Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau et celui de la Justice Didier Migaud étaient à Marseille le vendredi 8 novembre 2024 pour faire des annonces censées être chocs contre les réseaux de trafic de stupéfiants. Le narcotrafic est tellement implanté et prépondérant en France que le gouvernement est obligé de prétendre qu’il agit.
La première moitié de l’année 2024 comptabilise pas moins de 182 assassinats, tentatives d’assassinats et règlements de comptes, qui reflètent un très haut niveau de tension et d’installation dans le paysage de la part des réseaux ressemblant de plus en plus à des cartels. Le bilan est stratosphérique : 42 morts et 171 blessés, soit plus d’une victime par jour depuis le début de l’année.
Le mode opératoire est en général tout aussi impressionnant que le volume de règlements de compte : tueurs à gages adolescents, criblage par mitrailleuse, multiples perforation au couteau, ou concurrent brûlé vi en pleine rue. Le ministre de l’Intérieur lui-même, face aux faits, est obligé de dénoncer la « mexicanisation » du pays.
Seulement voilà, non seulement les trafics ne datent pas d’aujourd’hui, car la situation empire en profitant d’une situation façonnée culturellement et économiquement durant des dizaines d’années, mais en plus la société française est tellement corrompue par le libéralisme et paralysée sur le plan politique qu’elle n’y peut rien.
Le gouvernement n’arrivera donc à pas changer les choses, et il est lui-même directement responsable de la situation actuelle. Il ne s’agit pas spécifiquement des ministres en exercice à date, mais du personnel politique français en général, qui relèvent des différentes tendances de la bourgeoisie française en particulier.
De ce point de vue, le compte n’y est absolument pas : la bourgeoisie française est décadente sur le plan des mœurs et réactionnaire politiquement. Elle n’a aucun moyen de faire avancer la société et de porter la civilisation comme antagonisme face à la barbarie.
Alors la barbarie progresse et progressera. Le gouvernement français n’arrivera à rien avec son plan désespéré et vain contre le narcotrafic, car il n’est déjà pas capable de faire respecter le minimum d’ordre démocratique qu’il est censé garantir.
Les prisons en particulier, censées isoler des malfrats condamnés par une justice qui prétend être rendue au nom du peuple, sont en fait des quartiers généraux du trafic, d’où sont donnés des ordres importants, où des trafics ont lieu et où bien sûr nombre de recrutements se font.
Le gouvernement français prétend pouvoir agir avec un « plan », donc de nouvelles mesures et de nouveaux moyens, mais il est déjà incapable de faire avec ce qui existe déjà.
La consommation de drogue est déjà interdite ; il serait très facile de harceler les consommateurs directement autour des points de vente en faisant appliquer les sanctions prévues par la loi.
Le trafic de drogue est déjà sévèrement puni par la loi, les forces de police sont déjà mobilisées contre les trafiquants, la Justice condamne déjà les coupables.
Le « plan » du gouvernement n’apporte rien au sens strict, si ce n’est une nouvelle organisation administrative tout à fait anecdotique. C’est tellement ridicule et vide qu’à part fanfaronner dans la presse locale, le gouvernement n’a rien à dire. On ne trouvera d’ailleurs aucun détail ni contenu réel sur les sites gouvernementaux de ce fameux « plan » !
Du bruit, donc, et aucune action, voilà ce qui va se passer.
Rien ne changera, car il n’y a en réalité aucune dynamique populaire contre le trafic de drogue et les narcotrafiquants, c’est-à-dire à la fois contre la vente et contre l’achat de drogue.
Il ne faut pas s’y tromper, la drogue n’existe pas contre le capitalisme, ou de manière souterraine par rapport au capitalisme : elle est une marchandise à part entière du capitalisme et de la société capitaliste de consommation.
C’est de lutte des classes dont il s’agit ici. Soit il y a dans le prolétariat français une conscience de classe suffisante pour changer les choses et emporter les masses populaires vers de nouveaux horizon en installant un nouvel ordre. Soit il n’y aura que le capitalisme en décadence, charriant avec lui tout ce que l’âme humaine peut avoir de plus bas et de plus sombre, tels les cartels de la drogue et leur violence systématique.
Quand on parle de lutte des classes, il ne faut surtout pas s’imaginer qu’on pense syndicalisme. Qui dit lutte des classes dit concurrence acharnée entre deux classes pour diriger la société. Et qui dit société dit culture. Voilà le fond du problème.
La bourgeoisie est incapable, car sa culture est libérale et marchande, individualiste au possible. La drogue, au fond, ne lui pose aucun problème et d’ailleurs la drogue est tout à fait hégémonique dans la bourgeoisie française elle-même.
C’est anecdotique, ou pas, mais on apprend par exemple dimanche 11 novembre 2024 qu’un trafiquant de cocaïne venant de se faire prendre est également un employé (majordome) en arrêt maladie de l’hôtel de Matignon, le lieu du Premier ministre français.
Il est absolument courant et très facile de se procurer de la drogue en France, tout type de drogue ; la drogue est une marchandise courante et les trafiquants ne sont que des entrepreneurs contournant le circuit classique et légal du business. La violence n’en est que le sous-produit inévitable, de part l’absence de normes et de contrôle social sur leurs affaires.
La bourgeoisie et sa police ne font rien contre la drogue, car ils portent surtout la décadence, et non plus l’ordre comme aspect principal. Il n’y a qu’à voir les propos lunaires du futur directeur général de la police nationale dans la presse d’État (France info) jeudi 7 novembre 2024 :
« Un point de deal, c’est un abcès. Et autour d’un point de deal, la vie est perturbée, dégradée. Et les gens vivent moins bien », a-t-il déploré. « Chaque fois qu’on démonte un point de deal, on désorganise une activité. C’est-à-dire que ce jour-là, il n’y a pas de vente. Alors, souvent, les gens disent, mais à quoi ça sert ? » . Ce sont « peut-être des personnes que l’on sauve (…), qui ne vont pas tomber dans l’addiction », a-t-il estimé. »
Ce type de personnage est typique de la situation française. Soit il ne connaît rien à l’affaire, car évidemment que les consommateurs trouvent facilement ailleurs leur marchandise, soit il est un menteur prétentieux, pourtant au plus haut poste de commandement.
Rien ne changera sans une révolution des mœurs imposant un ordre nouveau.
Et chaque jour qui passe les choses deviennent plus difficiles à résoudre, au sens il faudra toujours plus de violence pour renverser la situation. La contradiction est là, et devient toujours plus antagonique !