Pierre de Villiers de retour pour renforcer la propagande guerrière

15 septembre 2025

Cela fait deux ans que l’ex-chef d’état-major des armées françaises Pierre de Villiers (2014-2017) n’avait pas fait parlé de lui, alors même qu’il était omniprésent dans les médias de la France de l’après confinement.

À l’époque, il apparaissait comme une des voies de recours de la bourgeoisie pour une remise en ordre par la centralisation militariste du régime, ce que n’avait pas manqué de souligner notre média.

Il était carrément proposé comme candidat à l’élection présidentielle de 2022 car Pierre de Villiers peut compter sur une légitimité issue de sa carrière de militaire, mais aussi et surtout d’une légitimité politique du fait de sa démission de chef d’état-major des armées à l’été 2017 en guise de contestation de trop faibles moyens accordés aux armées.

Le voilà donc de retour en cette rentrée 2025. C’est lors d’une conférence destinée à identifier les start-up à forte croissance, le trophée des Licornes, réunie, entre autres, par le journal pro-entreprises Challenges que l’ex-chef d’état-major des armées est revenu sur la scène médiatique.

Il intervient ici comme porte-parole organique de la bourgeoisie française dans le but de l’unifier autour de la perspective de la guerre de repartage comme porte de sortie inévitable si les capitalistes français veulent se relancer dans un nouveau cycle de croissance.

Pour cela, il a salué la nomination de l’ancien ministre des Armées Sébastien Lecornu comme nouveau Premier ministre, dont il dit avoir trouvé « excellent«  son livre Vers la Guerre ? publié à l’automne 2024 et dont l’objectif éditorial était le rassemblement technocratique autour de l’impératif de la guerre.

Alors Pierre de Villiers enfonce le clou en rappelant que les armées n’ont de cesse d’être « dégarnies ». Dans la course à la guerre mondiale, il serait primordial d’augmenter le budget des armées, ce qui permet de se poser là encore comme un soutien avéré du Premier ministre qui a été, en tant que ministre des armées, l’artisan de la remontée du budget militaire à travers le vote de la dernière loi de programmation militaire, ainsi que des récentes allonges financières accordées et de la restructuration du secteur de l’industrie de l’armement.

L’ex-chef d’état-major des armées reprend alors toute la narration idéologique de la guerre soi-disant « défensive » du capitalisme occidental contre l’émergence du capitalisme « oriental ». Et pour cela, il annonce clairement la guerre sur le sol national :

« Je vais vous dire, il y a un fossé d’absence de vérité sur ces sujets en France. Alors que nos adversaires sont prêts, eux ! Dans mes anciennes fonctions, je les ai tous vus en face-à-face les dictateurs de la planète… Eh bien, il est temps de se réveiller ! Pourtant, on peut, en France, reconstituer une armée en 10 ans, c’est ma conviction, si l’on y met le prix et de la constance… Car, il faut bien se le dire, la guerre va être de retour sur notre territoire ! »

La guerre du capitalisme occidental sous direction de la superpuissance américaine est présentée comme légitime car défensive, et il n’y a nullement aucun outrage démocratique à ce qu’Emmanuel Macron ait envoyé récemment trois avions français Rafale en Pologne contre la Russie sans aucune consultation parlementaire et dans un contexte d’effritement prononcé de sa légitimité politique…

On retombe là dans le même narratif que 1914 qui aurait vu des puissances françaises, anglaises, etc., être contraintes à la guerre « défensive » contre des empires centraux soi-disant par nature « militaristes ».

La guerre s’imposerait comme une fatalité à l’instar du carnage de la première guerre mondiale précipitée par l’assassinat le 28 juin 1914 de l’archiduc de Sarajevo, et Pierre de Villiers d’aller à fond dans ce sens, comprenant que cela permet de neutraliser toute forme de contestation en laissant croire que tout cela relèverait d’un hasard malheureux mais inéluctable :

« Un jour ou l’autre, j’en suis certain, il y aura une étincelle. Dans l’histoire du monde, arrive ce moment où vous avez une étincelle, comme jadis à Sarajevo.

Ne l’oublions pas, nous sommes face au bloc des anti-Occidentaux ! »

Par conséquent, il n’y a pas de débat à avoir sur ce sujet, c’est un impératif catégorique qui doit tout emporter. Cela fait directement écho aux propos lapidaires tenus par l’actuel Premier ministre Sébastien Lecornu lors de sa passation de pouvoir avec François Bayrou le 10 septembre 2025 :

« Ce décalage entre la vie politique du pays et la vie réelle devient préoccupante, et pas seulement pour celles et ceux qui gouvernent, pardonnez-moi, mais pour l’ensemble de la classe politique dans son intégralité. Et puis, comme ministre des Armées sortant, ce décalage entre la vie politique intérieure et la géopolitique globale, on l’a encore vu ces dernières heures, on ne pourra pas continuer ce décalage éternellement parce qu’évidemment, il nous rattrapera. « 

Les choses sont on ne peut plus claires : la guerre est au poste de commande de tout l’appareil d’État. Il n’est plus question de séparer la restructuration économique de la guerre. Il s’agit d’embarquer la société toute entière dans le projet de guerre dans le cadre d’une union nationale renouvelée, le reste étant devenu secondaire.

Tant la conférence de Pierre de Villiers devant un parterre de star-up que la nomination de Sébastien Lecornu ancien ministre des Armées ayant mené à bien la restructuration dans ce secteur viennent confirmer cette tendance. Deux choses qui sonnent comme une mise en garde d’ampleur pour qui veut regarder le réel en face.

Au prolétariat de se saisir de l’Histoire en ne répétant pas les erreurs de 1914 qui l’a vu s’auto-détruire au profit des grandes puissances capitalistes de l’époque. Ou la Révolution empêche la guerre, ou la guerre provoque la Révolution !