Comment préserver les mentalités françaises libérales-démocrates avec un défi exigeant un sens de l’organisation et de la discipline sans failles ? Le discours d’Emmanuel Macron du 16 mars 2020 laisse sur sa faim, la rhétorique guerrière restant sans esprit de décision et sans valeur populaire.
Emmanuel Macron a largement profité du caractère présidentiel du régime ; il en paie le prix avec deux erreurs magistrales. La première, c’est d’avoir maintenu le premier tour des municipales, ce qui a été considéré comme incompréhensible. Surtout que, maintenant, le second tour est repoussé, ce qui est anti-constitutionnel, puisqu’un second tour doit nécessairement se dérouler la semaine qui suit le premier.
La seconde erreur, c’est d’avoir considéré que la crise serait gérable comme un bon père de famille français. Le 7 mars, il appelait ainsi encore les gens à ne pas modifier leurs habitudes et à sortir comme si rien n’avait changé. Le 16 mars, il en est à parler de guerre.
Or, tout le monde le comprend tout de suite, la guerre c’est la guerre. Soit on y va, soit on y va pas. Une guerre est une mobilisation générale. Emmanuel Macron est un libéral, donc il a cherché à contourner la question au maximum.
Ainsi, si on ne se confine pas sauf exception, on risque une amende de… 38 euros. En Italie, c’est la prison, en Autriche des milliers d’euros d’amendes. Et depuis 48 heures, plusieurs médias distillent déjà l’annonce de confinement au moyen d’articles indirects, faisant passer le message de l’Élysée.
Les dénégations sont d’ailleurs assez ridicules. On a ainsi hier des colonnes de véhicules militaires de l’Armée de Terre qui sont arrivées à Paris, ainsi qu’un décret « relatif aux organismes susceptibles d’accueillir des militaires en affectation temporaire » émis dimanche par le gouvernement, après avoir été pris vendredi.
Malgré la mise en place du décret un dimanche, l’armée a démenti tout rapport avec la crise actuelle, ce décret étant selon elle prévu depuis 2019 :
« Ce décret n’a strictement rien à voir avec le Covid-19 et l’implication des forces armées. Il précise la situation administrative des militaires qui servent temporairement en dehors du ministère des Armées, pour les besoins du ministère des Armées. »
L’armée a toujours pris les gens pour des idiots. Cela tient d’autant moins qu’en plus, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’un hôpital de campagne du service de santé des armées en Alsace, ainsi que l’emploi de l’armée pour transporter des malades vers d’autres hôpitaux.
Le choix est de toutes façons évident. Plus rien ne fonctionne réellement en France à part l’armée. Tout le reste est travaillé par le libéralisme économique et culturel. Notons que l’armée elle subit des coupes budgétaires massives en certains domaines, notamment la médecine. Mais niveau encadrement, elle est fonctionnelle.
En situation de crise, on a donc vite fait de passé de Bonaparte à Napoléon, du président au général, et inversement, tout se ressemblant tellement qu’on ne sait plus trop. Est-ce l’homme providentiel qui en appelle à l’armée ou l’inverse ?
Les Français, indisciplinés car pourris par le libéralisme, se soumettent historiquement aisément au patriarche et à l’armée. L’armée changeant le patriarche s’il le faut et ici Emmanuel Macron joue avec le feu. Contournant le pouvoir populaire – il est en effet pour le capitalisme – il est obligé de se soumettre à une logique d’État totalement en-dehors de son périmètre libéral.
L’armée va sortir renforcé de cette situation et un appel à une remise en ordre général va de plus en plus se faire entendre. Cela ne changera rien au libéralisme quotidien et cela ne dérangera pas les Français, qui ne font plus de politique depuis longtemps. Mais cela implique la mise en place d’un régime anti-démocratique, anti-populaire.
Toute personne de Gauche sait qu’Emmanuel Macron ne peut pas, en raison de son libéralisme, assumer des mesures collectives. La Gauche est faible, désorientée, incapable d’assumer quoi que ce soit. L’ombre de l’armée se profile alors…