La violence terrible de la DZ Mafia est une expression du cannibalisme social propre à la crise. Voici des informations tout à fait nécessaires pour comprendre cette nature. On peut, pour simplifier, parler de « mexicanisation », mais le terme est impropre bien sûr, car il attribue à un pays quelque chose de foncièrement négatif. Il faut mieux parler de cartel, et la DZ mafia est un exemple de cartel en devenir, comme nous l’avons dit ici.
C’est un phénomène inéluctable, si ce n’est pas la DZ mafia, ça en sera d’autres. Seul un État démocratique et populaire peut avoir la dimension (culturelle, sociale…), l’ampleur (populaire!) et la violence (démocratique, avec des camps de travail!) pour faire face au développement des cartels. Il suffit de regarder aux États-Unis, où il y a des mafias et des gangs partout, et où 2,2 millions de personnes sont en prison (soit pratiquement 1% de la population).
L’origine
La DZ Mafia est à l’origine un petit groupe faisant du trafic de drogues, comme il y en a un nombre très important. Commencée en 2010, l’activité a amené à affronter des groupes voisins et concurrents, avec une certaine violence propre à l’environnement marseillais.
Le facteur-clef fut néanmoins le confinement. Les ventes de drogue de la cité de la Paternelle, la base de la DZ Mafia, ont en effet explosé à ce moment-là. On parle de jusqu’à 100 000 euros de vente par jour.
La Paternelle, ce sont 184 logements, relativement récents puisque de 1983, et on est non loin de la mer… Quel désastre !
Il faut savoir ici qu’en janvier 2024, les quatre points de deal ont été définitivement fermés, après… deux ans d’activités policières ! Au début de l’année, les commentaires bourgeois étaient triomphalistes… Quelques mois plus tard, il fallait s’apercevoir que la DZ Mafia avait changé de dimension.
Le rôle initial
La DZ Mafia a profité de sa manne financière pour employer massivement des jeunes. Grosso modo, la grande majorité à moins de 21 ans, voire même peut être mineur. La DZ Mafia est ici très connue pour avoir joué les rôles de « semi-grossistes ». Ils proposent d’acheminer les drogues, ils proposent du personnel, etc.
On parle ici des choufs (c’est-à-dire les guetteurs), des charbonneurs (c’est-à-dire les vendeurs), des ravitailleurs… Mais également des tireurs, et c’est cela qui a terriblement marqué la police et l’opinion publique. Les règlements de compte sont facilités, en raison de l’ « uberisation » du phénomène.
C’est de cette manière que la DZ Mafia a éliminé un concurrent, le « Clan Yoda », avec un bilan de 35 morts. Et dans son élan, il a pu étaler ses activités.
La rupture et l’idéologie des cartels
La DZ Mafia a initialement à sa tête Abdelatif Mehdi Laribi « Tic ». Celui-ci s’est mis de côté ou a été mis de côté, ne suivant pas la ligne des assassinats en série.
C’est là où on retrouve trois dirigeants nouveau qui sont… en prison! La DZ Mafia est dirigée depuis la prison, ce qui révèle l’incroyable faillite de l’État, entre faiblesse et corruption. Ces gens utilisent leurs téléphones portables pour gérer et commanditer des assassinats, l’État le sait mais ne peut rien faire. Quelle faillite !
Le profil des trois nouveaux dirigeants reflète naturellement l’époque. Amine O. est le produit de son environnement : adolescent braqueur dans la cité des Micocouliers à Marseille, il a tenté l’aventure en procédant à de multiples actions de tête brûlée pour éliminer ses concurrents. Son succès fait qu’outre son surnom « Mamine », il se fait appeler également « Jalisco » ou « Nemesio », une référence à Nemesio Oseguera Cervantes, le dirigeant du cartel mexicain Cártel de Jalisco Nueva Generación.
On a la même histoire pour Gabriel O., du quartier de la Visitation à Marseille, avec le passage du braquage au rôle de « sicaire ». Ces deux figures rentrent en pratique dans l’histoire du crime comme les premiers à avoir franchi et effacé la frontière allant du braquage à la liquidation ciblée.
Il faut alors mentionner Medhi Laribi, dans la DZ Mafia depuis le début, dont le surnom est « la Brute ». C’est lui qui a accompagné et porté le processus transformant la DZ Mafia. Lui aussi apparaît historiquement comme le premier gérant de ventes de drogues systématisant son activité dans une logique d’expansion capitaliste.
L’aventure humaine criminelle
Ce n’est pas le lieu de philosopher, mais il faut bien noter tout de même qu’à moins de caricaturer les criminels de la DZ Mafia, il faut bien voir qu’ils ont une nature « dynamique ». Ce n’est pas la bonne « dynamique », car au lieu du Socialisme, ils veulent réactiver un mode de vie clanique propre à l’époque esclavagiste.
Néanmoins, ils expriment une situation de crise, ce ne sont pas simplement des « vilains » avec prétendument des gènes criminels. Au sens strict, ce sont des capitalistes tellement modernes et efficaces… Qu’ils en reviennent à l’époque où esclavagiser l’autre était le moyen de pouvoir vivre convenablement.
Le nombre
La DZ Mafia concerne environ 1 000 personnes, un chiffre qui ne veut pas dire grand chose de par les ramifications. Ce sont uniquement des hommes, bien entendu, puisque la dimension patriarcale est omniprésente. La DZ Mafia a un nom faisant référence, rappelons le, à l’Algérie (Djazaïr, DZ), un pays du tiers-monde, portant par conséquent une vaste dimension semi-féodale.
Sans cet arrière-plan, il n’y aurait pas pu avoir de passage au mode « cartel » fonctionnant selon les principes du cannibalisme social. Et de manière intéressante, c’est l’ombre inversée de la tentative de l’Algérie de s’en sortir en trouvant un moyen de développement au moyen des BRICS et de l’affirmation du tiers-monde.
La localisation
Il est considéré que la DZ Mafia s’appuie sur une centaine de pôles dans le pays. On est principalement en région PACA, mais cela commence à irradier. Le noyau dur, c’est Marseille, puis vient une zone avec Arles, Valence, Avignon et Nîmes. Il fut ajouter Dijon et Toulouse.
Le mode opératoire
Il est arrivé que la DZ mafia mène un assassinat, puis incendie le cadavre, pour filmer la scène, la diffuser sur les réseaux sociaux avec un avertissement : « Voici la dernière étape pour les suceurs qui voudront attaquer le pain de la DZ Mafia ».
Il y a également un incendie criminel du domicile d’un agent pénitentiaire, des sévices sexuels commis sur quelqu’un en prison…
C’est la logique des cartels et on connaît la suite : corruption d’agents des institutions (le processus semble déjà avoir commencé), élimination spécifique (journalistes, magistrats…), terreur locale, mise en place d’élus soumis…
Une mafia n’est jamais loin de tout cela, mais c’est différent.
Un cartel n’est pas une mafia
Il faut bien cerner la différence avec ce qu’est une mafia. Une mafia aime l’obscurité, elle fait toujours des accords avec l’appareil d’État à un moment donné. C’est un super-parasite reconnu et accepté à un moment donné. Une mafia est acceptée socialement, elle est quasi intégrée au panorama et ne forme pas, toutes proportions gardées, une réalité à part. Il suffit de penser à la situation italienne.
Un cartel est présent, par contre, à côté de la population. Il y a des rapports cartel – population, mais ils ne sont pas « organiques ». Au point que les cartels peuvent « prélever » des forces dans la population, surtout des jeunes femmes pour les prostituer, ou bien des jeunes hommes pour les faire travailler dans les laboratoires de drogue.
Pour simplifier : une mafia est un reste féodal qui doit sa réalité à des conditions historiques précises. Un cartel est une réactivation de l’esclavagisme.
Le prestige international
Il est affirmé que la DZ mafia est parvenu à tisser des liens avec la ’Ndrangheta italienne et des criminels très brutaux de la Mocro Maffia des Pays-Bas. Si c’est bien le cas, on ne s’en sortira plus. Même si la DZ Mafia devait s’affaiblir, il y aurait un renforcement par des forces extérieures, pour profiter du terrain conquis.
Surtout que la DZ Mafia est parvenu à se connecter aux réseaux du port du Havre, le pont nécessaire avec l’Amérique.
La solution
Il n’y a qu’une seule solution face à la DZ Mafia, face au cannibalisme social : le Socialisme. Pour trois raisons :
- seule une centralisation de l’économie permet d’éviter le foisonnement des activités illégales parasitaires, en instaurant des normes, des régulations, un cadre, une surveillance, et au moyen de principaux leviers économiques nationalisés ;
- seule la valorisation de comportements positifs, culturels, populaires, artistiques peut étouffer la fuite en avant dans le cynisme, l’égoïsme, la logique criminelle ;
- seul un État s’appuyant sur les masses peut briser des appareils criminels développés et est en mesure d’instaurer des camps de travail pour rééduquer le éléments anti-sociaux.
Tout autre perspective est vaine. Il faut que les masses le comprenne avant la catastrophe, car le comprendre après la catastrophe rend les choses bien plus dures, comme on le sait.