Karl Marx avait dit que l’Histoire se répète toujours deux fois : d’abord comme tragédie, ensuite comme bouffonnerie. Il voulait dire par là que si une entreprise échoue, il y a sa caricature qui se reproduit un peu plus tard.
L’échec de Napoléon Bonaparte a donné naissance à Napoléon III qui a essayé de faire la même chose, mais de manière caricaturée. Jacques Chirac fut un bouffon par rapport à la figure tragique de de Gaulle. Et le Nouveau Front populaire de 2024 a été un décalque raté du Front populaire de 1936.
Pourquoi le Front populaire a-t-il échoué en 1936 ? Parce que son aile droite, les Radicaux (c’est-à-dire les centristes) ont fini par trahir. Mais le Front populaire était une bonne chose : cela a permis de bloquer les fascistes, d’unir les forces se revendiquant du Socialisme (les socialistes et les communistes).
Le Nouveau Front populaire de 2024 était par contre à ne surtout pas faire, car c’était une alliance par en haut. C’était une union électorale sans principes, c’était un moyen pour le peuple de gauche de voter les yeux fermés sans réfléchir à rien, sans se remettre en cause, sans assumer quoi que ce soit.
Et voilà que le 16 janvier 2025 le Parti socialiste, soit l’aile droite de ce bric-à-brac populiste qu’est le Nouveau Front populaire, a décidé de ne pas censurer le gouvernement libéral de François Bayrou, allié avec la Droite traditionnelle.
Autrement dit, il lui sauve la vie, car l’équation est très simple :
le Parti socialiste + La France insoumise + le PCF + les Verts (sauf Delphine Batho) + le Rassemblement national + l’UDR d’Eric Ciotti = censure avec 331 sièges sur 575 !
Mais sans les 66 voix du PS, le gouvernement a la vie sauve, à 23 suffrages près !
L’enjeu n’était pas pour tout de suite, car le RN et le l’UDR ne comptaient pas voter directement la motion de censure de principe déposée par La France insoumise, mais pour le vote prochain des budgets de l’État et de la Sécurité sociale.
Le Parti socialiste a donc négocié un accord de non-censure, sans le dire ouvertement. Olivier Faure, son premier secrétaire, est d’ailleurs très fier de son « coup ». Par là, sa formation se retrouve, pense-t-il, au centre du jeu politique.
Le Parti socialiste devient incontournable et pérennise par là son existence, dans un contexte politique plus que difficile.
On est dans le machiavélisme le plus classique, avec des calculs et des accords cachés, des entourloupes et des alliances, des manigances et des chantages.
Bien entendu, ce n’est pas cela qui est dit, car un tel opportunisme de droite ne peut être assumé de la part du Parti socialiste. Il faut au contraire faire croire à une victoire sociale, en plus de se présenter comme des gens responsables et respectables voulant faire avancer les choses.
Olivier Faure a donc revendiqué « l’honneur d’avoir évité aux Français » un budget dur, car il est d’une « gauche qui propose, qui avance (et) qui fait céder le gouvernement ».
Il a choisi avec le Parti socialiste de « ne pas pratiquer la politique du pire ». Bref, il se donne le beau rôle.
En ce sens, le Premier ministre François Bayrou a entériné par écrit ses engagements vis-à-vis de ses alliés de circonstance, représentés ici par Boris Vallaud le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, et Patrick Kanner, le président du groupe socialiste au Sénat.
De quoi parle-t-on précisément. Voici le butin socialiste, en plus de l’engagement pris par le chef du gouvernement de remettre sur la table la négociation de la réforme des retraites (à 64 ans) :
– abandon des nouveaux jours de carence pour les fonctionnaires ;
– maintien de la taxe sur les hauts revenus ;
– renoncement aux suppressions de postes dans l’éducation.
Quelle faiblesse ! Il est fait comme si le monde n’était pas en crise, comme si la France n’était pas le maillon faible de l’occident, empêtré dans une dette faramineuse, minée par un délitement généralisé de son tissu social/collectif, et surtout engagée quasi directement dans une guerre contre la Russie, pouvant dégénérer en la troisième guerre mondiale.
Une telle alliance du Parti socialiste avec régime menant une guerre de superpuissance (en tant que sous-traitant des États-Unis), qui plus est mené par un gouvernement de nature semi-fasciste (car n’ayant aucune assise démocratique) : voilà qui est bien plus qu’une faute politique.
C’est ni plus ni moins que de la haute trahison par rapport aux valeurs de gauche. Trahison du peuple, de l’idéal socialiste et de toute perspective allant dans le sens de la Gauche en général.
Certes, cela ne date pas d’aujourd’hui, on le sait bien, le Parti socialiste étant depuis des années une formation bourgeoise, composée de bourgeois menant une vie de bourgeois, et intéressés uniquement par des considérations bourgeoisies.
C’est pourquoi plus que le Parti socialiste, ce sont ses alliés qu’il faut critiquer. Ce sont eux qui ont refusé de rompre avec le Parti socialiste, ce sont eux qui ont refusé d’affirmer une véritable Gauche.
Aussi est-ce la fin de cette grande bouffonnerie qu’a été le Nouveau Front populaire, pleine de prétention, pleine d’orgueil, pleine de chantage à l’encontre de ceux qui portent des vraies valeurs de gauche.
Le Nouveau Front populaire a été mensonger de bout en bout et la trahison du Parti socialiste démasque le caractère opportuniste de ses fondements.
Le résultat est que la Gauche n’a rien à proposer alors qu’on est en France en pleine crise de régime et que l’escalade militaire contre la Russie continue.
En 1936, on avait alors des gens ayant véritablement en tête un changement de régime. La Gauche, c’était le poing levé, le drapeau rouge, le Socialisme non pas comme « anticapitalisme » mais comme collectivisation de l’économie, avec un Etat aux mains des masses.
Aujourd’hui, toute la mouvance du Nouveau Front populaire est composé de gens sans principes, qui n’osent rien, n’ont aucune ambition, n’ont aucun idéal politique et idéologique, qui vivent du populisme.
Ils ne sont que des accompagnateurs bruyants et lamentables du régime, s’étant donné pour rôle de récolter le plus de miettes possibles pour servir leur base électorale composée essentiellement de fonctionnaires et de petits-bourgeois urbains, profitant de leur position d’occidentaux, avec une démagogie sans bornes pour capter les masses liées à l’immigration.
Soyons certains que la situation française ne va pas vers l’accalmie, mais vers l’agitation ; le gouvernement Bayrou a été sauvé, mais pour encore davantage provoquer la polarisation.
L’Histoire a besoin de la Gauche historique, de ses valeurs, de ses exigences, de son programme – la France a besoin de l’Etat socialiste, d’un nouvel ordre démocratique et populaire.
Le processus de confrontation est inéluctable !