Avec ses 58 919 habitants et son pôle universitaire, Chambéry est la capitale de la Savoie. Sans grand héritage du mouvement ouvrier, la capitale savoyarde se situe à mi-chemin entre la très riche Genève et la métropole de Lyon, mais attire des jeunes étudiants issus des campagnes populaires.
Ce jeudi 27 février, un débat organisé par le journal Le Dauphiné et TV 8 Mont-Blanc a eu lieu avec les 7 candidats en lice à l’élection municipale de mars. S’il y a un candidat de droite et un candidat du centre soutenu par LREM, on y apprend qu’il y a pas moins de 5 listes issues de la Gauche.
En 2014, le mouvement « Grand Chambéry Solidaire » soutenu par le PCF lançait la liste « Cap à gauche » avec à sa tête Guy Fajeau, inspecteur divisionnaire des finances publiques et adjoint au travaux sortant de la municipalité PS. Avec une fusion au deuxième tour avec le PS, cela laissait forcément une place aux forces opposées au PS, comme le NPA porté par Laurent Ripart, maître de conférence universitaire en histoire médiévale.
Alors où en sommes-nous en 2020 ? Nous en sommes au même niveau politique, voir même pire avec donc une Gauche totalement divisée.
De par son poids historique, on retrouve logiquement une liste de centre-gauche portée par le Parti socialiste et l’UDI, « Chambéry en commun », menée par l’ancien président de « Chambéry métropole » Thierry Repentin, également ancien délégué interministériel à la mixité sociale dans l’habitat.
Il y a également une liste « citoyenne, sociale et écologiste » issue du rassemblement du « mouvement citoyen Grand Chambéry » (soutenue par La France insoumise et EELV) et de « Grand Chambéry solidaire » (soutenu par le PCF, à quoi s’ajoutait Génération-s). Une construction unitaire qui paraissait de bonne augure.
Malheureusement, cette unité s’est fissurée après que les militants LFI, PCF et Génération-s aient lancé une autre liste, « Chambéry sociale et écologiste », au début du mois de février. Lors du débat de ce jeudi 27 février, Sarah Hamoudi-Wilkowsky a expliqué cette désunion :
« Ce qui fait qu’on a pas réussi le rassemblement avec « Chambé citoyenne » (…) c’est vraiment la question du positionnement politique entre le souhait de certains de vouloir se déclarer plutôt apolitique. Or, précisément là on y va pour faire de la politique, puisqu’on va s’intéresser à la vie de la cité, la vie de la commune et de l’agglomération. Là je crois que j’ai été très clair sur notre positionnement avec un marqueur clair à gauche et en affichant nos soutiens par toute la liste des formations et organisations de gauche (…) On a souhaité y aller en portant haut et fort ces couleurs là »
En effet, la liste « Chambé citoyenne » soutenue par EELV et portée par Aurélie Le Meur « Chambé citoyenne écologique et solidaire » est l’expression même de l’apolitisme « bobo » avec sa logique « citoyenne-participative » et son fantasme absurde sur les gilets jaunes ayant exprimé un « désir de renouvellement ».
Enfin, il y a la gauche radicale empêtrée dans son folklore des « luttes ». Laurent Ripart du NPA est à la tête d’une liste baptisée « Chambé, poing levé », s’adressant de manière finalement peu sérieuse à « tous ceux qui luttent ». Enfin, il y a la liste portée par Marie Ducruet de Lutte Ouvrière qui malgré son mérite d’impliquer des ouvriers, a une position para-syndicale qui néglige la conscience politique et surtout la culture.
La Gauche a t-elle conscience de ce qu’il se passe dans le pays ? Du poids énorme représenté par l’extrême droite ? Que l’extrême-Droite soit formellement absente aux élections de Chambéry n’y change rien, car elle reste présente malgré tout.
À quelques kilomètres de là, le village d’Aiton avait placé Marine le Pen à 58 % au second tour de l’élection présidentielle de 2017. En février 2017, le mouvement néo-fasciste Bastion Social, issu d’ « Edelweiss pays de Savoie » recrutant dans les campagnes alentours, ouvrait un local en plein centre-ville. Et ce sont ces mêmes militants qui ont pris la tête de la manifestation du 15 décembre 2018 des gilets jaunes avec une banderole nauséabonde « Stop à la finance, Libérons la France ».
À Chambéry, la Gauche avance en vase-clos et fait comme si de rien n’était, ou plutôt comme s’il y a avait « quelque chose qui se passe ». La seule chose qui se passe c’est que le fascisme avance a grands pas et ne pas mettre au premier plan l’unité de la Gauche est un désastre politique.