L’être humain est un être animal social. Ce n’est donc pas seulement qu’il ne faille pas détruire « l’environnement », mais qu’il faut s’inscrire correctement et de manière sophistiquée dans la nature elle-même. C’est là toute la clef du développement si tortueux de l’Humanité…
Ainsi, pour développer pleinement ses facultés physiques et intellectuelles, l’être humain doit pouvoir suivre ce qu’il est appelé le rythme circadien, c’est-à-dire la reproduction journalière de phases biologiques.
Par exemple, on sait que l’attention physique et intellectuelle est la plus développée entre 10h et 17h, puis aux alentours des 21h commence la sécrétion de mélatonine, hormone du fameux « train du sommeil ».
Ainsi, une société qui se voudrait la plus efficace dans l’usage des facultés humaines se devrait d’organiser la journée de travail entre 10h et 17h, de la même manière qu’elle devrait toujours être en phase avec le soleil, tant lors des journées que selon les saisons. La saison d’hiver qui voit la nature tourner au ralenti et être caractérisée par une luminosité plus faible, limitant l’absorption des vitamines, devait être consacrée à des activités correspondantes.
Et pour l’Humanité, la nuit est faite pour dormir. C’est un moment essentiel dans les cycles biologiques pour « recharger les batteries ». De la même manière que l’on devrait établir des moments précis pour faire du sport, avoir une activité intellectuelle soutenue ou bien encore se nourrir. Tous les moments d’une journée ne se valent pas pour la pleine satisfaction de ses besoins.
Hélas, l’Humanité a été entièrement conditionnée par un mode de production capitaliste qui a bénéficié de forces productives lui permettant de satisfaire son propre but d’accumulation et faisant des cycles naturels des obstacles à dynamiter. Karl Marx avait bien saisi cet aspect :
« Dans sa passion aveugle et démesurée, dans sa gloutonnerie de travail extra, le capital dépasse non seulement les limites morales, mais encore la limite physiologique extrême de la journée de travail. Il usurpe le temps qu’exigent la croissance, le développement et l’entretien du corps en bonne santé.
Il vole le temps qui devrait être employé à respirer l’air libre et à jouir de la lumière du soleil. Il lésine sur le temps des repas et l’incorpore, toutes les fois qu’il le peut, au procès même de la production, de sorte que le travailleur, rabaissé au rôle de simple instrument, se voit fournir sa nourriture comme on fournit du charbon à la chaudière, de l’huile et du suif à la machine. »
Le travail de nuit apparait ici comme un élément fondamental de cette tendance anti-naturelle du capitalisme. Il n’a d’ailleurs cessé de s’étendre depuis les années 1990, preuve, s’il en fallait une, de l’expansion du capitalisme à cette époque… En 1900, alors qu’un débat existait autour de l’interdiction du travail de nuit pour les femmes, un inspecteur du travail à Marseille avait cette remarque si pertinente :
« La vie normale de la plante ne cesse-t-elle pas avec la lumière ? L’abeille butine-t-elle pendant la nuit ? La femme pas plus que l’homme ne sont des animaux nocturnes. Les animaux qui ont ce caractère sont organisés pour cela par la nature, et la nature a d’implacables lois, dont on ne peut sans péril se défendre. »
Pour la bourgeoisie, classe devenue décadente, une telle manière de voir les choses est dorénavant inconcevable, tant elle a acté la séparation absolue de l’être humain et de la nature, de la culture et de la nature, du corps et de l’esprit avec son idéologie post-moderne.
Ce qui compte aujourd’hui c’est d’être résilient pour pouvoir compenser les déstabilisations occasionnées sur la nature, ici sur le rythme circadien.
Ce qui compte pour la bourgeoisie, ce sont les fonctions vitales organiques sans forcément qu’elles soient reliées à la nature dans son ensemble. Il n’y a que de la quantité qui compte, jamais de la qualité, moins encore s’il s’agit de l’inscrire de manière générale dans la nature elle-même.
Il faut dire que le société capitaliste développée, c’est une société de consommation, avec des loisirs et des divertissements à n’en plus finir qui exigent donc un être humain toujours disponible, prêt à produire et consommer, quitte à ce qu’il tienne par le biais de psychotropes en tous genres.
Le travail de nuit empêche le sommeil réparateur ? Pas de problème, il suffit d’avoir 8 heures dans la journée ! Le travail en général empêche une bonne alimentation ? Pas de problème, fast-food et plats ultra-transformées prêts-à-l’ emploi suffisent !
Contre tout cela, il faut affirmer la célébration de la vie comme principe socialiste ! Il s’agit d’établir un nouveau rapport au monde, à la Nature, à la vie quotidienne.
La dimension écologique de la révolution se doit de considérer cet aspect en ayant comme objectif la réintégration de l’Humanité dans ces cycles.
Pour prendre le thème connu du réchauffement climatique, lorsqu’on s’y penche, on comprend vite que le problème que cela pose pour le monde vivant est le processus de désynchronisation, soit le fait que les cycles naturels ne sont plus en phase les uns avec les autres, provoquant donc des troubles, des déséquilibres avec pour conséquence l’extinction massive d’espèces.
En fait on a le même phénomène de désynchronisation de l’être humain avec lui-même, avec sa nature, donc avec la nature elle-même.
La réintégration dans les cycles naturels est donc une resynchronisation. C’est le Socialisme !
L’être humain doit assumer d’être un animal social, utilisant ses facultés de connaissances des nécessités et par là-même ses capacités productives, non pour s’arracher et aller contre lui-même mais pour mieux y correspondre.
C’est là le sens même du socialisme, puis du communisme : permettre le libre développement des facultés humaines, car sachant planifier correctement la satisfaction des besoins !