Pour la première fois dans l’Histoire, un missile balistique pouvant contenir des ogives nucléaires a été lancé sur une ville. Et personne ne dit rien en France. Le président Emmanuel Macron ne dit rien. Pour celui-ci, on peut le comprendre, il y a un climat de tension et il veut « gérer ».
Mais à gauche? La silence est total. Le Parti socialiste ne dit rien, le PCF ne dit rien, Lutte Ouvrière ne dit rien, le PRCF ne dit rien, le PCRF ne dit rien, Révolution permanente ne dit rien, etc., etc. C’est totalement incroyable. On marche comme des zombies à la guerre mondiale.
Et que donne justement la combinaison du silence d’Emmanuel Macron et celui de la Gauche en France? On l’aura compris, une nouvelle pièce mise discrètement dans la machine. C’est un cas d’école de narration parfaitement maîtrisée.
Toute en délicatesse, on ajoute une pierre à l’édifice du conflit armé avec la Russie. Lentement, mais sûrement, on fait sauter les digues. C’est là où vraiment la chronologie depuis le 26 février 2024 est essentielle.
Comment la narration belliciste a-t-elle procédé? Il a été pensé de la part d’Emmanuel Macron et de l’armée que prendre la parole directement et immédiatement apporterait une touche dramatique par définition contre-productive.
Aussi, c’est le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot qui a pris la parole, le 23 novembre, soit 48 heures après l’utilisation du missile russe sur Dnipro. Et le média choisi est britannique, c’est la BBC, pour une interview retranscrite.
C’est très subtil, car très indirect. Les médias français reprennent certains propos, mais il n’y a rien de frontal. C’est fait pour passer tout en douceur.
Le contenu des propos est par contre tout ce qu’il y a de plus clair et confirme toutes nos analyses. On va à la guerre, on est en plein dans le processus. La première phrase dit tout déjà :
« Il n’y a pas de « lignes rouges » en ce qui concerne le soutien à l’Ukraine, a déclaré le ministre français des affaires étrangères à la BBC. »
La ligne rouge à laquelle il est principalement fait allusion, on le sait depuis le 26 février 2024, c’est l’envoi de troupes au sol.
Et pour que les choses soient claires, le thème est ouvertement abordé.
Interrogé sur l’éventualité d’une participation des troupes françaises aux combats, il a déclaré : « Nous n’écartons aucune option ».
« Nous soutiendrons l’Ukraine aussi intensément et aussi longtemps que nécessaire. Pourquoi ? Parce que c’est notre sécurité qui est en jeu. Chaque fois que l’armée russe progresse d’un kilomètre carré, la menace se rapproche d’un kilomètre carré de l’Europe », a-t-il déclaré.
Le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a également affirmé qu’il fallait inviter l’Ukraine dans l’Otan et que les pays occidentaux devaient augmenter leurs dépenses militaires.
On est ici dans l’escalade, c’est on ne peut plus clair. Il ne s’agit pas d’une impasse, il ne s’agit pas d’un « choix », tout cela résulte de l’inexorable progression de la bataille pour le repartage du monde dans le cadre de la crise capitaliste.
Ces gens agissent commes des somnambules, avec un brin d’organisation dans la narration, bien entendu. Preuve s’il en fallait, le même jour s’exprimait le général Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de Défense nationale, à l’occasion d’une interview à La Dépêche (en fait La Dépêche du Midi, qui sort en région Occitanie).
Défense nationale est la revue officielle et inoficielle de l’armée française, un paradoxe qui s’appuie sur le fait qu’elle est produite dans le cadre de l’armée, mais pas par elle (encore une nuance à la française !). La revue est ainsi hébergée au sein de l’École militaire… mais vit de ses propres abonnements, sans subventions aucune. Enfin, on l’aura compris, les hauts cadres de l’armée doivent s’y abonner.
Le général Jérôme Pellistrandi tient des propos dans le même sens que Jean-Noël Barrot, et on retrouve ici la fonction typique des journaux régionaux dans l’escalade de la narration belliciste depuis février 2024.
« Plutôt que céder à la peur, il faut être réaliste. En ce sens, nous devons continuer de faire preuve de détermination (…). Il n’y aura pas de période de détente selon moi (…).
Le type de missile qui a été utilisé n’est pas intercontinental, c’est-à-dire, qu’il ne peut pas tomber sur les États-Unis par exemple. En revanche, il a une portée suffisante pour frapper certaines villes européennes. D’autant plus que ce missile peut être à capacité nucléaire. Jeudi il a été utilisé avec des charges conventionnelles mais c’est une nouvelle provocation de la part de la Russie. »
La dernière question posée témoigne tout à fait de comment l’interview est totalement aux ordres de l’armée et relève de la propagande. On se croirait en 1914-1918 où l’armée française expliquait qu’elle était contre la guerre, mais malheureusement l’ennemi est ce qu’il est, il ne veut pas la paix, etc.
Personnellement, êtes-vous surpris par la direction que prend le conflit ?
Hélas, non. Vladimir Poutine déteste l’Occident et nous mène une guerre hybride, de désinformation et de menace. Et elle n’est pas près de s’arrêter. N’oublions pas que la sécurité de l’Europe se joue aujourd’hui en Ukraine.
La Dépêche est ici un organe de bourrage de crâne, un bourrage de crâne qui est systématique dans tous les médias, dans le silence complet de la Gauche.
Cela ne change rien, cela polarisera d’autant plus les choses quand on va aller à la rupture. C’est la révolution ou la guerre, et si c’est la guerre qui l’emporte d’abord, ce sera la révolution ensuite.
Seuls ceux qui sont installés dans le capitalisme et qui ne veulent pas de la révolution en ont peur. S’il faut bien entendu appréhender une situation horrible, elle n’en est pas moins produite par l’Histoire et il faut être à la hauteur de celle-ci.
Il faut être prêt pour les grands événements !