Quand même, même si on sait que parfois il y a un manque de culture ou d’intelligence, de plus en plus de positions à gauche laissent perplexes, pantois, tellement l’incohérence rejoint l’inconsistance.
Prenons la question de Notre-Dame-des-Landes. La lutte contre l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes vise initialement à défendre les zones humides, comme on le sait on est ensuite passé totalement à autre chose, avec des gens voulant vivre en petites communautés autosuffisantes.
On est passé d’une question écologiste à une question d’idéologie de repli sur la petite propriété, l’esprit communautaire, un vécu commun plein de « transcendance » par la solidarité, la mise en œuvre en commun, l’autosuffisance individuelle, etc.
On sait que cela relève du folklore anarchiste, de l’esprit anti-social de négation du mouvement ouvrier ; les zadistes de la « Zone à défendre » sont des gens cherchant à tout prix à vivre en marge de la société, récusant toute envie de changer celle-ci, haïssant la production organisée, développée, moderne.
Il n’y a donc rien à défendre là-dedans quand on est de Gauche. Et c’est pour cela que se précipitent pour défendre cela des gens cherchant à « dépasser » la Gauche historique, le mouvement ouvrier.
C’est cela qui unit les cadres du Parti de Gauche, de La France Insoumise, de Génération-s, d’Europe Ecologie Les Verts, etc.
A lire en effet « Cent noms pour une Zone d’Agriculture Durable à Notre-Dame-Des-Landes », un manifeste en faveur des zadistes cherchant à prolonger leur démarche, il y aurait une voie nouvelle combinant individualité, propriété et collectivité.
C’est là l’idéologie de la « troisième voie », celle du fascisme, qui prétend fonder le monde sur des « idées », des « expériences », le « vécu », la mise à plat des contradictions, etc.
La « nouvelle » gauche – rempli d’universitaires adeptes des philosophies sur la post-modernité, le monde post-industriel, etc. – se précipite toujours plus dans un positionnement franchement réactionnaire.
Au prétexte du respect de l’« Etat de droit », des femmes et des hommes qui cultivaient la terre et pratiquaient l’élevage ont été délogé·e·s de leur lieu d’activité et de vie. Leur ferme, où deux agneaux sont nés la semaine passée, a été détruite.
Ces paysannes et ces paysans occupaient un terrain appartenant à l’Etat. Pourtant, il leur avait été promis qu’une solution viable, pacifique et tournée vers l’avenir serait recherchée. Ils/elles étaient en discussion avec la préfecture pour obtenir une convention d’occupation collective de ces terrains.
Le collectif : voilà le sujet du combat qui se joue à Notre-Dame-des-Landes.
Quand le Gouvernement impose des conventions d’occupation temporaires individuelles, des paysan·ne·s, de la ferme des Cent noms ou d’ailleurs, envisagent leur activité collectivement.
La question de la propriété de la terre et le fait qu’elle puisse appartenir à celles et ceux qui la travaillent est un enjeu considérable de l’Histoire politique de notre pays et du monde. L’un des ressorts de la Révolution française reposait sur cette question majeure.
La lutte des paysan·ne·s sans-terre d’Amérique latine comme l’accaparement des terrains agricoles par la Chine et les puissances occidentales en Afrique en sont l’expression criante aujourd’hui.
Si notre tradition et notre Histoire envisagent la possession de terres principalement de façon individuelle, l’imaginaire politique qui existe à Notre-Dame-des-Landes et ailleurs prend appui sur un constat critique du rapport à la propriété pour expérimenter des propositions nouvelles.
Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. Dès lors, les écologistes et toutes celles et tous ceux qui réfléchissent à une autre relation à l’agriculture et aux sols envisagent légitimement, à coté de la propriété individuelle, une propriété collective, partagée, de la terre, ainsi qu’un travail lui aussi appréhendé collectivement.
Depuis des décennies, le labeur des agricultrices et des agriculteurs n’a cessé de s’alourdir pour des revenus de plus en plus faibles. Isolé·e·s les un·e·s des autres, les agriculteurs·trices de notre pays souffrent et meurent.
À Notre-Dame-des-Landes, l’intervention brutale des forces de l’ordre ne vise pas à faire respecter le droit. Elle vise à combattre une idée : celle d’un autre rapport à l’agriculture, en rupture avec le modèle productiviste.
Dans un monde globalisé, où la concurrence et l’individualisme font rage en délitant les liens de solidarité humaine et en détruisant l’environnement, les paysan·ne·s de Notre-Dame-des-Landes sèment les graines d’un autre monde.
Les défricheuses et les défricheurs de ce nouveau monde désirable n’ont pas toujours raison, mais celles et ceux qui les moquent, les oppriment et qui les blessent ont toujours tort.
En accordant la possibilité de conventions d’occupation collective des terres de Notre-Dame-des-Landes à celles et ceux qui en font la demande, ce que le droit permet, le Gouvernement n’abandonnerait pas son autorité. Au contraire, il ferait la preuve de sa disponibilité et de son ouverture à une approche différente de l’agriculture.
La ferme des 100 noms est tombée mais son imaginaire, celui qui s’est épanoui à Notre-Dame-des-Landes, est porteur d’espoir. Nous sommes convaincu·e·s que cet espoir est notre avenir. Il n’est pas trop tard.
Nous réclamons le droit de laisser vivre cette alternative pour transformer en réalité le rêve d’une agriculture ancrée sur les territoires, respectueuse du vivant et des paysan.ne.s.
Nous affirmons que cette France qui s’investit contre les grands projets destructeurs et dangereux sait et peut construire un monde meilleur.
Nous demandons l’arrêt immédiat des interventions policières et l’ouverture d’un vrai dialogue qui permette dans le respect de la loi l’élaboration de conventions individuelles, mais aussi collectives, d’occupation des terres de Notre-Dame-des-Landes.
Pour signer cette tribune en ligne : https://100noms.typeform.com/to/TO4gy9
Premier·es signataires :
Arnaud Apoteker, tribunal Monsanto; Isabelle Attard, ancienne députée; Clémentine Autain, députée du groupe LFI; Geneviève Azam, Attac; Laurence Abeille, ancienne députée écologiste;
Pénélope Bagieu, autrice de bandes dessinées; Guillaume Balas, co-coordinateur de Génération.s; Étienne Balibar, philosophe; Clotilde Bato, directrice de SOL-asso; Michel Bauwens, fondateur de la Fondation P2P; Julien Bayou, porte-parole EELV; Sandrine Bélier, ancienne députée européenne; Esther Benbassa, sénatrice EELV; Fatima Benomar, Les effrontées; Michel Bérhocoirigoin, paysan, co-fondateur de la Confédération paysanne; Martine Billard, secrétaire nationale à l’écologie du PG; Christophe Bonneuil, historien, CNRS; Dominique Bourg, philosophe; Jacques Boutault, maire du 2e arrondissement de Paris; Pauline Boyer, porte-parole Alternatiba; Sophie Bringuy, conseillère régionale EELV des Pays-de-Loire; Sophie Bussière, avocate au barreau de Bayonne et militante écologiste;
Valérie Cabanes, essayiste et juriste; Alice Canabate, vice-Présidente de la FEP; Aymeric Caron, journaliste, écrivain, porte-parole du REV; Damien Carême, maire EELV de Grande-Synthe; Naima Charai, Génération.s; Pascal Cherki, Génération.s; Philippe Colomb, président d’Agir pour l’environnement; Eric Coquerel, députée du groupe LFI; Maxime Combes, économiste; Hugo Cordier, co-secrétaire des Jeunes écologistes; David Cormand, secrétaire National EELV; Christel Cournil, juriste et enseignante chercheuse; Thomas Coutrot, porte-parole d’Attac;
Célia Da Costa Cruz, co-secrétaire des Jeunes écologistes; François Damerval, Cap21; Laurence de Cock, professeure et chercheuse; Jean-Paul Deléage, fondateur et directeur de la revue Ecologie & Politique; Estelle Deléage, rédactrice en chef de la revue Ecologie & Politique; Karima Delli, députée européenne EELV; Stéphane Delpeyrat, Génération.s; Florence Denier-Pasquier, membre du CESE; Marie Desplechin, auteure; Rokhaya Diallo, journaliste et réalisatrice; Cyril Dion, auteur-réalisateur; Clémence Dubois, 350.org; Michel Dubromel, Président de FNE; François Dufour, conseiller régional, syndicaliste et faucheur volontaire; Marc Dufumier, agronome; Julien Durand, porte-parole de l’ACIPA, paysan;
Quentin Erades, lauréat de l’Institut De l’Engagement; Txetx Etchevery, Bizi;
David Flacher, Porte-parole d’Utopia; Charles Fournier, vice-Président EELV de la Région Centre Val-de-Loire; Bastien François, président de la Fondation pour l’écologie politique;
Roccu Garoby, autonomiste corse, membre du PNC; François Gemenne, chercheur en sciences politiques, Université de Liège, professeur à SciencesPo.; Guillaume Gontard, sénateur divers gauche de l’Isère; Gueraud Guibert, président de la Fabrique écologique;
Emilie Hache, philosophe; Nicolas Haeringer, 350.org; Benoit Hamon, Génération.s;
Nicolas Imbert, directeur de Green Cross France;
Yannick Jadot, député européen EELV; Mila Jeudy, Génération.s; Eva Joly, députée européenne EELV; Samuel Juhel, Président du REFEDD; Jean-François Julliard, Délégué général de Greenpeace France;
Stéphen Kerckhove, Délégué général d’Agir pour l’environnement;
Annie Lahmer, conseillère régionale EELV; Jean-Charles Lallemand, secrétaire général du PG; Aurore Lalucq, porte-parole de Génération.s; Philippe Lamberts, président du groupe Verts – ALE au Parlement Européen; Frédéric Lamblin, directeur d’une association agricole et environnementale; Mathilde Larrere, historienne; SarahLegrain, Secrétaire nationale aux relations extérieures du PG; René Louail, paysan; Benjamin Lucas, Génération.s; Roxane Lundy, Génération.s; Alexandra Lutz, présidente de CliMates;
Sébastien Mabile, avocat; Noel Mamère, journaliste et militant écologiste; Dominique Méda, sociologue et philosophe; Jean-Luc Mélenchon, président du Groupe LFI à l’Assemblée nationale; Christian Métairie, maire d’Arcueil; Guillaume Meurice, humoriste; Benoit Monange, directeur de la Fondation de l’Ecologie Politique; Claire Monod, co-coordinatrice Génération.s; Corinne Morel-Darleux, conseillère régionale AURA LFI; Cécile Muret, secrétaire Nationale de la Confédération Paysanne;
Franck Nicolon, conseiller régional «écologiste et citoyen» Pays-de-Loire; Claire Nouvian, présidente de Bloom;
Jon Palais, ANV-Cop 21; Mathilde Panot, députée du groupe LFI; Corine Pelluchon, philosophe, professeur à l’Université Paris-Est-Marne-La-Vallée;
Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération Paysanne; Eric Piolle, maire EELV de Grenoble; Emmanuel Poilane, directeur de France Liberté; Thomas Porcher, économiste; Loïc Prud’homme, député du groupe LFI; Audrey Pulvar, présidente de la Fondation pour la Nature et l’Homme;
François Ralle Andreoli, conseiller consulaire; Sandra Regol, porte-parole EELV; Guillaume Riou, Président de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique; Michèle Rivasi, députée européenne EELV; Marie-Monique Robin, journaliste d’investigation et réalisatrice; Barbara Romagnan, militante écologiste et féministe; Clément Rossignol Puech, maire de Bègles;
Laetitia Sanchez, conseillère régionale EELV de Normandie; Olivier de Schutter, ancien rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation de l’ONU et Président de IPES Food; Arnaud Schwartz, membre du CES européen; Pierre Serne, conseiller régional EELV; Danielle Simonet, coordinatrice du PG;
Claude Taleb, conseil Régional écologiste de Normandie; Laura Slimani, Génération.s;
Annie Thebaud-Mony, association Henri Pezerat; Nicolas Thierry, vice-président du Conseil Régional Nouvelle Aquitaine, EELV; Marie Toussaint, présidente de Notre affaire à tous;
François Veillerette, militant écologiste; Véronique Vinet, conseillère régionale EELV d’Occitanie; Vincent Verzat, youtubeur; Denis Vicherat, directeur des éditions Utopia; Patrick Viveret, philosophe…