuons de renforcer la dissuasion et la défense de l’OTAN face à toutes les menaces et à tous les défis, dans tous les domaines et dans plusieurs directions stratégiques dans la zone euro-atlantique.

Nous avons déployé des forces en place et prêtes au combat sur le flanc oriental de l’Alliance, renforcé les défenses avancées et amélioré l’aptitude de l’Alliance à fournir rapidement des renforts à tout Allié qui serait menacé.

Nous disposons d’une nouvelle génération de plans de défense de l’OTAN, qui rendent l’Alliance plus forte et mieux à même d’assurer la dissuasion et, si nécessaire, la défense face à tout adversaire potentiel, y compris sans préavis ou sur court préavis. Nous sommes déterminés à mettre à disposition les forces à haut niveau de préparation requises, dans tous les domaines, notamment au service d’une Force de réaction alliée robuste et agile. Nous accélérons encore la modernisation de notre défense collective.

Les 73 et 74 sommets de Madrid (2022) et de Vilnius (2023) avaient établi la nouvelle feuille de route stratégique de l’Otan contre la Chine et la Russie. Le 75e sommet de l’Otan vient quant à lui confirmer la mise en place concrète des modalités des opérations militaires à tenir.

Ainsi, les exercices au niveau brigade (4 000 soldats) redoublent d’intensité, de nouveaux plans de défense ont été mise sur pied, avec notamment la définition de trois zones d’opération et il est déjà prévu que le commandement terrestre pour la zone atlantique, actuellement à Norfolk aux États-Unis, soit transféré en Finlande.

La zone autour de l’exclave russe de Kaliningrad devient de plus en plus ouvertement l’espace d’une confrontation entre l’Otan et la Russie. Dans cette perspective, le commandement opérationnel doit également être relocalisé à Brunssum en Allemagne et les pays Baltes, de concert avec la Pologne, mettent en place de nouvelles et massives lignes de défense militaire à leurs frontières. Il est aussi dorénavant visé un nouveau seuil de participation financière au budget militaire de chaque pays membre, au-delà de l’ancienne règle des 2%.

De la même manière que les points 26 et 27 de la déclaration prennent acte du « rôle déterminant » de la Chine « dans la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine au travers de son partenariat dit « sans limites » et du large soutien qu’elle apporte à la base industrielle de défense russe« . En parallèle aux tensions accrues en Mer de Chine, les Philippines et le Japon viennent récemment de signer un pacte de défense mutuelle contre la Chine, s’imposant comme des relais de la superpuissance américaine dans la zone.

Il est donc maintenant clair que la Chine est reconnue comme belligérante dans la guerre en Ukraine, celle-ci formant un terrain d’affrontement clair entre la superpuissance américaine et la superpuissance chinoise pour l’hégémonie mondiale.

Dans ce cadre, et pour continuer à gagner du temps, de nombreuses annonces ont été faites pour maintenir debout le proxy ukrainien dans sa guerre à la Russie. Ont été annoncées des livraison d’avions de chasse F-16 par la Belgique et la Norvège, avec déjà des appareils en provenance du Danemark et des Pays-bas acheminés vers les forces ukrainiennes. En parallèle, le Royaume-Uni vient d’annoncer l’envoi de missiles Martlet à guidage laser pour contrer les drones russes et une nouvelle enveloppe de 40 milliards d’euros vienne d’être accordée pour l’année à venir.

Les Etats-Unis vont également placer des missiles à longue portée en Allemagne, ce qui nous ramène à la « crise des euromissiles » des années 1980.

Cette montée en puissance des conditions de l’affrontement reflète en réalité la déliquescence de l’Occident face aux poussées russes et chinoises, autant que face au pourrissement des situations nationales intérieures. Emmanuel Macron a par exemple dû rassurer l’opinion quant à la situation d’instabilité intérieure de la France et le président américain Joe Biden a créé un malaise général en présentant « le président Poutine » au lieu du président Zelensky.

Alors que la France a pris le leadership de la guerre américaine à la Russie en Europe, la crise de régime qu’elle traverse actuellement fait plus que jamais d’elle le maillon faible du bloc occidental. Une situation des plus inquiétantes, avec à l’horizon une potentielle remise en ordre par l’armée dans le but de garantir ses prétentions de part ses engagements pris depuis le 26 février 2024.

Là est le sens de l’Histoire avec un Occident qui s’effondre toujours plus sur fond de mise en place des conditions de la troisième guerre mondiale. La situation d’instabilité générale de la France relève directement de cette tendance et appelle impérativement à la reconstruction d’une force autonome de la Gauche historique pour établir une porte de sortie positive, socialiste, à la crise en cours.

Plus que jamais, l’actualité est : Guerre ou la Révolution  Socialisme ou barbarie!