Une initiative a formé une plate-forme pour qu’en 2022, la Gauche ne présente qu’un seul candidat aux prochaines élections présidentielles, sur la base d’un dénominateur commun à la fois social, humaniste et écologiste. Si le dénominateur commun en question peut évidemment se discuter, dans tous les cas c’est une évidence qui s’affirme d’elle-même alors que les menaces ultra-libérales et d’extrême-Droite ne cessent de se renforcer.
Le site uniondesgauches2022.org propose un embryon de programme et une pétition pour, en amont, contribuer à une candidature unique de la Gauche aux présidentielles de 2022. Parmi les idées mises en avant, il y a le passage suivant qui est très bien tourné et qui parlera de manière naturelle à tous les gens de gauche :
« Le sentiment d’appartenance à une société commune, prérequis indispensable à la vie démocratique, a été brisé par une double peine.
D’une part, le modèle libéral dominant impose une compétition permanente au citoyen/consommateur dont la réussite est mesurée à l’aune de son enrichissement par rapport aux autres.
D’autre part, le discours réactionnaire et omniprésent de l’extrême droite enferme notre société dans une vision communautariste qui oppose les citoyens, à mille lieues de nos valeurs universalistes historiques.
Face à cette menace, la gauche se mobilise pour défendre une société du commun. »
On ne dira pas : c’est beau, parce que tout cela est dramatique. On dira donc : c’est bien. Très bien même ! Rien que ces quelques lignes devraient suffire à établir la base de l’union, permettant de débattre, proposer, discuter ensuite de comment faire, comment interpréter la situation, etc.
L’initiative mise en place cherche cependant directement à aller plus loin. On a donc plusieurs thèmes, avec à chaque fois un petit résumé et les liens vers les positions d’Europe Écologie-Les Verts, du Parti socialiste, de La France Insoumise et du PCF. On a donc :
– en finir avec la monarchie présidentielle pour remettre le citoyen au coeur de la décision publique ;
– reprendre le contrôle sur les banques et la finance ;
– redistribuer plus justement les richesses ;
– refonder une société du commun et du vivre-ensemble ;
– défendre nos services publics pour préserver le modèle social français ;
– accueillir et intégrer dignement les réfugiés ;
– passer au 100% renouvelable ;
– encourager une économie verte et relocalisée.
L’idée est bien sûr de ne pas en dire trop peu et d’essayer de dynamiser le tout le plus rapidement possible… De par l’état des forces de la Gauche, d’ici les élections présidentielles en 2022 mieux vaut s’y prendre tôt, effectivement !
On peut toutefois – pour faire quelques remarques tout de même – regretter des incohérences.
Dire qu’il faut en terminer avec la monarchie présidentielle est par exemple excellent, c’est le cœur de la Gauche historique d’ailleurs. Notons tout de même en passant que tous les partis de Gauche ayant été au gouvernement s’en sont finalement bien accommodés, de cette Ve République née d’un coup d’État militaire…
Mais passons, le souci vient du fait qu’il est demandé que soit renforcé le pouvoir des villes et régions, et réinventé le rôle des députés. Cela ne marche pas, car est ici oublié le Sénat, ce bastion des forces réactionnaires s’appuyant sur les élus des collectivités territoriales, cet arrière-pays réactionnaire… Soit on renforce les députés (aux dépens du Sénat), soit on renforce le local, mais les deux en même temps, ce n’est pas possible.
C’est pourquoi, finalement, une vraie Gauche ne peut qu’aller dans le sens de la disparition du sénat et des préfets, ces avant-postes relevant obligatoirement de la Droite. Ce qui amène au vrai problème de fond, d’ailleurs. Il n’est en effet pas possible de combiner :
– la décentralisation, les concertations citoyennes, le renforcement du local… comme le veut la tradition de la seconde Gauche rejointe finalement par le PCF,
– avec l’affirmation politique de la Gauche, qui ne peut exister que dans le dépassement des particularismes locaux et la proposition au niveau de tout le pays.
Ce nécessaire besoin de la Gauche d’exister au niveau national, sans quoi elle se dilue dans l’arrière-pays réactionnaire, dans la France profonde, a été vrai pour tous ses marqueurs : la Commune de Paris de 1871, le Front populaire de 1936, mai 1968, tout comme évidemment l’union de la Gauche en 1981.
On voit mal comment l’union des gauches en 2022 pourrait éviter de proposer quelque chose de fort sans se faire littéralement massacrer par les libéraux d’un côté et l’extrême-Droite de l’autre. Il y a de sacrés défis qui nous attendent !