Le ronron du 24 heures sur 24 du capitalisme a lessivé les Français entre 1989 et 2020, au point maintenant que les gens qui se disent révolutionnaires ne veulent pas dire par là qu’ils veulent la révolution.
Eh non ! Ils veulent dire par là qu’ils ont des idées qui sont « révolutionnaires », qui sont totalement en opposition avec, disons, le libéralisme, le capitalisme. Ils vont bien souvent se dire d’ailleurs « anticapitalistes ». Parfois ils se diront « communistes » ou « communistes révolutionnaires ».
Mais jamais au grand jamais ils n’ont en tête l’idée de prendre d’assaut l’Elysée les armes à la main, de mener des troupes armées pour dévaliser les armureries, de fusiller tous les hauts gradés de l’armée et les hauts fonctionnaires, de prendre le contrôle des commissariats et des bases militaires.
C’est pourtant bien cela que veut dire le mot révolution. La révolution, c’est un changement de régime dans la violence. C’est le remplacement d’un appareil d’Etat par un autre, d’une armée par une autre, d’une administration par une autre.
C’est le remplacement de valeurs morales par d’autres valeurs, de lois par d’autres lois.

« nous nous débarrasserons définitivement de la Burqa ! »
La force du capitalisme est, comme on le sait, sa capacité à intégrer, corrompre, dissoudre. Prenons Lutte Ouvrière, une organisation qui veut faire la révolution et, à ce titre, a commencé ses activités dans les années 1960 en se fondant sur le principe de la clandestinité. Aujourd’hui, tous ses membres sont par définition « grillés » puisqu’ils remplissent les listes aux élections.
Pareillement, tous ceux qui passent leur temps à poster des messages sur les réseaux sociaux se grillent et grillent les gens. Jamais le travail de la police n’aura été aussi simple : plus besoin de filatures, d’écoutes téléphoniques. Il suffit de lire les mails et les réseaux sociaux, et même plus simplement encore de voir qui connaît, qui est ami avec qui.
On touche cependant là le fond du problème. En France, on aime contester, mais vouloir mener la révolution réellement, c’est autre chose. C’est très paradoxal que la France, ce pays où s’il y avait des barricades, beaucoup de gens s’impliqueraient avec un sens du sacrifice. Pour autant, il n’y a absolument personne pour les faire, ces barricades !

Qu’est-ce que cela souligne, inversement ? Qu’on ne peut pas reprocher aux gens de ne pas faire la révolution, si personne ne la propose, cette révolution. Les gens ne se bougent jamais d’eux-mêmes, les conceptions révolutionnaires ne tombent pas du ciel.
Il faut une avant-garde pour conscientiser, éduquer, organiser les gens. C’est le grand principe de la Gauche historique.
Il ne faut pas être « révolutionnaire » seulement, il faut oeuvrer à la révolution.
Il ne faut pas se dire : ce que je fais contribue, indirectement, à faire avancer les choses. Car c’est faux ! C’est le capitalisme qui fait croire ça.
C’est le drapeau de la révolution qui doit être assumé, celui du renversement du régime, du dépassement du capitalisme, par un Etat socialiste. Le drapeau rouge à l’Elysée, tel doit être le rêve fiévreux de chaque révolutionnaire, tout le temps et partout.
Et sa vie ne doit avoir de sens que par rapport à un tel objectif.
